Quelques grands noms, contestables d’ailleurs, ne constituent pas cet ensemble d’inventions, de traditions et de parentés intellectuelles qu’on appelle une littérature, et encore, parmi ces grands noms (si on excepte Fenimore Cooper, qui a cueilli la virginité de la Nature américaine), tous les écrivains de ce pays vivent sur le fond commun des littératures de l’Europe. […] et en supposant qu’on puisse l’employer heureusement dans un but de littérature, l’emploi de cette faculté ne tombe-t-il pas dans la rouerie ? […] Si les poésies individuelles de Poe annoncées par Baudelaire ne lèvent pas la pierre de matérialisme sous laquelle il se débat, elles formeront une littérature plus horrible et qui méritera plus le nom de satanique que celle de Shelley l’athée et de Mathurin. Sans rien préjuger de l’atroce croyance de Poe sur l’état de son âme, on peut assurer, dans le sens littéraire, que ce sera là de la littérature de damné. […] Edgar Poe, le fils de l’aventure et de l’aventure infortunée, est aussi le plus souvent un aventurier d’inventions malheureuses, quoiqu’il y ait quelques-uns de ses Contes qui, le genre admis de cette littérature matérialiste et fébrile, semblent réussis.
Fallait-il que la preuve fût ainsi donnée de la sincérité du nupticisme de la jeune Littérature ? […] [La Littérature de tout à l’heure (1889).]
Quoiqu’il ait fourni au Dictionnaire Encyclopédique quelques Articles de Littérature, qui ne sont pas les plus médiocres de cette Compilation universelle, il a su néanmoins se garantir de l’influence du Siecle, & éviter les écueils du faux Bel-Esprit & de la fausse Philosophie. […] Les leçons de la Morale sont très-bien fondues avec les regles de la Littérature ; attention aussi nécessaire qu’utile, quand on veut instruire la Jeunesse.
Il n’admettait pas de classement en littérature. […] La littérature décadente faisait alors parler d’elle. […] Il ne parle jamais littérature. […] Vous aimez la littérature ? […] En admettant que ce soit là de la littérature.
Cela est, dans sa férocité intime, d’un ton inconnu en littérature. […] En littérature, en art, tout ce qui existe a sa loi ; je suis à cet égard fataliste comme un Bédouin. […] Je vais faire une citation terrible, et l’on ne dira pas qu’à propos de littérature romantique je vais chercher mes autorités dans le camp des intéressés. […] On ne pourrait pas dire aujourd’hui quel tort a fait à la littérature, à la langue, combien d’intelligences, de talents a viciés cette préoccupation de plaire à toutes les classes et à tous les âges. […] n’y a-t-il pas une littérature pour les petites filles ?
Son père était lui-même, sinon auteur, du moins amoureux de littérature, et nous avons quelques témoignages — un peu vagues, mais enfin quelques témoignages — nous marquant qu’il a poussé un peu son fils du côté de la littérature. […] Le père de La Fontaine, plus ou moins, l’a poussé vers la littérature ou a été loin de l’en détourner. […] Or, Chapelain était, à cette époque-là, une espèce de surintendant des lettres, il était tout à fait officiellement à la tête de la République des lettres, il était le chef des grands conseils de la littérature, il était le maître des pensions, etc. […] En tout cas, il fit abjurer La Fontaine, il lui fit renouveler l’amende honorable qu’il avait faite à propos de ses écrits licencieux et il le ramena définitivement à la littérature religieuse. […] A la gloire de la littérature, d’abord, et puis de l’espèce humaine en général, il y a de grands hommes de lettres qui résistent à cette dissection, Corneille, par exemple, à très peu près ; Lamartine, presque complètement.
Plus tard, retourné en Angleterre, le premier essai qu’il publia (Essai sur l’étude de la littérature, 1761) est écrit en français. […] Cet Essai sur l’étude de la littérature par Gibbon n’a aujourd’hui d’intérêt pour nous que comme témoignage de ses réflexions précoces et de ses inclinations premières. […] Le but principal du jeune auteur est de venger la littérature classique et l’érudition, de la légèreté avec laquelle d’Alembert les avait traitées. Gibbon se pique de prouver que l’érudition bien comprise n’est pas une simple affaire de mémoire, et que toutes les facultés de l’esprit n’ont qu’à gagner à l’étude de l’ancienne littérature. […] Gibbon me fait mal penser de lui ; j’ai revu son livre (l’Essai sur l’étude de la littérature).
Et en effet c’est bien là, avec les réserves que chacun fait, et deux ou trois noms comme ceux de Bossuet et de Montesquieu qu’on sous-entend, c’est là, jusqu’en 1789 environ, le caractère distinctif. le trait marquant de la littérature française entre les autres littératures d’Europe. […] Au commencement du dix-septième siècle, notre civilisation, et partant notre langue et notre littérature, n’avaient rien de mûr ni d’assuré. […] Si donc aujourd’hui, et avec raison, l’on s’attache à réviser et à remettre en question beaucoup de jugements rédigés, il y a quelque vingt ans, par les professeurs d’Athénée ; si l’on déclare impitoyablement la guerre à beaucoup de renommées surfaites, on ne saurait en revanche trop vénérer et trop maintenir ces écrivains immortels, qui, les premiers, ont donné à la littérature française son caractère d’originalité, et lui ont assuré jusqu’ici une physionomie unique entre toutes les littératures. […] Malherbe et Balzac fondèrent dans notre littérature le style savant, châtié, poli, travaillé, dans l’enfantement duquel on arrive de la pensée à l’expression, lentement, par degrés, à force de tâtonnements et de ratures.
Littérature grecque. […] Entre la littérature de l’Inde et celle de la Chine, littératures qui ont précédé de bien des siècles la littérature grecque, il y a eu l’Égypte ; l’Égypte, grand mystère, grand arcane, grande éclipse aujourd’hui, civilisation, religion, politique, langue, livres dont nous ne savons rien ou presque rien, tant que les innombrables papyrus, ces momies de la pensée humaine aux bords du Nil, ne nous auront pas révélé leurs énigmes, que nos savants cherchent à déchiffrer depuis cinquante ans ! Mais, si nous en jugeons par les monuments écrasants de masse et imposants de solidité, par les montagnes des Troglodytes trouées comme des alvéoles de ruches humaines, par les temples de granit d’un seul bloc, par les pyramides, ces Alpes du désert élancées au ciel d’un seul jet, par les canaux creusés à main d’homme comme des lits au plus débordant des fleuves, par ces bassins intérieurs que tout le sable de l’Éthiopie ne suffirait pas à boire et que le percement de l’isthme de Suez s’efforce aujourd’hui de surpasser pour déverser trois mers en une et pour placer trois continents sous la main de l’Europe ; si nous en jugeons, dis-je, par ces gigantesques alphabets de pierre qui couvrent le sol de l’Égypte, sa littérature dut être aussi puissante que son architecture, car tous les arts prennent en général leur niveau dans une civilisation. […] Les littératures primitives de la Grèce sont elles-mêmes un mystère, jusqu’à Orphée, Hésiode, Homère.
Si M. de Chateaubriand ne traite pas mieux ses parents poétiques, Jean-Jacques et Bernardin de Saint-Pierre, il n’a guère plus d’indulgence pour sa propre postérité, pour ses propres enfants en littérature. […] Une famille de Renés poètes et de Renés prosateurs a pullulé ; on n’a plus entendu que des phrases lamentables et décousues… » Évidemment René ne voulait pas avoir d’enfants, et, s’il avait pu, il aurait voulu (en littérature) ne pas avoir de père. […] Il faut se rappeler que Mme de Staël avait publié, en 1800, un ouvrage sur La Littérature considérée dans ses rapports avec la société. […] Or, M. de Chateaubriand, encore inconnu, fit son entrée dans la littérature en insérant au Mercure un article sous forme de lettre, par lequel il attaquait précisément Mme de Staël et son livre. […] Ainsi un autre talent supérieur a évité mon nom dans un ouvrage sur la littérature.
Il avait été élevé par un Français, homme de mérite, appelé Duhan, qui lui avait inspiré l’amour de notre langue et de notre littérature. […] Son instruction était le plus volontiers tournée à la morale pratique et à l’application sociale ; en cela il se rapprochait de Voltaire, qui était aussi pratique lui-même qu’un écrivain peut l’être, et il aurait pu dire comme lui : « Je vais au fait, c’est ma devise. » De la littérature allemande, il en est à peine question avec Frédéric ; il en sent très bien les défauts, qui étaient encore sans compensation à cette date, la pesanteur, la diffusion, le morcellement des dialectes, et il indique quelques-uns des remèdes. Il présage pourtant à cette littérature nationale de prochains beaux jours, et il les prédit : « Je vous les annonce, ils vont paraître ! […] J’estime en vous le plus beau génie que les siècles aient porté ; j’admire vos vers, j’aime votre prose, surtout ces petites pièces détachées de vos Mélanges de littérature. […] Sur Jean-Jacques, par exemple : « Le roi parle, ce me semble, très bien sur les ouvrages de Rousseau ; il y trouve de la chaleur et de la force, mais peu de logique et de vérité ; il prétend qu’il ne lit que pour s’instruire, et que les ouvrages de Rousseau ne lui apprennent rien ou peu de chose. » Avec d’Alembert, dont il apprécia tout d’abord le caractère estimable, Frédéric se montre purement en philosophe ; on le voit tel qu’il aurait aimé à être dans la seconde moitié de sa vie, quand la goutte et l’humeur ne l’aigrissaient pas trop, et s’il avait eu autour de lui quelqu’un de digne avec qui s’entendre : « Sa conversation roule tantôt sur la littérature, tantôt sur la philosophie, assez souvent même sur la guerre et sur la politique, et quelquefois sur le mépris de la vie, de la gloire et des honneurs. » Voilà le cercle des sujets humains qu’il aimait à traiter habituellement, sincèrement, et en moralisant toujours ; mais la littérature et la philosophie étaient encore ce dont il aimait à causer par-dessus tout pour se détendre, quand il avait fait son métier de roi.
Son portrait littéraire au tome Ier de l’Histoire de la littérature française à l’étranger par M. […] Les grandes et classiques parties de la littérature française ayant été explorées mainte fois et étant depuis longtemps, en quelque sorte, au pouvoir des maîtres, il s’est ingénieusement établi et posté sur la frontière ; il a choisi de ce côté sa province. […] Les deux volumes, qui embrassent cette littérature française à l’étranger durant tout le cours du xviie siècle, nous fourniront plus d’un secours et d’un prétexte pour revenir nous-même vers quelqu’un de ces personnages que l’auteur nous fait mieux connaître, et qu’il éclaire par ses recherches nouvelles ou par ses fins aperçus. […] On était en 1608, vers la fin de ce règne de Henri IV, alors dans toute sa plénitude et sa gloire, mais qui, après des troubles et des déchirements si profonds, avait eu le temps à peine de produire sa littérature propre. […] De telles pages n’entrent point dans la littérature et ne sauraient être soumises même à l’admiration.