Une des choses qui me plaisent le plus dans Mézeray, à côté de l’agencement plein et facile de la narration, c’est le talent naturel et presque insensible avec lequel sont traités les caractères ; on les voit se développer successivement et sans parti pris selon les circonstances, avec tous leurs flux et reflux de passions ; Mézeray ne les fait jamais poser, il les laisse marcher et on les suit avec lui. […] Ce sont des faiblesses qui sont faciles à comprendre, et qu’il n’est pas juste de trop étaler.
Loin de chercher à la rendre facile et à la portée de tout le monde, il en fait une sorte d’escrime où il prend trop d’avantage ; on le quitte mécontent de soi et de lui, et ceux dont il a blessé la vanité s’en vengent en lui donnant la réputation de méchanceté, et en lui refusant les qualités solides du cœur et de l’esprit… M. de Forcalquier n’était fat qu’à moitié, il lui manquait un grain de présomption : « Il ne consulte son goût et ses lumières sur rien ; il adopte les lumières et les sentiments de ceux qu’il croit le plus à la mode et les plus confirmés dans le bel air. » Duclos fut sans doute un de ceux qui le dominèrent pour un temps et qui lui imposèrent dans les choses de l’esprit ; on en sait bien peu sur ce salon de l’hôtel de Brancas. […] Il s’abandonnait chaque jour au même mouvement, pour lui facile, au même entrain sans cesse répété ; il ne se renouvelait pas, il ne grandissait pas : « Il n’est pas rare, disait-il, qu’on prenne dès la première entrevue l’opinion qu’on a de mon esprit. » Et en effet, c’est que, dans sa verve improvisatrice mondaine, il donnait d’abord sa mesure ; il jetait à tous venants ce qu’il avait de mieux, ce qu’il avait de plus original et de plus vif.
Il serait facile encore de montrer que nous autres critiques et journalistes (il y en avait déjà), nous sommes atteints et notés en passant par Bourdaloue ; les satiriques de profession, tous censeurs qui érigent de leur autorité privée « un tribunal où l’on décide souverainement du mérite des hommes », sont repris par lui. […] La princesse de Conti, présente au sermon et ayant cru reconnaître ses amis « dans ces hommes zélés, mais d’un zèle qui n’est pas selon la science, dans ces esprits toujours portés aux extrémités, qui, pour ne pas rendre la pénitence trop facile, la réduisent à l’impossible et n’en parlent jamais que dans des termes capables d’effrayer », témoigna par quelque geste qu’elle était blessée de l’allusion : ce que Bourdaloue ayant remarqué, il alla après le sermon voir la princesse, qui s’en expliqua avec lui et qui lui dit très nettement que la seconde partie l’avait fort scandalisée.
Que ce soit dans une allée des jardins de Juilly au temps de M. de Salinis, ou au coin d’un maigre foyer dans une grande chambre à peine meublée de la rue de Vaugirard, ou sous les ombrages mélancoliques et mornes de La Chesnaie, à l’époque où s’y cachait l’humble Maurice de Guérin, inaperçu alors, devenu aujourd’hui le génie poétique du lieu ; ou encore, à quelque dîner discret du mercredi à l’Abbaye-au-Bois, sous une présidence gracieuse ; il y a de ces rencontres qui semblent toutes simples et faciles au moment même, et qui n’ont pu avoir lieu que bien peu de fois ; qui le lendemain, et l’instant passé, ne recommenceront jamais plus. […] Le parti dit clérical en est un, avec son organisation, ses nombreux moyens de propagande, sa presse si bien servie, son mot d’ordre si vite accepté et répété par tous ses organes, son injure facile, aisément calomnieuse, avec la difficulté où l’on est de l’atteindre dans le vif, en respectant, comme il convient, le religieux en lui et en n’attaquant que le clérical.
Les légendes se ressentent aussi des deux âges : plus faciles, plus fraîches et plus gaies dans le premier temps, elles sont plus creusées, plus cherchées quelquefois dans la seconde époque ; elles se répètent ; elles s’attristent. […] Je choisis, dans ces séries dernières et désenchantées, celle qui me paraît la plus facile, la plus directe et la mieux trouvée, la plus heureuse vraiment de ces contreparties, gaie encore et plaisante, sans rien d’odieux : les Invalides du sentiment.
Il vous a fait passer sous les yeux une image fidèle, une merveille de réduction toute brillantée, et il vous laisse à vous, l’homme sévère, l’arbitre inexorable du goût, l’honneur facile de prononcer, si vous y tenez, le jugement qu’il a amené, pour ainsi dire, sur vos lèvres. […] Car vous noterez encore que ce qui paraît un tour de force n’en est pas un pour lui : on croirait que ce style savant et dont chaque mot a sa valeur de ton est des plus travaillés, il est improvisé et facile ; il coule de source.
Le duc Pompée n’a rien de cela ; c’est un aimable et gracieux libertin, séduisant, facile, abandonné ; il n’est pas né méchant, et il ne l’est pas devenu. […] Si je provoque le scandale, je hais le mensonge ; jamais, pour triompher d’une résistance, je n’ai eu recours à la comédie de l’amitié ; jamais je n’ai prodigué les feintes promesses ni les faux serments d’une éternelle flamme ; jamais je n’ai séduit, jamais je n’ai trompé… » Morale facile, morale commode, mais qui va devenir rare encore en ce siècle, s’il continue dans la voie où il est depuis quelque temps engagé, — et où il semble faire des progrès chaque jour, celle du faux-semblant convenu et de l’hypocrisie utile.
Ce qu’il y a de certain, c’est qu’au gré des amis de l’auteur, Bosc ne prit point encore assez de précautions ; car, au milieu de remerciements et d’éloges mérités, on lui reprocha non seulement d’avoir laissé « des redites qu’il eût été aussi facile que nécessaire d’éviter », mais encore de n’avoir pas émoussé ou retiré certains traits cruels et injustes. […] Elle est bien facile à appliquer présentement, cette doctrine : il s’agit d’aller à la Bibliothèque impériale où le manuscrit est déposé, de bien lire et de copier exactement.
Jules Cousin, de la Bibliothèque de l’Arsenal, a fait plus que de rendre cette Étude facile ; il nous la présente toute préparée et sous la forme la plus modeste. […] Après des personnes du grand monde, telles que la duchesse de Bouillon, — une passion orageuse et triste, traversée d’affreux soupçons, — il se jeta dans les plaisirs dits faciles et n’en sortit plus : ces plaisirs l’enchaînèrent.
Il faut s’en garder soigneusement, repousser la tentation facile des images que dix générations se sont léguées pour décorer le discours. […] Le pas est facile à franchir de la métaphore à la périphrase : souvent, pour être comprise et trouver son application, la métaphore a besoin de s’allonger en périphrase.
L’élan non encore lassé des croisades, la touchante confiance en la sollicitude divine, la vulgarité passablement matérialiste, qui, pour n’être pas dupe, réclame de Dieu, de son saint, un service temporel et des miracles lucratifs, voilà les hauts et les bas de la foi du moyen âge : mais dans la vie facile et bruyante de la province artésienne, que de place prennent les tavernes, les « beuveries », les drôles insolents et amusants que la police bourgeoise pourchasse, mais qui font les délices de la gaieté bourgeoise ! […] Des scènes décousues qui défilent devant nous comme une collection d’images sous les yeux d’un enfant, nulle préoccupation des caractères, des sentiments et de la vie intérieure, une stricte déclaration des pensées précisément nécessaires pour rendre les actes intelligibles dans leur suite, mais non pas dans leur production, un courant facile et plat de style où sont semés des îlots de rondels, motets et chansons, certains raffinements d’art, et point de poésie : voilà ces Miracles de Notre-Dame.
Déjà un jeune homme doué d’une langue facile, d’une grande éloquence et d’un esprit brillant, avait annoncé le dessein de mettre en vers ces histoires, et le cœur de tous s’en était réjoui. […] Le père n’a garde de refuser ; il accorde sa fille selon les rites du pays, qui paraissent avoir été assez faciles, et la belle Tehmimeh est au comble de son vœu.