L’habitude de ces passions nous rend capables de bien des efforts de vertu et de courage que la raison seule ne pourroit pas nous faire tenter.
Mais il ne l’avait pas parce qu’il était un janséniste de tempérament encore plus peut-être que de doctrine, et qu’il s’accotait sans effort dans des idées qui convenaient à l’aridité naturelle de son esprit.
Ainsi, avant l’invention de la poudre, c’est-à-dire avant qu’on eût découvert l’art d’unir la mollesse au courage, et que la faiblesse fût parvenue à détruire sans effort et à triompher sans mouvement, la force du corps a été et a dû être en effet dans la plus grande estime sur toute la terre.
Ces malheureux étaient vils, et ceux pour qui ils se donnaient la peine de l’être, ignoraient jusqu’à leur nom ; fleurs obscures bassesses restaient dans la même poussière qu’eux, et, malgré leurs efforts, ils ne pouvaient réussir même à se déshonorer.
Cette erreur est venue de l’infirmité de l’intelligence humaine : plongée et comme ensevelie dans le corps, elle est portée naturellement à percevoir les choses corporelles, et a besoin d’un grand travail, d’un grand effort pour se comprendre elle-même ; ainsi l’œil voit tous les objets extérieurs, et ne peut se voir lui-même que dans un miroir.
Le succès ne répond pas toujours à leurs efforts.
À un degré supérieur c’est un effort, pour échapper au temps où l’on vit, et pour se faire une âme antique. […] Il se sent indigne d’elles, et il fait tous ses efforts pour rivaliser, au moins par le soin scrupuleux de l’expression. […] Elle se tue de l’effort qu’elle fait pour naître, et se nie plus elle s’affirme. […] Effort inouï ! […] C’est qu’il était doué, d’abord ; c’est ensuite que tout en inventant sa théologie il faisait un effort plus grand encore peut-être pour la rendre populaire du même coup.
Et de là, enfin, l’affinité secrète du romantisme avec la littérature espagnole si, dans l’Europe entière, le romantisme se définit et se caractérise en partie par l’effort qu’il a fait pour renouer, par-delà la Renaissance, la chaîne de la tradition du moyen âge. […] Et si nous ne pouvons pas nous flatter de jamais définir le « génie », ne ferons-nous pas un effort pour le caractériser en ce qu’il a toujours de particulier, d’individuel, et d’unique ? […] Mais ils admettaient moins aisément encore que l’on rendît la pratique de la vertu facile, et que l’on expulsât de son idée les deux notions qui la déterminent : celle de l’effort de l’homme, et celle de la nécessité du concours de la grâce d’en haut. […] Les Provinciales réclament de l’homme un effort qui n’est pas peut-être au-dessus de ses forces, mais, à vrai dire, dont la continuité s’accommode mal de ce que j’appellerai la dispersion de la vie. […] Si cependant nous étions sincères — ou plutôt, si nous prenions seulement la peine de réfléchir, — nous nous rendrions compte que ce qui nous plaît dans Tartufe, c’est justement l’effort que Molière y a fait pour séparer la morale de la religion.
Tantôt l’élévation des aperçus empêche le critique d’être biographe exact ; tantôt les efforts du biographe pour être précis et fidèle empêchent le critique d’être élevé. […] Son désespoir s’accrut encore par les efforts qu’il fit pendant quelque temps pour le dissimuler. […] Bientôt après il s’aperçut que le mendiant suivait, en courant, la voilure et faisait tous ses efforts pour la rejoindre. […] Continuez cependant à vous faire des efforts, ils feront leur effet lorsque vous y penserez le moins. […] Le dénouement du Misanthrope prouve qu’Alceste se berçait d’un faux espoir : les efforts de Molière ne furent pas moins malheureux.
Quelle conscience eût résisté à cette analyse de l’intérieur, à cet effort impossible pour s’épurer successivement de ces quatre sortes d’intérêt personnel, et se volatiliser pour ainsi dire jusqu’à cet amour qu’on ne peut plus distinguer du sujet qui aime ? […] Vous le reconnaîtrez dans ce désir d’une perfection impossible, dans cette prodigieuse multiplicité de prescriptions qui n’enfantent que les vains efforts et les scrupules. […] Ainsi le moyen de se délivrer des petites choses c’est d’être présent à de plus petites encore ; c’est de s’écouter d’un peu plus près, de s’enfoncer de la défiance dans le soupçon : c’est d’aller au plus profond de soi, de se creuser, de se poursuivre, dût-on perdre sa route dans ces vains efforts pour s’atteindre. […] Les expressions suivent, sans interruption et sans effort. […] Peu à peu on sent de la fatigue, et il faut quelque effort pour aller jusqu’au bout.
Et, pour regarder la poésie sous cet angle, nous ne pouvons admirer entièrement les écrivains du xixe siècle, qui ont substitué le pittoresque à la pensée pure, la peinture et la musique à la littérature, et qui ont dirigé les efforts littéraires dans cette voie néfaste qui devait aboutir aux aberrations de l’Instrumentisme et du Magnificisme. […] Mais avoir su se créer une place du vivant même de ce géant, Victor Hugo, avoir été si mal payé de ses efforts vers le mieux, avoir si singulièrement préparé sa gloire, avoir recueilli tant de dédain, tant de haussements d’épaules, me font considérer Charles Baudelaire comme le type du poète mort que je dois le plus vénérer. […] « L’après-midi d’un Faune » et « Hérodiade », témoignages éblouissants de cet effort héroïque, sont les poèmes les plus grands et les plus purs du xixe siècle, de par leur puissance évocatrice, leur prodigieuse harmonie et leurs innombrables sorcelleries verbales. […] On ne peut nier toutefois qu’il ne se soit placé au-dessus des autres poètes de son siècle et qu’il ne les domine simplement, sans effort apparent, comme un pic domine d’autres pics. […] Et l’effort qui soutient, inlassable, la joie — la Joie — de ceux des esprits contemporains que nous aimons.
Les grands esprits naissent encore, mais leurs travaux ne prennent point leur rang et leurs efforts ne portent plus. […] D’ailleurs quiconque, avec un petit effort, regarde en face sa pensée, la plus simple, pressent en elle une sorte d’abîme héréditaire, de legs mystérieux et divin. […] Une des caractéristiques de la nature humaine, c’est son effort de stabilisation et de résistance à l’écroulement perpétuel de la nature tout court. […] Enfin la liberté humaine est capable de surmonter, au prix d’un effort constant, ce qu’on a appelé la fatalité héréditaire, ce que j’appelle la mémoire héréditaire. […] Vains efforts.