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239. (1887) Discours et conférences « Réponse au discours de M. Louis Pasteur »

Et voyez, Monsieur, combien notre sort est étrange et quelle ironie supérieure semble s’attacher à nos pauvres efforts ! […] que d’efforts elle fait pour saisir l’insaisissable ! […] Dans le vaste sein de la nature, les efforts les plus divers s’ajoutent, se combinent et aboutissent à une résultante de la plus majestueuse unité. […] Le but de la nature a été atteint ; un puissant effort a été tenté ; une vie admirable a été réalisée, et alors, avec cette insouciance qui la caractérise, l’enchanteresse nous abandonne, et nous laisse en proie aux tristes oiseaux de nuit.

240. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIV. De la plaisanterie anglaise » pp. 296-306

On est sérieux seul, on est gai pour les autres, surtout dans les écrits ; et l’on ne peut faire rire que par des idées tellement familières à ceux qui les écoutent, qu’elles les frappent à l’instant même, et n’exigent d’eux aucun effort d’attention. […] Les allusions, les allégories, toutes les fictions de l’esprit, tous les déguisements qu’il emprunte, sont des combinaisons avec lesquelles on produit de la gaieté ; et, dans tous les genres, les efforts de la pensée vont très loin, quoiqu’ils ne puissent jamais atteindre à la souplesse, à la facilité des habitudes, au bonheur inattendu des impressions spontanées.

241. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre VI. De l’emploi des figures et de la condition qui les rend légitimes : la nécessité »

Unissez-vous ensemble et faites une armée, Pour combattre une main de la sorte animée : Joignez tous vos efforts contre un espoir si doux ; Pour en venir à bout c’est trop peu que de vous. […] Et si l’on songe aux facilités qu’offre une langue déjà vieille par la multitude des phrases toutes faites et des figures ajustées d’avance, on concevra comment tant de métaphores ou d’hyperboles, qui naissent spontanément au premier effort de la pensée, ne sont que de vains échappatoires par lesquels on se dispense de faire acte de réflexion en donnant une espèce de satisfaction à la sensibilité.

242. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre X. Zola embêté par les jeunes » pp. 136-144

On exalte, sans y regarder, la Fille Élisa, roman écrit, selon la déclaration de l’auteur, pour « parler au cœur et à l’émotion de nos législateurs » et auquel, en effet, les parlementaires ont pu s’intéresser sans effort, roman dont l’émotion demeure à la préface, livre pauvre d’humanité et mince de littérature, bien loin, ce me semble, des chefs-d’œuvre que fabriquait, avec son frère, M.  […] Pendant un quart de siècle, quelques écrivains laborieux et artistes ont fait, pour le roman, pour le théâtre, pour la langue française, de braves efforts et de réelles conquêtes.

243. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre VI. Conclusions » pp. 232-240

Nous repousserons les philtres de la sirène étrangère, et nous n’imiterons pas l’imprudent Ulysse, qui but dans la coupe de l’enchanteresse l’oubli de la patrie et du foyer domestique… Nous prendrons pour modèle l’humble effort de l’arbre qui, tout entier concentré dans l’élaboration des sèves, envoie ses racines les plus profondes comme ses branches les plus hautes à la poursuite de toutes les nourritures qui fructifieront sous son écorce. […] En présentant ici l’effort de la jeune littérature au cours de ces dix dernières années, nous avons voulu éviter surtout, avant tout, de faire œuvre de polémistes.

244. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 3, que l’impulsion du génie détermine à être peintre ou poëte, ceux qui l’ont apporté en naissant » pp. 25-34

Les parens de Nanteüil firent les mêmes efforts pour l’empêcher d’être graveur, que les parens font ordinairement pour obliger les enfans à s’instruire dans quelque profession. […] Bernoulli, qui s’étoit acquis dès la jeunesse une si grande réputation, et qui mourut il y a vingt-sept ans, professeur en mathematiques dans l’université de Basle, s’étoit livré à cette science malgré les efforts que son pere avoit faits durant long-temps pour l’en détourner.

245. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — VII »

Taine a très bien senti l’insuffisance, le verbalisme où aboutissent tant d’efforts, tant d’enthousiasmes dépensés et tant de sang versé ; mais si le but qu’on déclarait viser n’a pas été atteint, si, dans l’entreprise révolutionnaire, il y a des puérilités, de l’agitation et du vide, une grandeur pourtant y apparaît : certaines dépenses d’énergie, fussent-elles infécondes, contribuent à manifester les hommes ; elles accroissent sinon le bien-être, du moins la beauté et puis aussi la dignité de notre espèce. […] J’ose dire que, dans les œuvres dont la nature m’avait prescrit la tâche, mes efforts, mes recherches, mon activité, tout a été aussi consciencieux qu’il dépendait de moi.

246. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

L’une est l’enivrement de la raison après l’effort et les conquêtes du xvie  siècle. […] Mais si l’effort du catholicisme fut efficace, c’est qu’il avait repris force et vitalité dans la crise du xvie  siècle ; et surtout, c’est qu’il avait poussé en France le rameau vigoureux du jansénisme. […] comment a-t-elle excité les âmes aux sublimes efforts dans les rudes voies de la perfection chrétienne ? […] Pascal et le jansénisme ont rendu au christianisme sa raison d’être lorsqu’ils l’ont ramené à être un principe d’effort moral, lorsqu’ils ont remis dans le chemin de la vertu ses épines et ses ronces. […] Mettant à profit la grande leçon de Malherbe, Pascal a laborieusement, lentement, patiemment amené son ouvrage à être l’expression pure et parfaite de sa pensée : il ne s’est pas contenté du premier effort de sa nature, si richement douée.

247. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre II. Le comique de situation et le comique de mots »

» représente un effort croissant pour refouler quelque chose qui pousse et presse pour sortir. […] Faire beaucoup de chemin pour revenir, sans le savoir, au point de départ, c’est fournir un grand effort pour un résultat nul. […] Telle paraît être l’idée de Herbert Spencer : le rire serait l’indice d’un effort qui rencontre tout à coup le vide. Kant disait déjà : « Le rire vient d’une attente qui se résout subitement en rien. » Nous reconnaissons que ces définitions s’appliqueraient à nos derniers exemples ; encore faudrait-il apporter certaines restrictions à la formule, car il y a bien des efforts inutiles qui ne font pas rire. […] C’est donc sur l’autre, et sur l’autre seulement, que portera l’effort d’invention comique.

248. (1882) Essais de critique et d’histoire (4e éd.)

Guizot y revient naturellement et sans efforts. […] Il a découvert leur vie ; il souffre de leur effort. […] Jamais le lecteur n’a besoin d’effort pour entendre leurs pensées. […] Ils se tournent en tous sens, ils font cent efforts pour s’échapper. […] La piété y surnagea par les plus prodigieux efforts.

249. (1893) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Première série

Nous pouvons sans ingratitude refuser notre admiration à un renoncement qui leur, coûte si peu d’effort. […] Le style est à lui seul le plus grand effort que l’individu puisse faire pour prendre possession d’un avenir éternel, et plus je descends dans les raisons secrètes de cet effort, plus je découvre, à la source profonde du style, l’élan énergique et passionné de l’être morte ! […] « Aspirer au néant » est une expression vide de sens, puisque nous y sommes précipités sans effort. […] Aucun effort sublime du génie n’est capable, à lui seul, de la réaliser. […] Une de ses bonnes malices est de substituer un succès de rencontre à celui que visaient patiemment nos efforts.

250. (1866) Nouveaux essais de critique et d’histoire (2e éd.)

Mais par quels efforts et après quel travail ! […] Encore un effort ; qu’il en coûte d’aborder les grands écrivains modernes ! […] Qui pourrait gêner son effort, puisqu’il n’y a d’autre effort que le sien ? […] Peu à peu les parties solides se déposent, et sous l’effort du vent, elles se consolident. […] Encore un effort cependant ; car il pourrait affirmer qu’il n’y a rien, et cette affirmation serait quelque chose.

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