/ 1248
406. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite) »

La Renaissance, en Angleterre, ne se comporta point comme chez nous ; elle ne mit pas fin brusquement au Moyen-Age ; elle ne produisit point un sens-dessus-dessous dans l’art, dans la poésie, dans le drame, une inondation destructive ; elle trouva un fonds riche, solide, résistant comme toujours : elle le recouvrit par places et s’y mêla en se combinant. […] Ses traductions qui font corps avec son texte sont le suc même des originaux, la chair et le sang de leurs drames. […] Il n’est pas né pour le drame, mais pour l’ode.

407. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Idées et sensations : par MM. Edmond et Jules de Goncourt. »

MM. de Goncourt sont deux auteurs qui n’en font qu’un et dont le nom a acquis toute sa signification depuis leurs deux ou trois derniers romans très-remarquables, mais surtout par ce drame d’Henriette Maréchal qui a fait éclat et qui les a bombardés tout d’un coup à la célébrité. J’ai le plaisir de les connaître particulièrement, et j’ai tant entendu déraisonner sur eux à propos de ce dernier drame spirituel et passionné, vif et hardi, incomplet et brusque, qui méritait la critique et l’attention, — j’ai tant entendu débiter, à ce sujet, de lieux communs et de fadaises (Melpomène, la dignité des genres, la Maison de Molière, etc.), que l’envie me prend d’esquisser le portrait littéraire de ces deux frères unis, ou plutôt de l’extraire du présent volume qu’ils viennent de publier, Idées et Sensations, — un recueil de pensées, de fantaisies et de petits tableaux, qu’ils ont dédié à Gustave Flaubert. […] Voltaire a enterré le poème épique, le conte, le petit vers et la tragédie : Diderot a inauguré le roman moderne, le drame et la critique d’art.

408. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Morhardt, Mathias (1863-1939) »

Nous y voyons aussi la confession d’un Faust que l’amour de Marguerite aurait régénéré, le drame simple de la vie révélé par l’amour d’où le personnage de Méphistophélès a été biffé.

409. (1772) Discours sur le progrès des lettres en France pp. 2-190

  Mais, supposons nos Drames aussi parfaits qu’ils pourroient l’être, quels avantages les mœurs en retireront-elles ? […] N’est-ce donc pas porter un coup mortel au bon goût, que de s’efforcer d’introduire sur la scène ce nouveau genre de Drame, où les moyens de réussir coûtent si peu, par la dangereuse facilité dont il est susceptible ? […] Ne s’imagineroit-on pas, en lisant les Préfaces de certains Drames ou Tragédies Bourgeoises, que leurs Auteurs excellent dans l’art de peindre les passions & de les émouvoir ? […] Paroît-il en effet un seul Drame, qui ne soit accompagné d’une Poëtique nouvelle, où l’Auteur, eût-il été sifflé, ne fasse le plus grand éloge de sa pièce, ne justifie sa manière sur les principes qu’il s’est formés, & ne cherche à persuader qu’il en sait plus qu’Aristote & Horace ? […]   Oui, sans doute, à juger notre langue d’après quelques ouvrages & quelques Drames modernes, elle est en effet dure, barbare & monotone : mais qu’on la juge d’après les Poëmes d’Armide, de Roland, d’Amadis, &c. qui osera, sans injustice, lui reprocher ces défauts ?

410. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Claudel, Paul (1868-1955) »

. — Cette haute indifférence pour les petits combats s’explique par deux drames, encore sont-ils sans nom d’auteur : Tête d’or et La Ville.

411. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la révolution française — I. La Convention après le 9 thermidor. »

Thiers en fait jaillir autant d’instruction que d’intérêt ; son récit est à la fois un drame et une leçon, sans jamais cesser d’être un récit, tant il a su y mettre de compassion et d’impartialité tout ensemble. […] En assistant à tant de catastrophes inévitables, en voyant passer et s’accomplir sous ses yeux ce grand drame de la Révolution, où la fatalité plane comme dans une tragédie d’Eschyle, toute âme honnête se plaît, dans le calme de la raison et de la conscience, à imaginer un rôle de conciliation, de justice et de miséricorde, rôle inutile et sublime, que nul n’à rempli, que nul ne pouvait remplir, mais dont à cette distance et par une illusion bien permise on ose se croire capable, si les destins recommençaient.

412. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « La Fontaine »

Et plus nous avons grandi, plus il a grandi avec nous ; plus nous avons avancé dans la vie, plus nous avons trouvé de charme et de solidité dans ces Fables qui sont la vérité, dans ces drames dont les bêtes sont les personnages et qui racontent si délicieusement et si puissamment la vie humaine, tout en la métamorphosant. […] Ainsi, l’originalité dramatique, car chaque fable, à elle seule, est tout un drame, dont les personnages, transposés de l’homme à l’animal, sont des caractères révélés par la plus merveilleuse divination physiologique.

413. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Ernest Feydeau »

tout cela peut être exact, mais si, au lieu d’avoir cet unique souci de l’exactitude, l’auteur avait su se servir des notions de cette dissertation pour en tirer des effets de pittoresque ou de drame, il aurait fait de l’art intéressant et non pas une ennuyeuse nomenclature. […] Madame Sand, qui faisait un livre, a traité ce sujet en se plaçant en plein centre d’âmes et de drame tète à tête, et, quoique sa main de femme ait un peu tremblé sur le scalpel et ne l’ait pas enfoncé aussi avant qu’il le fallait, elle en a mis pourtant la pointe à la place juste, tandis que Feydeau, venu après elle et faisant un feuilleton, a enroulé autour du Leone Leoni de madame Sand, dissous et délayé dans une boue plus liquide et plus infecte que la boue qui avait servi la première fois à la confection de ce type, un tas d’événements en arabesques qui sont des prétextes à feuilleton, mais qui ne font rien, absolument rien au sujet.

414. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

Où le romanesque devient seulement haïssable, c’est si du drame il passe aux personnages. […] Ses drames et ses comédies se donneraient dans l’azur, qu’ils n’auraient ni plus ni moins de consistance. […] Voyez, par exemple, Solange de Croix-Saint-Luc, qui est la mise en œuvre du triste drame de Solesmes. […] Les Bêtises vraies, Les Petites Comédies du vice, Les Petits Drames de la vertu, etc. […] Drames en cinq minutes.

415. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre III. La poésie romantique »

En réalité, il n’y eut de révolution rapide qu’au théâtre, parce que le drame, violent et pittoresque, nécessitait la dislocation du vers : tout comme Racine dans les Plaideurs, Molière, dans les Fâcheux et ailleurs, avaient dû altérer fortement le type classique. […] Il a écrit des romans : Cinq-Mars (1826), où l’histoire embrouille le symbole, et où le symbole fausse l’histoire, bariolage romantique de psychologie insuffisante, de description trop littéraire, et de mélodrame brutal, Stello (1832), Servitude et grandeur militaire (1835), où se trouvent des récits poignants et sobres, dignes pendants des poèmes ; il a composé des drames : un Othello (1829), une Maréchale d’Ancre (1830) et ce Chatterton surtout (1835), si sobrement pathétique, dont je ferais volontiers le chef-d’œuvre du théâtre romantique. […] Il n’a pas construit de système, mais il a disposé dans ses romans, ses drames, ses poèmes, son Journal intime, toutes les pièces d’un système original et triste. […] Les genres ou thèmes objectifs convenaient à ce tempérament plus riche de formes que de fond ; ces romans, drames, voyages, mettaient V. […] La chanson de Béranger est récit ou drame ; et chaque couplet met en lumière un des moments principaux de l’action.

416. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

Nous terminions, au mois de décembre 186320, le drame intitulé Henriette Maréchal ; et vers la fin de janvier 1864, nous le présentions à M. de Beaufort, alors directeur du Vaudeville. […] Je ne tiens pas compte toutefois d’un Étienne Marcel, drame en cinq actes et en vers, commis en rhétorique par mon frère, et d’un indigeste travail sur les « Châteaux de la France au moyen âge », présenté par moi à la Société d’histoire de France pour avoir l’honneur d’être admis parmi ses membres. […] Voici la route de Bellevue, et, sur cette route, nous rencontrons tenant par la main un joli enfant, la jeune fille, jeune femme aujourd’hui, que l’un de nous a eu, au moins pendant huit jours, la très sérieuse pensée d’épouser… et qui nous rappelle du vieux passé… Il y a des années qu’on ne s’est vu… On s’apprend les morts et les mariages… et l’on nous gronde doucement d’avoir oublié d’anciens amis… Puis nous voilà dans la maison de santé du docteur Fleuri, causant avec Banville, et croisant dans notre promenade, le vieux dieu du drame, le vieux Frédérick Lemaître… « … Dans tout cela, par tous ces chemins, en toutes ces rencontres, au milieu de toute notre vie morte que le hasard ramène autour de nous et qui semble nous mener à une vie nouvelle, nous roulons, les oreilles et les yeux aux bruits et aux choses comme à des présages bons ou mauvais, et prêtant à la nature le sentiment de notre fièvre… En rentrant : rien. » Une semaine après, nous apprenions que notre pièce n’était ni reçue ni refusée, que Beaufort voyait un danger dans la mise à la scène de la petite presse… qu’il attendait. […] Nous nous plongions cependant en un drame de la Révolution vers laquelle nous nous sentions attirés depuis des années, et dans laquelle le siège de Verdun donnait l’épisode héroïque de la défense de la France contre l’étranger. […] La Patrie en danger est incontestablement la meilleure pièce que nous ayons faite, elle a cela, que je ne retrouve nulle part, dans aucun drame du passé : une documentation historique qui n’a pas été encore tentée au théâtre.

417. (1890) Nouvelles questions de critique

Une tragédie de Racine ou un drame de Shakespeare n’ont pas besoin non plus d’être joués pour être sentis, admirés, et compris ; même, on a soutenu qu’ils y perdraient plutôt. […] Je crois aussi qu’il n’en avait point, ou qu’il en avait peu, sur les conditions du poème épique et sur le mérite comparé des tragédies de Marmontel et des drames de La Harpe. […] De telle sorte que, ses conclusions, quasi contradictoires à son point de départ, sembleraient n’avoir servi qu’à faire passer les romantiques d’un joug sous un autre, et le drame futur — le drame prochain de l’auteur de Chatterton ou de celui de Cromwell, — d’une pâle imitation de la tragédie du xviie  siècle, à ce que je me permettrai d’appeler la caricature très appliquée du drame shakespearien. […] On ne peut pas la violer sans faire autre chose que du drame, et nous donner ce qu’Hugo nous donne, en effet : lui, toujours lui, lui partout, sous les traits de Barberousse ou de Gennaro. […] Comme l’excès du lyrisme avait dénature la critique et l’histoire, c’est bien lui qui, dans l’école romantique, a faussé la notion du drame.

/ 1248