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1805. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIIe entretien. Vie du Tasse (3e partie) » pp. 129-224

L’invasion des Sarrasins en Espagne, en Calabre, en France, avait exercé la chevalerie à des guerres entre les musulmans et les chrétiens, champions de deux cultes opposés, qui avaient créé une espèce d’Olympe chrétien aussi peuplé de fables et de prodiges populaires que l’Olympe d’Homère.

1806. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

vous voilà arrivé, quoique plus jeune que moi, devant Celui qui nous crée et qui nous juge, dans ce monde où toutes nos petites passions meurent avant nous, où nous ne serons appréciés ni par nos amis ni par nos ennemis, mais sur le type éternel du bien ou du mal que nous avons fait !

1807. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (2e partie) » pp. 97-191

Ce n’était point assez d’avoir produit ces chefs-d’œuvre ; il fallait encore les faire comprendre ; et au génie spontané des poètes est venu s’ajouter le génie de la critique, qui ne crée pas, mais qui réfléchit.

1808. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (2e partie) » pp. 315-400

Les jeunes poètes qui se montrent maintenant en foule ne sont pas de vrais talents ; ce ne sont que des impuissants à qui la perfection de la littérature allemande a donné l’envie de créer. — Que les Français quittent le pédantisme et s’élèvent dans la poésie à un art libre, il n’y a rien d’étonnant.

1809. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1890 » pp. 115-193

Et pour les êtres, dont Flaubert a peuplé le monde de ses livres, ce monde fictif à l’apparence réelle, l’auteur s’est trouvé posséder cette faculté créatrice, donnée seulement à quelques-uns, la faculté de les créer, un peu à l’instar de Dieu.

1810. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIe Entretien. Le 16 juillet 1857, ou œuvres et caractère de Béranger » pp. 161-252

XXXIV C’est sans doute cet amour, amour qui rend le cœur bien plus prudent, parce qu’il le force à penser à deux, c’est sans doute cet amour qui pressa instinctivement Béranger de songer à se créer par les lettres une existence qui pût suffire à deux vies.

1811. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Féval » pp. 107-174

Il faut bien le dire, il a diminué la notion du roman, de cette chose complexe et toute-puissante, égale au drame par l’action et par la passion, mais supérieure par la description et par l’analyse ; car le romancier crée son décor et descend, pour l’éclairer, dans la conscience de ses personnages, ce que le poète dramatique ne fait pas et ne peut pas faire.

1812. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome II

C’est en rapprochant les tissus anatomiques analogues et en concluant de l’analogie de forme à l’analogie de propriété et de fonction, qu’il a créé réellement l’anatomie générale. […] Le phénomène physiologique de la sécrétion consisterait donc à créer dans la glande la matière qui caractérise la sécrétion ; le phénomène mécanique de la sécrétion consisterait à la dissoudre dans un véhicule alcalin qui provient du sang, et à l’expulser non pas du sang, mais directement de l’organe glandulaire dans lequel elle se trouve formée par un développement morphologique.

1813. (1908) Esquisses et souvenirs pp. 7-341

Sans doute il n’a pas suivi la mode ; il l’a créée, ce qui est peut-être plus grave. […] Mais aussitôt, il observe : « … Un inconvénient est à craindre dans ces productions lyriques trop fréquentes, surtout quand on tient à les rattacher, ainsi que fait l’auteur, à des cadres distincts et composés : c’est qu’au lieu de réfléchir fidèlement dans les vers les nuances vraies qui se succèdent dans l’âme, on ne crée, on ne force un peu, on n’achève exprès des nuances qui ne sont qu’ébauchées encore… » Lorsque Sainte-Beuve soutient que Victor Hugo n’avait point le sens de la perfection grecque, il a tout à fait raison. […] — Ô fantôme, lui dis-je, je t’ai créé afin que tu parles avec une des mille voix de mon âme ; et j’ai voulu te nommer Tiberge, en souvenir des larmes que j’ai versées (quelques bouteilles de Saumur mousseux y aidèrent sans doute) une nuit sur la page où l’on lit comment le sensible Chevalier retrouva son ami à la Nouvelle-Orléans.

1814. (1890) Impressions de théâtre. Quatrième série

Or, si j’étais savante, je vous rappellerais que ce qu’on a dit de l’amitié : Aut invenit pares, aut facit , on le pourrait dire aussi du véritable amour : il crée l’égalité entre ceux qui aiment. […] Et ainsi, nous qui sommes la foule, nous qui n’avons que des désirs et qui ne savons rien créer, nous contribuons, en un sens, à tout ce qui se fait de beau de notre vivant : nous y contribuons à force de l’attendre et de l’aimer… Pour revenir à Dumas, Henri III est postérieur à Cromwell, mais antérieur à Marion Delorme. […] Il tue à la façon d’un somnambule, mû par une force qu’il a sans doute créée, mais qu’il ne gouverne plus… Et c’est ainsi qu’on peut voir un assassin qui tue pour voler — et qui n’est pas odieux. […] de ne pas apporter une attention trop soutenue à ce que fait son corps, et de pouvoir se créer une vie morale profondément séparée de l’autre, qui va son train comme elle peut.

1815. (1890) La bataille littéraire. Troisième série (1883-1886) pp. 1-343

Le fantôme charmant a un cœur, beau comme son enveloppe ; ses lèvres s’agitent au souffle des promesses infinies ; le souvenir d’un jour se fond dans la joie immense qui crée une seconde vie ; cette fois c’est l’amour.

1816. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Alexis Piron »

Ainsi fait et créé par la nature, et n’ayant cessé d’abonder en lui-même, on a plus de traits piquants et personnels à citer de lui, que de pensées et de maximes d’une application générale ; en voici une pourtant qui mérite d’être conservée ; Fontenelle, à qui Piron la disait un jour, l’avait retenue et en avait fait un des articles de son symbole littéraire : « La lecture a ses brouillons comme les ouvrages100 », c’est-à-dire que, pour bien comprendre un livre et s’en former une idée nette, lire ne suffit pas, il faut relire.

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