* * * La vérité, d’ailleurs, c’est que l’acte en question est toléré par la « morale » commune, même par celle des gens « comme il faut », — à condition de demeurer secret. […] Comment en serait-il autrement, quand le crime dont je parle est si pareil, dans son fond, à d’autres actes, absous ceux-là par le Code, ou dont la loi ne saurait connaître, et que la « morale » commune, non seulement supporte, mais avoue ?
A ne considérer que ces rois de l’intelligence, on s’expose à les grandir jusqu’à des proportions surhumaines ; on en arrive à confondre en eux ce qui leur est personnel avec ce qui leur est commun avec leurs voisins. […] Mais il est visible, au premier coup d’œil, que, si nous trouvons, en parcourant la littérature d’une époque, des caractères qui sont strictement individuels, nous en rencontrons d’autres qui sont communs à plusieurs auteurs, à des groupes plus ou moins étendus.
Une si grande déraison dans un homme qui faisoit dire qu’ assurément le diable étoit auteur de l’érudition , méritoit qu’il rencontrât quelqu’un encore plus emporté que lui, & qui vengeât la cause commune des gens de lettres. […] Il avoit cela de commun avec Joseph Scaliger, qu’il étoit plein d’idées extravagantes sur sa naissance.
Chaque peuple en a bien une particuliere des bons livres écrits en sa langue, mais il en est une commune à toutes les nations. […] Rien ne montre mieux qu’il n’étoit pas un homme du commun dans la carriere qu’il a courue, que l’inutilité des efforts de ceux qui osent entreprendre de l’atteindre.
On va maintenant considérer certaines manières d’être et certaines croyances communes à l’humanité tout entière, à ce point qu’elles semblent conditionner son existence, et dont on va montrer qu’elles comportent toutes un fait flagrant de Bovarysme. […] Or, pour qui est parvenu à percer entièrement le brouillard qui favorise l’illusion commune, il n’est pas de spectacle plus singulier, plus comique et plus terrible à la fois, que celui du contraste qui apparaît ici entre la réalité des choses et l’interprétation qui en est imaginée par la cervelle humaine. […] Mais parmi ces automates en voici un qui semble prendre part à la gaîté commune : il est si parfaitement imité qu’il est comme tout le monde : on le prend vraiment pour un homme. […] Un certain état d’équilibre instable entre les instincts multiples et communs à tous, donne à l’individu cette apparence de la liberté. […] L’homme, dévoué à la contemplation esthétique, et qui ne considère plus les choses qu’au point de vue de leur beauté, est condamné à périr par l’oubli où il tombe de ses intérêts vitaux : il se trouve bientôt exclu d’un monde où le commun des êtres, aiguillonné par le souci matériel, s’empare des choses nécessaires au détriment de qui ne fait plus effort pour les posséder ou les conserver.
Les pères étant rois et souverains de leurs familles, il était impossible, dans la fière égalité de ces âges barbares, qu’aucun d’entre eux cédât à un autre ; ils formèrent donc des sénats régnants, c’est-à-dire composés d’autant de rois des familles, et, sans être conduits par aucune sagesse humaine, ils se trouvèrent avoir uni leurs intérêts privés dans un intérêt commun, que l’on appela patria, sous-entendu res, c’est-à-dire intérêt des pères. […] Mais ils n’auraient eu personne à qui commander, si l’intérêt commun ne les eût décidés à satisfaire leurs clients révoltés, et à leur accorder la première loi agraire qu’il y ait eu au monde. […] Les hommes n’ayant encore que des idées très particulières, et ne pouvant comprendre ce que c’est que le bien commun, la Providence sut, au moyen de cette forme de gouvernement, les conduire à s’unir à leur patrie, dans le but de conserver un objet d’intérêt privé, aussi important pour eux que leur monarchie domestique ; de cette manière, sans aucun dessein, ils s’accordèrent dans cette généralité du bien social, qu’on appelle république. […] Achille est-il juste quand Hector lui demande la sépulture en cas qu’il périsse, et que, sans réfléchir au sort commun de l’humanité, il répond durement : Quel accord entre l’homme et le lion, entre le loup et l’agneau ? […] Tacite en dit autant des anciens Germains, auxquels cette coutume était probablement commune avec tous les peuples barbares.
Le matériel de l’art y a gagné de la souplesse et de l’aisance ; la poésie y a conquis de nouvelles images, et s’est pour jamais placée hors du plat et du commun. […] Mais la peur du commun le rend parfois obscur et bizarre. […] Le naïf, après ces grandes beautés, est presque le commun, et, dans cette poésie à jour, il ressort comme une faute de paresse ou d’impuissance. […] Supposons, à mettre les choses au mieux, qu’il ait eu la conscience qui donne le droit, et assez de talent, eu égard à la mesure commune de son temps, pour exercer ce droit à l’honneur de son esprit ; quel bien a-t-il fait ? […] C’est, du reste, une pratique assez commune à tous les auteurs incomplets : quand ils manquent d’une qualité, ils imaginent une théorie qui les en dispense ou qui leur fait un mérite éminent de ne l’avoir pas.
Il y a, je le sais, des éléments communs que l’examen de tous les peuples et de tous les pays rendra à l’analyse. […] Sans doute il y a de l’universel et des éléments communs dans la nature humaine. Sans doute on peut dire qu’il n’y a qu’une psychologie, comme on peut dire qu’il n’y a qu’une littérature, puisque toutes les littératures vivent sur le même fond commun de sentiments et d’idées. […] C’est une action et une réaction réciproques, un commerce de parties communes, une végétation sur un tronc commun. […] Les noms de leurs facultés sont intraduisibles pour nous ; tantôt leurs facultés renferment plusieurs des nôtres sous un nom commun, tantôt elles subdivisent les nôtres.
L’hérédité existe et s’exerce ; très probablement dans une race homogène, stable et peu nombreuse, à force de mariages consanguins et de vie en commun, cette force finirait par établir entre les divers membres du groupe une ressemblance constante et complète qui permettrait de dériver les facultés morales d’un de ses individus de celles de tous, et réciproquement celles de tous de celles d’un seul individu. […] On sait qu’en Italie, par exemple, le tempérament sensé, sec et ironique de la généralité des Piémontais n’a rien de commun avec la mobilité braillarde des Napolitains ; et encore sont-ce là des étiquettes inexactes sur la foi desquelles il ne faudrait pas croire qu’il n’y ait des bavards à Turin et des gens sensés à Naples. […] L’adaptation des êtres vivants est évidemment le résultat d’une harmonie sans cesse rétablie entre la nature organique et inorganique, ou, si l’on aime mieux, un accident, ou encore la conséquence de la commune substance de toutes deux. […] Taine, on voit qu’il est impossible d’établir un rapport direct entre une société et les artistes qui l’illustrent, en considérant ceux-ci comme dépendant de celle-là, ou en envisageant la société et les artistes comme dépendant de causes communes. […] II Pratique de l’analyse sociologique ; faits particuliers. — Étant donc admis qu’un artiste ne dépend pas essentiellement de son milieu, de sa race, de son pays, et que l’on ne peut, par ces causes, l’assimiler à ses compatriotes et à ses contemporains, en d’autres termes qu’il n’y a pas de cause commune entre ces derniers et lui, il faut prendre un détour pour obtenir de l’esthétique des données sociologiques.
Il peut arriver que certains mots aient dans leur sens une partie commune, et qu’on puisse les employer indifféremment, quand on n’a besoin d’exprimer que cette partie commune de leur sens.
Trois principales influences diversifient le fond commun de l’esprit français dans les œuvres de notre littérature : la classe sociale, l’origine provinciale, le moment historique. […] Les bruyantes communes picardes se donnent la joie de la poésie dramatique.
Ce qu’ils s’assuraient les uns aux autres par la mise en commun de leur pauvreté, ce n’était point leur part intégrale des jouissances terrestres, telle que la peut concevoir un ouvrier, et qui comporte, très naturellement, une nourriture copieuse et les plaisirs qu’on trouve chez le marchand de vin et ailleurs : ce n’était que quelques figues sèches et la douceur d’attendre ensemble le royaume de Dieu. […] Je me souviens de l’avoir sentie très nettement, à Paris, pendant le premier mois de la Commune, à lire les affiches et les journaux enfiévrés, à voir flamber dans les rues le drapeau rouge, à me mêler, sous le grand soleil, aux cohues démentes de la place de l’Hôtel-de-Ville ; et pourtant j’étais un enfant très raisonnable. — Bref, je conçois, sans nul effort que cet homme, l’autre jour, soit monté sur cette table et qu’il y ait chanté cette chanson assassine contre une classe pleine de vices et d’égoïsme assurément (comme toutes les classes sociales sans exception), mais où il y a aussi de braves gens, et dont il se pourrait que la très modeste moyenne de vertu et de bonté ne fût pas trop inégale à la bonté et à la vertu de ceux qui réclament du plomb contre elle.