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331. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre IV Le Bovarysme des collectivités : sa forme imitative »

Ils se sont vu placer devant les yeux des modèles parfaits, mettre en main des méthodes — merveilleux instruments de mentalité ; — ils se sont vu montrer des raccourcis, ouvrir des portes dérobées et soudain ils se trouvèrent de plain-pied avec un territoire où fleurissaient l’art, la science et le goût, où s’épanouissaient déjà la connaissance et la beauté. […] Suscitant le goût de la recherche et de l’érudition, cette curiosité passionnée aboutissait à la découverte de la beauté antique, et il est permis de penser que si cette trouvaille fut par la suite le moyen de l’un des bonds les plus prodigieux de l’esprit humain, elle fut elle-même la conséquence et l’un des effets d’une activité déjà formée et qui avait sa source en elle-même. […] Les œuvres antérieures à la Renaissance, celles particulièrement qui sont dues au ciseau des statuaires bourguignons témoignent déjà d’une attachante beauté.

332. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre V. Le mouvement régionaliste. Les jeunes en province » pp. 221-231

Par cela même qu’elles propageaient le culte du pays natal, le goût de l’action, la recherche des méthodes naturelles d’évolution, elles éloignaient la jeunesse d’un art obscur, subtil où elle avait failli se perdre — (après y avoir d’ailleurs au début connu des beautés nouvelles). — Ici, nous n’avons qu’à constater cette floraison des provinces nouvelles. Elle nous assure encore que la sève n’est point tarie qui animait, jusqu’à l’héroïsme et la beauté, la France65. […] À LA CITÉ DE CARCASSONNE De la tour de Justice à la tour du Trésaut, Le soir apaise enfin l’horizon solitaire ; D’implacables destins ont désolé ces terres, Mais leur fière beauté garde encor des vassaux.

333. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Μ. Jules Levallois » pp. 191-201

Il en avait toujours senti les beautés, les poésies, les langages, mais en artiste, en poète, en raffiné, en âme qui s’était parfumée, comme celle de Rousseau, dans des rêveries de promeneur solitaire, et trempée, trempée dans la rosée où Jean Lapin s’en va faire sa cour à l’Aurore. […] Il s’imagine qu’elle ne donne pas que la joie de ses beautés aux yeux qui la contemplent et la pureté de ses voluptés à, nos âmes, mais, de plus, encore, la force à nos esprits et à nos cœurs pour vivre non plus tête à tête et cœur à, cœur avec elle, mais pour vivre mieux avec les hommes et être plus dispos et plus prompt à toutes les charges du devoir ! […] La nature a ses beautés et ses puissances, mais ses puissances ne sont pas celles-là.

334. (1897) Un peintre écrivain : Fromentin pp. 1-37

Nous suivions, depuis longtemps, les crêtes rocheuses et tournantes qui enserraient le cours d’une rivière torrentueuse ; nous nous taisions parce que la fatigue avait été grande, et parce que l’heure était d’une beauté merveilleuse. […] » Nous ne sommes pas, devant la beauté, des analystes et des subtils. Nous sommes, nous serons toujours des primitifs, et trois ou quatre notes simples, dans tous les arts, résumeront cette perception, et suffiront à rendre toute la grandeur, toute la valeur poétique de cette apparition de la beauté. […] Ils n’ont pas vu que c’était la saison la plus riche et la plus colorée de l’année, celle où les arbres, qui peuvent se ressembler au printemps, ont des frondaisons variées, et chacun une manière différente d’épanouir en peu de jours toute leur beauté jusque-là indécise ? […] Toute la sensibilité furtive de Rubens est dans ce contact imperceptible, qui dit tant de choses, les respecte toutes et attendrit. » Est-ce tout, et n’aurions-nous à admirer dans ce livre que la beauté supérieure d’un style renouvelé ?

335. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Séverin, Fernand (1867-1931) »

Fernand Séverin font souvenir de ceux de Racine et de Shelley, de Chénier et de Keats et quelquefois de ceux de Lamartine ; mais, comme la déplorable bien que judicieuse manière de comparer une œuvre peinte à une œuvre écrite prévaut quelquefois et exprime d’une façon plus exacte les beautés qui les caractérisent, il nous semblerait donner une idée des poèmes de M.  […] L’élégance et la pureté de la versification, la tendresse et la sincérité du fonds séduiront les intelligences distinguées de notre époque, beaucoup plus nombreuses qu’on le pense, et qui sont avides de beauté virginale et de radieuse sensibilité.

336. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 100-103

C’est dommage qu’à force d’avoir abrégé l’Auteur Latin, sous prétexte de faire disparoître les défauts qui le déparent, & de rapprocher les beautés qui le font admirer, M. le Chevalier de Laurés soit quelquefois tombé dans une sécheresse non moins condamnable que l’enflure & le faux sublime de l’Original. […] Il est bien plus noble d’imiter ces Fondeurs habiles, qui, sachant conserver l’attitude & les principaux traits d’une Statue, forment un nouveau moule pour la rendre avec les beautés qu’elle avoit déjà, lui donner celles qui lui manquoient, & la corriger des défauts qui en rendoient l’exécution moins heureuse.

337. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

L’humanité ne se convertit qu’éprise par l’attrait divin de la beauté. Or la beauté dans l’ordre moral, c’est la religion. […] Dites aux simples de vivre d’aspiration à la vérité et à la beauté, ces mots n’auront pour eux aucun sens. […] Il ne faut donc pas craindre d’y mettre tout ce qu’on peut imaginer de bonté et de beauté. […] Son œuvre a été de révéler à la critique une veine de beauté inaperçue dans les dogmes et le culte chrétiens ; mais il aurait dû s’en tenir au passé et ne pas chercher de poésie dans des platitudes jésuitiques.

338. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE IX »

C’est là surtout qu’elle donnait à la foule l’audience, muette et dédaigneuse, de sa beauté. […] Appuyée sur le rebord de sa loge, où languissait sa main frêle, elle ressemblait à ces romantiques beautés anglaises qui rêvent, dans les keepseakes, accoudées sur un vase, au murmure d’un lac, au souffle d’un feuillage, aux faibles palpitations de leur cœur. […] Il manquait au déclin de sa beauté mourante, — peut-être en aura-t-elle jailli plus tard, — cette lueur de l’âme qui colore la cime des vies purifiées de l’enthousiaste et suprême rougeur des crépuscules. […] Ce n’était pas un roman, c’était une histoire, l’histoire, intime et secrète, de cette Marie Duplessis dont le monde ne connaissait que la beauté et les scandales. […] Prudence présente Armand à Marguerite comme amoureux fou de sa beauté à peine entrevue, et la dame, qui l’a trouvé charmant tout d’abord, le remercie par un regard du bon goût de ses yeux, sinon de son coeur.

339. (1828) Préface des Études françaises et étrangères pp. -

Arrêtons-nous pour remarquer que le génie de nos trois grands tragiques s’est manifesté dans les proportions et avec les formes qui convenaient aux époques où ils ont écrit ; et que la nature de leurs beautés et même de leurs défauts n’a aucune analogie. […] Ceux qui ne comprennent pas d’autre mélodie que celle des vers de Racine, ne sont pas capables même de sentir les beautés de ce grand poète. […] Le poète au contraire arrive avec ses beautés et ses fautes à lui, et tout le monde s’effarouche ; mais depuis quand la perfection est-elle dans les créations humaines ? […] La critique devrait donc apprendre à se montrer un peu indulgente pour certains défauts, et très difficile sur la nature des beautés. […] Lemercier est un poème non-seulement très intéressant et très philosophique, mais encore plein de beautés de style ; nous dirons avec beaucoup plus de monde, que l’Académie française a oublié M. 

340. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Alphonse Daudet »

est de la plus épouvantable beauté. […] Stendhal dit quelque part que la beauté d’une œuvre d’art se mesure au bonheur qu’elle nous donne. […] Je ne prends point si strictement le bonheur que donne une œuvre d’art pour la mesure de sa beauté ; car le bonheur est relatif, et la valeur d’une œuvre d’art est absolue. […] La poésie, cette forme divine, emporte toujours le fond humain dans l’œuvre des hommes, quelle que soit la beauté ou la profondeur de ce fond. […] … Nous sommes assez physiologistes pour croire à la race, — à la race démontrée, d’ailleurs, par des siècles de grandeur, d’héroïsme, de génie et même de beauté.

341. (1886) Le naturalisme

La poésie se modifie, admet comme élément de beauté la réalité vulgaire. […] Comme défaut, il a tous ceux qui manquent à Beyle : lyrisme, enflure, remplissage ; mais quelles beautés ! […] Je le préfèrerais plus réservé et, bien sûr, je ne loue pas chez lui les fautes mais les beautés. […] Je ne méconnais point la beauté, la splendeur et la fécondité d’autres formules aujourd’hui expirantes. […] Avide de beauté, celle-ci la cherchera toujours en consultant d’un regard anxieux les points les plus éloignés de l’horizon.

342. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  premier article .  » pp. 326-341

Les beautés des tragiques et des lyriques, les grandeurs d’Homère se dérobaient par mille côtés, et par leurs côtés peut-être les plus sacrés : on en parlait à la légère, presque sur ouï-dire, un peu sur la foi de l’écho, et, même en les célébrant, on courait risque d’en méconnaître et d’en altérer le caractère. […] A un certain moment de la Restauration, le goût des littératures étrangères et de ce qu’on nomma la couleur locale vint aider collatéralement pour ainsi dire et prêter son reflet à l’entière explication des beautés classiques, en ce que celles-ci avaient gardé de singulier quelquefois et d’étrange. […] Mais en même temps que cette force intérieure s’est redoublée et que, dans les directions diverses, on poursuit des travaux curieux et profonds, le sentiment littéraire des beautés, faut-il le dire ? […] Depuis l’amateur qui l’a saluée d’un coup d’œil et qui s’en souvient avec grâce, jusqu’à celui qui s’initie lentement à ses mystères ; depuis l’heureuse nature qui en a été allaitée et pétrie dès l’enfance, jusqu’à l’esprit fait qui tard y revient et tâche, comme Alfieri, comme Marie-Joseph Chénier, de se l’inoculer par réflexion, qui en épelle et qui en reconquiert chaque beauté, tous y gagnent et trouvent de ce côté seulement la patrie première, le point fixe et lumineux pour s’orienter dans les écarts comme dans les retours.

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