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1231. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

« Malgré mon âge, qui touche à cinquante ans, écrit-il à Vettori, je vais chaque jour visiter celle qui captive mon cœur ; je ne me laisse ni rebuter par les ardeurs de l’été, ni arrêter par la longueur et les difficultés du chemin, ni effrayer par l’obscurité des nuits. » Tant que dura ce violent amour qui lui faisait tout oublier, même la dignité de son nom, même sa misère, même la décence de son âge, il n’écrivit plus rien que des lettres amoureuses ou que les confidences de son bonheur. […] Cette histoire est un monument de bon sens, de connaissance des hommes, de clarté, de récit, surtout de réflexions politiques découlant des événements qu’il retrace ; mais le sujet est trop exclusivement toscan pour s’y arrêter ; la main de Machiavel est plus grande que sa république. […] Elle se ligua avec l’Angleterre, avec le pape, avec l’Autriche et la Russie, avec toutes les puissances et toutes les causes qui voulaient arrêter ce torrent de principes et de sang menaçant de couler de Paris sur le monde.

1232. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (5e partie) » pp. 145-224

XVIII « Le père et le fils s’étaient arrêtés près du bassin où s’ébattaient les deux cygnes. […] N’est-ce pas misère que d’aspirer follement à une égalité impossible des conditions, égalité tellement impraticable que, si l’utopiste la créait un instant, tout mouvement, et par conséquent tout ce que l’auteur appelle le progrès, s’arrêterait à l’instant, car le grand ressort de l’horloge humaine, le désir, serait à l’instant brisé ? […] Et c’est là le grand péril pour ceux qui courent quand elle ne veut que marcher, ou qui marchent quand elle veut s’arrêter.

1233. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (2e partie). Littérature de l’Allemagne. » pp. 289-364

Ici il s’arrête et il pense : XIII « Le tableau général de la nature que j’essaye de dresser serait incomplet, si je n’entreprenais de décrire ici également, en quelques traits caractéristiques, l’espèce humaine considérée dans ses nuances physiques, dans la distribution géographique de ses types contemporains, dans l’influence que lui ont fait subir les forces terrestres, et qu’à son tour elle a exercée, quoique plus faiblement, sur celles-ci. […] Un tableau physique de la nature s’arrête à la limite où commence la sphère de l’intelligence, où le regard plonge dans un monde différent. […] Voici comment il en parle : « Puisque nous sommes revenu aux prosateurs, nous nous arrêterons avec plaisir sur la création qui a valu à Bernardin de Saint-Pierre la meilleure partie de sa gloire.

1234. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIe entretien. Le Lépreux de la cité d’Aoste, par M. Xavier de Maistre » pp. 5-79

J’en étais pourtant importuné quelquefois, car la vive Mme Lard ne laissait pas d’être exigeante ; et si dans la journée j’avais passé devant la boutique sans m’arrêter, il y aurait eu du bruit. […] Tout à coup je les vis s’arrêter : la jeune femme pencha la tête sur le sein de son époux, qui la serra dans ses bras avec transport. […] Je m’arrêtai, saisi d’horreur, sur la porte de la tour, et l’écho faible de la montagne répéta longtemps après : Malheur à toi !

1235. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre VI. Bossuet et Bourdaloue »

Des conférences s’ouvrirent à Issy, où les trois commissaires arrêtèrent laborieusement 34 articles qui définissaient la doctrine orthodoxe sur le pur amour et l’oraison. […] Après avoir secoué le joug de Rome, les protestants s’étaient efforcés d’arrêter un dogme commun, et de constituer des églises. […] Ce qu’il a écrit contre Richard Simon et contre Fénelon est trop lié à la théologie pour que je m’y arrête ici : je signalerai de préférence le petit traité sur la Comédie. débordant d’une âpre éloquence, et dans lequel une dure malédiction fait éclater l’opposition de l’esprit de Molière et de l’esprit chrétien.

1236. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre cinquième. De l’influence de certaines institutions sur le perfectionnement de l’esprit français et sur la langue. »

On songe moins à arrêter les lecteurs sur la beauté d’un esprit particulier, qu’à raffermir leur conscience troublée par la contradiction, et à conserver intact le dépôt de la doctrine. […] On soupçonne donc quelque rêverie de solitaire ou quelque utopie de perfection chrétienne, et on ne s’y arrête pas. […] Pourquoi n’y pas voir ce qui rend ces écrits si admirables, l’esprit collectif qui dicte, des plumes particulières qui écrivent, une révision en commun qui arrête le travail ?

1237. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Introduction »

Il leur faudra partir de quelque postulatum, de quelques vérités rationnelles ou expérimentales, ne point s’arrêter aux questions de principes et laisser à la philosophie ces discussions. […] Comment ne pas pressentir déjà cette vérité qui n’est un paradoxe que pour ceux qui s’arrêtent aux apparences ? […] Il est inutile de s’arrêter à démontrer combien l’étude des déviations est utile pour l’intelligence complète des phénomènes ; mais ce qui est remarquable, c’est l’insouciance de la psychologie sur ce point.

1238. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

Le soir, lassé par de vaines et humiliantes démarches, « il s’arrêtait sur les ponts pour voir se coucher le soleil et il songeait que sous tant de toits, il n’avait pas un ami », et pas un protecteur. […] Jugeant l’humanité à l’aune capitaliste, ils s’écrient triomphalement : « L’homme est et restera toujours égoïste ; si vous lui retirez comme unique mobile de ses actions l’intérêt privé, vous détruisez la société, vous arrêtez le progrès et nous retournons à la barbarie. » L’âme humaine, ainsi que les autres phénomènes de la nature est, au contraire, en un perpétuel état de transformation, acquérant, développant, et perdant des vices et des vertus, des sentiments et des passions. […] Mémoire d’un détenu pour servir à l’histoire de la tyrannie de Robespierre, par Riousse arrêté à Bordeaux par un comité révolutionnaire.

1239. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

On devrait décrire sur le frontispice de toutes les sciences physiques ou métaphysiques, à la borne des choses explicables. « Arrêtez-vous là ; vous êtes au bord de l’abîme ! […] « Les femmes qui tirent l’eau du puits, ou qui la rapportent à la maison dans un seau de bois sur leurs têtes, s’arrêtent à ce son de la cloche ; elles courbent leurs fronts en soutenant le vase de leurs deux mains levées, de peur que leur mouvement ne fasse perdre l’équilibre à l’eau ; elles adressent une courte prière au Dieu qui fait lever un jour de printemps. […] venait à arrêter un moment ma plume, l’outil assidu que j’use pour eux, ces braves amis péricliteraient avec moi ; ils seraient obligés de chercher dans mes cendres leur fortune ; ils la retrouveraient tout entière, sans doute, mais ils ne la retrouveraient que sous mes démolitions.

1240. (1900) La vie et les livres. Cinquième série pp. 1-352

En art, il ne faut s’arrêter que devant les personnalités exceptionnelles et ne considérer que les œuvres durables. […] » Les passants s’arrêtèrent. […] Deschanel à s’arrêter devant cette figure qui, à mesure qu’elle s’éloigne vers le passé, s’impose davantage à notre culte. […] Héraclite pleurait en songeant à l’évanouissement, si rapide, des réalités illusoires que sa vue ne pouvait saisir ni arrêter au vol.  […] Pouvillon s’est arrêté dans tous les coins, dans tous les recoins de la vallée quercinoise.

1241. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

Si l’influence des maîtres et les efforts de la critique n’arrêtent pas cette production torrentielle, c’en est fait de l’art. […] Son acquiescement s’est-il arrêté là ? […] Il est facile, dans une histoire construite, de trancher les situations sans issue et d’imaginer une fin qui arrête le problème. […] Le plan une fois arrêté, la composition n’est plus qu’une affaire de gestation plus ou moins pénible. […] L’exigence s’arrête lit où le talent fait défaut.

1242. (1888) Études sur le XIXe siècle

C’était une illusion : en réalité, cet homme grave, aux opinions arrêtées, aux allures de tyranneau du xve  siècle, n’était point maître dans son ménage, et sa femme le tenait dans un état d’absolue dépendance. […] Holman Hunt raconte que, navré de l’injustice des critiques, pris de découragement et peut-être de doute, il allait souvent à l’exposition, de bonne heure, dans l’espoir que quelque visiteur matinal — de ceux qui viennent pour la peinture et non pour la foule — s’arrêterait devant ses « Missionnaires » en exprimant peut-être une opinion favorable. […] Une ballade, un refrain populaire suffisent pour vous représenter un instant ce caractère sous les traits les plus arrêtés et les plus frappants. […] Mais, à ce qu’il semble, un grand mouvement, comme fut par exemple le mouvement romantique de 1830, aurait beaucoup de peine à se former et à se propager de ville en ville, arrêté qu’il serait sans doute, en presque tous les endroits, par des courants d’idées opposées ou par des influences locales. […] On y descend, on s’y arrête, — et au bout d’un séjour de vingt-quatre heures, on n’en garde qu’une impression de trouble et d’ennui.

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