/ 1173
881. (1809) Quelques réflexions sur la tragédie de Wallstein et sur le théâtre allemand

Sous le premier point de vue, l’amour est commun à l’homme et aux animaux ; sous le second, il est commun à l’homme et à Dieu.

882. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

— tous ses procédés consistaient à décrire l’objet, c’est-à-dire le livre, c’est-à-dire l’œuvre quelconque dont il avait à rendre compte, et cela identiquement de la même façon qu’un naturaliste étudie une plante ou un animal.

883. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Octave Feuillet »

III Figurez-vous, en effet, un roman conçu fièrement et vigoureusement réalisé dans cette donnée : un homme a le courage d’être un athée absolu, avec tous les dons de la vie : la naissance, la beauté, la jeunesse, la force de l’esprit, la solidité des organes, la richesse, sans laquelle rien ne se peut dans ce monde voué au veau d’or, à l’âne d’or, à tous les animaux d’or et à leurs excréments.

884. (1897) Un peintre écrivain : Fromentin pp. 1-37

Des animaux, logés dans un fondouk voisin, commencèrent à s’agiter sur leur litière et à faire un bruit matinal dans leurs mangeoires vides.

885. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

Mais à supposer même qu’en effet l’homme ne soit rien qu’un animal, et que nos sentiments, nos désirs, nos pensées mêmes et nos convictions soient uniquement les résultats nécessaires du jeu de nos organes, de notre constitution, je répondrai que la physiologie doit être laissée aux physiologistes ; méfions-nous de la physiologie littéraire autant que de la musique d’amateurs.

886. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

Perrier, Les colonies animales, p. 216.

887. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Si l’on conçoit la suite des sciences qui, prenant la matière organique à ses débuts, dans les cornues des chimistes ou l’abîme des mers, en conduisent l’étude à travers la série ascendante des plantes et des animaux jusqu’à l’homme, la décrivent et l’analysent dans son corps, ses os, ses muscles, ses humeurs, le dissèquent dans ses nerfs et son esprit ; si, abandonnant ici l’homme individu, on passe à la série des sciences qui étudient l’être social, de l’ethnographie à l’histoire, on verra que ces deux ordres de connaissances, les plus importantes, sans aucun doute et celles auxquelles s’attache l’intérêt le plus prochain, se terminent en un point où ils se joignent : dans la notion de l’individu social, dans la connaissance intégrale, biologique, psychologique de l’individu digne de marquer dans la société, constituant lui-même par ses adhérents et ses similaires, un groupe noble, propageant dans son ensemble particulier ou dans l’ensemble total, ces grandes séries d’admirations, d’entreprises, d’institutions communes, qui forment les États et agrègent l’humanité. » Et plus loin : « Dans l’ethnopsychologie des littérateurs, dans la physiologie biographique des héros, ces hommes sont mis debout, analysés et révélés par le dedans, décrits et montrés par le dehors, reproduits à la tête du mouvement social dont ils sont les chefs, érigés, avant leurs exemplaires, un et plusieurs, individus et foule, en des tableaux qui, basés sur une analyse scientifique nécessitant le recours à tout l’édifice des sciences vitales, et sur une synthèse qui suppose l’aide de toute la méthode historique et littéraire moderne, peuvent passer pour la condensation la plus haute de notions anthropologiques que l’on puisse accomplir aujourd’hui. » Voilà ce qu’Émile Hennequin eût fait pour notre temps. […] C’est par là que ces animaux — les Belges me pardonnent ce terme scientifique — se montrent réels et redoutables, en tant que singes, et parfaitement irréels et redoutables, en tant qu’hommes. […] Si nous comparons la durée relativement courte du développement de la civilisation à celle des temps préhistoriques ; si, comme le remarque le grand Büchner, nous observons qu’une portion restreinte du globe se prépare à ce développement ; si nous songeons que la vitesse du progrès s’accroît au fur et à mesure de sa continuité ; si nous ne perdons pas de vue qu’au milieu de notre vie raffinée, subsistent encore, en nombre considérable, les impulsions et les instincts grossiers de notre passé barbare, et que le struggle for life, dont le caractère sauvage s’est transmis des animaux à nous, fait rage, toujours, parmi les hommes ; alors nous reconnaîtrons que nous sommes à l’aurore de la civilisation et que nous n’avons parcouru qu’une petite partie du chemin de lumière ouvert devant nous. […] Les gardes en sont en soie jaune, d’un inexprimable jaune et répètent le vol du crépusculaire animal : Abeille de la brune, au falot découpage. […] La chauve-souris est un animal inquiétant, hybride, monstrueux, désorbité et repoussé des oiseaux qui lui veulent des plumes, et des fauves qui la voient s’envoler.

888. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre II. La perception extérieure et l’éducation des sens » pp. 123-196

« Au bout de six mois, neuf mois, la sensibilité avait beaucoup augmenté, mais l’animal ne reconnaissait pas encore l’endroit où on le pinçait. Après un an, il a parfaitement conscience de l’endroit où on le pince, et il se retourne pour mordre l’instrument. » On voit ici la preuve que l’expérience doit intervenir pour que l’animal puisse situer ses sensations.

889. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CLe entretien. Molière »

ces gaietés triviales semblables à notre horrible fête du carnaval et à nos promenades ironiques du bœuf gras dans Paris, où le peuple jouit cruellement de l’agonie de l’animal qu’il va frapper, le paraissent inspirer. […] J’ai vu une mère de famille, en rentrant dans sa maison après un assez long voyage, se dérober aux empressements de son mari et de trois filles charmantes, pour prodiguer ses caresses à un chien favori, vilain animal dont elle faisait ses délices.

890. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1885 » pp. 3-97

Partout l’abandon de la ruine, et comme spécimen de la vie vivante dans toute cette pierre morte, quelques vieillards desséchés, quelques jaunes enfants, des chats maigres : une pauvre et rare création d’êtres et d’animaux bancroches. […] Dimanche 6 décembre Est-ce que chez nous autres, les humains, le chagrin de la perte de ceux que nous aimons, en dépit de tous nos simulacres de désespoir, et de toutes nos belles phrases, n’aurait rien du sérieux du chagrin des animaux, attachés à leur maître.

891. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1892 » pp. 3-94

Jeudi 21 avril C’est étonnant comme les animaux, même un peu sauvages, quand ils souffrent, cherchent à se rapprocher de l’homme, et à obtenir un peu de sa commisération. […] » Et l’Anglais demeurait au diable de Crystal Palace, près duquel gîtait Carrière, qui répondait imperturbablement : « Oh, je prendrai un cab à la petite place de voitures, qui est à côté. » Et il revenait à pied, et rentrait chez lui, tant c’était loin, à quatre heures du matin… « Ce qui m’a sauvé, jette-t-il, en manière de péroraison, c’est qu’il y avait chez moi, dans ma jeunesse, beaucoup d’animalité, de force animale. » Il me confessait qu’à Londres, il avait eu, tout le temps, un sentiment d’effroi du silence des foules.

892. (1907) Le romantisme français. Essai sur la révolution dans les sentiments et dans les idées au XIXe siècle

Pourquoi est-il devenu le malheureux « animal politique ?  […] La fatigue de vivre est une maladie aussi vieille que la civilisation, peut-être que la première apparition de la conscience chez l’animal humain. […] Le spectacle de cet animal qui reçoit les coups paisiblement et qui pleure, quand il voit frapper, est d’une tristesse où il y a de l’ignoble. […] Mais qu’il s’avise, parce qu’il s’est échaudé, d’avoir violé quelque loi sans laquelle les hommes ne pourraient former société, non, je ne crois pas que les inductions de ce jeune animal fassent un tel bond. […] Je te le dis un gaillard qui spécule, c’est un animal que quelque malin génie promène en rond sur une lande aride, quand tout autour s’étendent de beaux pâturages verts !

/ 1173