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435. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame, secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. »

Au sortir de là et sa démission obtenue, le roi avait nommé M. de Marca, un savant homme, un ancien magistrat devenu homme d’Église, et qui mourut brusquement dans le temps même où il recevait ses bulles : on se rabattit alors à messire Hardouin de Péréfixe, ancien précepteur du roi, écrivain assez agréable dans sa Vie de Henri le Grand, assez instruit, assez bonhomme, mais sans caractère, sans élévation d’âme ni aucune dignité extérieure : il ne fut jamais au niveau de sa haute position, et il encourut en plus d’un cas le ridicule. […] Un jour, peu d’années avant sa mort, on lui annonce, à l’archevêché de Paris, qu’un vieux prêtre tout brisé par l’âge est à la porte du palais, qu’il demande à le voir, et se dit un de ses anciens amis, venu exprès à Paris pour lui faire un dernier adieu : c’était le curé de Courbépine, du diocèse de Lisieux. […] À peine rentré en faveur auprès du roi, il avait été nommé, lui le plus jeune et le moins ancien des archevêques, à la présidence de l’Assemblée du Clergé ; et l’on peut dire que ce fut désormais une de ses fonctions habituelles que de présider cette illustre Assemblée en chacune de ses sessions ordinaires ou extraordinaires. […] Ariste, bien nommé, homme de mérite, qui avait longtemps servi sous l’ancien secrétaire d’État Brienne. […] Jacquinet, ancien élève de l’École normale.

436. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Le mariage du duc Pompée : par M. le comte d’Alton-Shée »

Seul des anciens amis d’Herman, il a été l’un des témoins de son mariage, et il ne l’a pas perdu de vue depuis. M. de Noirmont est un personnage bien vrai, et qui nous rappelle plus d’un profil connu : « Né avant 89, d’une ancienne maison, mais abandonné à lui-même dès l’enfance, libre par conséquent de préjugés traditionnels, il a assisté avec indifférence, presque avec joie, à la chute de la vieille société. […] Mlle Pompéa a par hasard appris du tapissier chargé de meubler l’hôtel du comte, et qui se trouve être le sien, qu’il est de retour en France, qu’il habite à Maran aux environs de Fontainebleau, et elle s’est mise en route sur l’heure pour le revoir : elle arrive, accompagnée d’une vieille cantatrice, la signora Barini, ancien contralto qui a eu ses beaux jours, une manière de duègne très-peu duègne, une utilité, un embarras, le meilleur cœur et la meilleure langue de femme, baragouinant un français italianisé et jargonnant à tue-tête. […] Non, ce n’est point dans la chambre clandestine, toute pleine encore des anciens parfums et où tout est piège, qu’Herman ira sceller et consommer la rupture ; c’est chez lui, en présence de sa femme, près de son enfant, au centre de ses affections, sur ce terrain pur et solide, qu’il devra revoir Pompéa et rester invulnérable sous ce regard enflammé qui va tenter de le ressaisir. […] S’il faut être infidèle, c’est une infidélité nouvelle qu’il préférera à une ancienne, et Pompéa vient d’insulter à cette nouveauté d’infidélité.

437. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire de la Grèce, par M. Grote »

Je décris les temps plus anciens séparément, tels qu’ils ont été conçus par la foi et par le sentiment des premiers Grecs, et tels qu’ils sont connus seulement au moyen de leurs légendes, sans me permettre de mesurer la quantité, grande ou petite, d’éléments historiques que ces légendes peuvent renfermer. […] C’est ainsi que nos anciennes chansons de Geste, où figurent Charlemagne et Alexandre, n’apprennent rien sur les héros mêmes ni sur l’état de la société de leur temps, et elles ne seraient propres qu’à égarer, si on les interrogeait dans une telle pensée de recherche ; mais elles nous représentent avec une vérité naïve les mœurs de l’âge féodal où les trouvères mirent en œuvre ces anciens canevas et les reprirent à l’usage de leurs contemporains. […] D’ingénieux et savants disciples de Wolf poussèrent à bout les conséquences de ce système négatif et prétendirent ne laisser aucun coin de refuge à l’ancienne croyance9. […] L’intervention de Pisistrate présuppose, au contraire, un certain agrégat ancien et connu à l’avance, dont les principaux traits étaient familiers au public grec, bien que, dans la pratique, bon nombre de rhapsodes pussent s’en écarter souvent. […] Egger, Mémoires de Littérature ancienne, 1852, p. 84.)

438. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « CHRISTEL » pp. 515-533

Après quelques légers changements qu’elles firent exécuter, la distribution du bureau se présentait ainsi : la pièce, avec deux fenêtres, n’avait point d’entrée par la rue ; la porte extérieure était celle de l’ancienne allée, dont la cloison, du côté de la chambre, avait été à moitié abattue, et où l’on avait placé une grille de bois à travers laquelle se faisaient les échanges de lettres. […] Elles ne sortaient pas, elles n’avaient fait aucune connaissance dans la ville ; une ancienne domestique amenée avec elles les servait. […] C’était une des plus anciennes et des grandes familles du pays. […] non plus à ses goûts anciens, à ses gracieux amours de jeune fille, à ses lectures chéries (tout cela était trop insuffisant et dès longtemps flétri pour elle), mais à des sentiments plus mâles et plus profonds, comme à des ressources désespérées, — à son culte de la patrie, par exemple. […] Son mal réel l’obligeant à garder le repos, on ne se tenait plus dans la pièce du devant ; une personne qu’Hervé avait indiquée, une ancienne femme de charge, capable et sûre, y passait le jour, à des conditions modiques, et, tout en suivant son travail d’aiguille, répondait aux venants.

439. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Pensées, essais, maximes, et correspondance de M. Joubert. (2 vol.) » pp. 159-178

Joubert fut en son temps le type le plus délicat et le plus original de cette classe d’honnêtes gens, comme l’ancienne société seule en produisait, spectateurs, écouteurs sans ambition, sans envie, curieux, vacants, attentifs, désintéressés et prenant intérêt à tout, le véritable amateur des belles choses. […] Joubert, c’était un Athénien touché de la grâce socratique : « Il me semble, disait-il, beaucoup plus difficile d’être un moderne que d’être un ancien. » Il était surtout un ancien en ce qu’il avait le sentiment calme, modéré ; il ne voulait pas qu’on forçât les effets, qu’on appuyât outre mesure. […] Cette fille de l’ancien ministre M. de Montmorin, échappée pendant la Terreur au sort du reste de sa famille, et qui trouva grâce à cause de son abattement et de sa pâleur, était un de ces êtres touchants qui ne font que glisser dans la vie et qui y laissent une trace de lumière. […] C’est dans le fond des esprits que sont les littératures. » Aussi, lui qui sent si bien les anciens, l’Antiquité de Rome, de la Grèce, et celle de Louis XIV, il ne nous demande pas l’impossible ; il nous dira de la sentir, mais non point d’y retourner. […] Il exige de l’agrément et une certaine aménité, même dans les sujets austères ; il réclame du charme partout, même dans la profondeur : « Il faut porter du charme dans ce qu’on approfondit, et faire entrer dans ces cavernes sombres, où l’on n’a pénétré que depuis peu, la pure et ancienne clarté des siècles moins instruits, mais plus lumineux que le nôtre. » Ces mots de lumineux et de lumière reviennent fréquemment chez lui et trahissent cette nature ailée, amie du ciel et des hauteurs.

440. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Au milieu des jugements divers et contradictoires, plus souvent rigoureux qu’indulgents, qu’a provoqués la littérature de l’ancien Empire, la critique d’alors a toujours été exceptée, et elle a laissé une tradition de haute estime. Tâchons du moins que la critique littéraire, sous le jeune et nouvel Empire, ne paraisse pas trop au-dessous de ce qu’elle était sous l’ancien. […] Ils étaient reconnaissants à l’abbé Barthélemy de tout ce qu’il leur avait appris, en quelques jours de lecture, sur ce monde grec et sur cette société ancienne dont on parlait sans cesse, et où il était donné à bien peu dès lors de pénétrer directement. […] Mais, en y passant, il ne s’y acclimata jamais, et lorsqu’il parlera des Jésuites, lui si modéré d’ailleurs, il aura toujours un coin de raillerie et d’antipathie qui se ressentira de l’ancien élève des Oratoriens et de l’ami de M. de Choiseul. […] Lors de la disgrâce du duc de Choiseul, et quand on retira à cet ancien ministre la charge de colonel général des Suisses, Barthélemy envoya sa démission de secrétaire général ; il la maintint malgré les efforts qu’on fit pour l’amener à se rétracter, et on lui laissa encore, sans qu’il le demandât, une pension de 30 000 livres sur cette place à laquelle il renonçait.

441. (1824) Discours sur le romantisme pp. 3-28

Par une insigne faveur, Sa Majesté a voulu qu’au même moment où la France entière célébrerait, d’année en année, l’époque d’un retour qui combla tous ses vœux et répara tous ses maux, l’Institut consacrât, par une séance solennelle, le souvenir de cette heureuse réorganisation, qui replaça les Académies sur leurs anciens fondements, sans rompre ni relâcher le nouveau lien qui les unissait. […] La querelle des anciens et des modernes était déjà engagée depuis longtemps, et Boileau gardait encore le silence. […] Quoi qu’il en soit, ils puisèrent leurs faits dans le chaos des anciennes chroniques ou dans le fatras des vieilles légendes ; ils demandèrent leur merveilleux à la féerie, à la sorcellerie, à la magie noire ; ils ne dédaignèrent pas même l’absurdité des contes les plus populaires, et ils offrirent à l’admiration des hommes ce qu’en tout autre pays on n’exposerait pas impunément à la moquerie des enfants. […] Ce sont, disent-ils, les écrivains modernes qui ont imité les auteurs anciens, au lieu de créer comme eux ; qui leur ont emprunté, avec les formes de leurs poèmes, le fond même de leurs sujets et de leurs idées, au lieu de traiter, sous des formes différentes, des sujets et des idées appartenant à l’histoire, à la religion, aux mœurs des nations chrétiennes. […] Une littérature empruntée aux anciens, disent-ils, ne peut être vraie pour les modernes.

442. (1900) La province dans le roman pp. 113-140

* *  * Mais ce n’est pas assez d’observer que ce sentiment dédaigneux du Parisien pour la province est général : il faut ajouter qu’il est ancien, chez nous, et qu’il a une histoire. […] Je ne justifie aucunement le dédain de nos anciens auteurs envers la province, qui fut toujours pour la grandeur du pays, grandeur matérielle et grandeur morale, ce que les masses de l’infanterie sont pour la force d’une armée : l’élément principal, le corps discipliné, pressé, obscur, qui porte le poids de la bataille et ne connaît de la victoire que le repos qui la suit. […] Elle est ancienne. […] L’ancien mépris a été remplacé par un sentiment tout contraire. […] Elles deviennent négligeables, tant à cause de ce que j’appellerai l’usure littéraire d’un pareil moyen, que pour cette autre raison qu’il est tiré de l’histoire ancienne plus que de la réalité présente.

443. (1911) Visages d’hier et d’aujourd’hui

Il se promena par le temps et l’espace, amusé des civilisations anciennes ou lointaines. […] Il étudia l’ancien français. […] Autant, remarque-t-il, demander si le système métrique est vrai et si les anciennes mesures sont fausses. […] Elle est fort ancienne et remonte à une époque où la Vierge multipliait ses doux miracles. […] Les philosophes — ou, du moins, les anciens philosophes — sont cantonnés dans leurs études particulières.

444. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 339-340

Son Traité de la Géographie ancienne peut servir à l’intelligence de l’Histoire : mais ses Remarques sur la Langue Françoise sont aujourd’hui plus qu’inutiles. […] Je suis Gentilhomme Normand, D’une ancienne & pauvre Noblesse, Vivant de peu tranquillement Dans une honorable paresse.

445. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 404-405

Le Recueil de ses Ouvrages renferme des Traductions, des Traités, des Dissertations, des Commentaires, & par-tout ce Savant répand avec profusion les connoissances qu’il avoit puisées chez les Anciens. […] Nous avons encore de Budé des Commentaires sur les Langues Grecque & Latine, un Dictionnaire Grec, estimé encore aujourd’hui des Savans, & un Traité de Asse, où il rappelle presque toutes les monnoies des Anciens.

446. (1874) Premiers lundis. Tome I « Deux révolutions — I. L’Angleterre en 1688 et la France en 1830 »

Ainsi, sur un point ou sur un autre, la France avait toujours avancé depuis 89 ; et, d’une autre part, malgré bien des tentatives rétrogrades, rien de ce qu’il y avait d’essentiel dans l’ancien régime n’avait repris dans la nation le même rang qu’autrefois. Les Concordats, la création d’une noblesse d’empire, la réhabilitation de l’ancienne noblesse, les dons aux couvents, le milliard d’indemnité, tout cela n’avait refait ni un clergé Corps politique, ni une aristocratie féodale, ni une grande propriété ; la loi d’aînesse, dernière conséquence du système, n’aurait pas eu plus d’efficace20 . […] Napoléon, par ses projets fabuleux de reconstruire une monarchie à la Charlemagne} servit la cause de l’ancien régime.

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