C’est ainsi que nous contribuons au salut les uns des autres… Ne croyez pas qu’il suffise d’être pauvre et souffrant pour être sauvé ; il faut supporter patiemment cet état pour l’amour de Dieu. […] C’est dans le livre même qu’il faut voir ces modèles complets qui ne restèrent point à l’état d’idée, et qui se réalisèrent avec plus ou moins de gravité et de douceur dans ces figures encore charmantes et légèrement distinctes sous le voile, Mme du Pérou, Mme de Glapion, Mme de Fontaines, Mme de Berval. […] Une lettre de Mme de Maintenon à Mme de Fontaines, maîtresse générale des classes, du 20 septembre 1691, expose cet état périlleux et cette crise ; elle sent d’ailleurs et convient avec sincérité que c’est elle-même qui a introduit le mal, et elle prend tout sur son compte : La peine que j’ai sur les filles de Saint-Cyr ne se peut réparer que par le temps et par un changement entier de l’éducation que, nous leur avons donnée jusqu’à celle heure ; il est bien juste que j’en souffre, puisque j’y ai contribué plus que personne, et je serai bien heureuse si Dieu ne m’en punit pas plus sévèrement. […] Aujourd’hui, avec le nouvel état du monde, dans une société plus également morale en son milieu, nous qui ne sommes pas près de Versailles (dans le sens où l’était Saint-Cyr), il nous semble qu’il est quelquefois permis de se récréer d’un chant, d’une fleur, d’une joie d’imagination, mêlée aux choses du cœur, dans une éducation même de l’ordre le plus moral.
Les lettres de Joubert à cette époque présentent avec une grande vérité l’état de cette armée d’Italie, si aguerrie, si éprouvée, et qui, avant ses jours d’éclat et de triomphe, eut à supporter tant de privations, de souffrances obscures et de misères, — l’école, après tout, du bon soldat23. […] Et moi qui ne sens rien faiblement, je m’affecte d’autant plus profondément que dans notre état il faut avoir l’art de cacher aux autres ses affections particulières. […] Mais je vous assure que je désire n’avoir plus occasion de guerroyer, et encore une fois que le repos seul est l’état que je désire et dont j’ai besoin. […] Je me risquerai donc, à propos de cette singulière modestie de Joubert, à rappeler la pensée d’un moraliste de l’école de La Rochefoucauld : Une modestie obstinée et permanente est un signe d’incapacité pour les premiers rôles, car c’est déjà une partie bien essentielle de la capacité que de porter hardiment et tête haute le poids de la responsabilité ; mais de plus cette modestie est d’ordinaire l’indice naturel et le symptôme de quelque défaut, de quelque manque secret ; non pas que l’homme modeste ne puisse faire de grandes choses à un moment donné, mais les faire constamment, mais recommencer toujours, mais être dans cet état supérieur et permanent, il ne le peut, il le sent, et de là sa modestie qui est une précaution à l’avance et une sorte de prenez-y-garde.
On peut refaire ainsi des figures de poètes ou de philosophes, des bustes de Platon, de Sophocle ou de Virgile, avec un sentiment d’idéal élevé ; c’est tout ce que permet l’état des connaissances incomplètes, la disette des sources et le manque de moyens d’information et de retour. […] Quoi qu’il en soit, on arrivera avec le temps, j’imagine, à constituer plus largement la science du moraliste ; elle en est aujourd’hui au point où la botanique en était avant Jussieu, et l’anatomie comparée avant Cuvier, à l’état, pour ainsi dire, anecdotique. […] Il s’y rencontre des linéaments essentiels qui sont souvent masqués, pour être trop condensés ou trop joints ensemble, dans le grand individu ; le fond se retrouve, chez les autres de son sang plus à nu et à l’état simple : la nature toute seule a fait les frais de l’analyse. […] Par moments je croyais revoir en elles l’enthousiasme, la chaleur d’âme, quelques-unes des qualités paternelles premières à l’état pur et intègre, et, pour ainsi dire, conservées dans de la vertu6.
Bossuet ne le dit pas, mais Salomon, tel qu’il nous le montre dans son faste oriental et dans sa plénitude de jouissance, est de tous les saints rois celui qui s’est le plus accommodé de l’état présent, de la forme mosaïque tout acquise, qui s’y est le plus installé comme à demeure, en y mêlant les délices, et qui s’est le moins inquiété de Jésus-Christ. […] Même dans l’absence des prophètes et à leur défaut, « tout l’état de la nation est prophétique. » Ô le sublime et incomparable interprète, non-seulement de n’être jamais en peine, mais de trouver à volonté, d’avoir à son service de telles explications et appellations pour ce qui caractérise et distingue un peuple qui ne serait pour d’autres que le plus crédule et le plus superstitieux des peuples ! […] Ici de belles pages plus générales viennent consoler, cependant, de cette histoire allégorique et mystique si prolongée, et qui nous paraît, malgré tout, un peu dure : c’est un coup d’œil jeté sur l’état du monde avant la venue du Messie, sur la préparation graduelle des esprits à le recevoir. […] Si l’on ne voit pas, dit-il, « que tous les temps sont unis ensemble, que la tradition du peuple juif et celle du peuple chrétien ne font qu’une seule et même suite, que les Écritures des deux Testaments ne font qu’un même corps et un même livre » ; si on n’y découvre pas « un dessein éternel toujours soutenu et toujours suivi » ; si on n’y voit pas « un même ordre des conseils de Dieu qui prépare dès l’origine du monde ce qu’il achève à la fin des temps, et qui, sous divers états, mais avec une succession toujours constante, perpétue aux yeux de tout l’univers la sainte Société où il veut être servi, on mérite de ne rien voir et d’être livré à son propre endurcissement comme au plus juste et au plus rigoureux de tous les supplices. » A un moment l’orateur impatient, le prédicateur se lève : « Qu’attendons-nous donc à nous soumettre ?
Mon fils est dans un état qui ne me plaît point à moi, et pour d’autres raisons, mais qui peut lui convenir, et dans lequel, au fond, l’on n’a que les misères pour lesquelles les hommes sont faits. […] Le défaut de force dans les membres, l’impossibilité de dire : « Je vivrai dans toutes les situations où un homme peut vivre ; » cet assujettissement joint à l’immense difficulté de soutenir une femme, des enfants, sans revenus fixes, sans autres moyens que des débris à recueillir à des époques inconnues, sans état (même très-longtemps sans papiers et sans droits de citoyen), sans dettes, sans aucune intrigue, surtout aussi avec le sort contre soi, avec ce qu’on appelle du malheur (excepté la faveur marquée du sort en 1798 et en quelques autres circonstances rares), tout cela a rendu ma vie morale laborieuse et triste. […] « Il ne faut pas dire : « Il n’y a pas eu d’hommes d’État dans tel pays, car s’il s’y en était trouvé, ils se seraient élevés comme Cromwell, lequel a prouvé, ainsi que d’autres, qu’il n’était pas nécessaire d’être né sur le trône. » Cela n’était pas nécessaire pour lui, mais l’était pour d’autres qui, moins en état de s’élever comme lui, ou plus scrupuleux sur le choix des moyens, sont restés simples particuliers. […] À plus forte raison des livres dont le sujet et la manière conviennent très-peu au xixe siècle français ne peuvent-ils faire sensation dans le public… « S’il me survient assez tôt des circonstances qui me mettent en état de vivre, je me féliciterai fort d’être resté étranger au commérage du monde ; de n’avoir point eu de rapport en général avec ceux pour qui vivre, c’est être en place ; de n’avoir vu que de loin les meneurs :de n’avoir pas ajouté à mes misères leurs vaines passions et de n’avoir pas mis la main à leur petit feu d’artifice… (Ici une lacune.)
Le cerveau n’étant jamais tout d’un coup changé dans sa masse entière, il reste toujours dans l’état nouveau quelque chose de l’ancien. […] Lorsque, dans l’état nouveau de la conscience, il reste encore un souvenir de l’ancien état, l’être s’apparaît toujours à lui-même comme un ; s’il y a une scission plus complète, il semble scindé en deux et peut alors attribuer à un autre ce qu’il a fait lui-même. […] Nous ne sentons pas vraiment lorsque toutes les impressions extérieures restent à l’état de dispersion : c’est alors le rêve de la sensation plutôt que la sensation même.
Aucune morale ne se rattache d’ailleurs à une pareille imitation : bien au contraire ; car en voyant le tableau de notre état, ou nous tombons dans le désespoir, ou nous envions un état qui n’est pas le nôtre.
Cet état incohérent et stérilement fécond de la littérature américaine nous est revenu à la mémoire depuis que nous étudions2 l’état humiliant de la littérature française.
L’invention des symbolistes consiste peut-être à ne pas dire quels sentiments, quelles pensées ou quels états d’esprit ils expriment par des images. […] On soupçonnait, depuis Homère, qu’il y a des rapports, des correspondances, des affinités entre certains sons, certaines formes, certaines couleurs et certains états d’âme. […] Mais supposez en même temps que ces impressions soient très fines, très délicates et très poignantes, qu’elles soient celles d’un poète un peu malade, qui a beaucoup exercé ses sens et qui vit à l’ordinaire dans un état d’excitation nerveuse. […] Vous éprouvez réellement qu’un paysage n’est, comme on l’a dit, qu’un état de conscience. […] Cette tête lui parle : « J’étais en état de péché mortel quand tu m’as tué.
Toujours est-il que tel était l’état familial, l’état ethnique de ses parents. […] Ai-je besoin de vous citer des textes que vous avez certainement dans le souvenir, seulement, bien entendu, à l’état confus ? […] Je ne m’étendrai pas en considérations sur ce point ; je crois bien, seulement, que les esprits tout à fait supérieurs le sont déjà à l’état latent, en quelque manière, à l’état inconscient surtout, dans leur enfance, et qu’une éducation qui ne peut être faite que pour une moyenne, qui vise toujours une moyenne (Nietzsche a des considérations très intéressantes là-dessus), déplaît comme fatalement à l’homme qui sera plus tard un homme supérieur. […] Ainsi, par exemple, il nous dira : Homme qui femme prend se met en un état Que de tous, à bon droit, on peut nommer le pire : Fol était le second qui fit un tel contrat. […] Ses dilapidations à lui-même, celles de sa femme très probablement, un ménage en complet désordre, tout cela avait très rapidement mis les choses en bien mauvais état.
Par une timidité qui est évidemment un effet de son état pathologique. […] Parce que, affirme-t-il, l’égalité est mieux sauvegardée dans cet état primitif. […] Dans quel état, mon Dieu ! […] Le médecin Thierry, mon ancien ami, vint me voir et m’éclaira sur mon état. […] Mais en quelque état que ce soit, il faut toujours presser le bas-ventre pour la faire sortir.
Le parlementaire, conservateur par état, aurait horreur de renverser l’ordre établi. […] Sur les bénéfices s’élèvent beaucoup de grandes fortunes, encore plus de fortunes moyennes, et les capitaux ainsi formés cherchent un emploi. — Justement, voici que les plus nobles mains du royaume s’étendent pour les recevoir, nobles, princes du sang, états provinciaux, assemblées du clergé, au premier rang le roi, qui, étant le plus besogneux de tous, emprunte à dix pour cent et est toujours en quête de nouveaux prêteurs. […] Extrait des états dressés par les contrôleurs généraux, I, 175, 205. — Rapport de Necker, I, 376. — Aux 206 millions, il faut ajouter 15 800 000 pour les frais et intérêts des anticipations. […] Le Compère Mathieu, par Dulaurens (1766). « Nous ne devons nos malheurs qu’à la façon dont nous avons été élevés, c’est-à-dire à l’état de société dans lequel nous sommes nés. Or puisque cet état est la source de tous les maux, sa dissolution ne peut être que celle de tous les biens. » 585.