La science ne fera de rapides conquêtes que quand des bénédictins laïques s’attelleront de nouveau au joug des recherches savantes et consacreront de laborieuses existences à l’élucidation du passé.
Hypothèse explicative : existence chez Victor Hugo d’une surabondance de mots restreignant le nombre des idées sensuelles, des percepts, et créant par contre des idées verbales, des concepts, ayant les caractères du mot même, dont elles sont le retentissement intérieur.
Elle nous montre, dans la faculté de comprendre, une annexe de la faculté d’agir, une adaptation de plus en plus précise, de plus en plus complexe et souple, de la conscience des êtres vivants aux conditions d’existence qui leur sont faites.
Il a ragaillardi cette belle société, qui n’en avait pas déjà un si grand besoin, par cette petite invasion romano-sicilienne ; avec ces Olympe, ces Marie et ces Hortense, il y a semé d’éclatantes variétés de grandes existences, et l’a sillonnée de fredaines imprévues et bizarres. […] Renée a donc su rendre, par un agréable enchaînement de citations, d’extraits et d’observations rapides, l’existence et le caractère de la comtesse de Soissons, de la duchesse de Mazarin, de la duchesse de Bouillon ; il nous a introduits dans cette compagnie choisie de l’hôtel de Nevers, dans ce mystérieux ménage « qui joignait les grâces de Mortemart61 et l’imagination de Mancini ». […] Le duc de Nivernais était, en effet, plus propre que personne à servir d’exemple ; à une époque où l’on se piquait avant tout d’être, non pas féroce, mais ce qu’on appelait un homme aimable et même un petit-maître, et en l’étant lui-même, il n’avait rien négligé de ce qui orne intérieurement l’esprit, il se préparait à devenir insensiblement raisonnable ; il savait toutes les langues vivantes, il lisait les auteurs étrangers et en tirait des imitations faciles ; il ne songeait qu’à embellir, à égayer honorablement une grande et magnifique existence, et, sans le savoir, il ménageait à son âme des consolations imprévues pour son extrême vieillesse, dans la plus violente crise sociale qui ait assailli les hommes civilisés.
Depuis huit ou neuf ans que je la connais, vivant presque toujours auprès d’elle, m’attachant à elle chaque jour davantage, je me suis fait de cette société une partie nécessaire de mon existence : l’ennui, la tristesse, le découragement m’accablent dès que je suis loin d’elle. […] À quarante ans il se sentait vieux et usé, comme s’il eût assez de ce petit nombre d’années pour dévider l’existence infinie d’un Sophocle, d’un Racine ou d’un Voltaire. […] Pendant cette absence, son amie sollicite et obtient du roi et de la reine de France une subvention qui assure son existence.
Son droit à l’existence n’est qu’une application de ta liberté de penser et d’écrire. […] Ce fut, du reste, leur seul triomphe : la pièce tomba, et il n’est même pas certain que Flaubert en ait soupçonné l’existence. […] Sainte-Beuve le compare à ces épouses acariâtres qui abusent de leur vertu pour empoisonner par des scènes perpétuelles l’existence de leurs maris. […] Il aime tant la vie qu’une existence unique ne lui suffit pas et qu’il croit à la métempsycose. […] Il prétend éliminer de l’art ce qui en assure la valeur et l’existence même.
Le combat pour l’existence est plus acharné que jamais, la victoire plus insolente, la défaite plus inexorable. […] L’existence paisible de M. […] de quelle merveilleuse existence puis-je être douée si tu as la simplicité de me croire, si tu me défends contre ta raison ! […] Dans Madame Bovary, je n’ai eu que l’idée d’un ton, cette couleur de moisissure de l’existence des cloportes. […] C’est cela, je crois, qui, dans cette existence obscure tout unie et si proche de nous, semble majestueux et pur comme l’antique.
L’une d’elles ressemble encore un peu à une plaisanterie, puisqu’elle consiste à reconnaître une certaine existence au non-être. […] Celui-ci use des droits du romancier pour attribuer à ses jeunes hellénistes des doutes sur l’existence d’Homère qui n’apparaîtront qu’au siècle suivant chez Jules-César Scaliger. […] Au besoin, il eût lui-même ruiné les preuves classiques de l’existence de Dieu, comme le fera radicalement l’auteur de la Critique de la Raison pure. […] Il menait une existence modeste et frugale, et, pour vivre, il polissait des verres de lunettes. […] Il doute fort de l’immortalité de l’âme et de son existence distincte.
Il « ne s’aperçoit plus de son existence que par un profond sentiment d’ennui. » « Enfin, ne pouvant trouver de remède à cette étrange blessure de mon cœur, qui n’était nulle part et qui était partout (?) […] J’ai été aimé, trop aimé : l’ange qui m’environna de sa tendresse mystérieuse ferma pour jamais, sans les tarir, les sources de mon existence ( ?). […] Il est naturel que nous jouissions mieux de l’existence périssable lorsque, avertis de toute sa fragilité, nous la sentons néanmoins durer en nous. […] Les chapitres les plus agréables sont sans doute ceux qui « prouvent l’existence de Dieu par les merveilles de la nature ». Cela rappelle la première moitié du Traité de l’existence de Dieu de Fénélon, et c’est, à la fois, moins probant encore et infiniment plus riche de couleurs.
Il marchait la tête dans les étoiles, poursuivant son rêve, semblable à un enfant, qui ne soupçonne pas les difficultés de l’existence. […] L’écrivain mena encore pendant treize ans cette existence incohérente. […] mais il ne peut nous donner une seule heure comparable, en intensité d’existence, à une seconde de celles que nous venons de vivre. […] C’est un des mille drames par où se dénoue l’existence des marins. […] Il menait une existence modeste et habitait un appartement qui n’avait rien d’un palais.
Le dauphin de cette honorable maison, Jacquot, dit Tournebroche, est supposé conter candidement quelques particulatés de son existence. […] quelle preuve de l’existence de Dieu ! […] doux et monotone, et elle écrit : « C’est une existence qui coule à terre, qui filtre par ce tamis d’étoffe et de crin ! […] Il en établit, il en prouve l’existence. […] C’est qu’une société, à un moment quelconque de son existence, n’est pas un ramassis d’éléments rassemblés au hasard.
Claparède interrogea cinquante-quatre étudiants sur l’existence de cette fenêtre, devant laquelle ils passent tous les jours. […] D’autres, au contraire, ont assez de ressort pour mener une existence en partie double : la moitié des heures au jeu, l’autre aux affaires normales. […] Dire qu’on le supprimera, c’est affirmer plus fortement la nécessité de son existence. […] Non seulement ils ignorent l’ennui, mais les mille ennuis de l’existence passent sur eux sans déflorer leur jovialité. […] L’existence toute nue est un bonheur pour le Napolitain, parce qu’il est infiniment sobre, étant infiniment paresseux.
Et cette revue, en la fin de son existence, serait un exutoire pour son activité cérébrale. […] Je ne citerai que la censure théâtrale… Quant au bon marché de la vie, l’existence à Paris, et même en province, a presque décuplé depuis Louis-Philippe, en grande partie par la grande prépondérance donnée par le gouvernement à la société juive, et cela parallèlement à la diminution de la rente, à la baisse des fermages : les deux capitaux et les deux revenus des Français, qui ne sont pas juifs, qui ne sont pas tripoteurs d’argent. […] Oui, il montrerait la mère amenant l’enfant au couvent, et abrégeant les adieux par la hâte qu’elle a de se morphiner… Alors viendrait l’étude de l’élevage de la jeune fille, puis sa sortie, le jour où sa mère serait assassinée, puis sa rentrée au couvent : une existence qui n’aurait qu’un jour de la vie du monde. […] Alors Daudet me demandait quelles étaient mes convictions à ce sujet, et je lui répondais que malgré tout mon désir de retrouver mon frère, je croyais après la mort à l’anéantissement complet de l’individu, que nous étions des êtres de rien du tout, des éphémères de quelques journées de plus que ceux d’une seule journée, et que s’il y a un Dieu, c’était lui imposer une comptabilité trop énorme, que celle occasionnée par une seconde existence de chacun de nous. […] Dimanche 20 septembre Dans notre promenade en landau, il est amusant le regard de Daudet, fouillant pour sa « Caravane » toutes les maisons de paysans et de petits bourgeois, et cherchant à percer les existences qui sont derrière ces murs : « Oui, je les habite !
La perte de deux petites filles, l’existence avec un mari souffrant continuellement de ses blessures, et de la ruine d’une santé détruite par la campagne de Russie, faite tout entière, l’épaule droite cassée, et encore tout jeune ; tout ardent de vaillance, et tout irrité de ne pouvoir rentrer dans la vie militaire, de ne pouvoir accepter d’être l’aide de camp du roi, ainsi que le sont ses camarades D’Houdetot et De Rumigny, de ne pouvoir faire les campagnes d’Afrique… Puis veuve, avec une petite fortune en terres, aux fermages difficiles à recouvrer. […] Hier, à six heures, le fils de Popelin m’avait dit : « Il y a un petit mieux… ses crachats sanguinolents sont d’une meilleure nature… mais il n’y a pas à se le dissimuler, c’est un homme touché, bien gravement touché… et dont l’existence demandera à être entourée de grandes précautions. » Vendredi 20 mai Il n’y a plus qu’une chose qui m’amuse, m’intéresse, m’empoigne : c’est une conversation entre lettrés sympathiques, dans l’excitation d’un peu de vin, bu à dîner. […] Il parle, avec de l’amertume dans un coin de la bouche, de la longueur de sa vie, et des différents individus qui l’ont habité, disant qu’il est très sensible à la température, et qu’il ne retrouve de l’ancien Coppée, que les jours, où il fait la température de son ancien passé, et il s’écrie à propos des prétendus cent ans de son existence : « J’ai vu, j’ai éprouvé trop de choses, en un mot, j’ai eu trop de sensations ! […] Mais ce dîner, c’était l’hiver, où je ne voyais ma tante que pendant quelques heures, le jour de mes sorties, tandis que l’été, tandis que le mois des vacances était une époque, où ma petite existence, du matin au soir, était toute rapprochée de sa vie. […] Un mendiant, à l’esprit caustique, spirituellement méchant, qui avait été au collège avec les bourgeois les plus huppés de la ville, et qui au fait de leur vie privée dans les détails les plus intimes, en pleine rue, les interpellait avec une certaine éloquence, les blaguait, et obtenait la charité par l’intimidation, la terreur d’une divulgation des choses secrètes de leur existence.
Les plus anciennes générations, bien avant qu’il y eût des philosophes, ont cru à une seconde existence après celle-ci. […] Mais en quel lieu et de quelle manière se passait cette seconde existence ? […] Ils restent groupés dans cette seconde existence, et continuent à former une famille indissoluble. […] Dans l’opinion de ces générations anciennes, la femme ne transmettait ni l’existence ni le culte. […] Il croyait à leur existence, mais il aurait parfois voulu qu’ils n’existassent pas.
Cela lui donna « la conception de la fin languissante des existences et des choses, de l’immense effeuillement de tout ». […] L’ignorance est la condition nécessaire, je ne dis pas du bonheur, mais de l’existence même. […] Mais Robespierre n’avait aucune attache avec Catherine Théot, dont il ignorait probablement l’existence. […] Le peuple français reconnaît l’existence de l’Être suprême et l’immortalité de l’âme. […] Cela se conçoit : quand on croit à l’existence du monde extérieur, on est assujetti à de nombreuses obligations.
Durant son existence il en gardera la tragique empreinte. […] Rouart a deux amis, Ménalque et Gabriel, dont l’un, Ménalque, représente la vie aventurière, nomade, et l’autre, Gabriel, l’existence résignée et régulière. […] Elles nous apparaissent comme d’émouvantes monographies de races mourantes, figées dans un songe passé, résorbées dans une existence intérieure, silencieuse comme des logis clos. […] Puis, peu à peu, l’existence reprend son cours régulier, monotone et pacifique. […] Mais vous ne trouverez pas chez ce jeune homme des accents de douleur, des paroles d’affliction, l’atroce renoncement de la créature à l’existence ni les aspirations de celle-ci vers une vie chimérique.
En 1804, à la veille de l’Empire, causant avec lui aux Tuileries, pensant tout haut, exprimant son impatience des injustices de l’opinion parisienne à ce moment, son ennui des résistances qu’il éprouvait dans ses vues de la part même de quelques-uns de ses proches, le premier consul disait ces paroles qui renferment une trop haute et trop soudaine définition personnelle pour ne pas être recueillies : Au reste, moi je n’ai point d’ambition… (Et se reprenant :) ou, si j’en ai, elle m’est si naturelle, elle m’est tellement innée, elle est si bien attachée à mon existence, qu’elle est comme le sang qui coule dans mes veines, comme l’air que je respire. […] Amené à parler de la guerre, « de cet art immense qui comprend tous les autres », des qualités nombreuses qu’elle requiert, qui sont tout autres que le courage personnel, et qu’on ne se donne pas à volonté : Militaire, je le suis, moi, s’écriait Napoléon, parce que c’est le don particulier que j’ai reçu en naissant ; c’est mon existence, c’est mon habitude.
Caro a repris à fond et a exposé l’ensemble de cette existence et de cette doctrine singulière en son temps47. […] Ce sont ses mémoires à bâtons rompus, ses confessions : Je ne me suis laissé aller, dit-il, à composer de pièces et d’idées détachées ce recueil historique, moral et philosophique, que pour ne pas perdre les petits traits épars de mon existence ; ils n’auraient pas mérité la peine d’en faire un ouvrage en règle, et je ne donne à ce petit travail que des minutes très rares et très passagères, croyant devoir mon temps à des occupations plus importantes.
Ma première pensée en me livrant à l’étude des Pères de l’Église après le mariage de mes filles, a été la curiosité de savoir ce qu’ils avaient dit de l’âme, eux qui ne cherchaient point avec les mains cette âme dont l’existence immortelle rend l’homme excusable de croire que le monde tout entier a été créé exprès pour lui. […] Humble et patiente amitié, pensai-je, c’est ainsi qu’on t’oublie aux heures splendides de la jeunesse et de l’amour ; c’est ainsi que tu apparais, douce et consolatrice, vers le soir de la vie, quand la passion est morte et l’existence dénudée32.
Je ne sais s’il y en a qui n’auraient jamais voulu arriver à l’existence et vivre, je ne le crois pas ; mais ce que je sais bien, c’est qu’il y en a qui ne voudraient, à aucun prix, recommencer et revivre ; c’est assez pour elles d’une fois. […] Ils sont comme le sensible Virgile qui, dans son Élysée, nous montrant les essaims innombrables des âmes bourdonnantes, avides de se replonger dans le fleuve où l’on puise avec l’oubli du passé le désir et le principe d’une existence nouvelle, s’écriait par la bouche de son héros étonné et compatissant : « Quæ miseris lucis tam dira cupido !
Fontan » ; — bon Jovard (prenez bien garde de ne pas vous tromper et de ne pas prononcer Jobard), « il aurait plutôt nié l’existence de Montmartre que celle du Parnasse ; il aurait plutôt nié la virginité de sa petite cousine, dont, suivant l’usage, il était fort épris, que la virginité d’une seule des neuf Muses ; — bon jeune homme ! […] Il a en lui l’orgueil et les ambitions d’un Dieu : tantôt il voudrait faire rentrer dans sa propre nature et absorber en soi, sentir soi tout ce qu’il désire, et il se demande par moments si le monde n’est pas une ombre et si rien de ce qui n’est, pas lui existe ; tantôt il n’aspire, au contraire, qu’à sortir et à s’échapper de lui-même, à traverser les autres existences, à les revêtir et à les user par une suite d’incessantes métamorphoses.
Quelle portion d’existence t’est laissée, si ce n’est un point, ou s’il est quelque chose encore au-dessous d’un point ? Et cette existence que tu as si petite, elle est comme écrasée ; elle n’a rien en elle-même d’agréable ; mais elle est plus triste que l’odieuse mort.
Après cette peinture un peu embellie de sa vie, elle ajoute, revenant à son cher objet, à cette autre existence qui l’occupe : « Mais, sais-tu que tu me parles bien légèrement du sacrifice de la tienne, et que tu sembles l’avoir résolu fort indépendamment de moi ? […] Mme Roland, selon moi, si l’on veut bien laisser de côté en elle la Romaine et si on la sépare un moment des circonstances et des accidents extraordinaires qui ont compliqué sa destinée, nous a donné dans le récit de sa jeunesse, de sa propre éducation et de ce qu’elle enseignait à sa fille un tableau qui est comme l’image d’une quantité d’autres existences individuelles, et il faudrait retrancher peu de chose pour y trouver un modèle d’étude, de moralité, d’énergie bien dirigée, de santé de l’âme et de l’esprit mise à un excellent régime.
Que le maréchal de Saxe ait aimé plus ou moins les plaisirs, cela ne regarderait que lui, s’il n’en avait trop usé pour abréger une existence glorieuse et utile au pays. […] Il semblait être revenu par goût à l’existence du Nord, aux mœurs copieuses, aux habitudes et aux orgies paternelles.
Quoiqu’il n’y eût pas mis son nom, il ne défendait pas qu’on le devinât ; et comment ne pas le deviner tout d’abord quand il disait : « A les en croire, il suffirait désormais des caprices du Conseil aulique de Vienne ou du comité militaire de Paris pour qu’un injuste agresseur décidât de l’existence d’une nation de deux millions de braves, qui peut mettre plus de soldats sur pied que Frédéric le Grand n’en avait en montant sur le trône de Prusse. […] On sait seulement qu’au siège de Varna, après l’assaut donné, les Russes se trouvèrent en présence d’une seconde ligne de fortifications dont ils ignoraient l’existence ; mais une poignée de soldats de marine, ayant escaladé l’obstacle, traversèrent toute la ville et se firent massacrer jusqu’au dernier.
Son existence large, simple, négligemment tracée, s’idéalise à distance et se compose en massifs lointains, à la façon des vastes paysages qu’il nous a prodigués. […] Elle exhale enfin, elle exprime dans Novissima Verba ces quarts d’heure de navrante agonie, qui, comme une horrible tentation ou un avertissement salutaire, s’emparent souvent des plus nobles mortels au sommet de l’existence, et les inondent d’une sueur froide, rapetissés soudain et criant grâce, au sein des félicités et de la gloire !
Pour nous, il nous a semblé que dans ce grand dépouillement du passé, qui se fait de toutes parts et sur toutes les existences, c’était peut-être l’occasion de confier au public ce que depuis longtemps nous savions de la vie première, de l’enfance, des débuts et de l’éducation morale du poëte, notre ami, dont le nom se popularise de jour en jour. […] Victor Hugo, après avoir passé la belle saison de 1822 à Gentilly, près de la famille de sa fiancée, se maria au mois d’octobre, et dès lors son existence de poëte et d’homme fut fondée telle qu’elle nous apparaît aujourd’hui ; elle n’a fait, depuis ces neuf années, que monter et s’élargir sur cette base première.
” Puis, comme se reprochant ce retour vers l’existence : “Allons, Danton, se dit-il à haute voix, point de faiblesse ! […] J’en aurai mérité le châtiment ici-bas, je n’aurai pas protesté contre la peine, et j’ai toujours considéré les angoisses et les humiliations qui assiègent depuis dix ans le soir de mon existence comme une juste expiation d’une de ces témérités d’esprit par lesquelles l’homme le mieux intentionné ne doit jamais, selon l’expression des moralistes religieux, tenter la Providence quand il s’agit du sort et du sang d’un peuple.
Dans sa litière, où cette infatigable voyageuse passa la moitié de son existence, elle travaillait, conversait, dictait : vers ou prose, chant, drame ou récit, religion ou galanterie, mythologie ou réalité, toute forme et tous sujets lui étaient bons. […] Demandez-lui son rêve de bonheur : il tient tout entier dans la Facile existence d’un château des bords de Loire.
Dans notre maniere d’être actuelle, notre ame goûte trois sortes de plaisirs ; il y en a qu’elle tire du fond de son existence même, d’autres qui résultent de son union avec le corps, d’autres enfin qui sont fondés sur les plis & les préjugés que de certaines institutions, de certains usages, de certaines habitudes lui ont fait prendre. […] L’ame, indépendamment des plaisirs qui lui viennent des sens, en a qu’elle auroit indépendamment d’eux & qui lui sont propres ; tels sont ceux que lui donnent la curiosité, les idées de sa grandeur, de ses perfections, l’idée de son existence opposée au sentiment de la nuit, le plaisir d’embrasser tout d’une idée générale, celui de voir un grand nombre de choses, &c.
Je vérifierai donc soit l’existence de l’effet mécanique, soit celle de l’effet chimique, cela sera indifférent, puisque dans un cas comme dans l’autre la réponse doit être la même. […] Or la possibilité de la traduction implique l’existence d’un invariant.
Tout artiste les gêne, les bouscule, les soufflète, par le seul fait de son existence, et cela quel qu’il soit, jeune ou vieux, simple ou complexe, romantique ou réaliste, Barbey d’Aurevilly ou Zola, Manet, Roll ou Rodin, Hector Berlioz ou Richard Wagner. […] Sur ce dernier point, vous avez raison ; rien ne serait comparable à cet effet : quelque chose d’irremplaçable se briserait en moi et le soleil de mon existence serait obscurci, Dieu, dans sa bonté, m’épargnera un tel malheur et me laissera la joie que je trouve à susciter et à exécuter les plans de cet ami si cher, et à être pour lui, dans une petite proportion, ce qu’il est pour moi si infiniment.
Je n’ai pas eu le dessein d’écrire la vie entière de madame de Maintenon, et de la suivre dans son existence politique. […] Elle devait être féconde en jouissances nouvelles cette amitié vive qui, par une conversation animée, sans chicane et sans contrainte, multipliait sans cesse et variait à l’infini ses épanchements vers l’objet aimé, les lui offrait toujours avec intérêt et toujours à propos, provoquait les siens, lui communiquait une vie nouvelle, une existence inconnue, créait en lui un autre homme, avec des facultés jusque-là ignorées de lui-même, l’introduisait dans ce pays nouveau dont parle madame de Sévigné, où avec d’autres yeux il voyait d’autres choses et d’autres hommes, l’introduisait dans son propre cœur où il n’était jamais descendu, l’apprenait à s’étudier et à se connaître, lui donnait une conscience pénétrée du besoin de sa propre estime, une conscience qui lui rendit bon témoignage de lui et de son amie.
Il a vingt correspondances, dix amis intimes ; et chacun d’eux, sans fatuité pourrait se croire son premier objet : jamais, jamais on n’a eu tant d’existence, tant de moyens et tant de félicité. […] Turgot croit à une intelligence suprême et ordonnatrice du monde ; il croit à une continuation d’existence au-delà de cette vie ; il croit à une morale plus ferme et plus fondée en principe que ne le fait Condorcet.
L’abbé de Choisy a consigné les circonstances et les motifs de sa conversion dans quatre Dialogues sur l’Immortalité de l’âme, l’Existence de Dieu, la Providence et la Religion, qu’il publia dès l’année suivante (1684) : c’était ne pas perdre de temps. […] à peine ai-je eu prouvé à cet étourdi l’existence de Dieu, que je l’ai vu tout prêt à croire au baptême des cloches. » Pourtant la conversion de l’abbé de Choisy nous offre quelques traits aimables et sincères, et on n’a qu’à les relever dans le Journal qu’il fit, et qu’il publia bientôt après, de son voyage à Siam.
Songez à moi, monsieur, dans ce temps qui, si j’en crois ce qu’annonçaient les derniers mois où je vivais avec les vivants, doit être fécond en événements (la Guerre d’Amérique) ; songez à moi, dis-je, ou plutôt (car j’ai assez de preuves que vous daignez vous occuper de ma triste existence) rappelez-la à d’autres. […] Son témoignage tourne contre lui-même. — C’est ainsi que se termina à trente-cinq ans l’existence de cette Sophie que Mirabeau n’avait point enlevée, qu’il n’avait point délaissée non plus, mais qui s’était jetée vers lui par un mutuel transport, et que la force des choses avait pu seule lui arracher ; cette Sophie qu’il avait embrasée, qu’il avait enivrée d’émotions fortes, et à laquelle il laissa, en la quittant, la robe dévorante du Centaure, l’ardeur fatale qui ne s’éteint plus.
Faisant l’éloge de son mari et montrant que son existence est devenue inséparable du bien public : « C’est, dit-elle, le tison de Méléagre, auquel sa vie ministérielle est attachée. » Ce tison de Méléagre se retrouve en plus d’un endroit. […] Nos goûts sont changés, nos pensées sont affaiblies, le témoignage et l’affection d’un autre sont les seules preuves de la continuité de notre existence ; le sentiment seul nous apprend à nous reconnaître ; il commande au temps d’alléger un moment son empire.
Ou du moins, si l’instinct de la conservation y entra pour quelque chose, s’il se dit que c’était assez de sacrifice, s’il eut ce sentiment commun et naturel alors à toutes les grandes existences établies de surnager et de survivre, il l’eut certes moins nettement, moins sciemment que beaucoup d’autres maréchaux, et il ne méritait pas plus de blâme. […] Son existence toutefois s’en ressentira dans sa liberté d’action et son indépendance.
. ; enfin le pouvoir d’arrêter une administration dangereuse en lui refusant les subsides, c’est-à-dire l’existence même. […] En énumérant les cinq ou six grands sujets d’inquiétude qui préoccupent le pays (14 septembre), il y compte l’existence de quelques associations « dont les doctrines, encore confusément exprimées, semblent appuyer les réclamations des classes ouvrières, et vouloir étendre à la société une révolution purement politique ».
Hennin se retrouve toujours, il parvient, avec ces divers lambeaux de secours et de gratifications arrachées, à se former une modique existence. […] Quand 300 livres ne seraient rien pour vous, ne savez-vous pas qu’un bienfait en attire d’autres ; que, si vous vivez plus à l’aise, vous serez plus en état de travailler, de vous procurer une existence agréable ?
Il ne faut pas oublier que Marie-Antoinette avait quinze ans et demi, lorsqu’elle arrive en France, lorsqu’elle tombe dans ce royaume du papillotage et du Plaisir, parmi cette génération de Françaises qui semblent représenter la Déraison, dans l’agitation fiévreuse de leurs existences futiles et vides. […] Toutefois, quelque incomplet que soit le manuscrit, son existence démontre que les Mémoires annexés aux lettres n’ont pas été fabriqués, qu’ils ont été bien réellement écrits par la célèbre actrice, à la sollicitation d’un ami, d’un teinturier, d’un éditeur dont le nom est resté inconnu.
Une notoriété trouble succède à leur existence louche. […] Ils existent d’une existence plus intense que n’importe qui, se croyant vivant, là, dans la rue.
Mais, heureux jusqu’au bout, il ne soupçonne même pas l’existence de cet infiniment petit que j’appellerai L’USURPATEUR L’Usurpateur — Jules Minoret dans la vie privée — est un petit jeune homme effilé, aux allures doucereuses et félines. […] « C’est étrange, mais il me semble que vous, — le vieux, — vous m’avez offert des couteaux à Châtellerault, il n’y a pas bien longtemps. » Et en effet, après avoir provoqué l’expansion du chef de bande par l’achat d’un poignard que j’avais marchandé jadis au buffet de Châtellerault, j’appris : Que ces Espagnols n’étaient que des Espagnols en strass ; Que ces Castillans étaient nés natifs de la Vienne ; Qu’au lieu de guérilleros sans emploi faisant trafic de bonnes lames de Tolède, j’avais levé trois Français en rupture — de nationalité ; Que le chef Pedro Bobinardino avait été, dans une existence antérieure, coutelier à Châtellerault — et s’appelait Pierre Bobinard ; Que ledit Bobinard avait vu sombrer son industrie à l’époque de la grande débâcle des diligences Laffitte et Gaillard ; Que, sur le point de se jeter sous les roues de la locomotive qui le ruinait, une idée lumineuse lui avait représenté le suicide comme un acte profondément immoral ; Que cette idée consistait à courir les Pyrénées en costume espagnol, pour écouler, sous prétexte de Vieille-Castille, le fonds de Châtellerault ; Que l’idée était une Californie : le touriste se faisant une joie de posséder un couteau espagnol qui ferait, l’hiver prochain, l’admiration et la jalousie de Castelnaudary ; Que les adolescents de dix-huit ans, en bonne fortune à Luchon avec quelque baronne de hasard, donnaient particulièrement dans le couteau espagnol : vu qu’on ne peut, décemment, aux heures des grandes colères passionnées, menacer sa folle maîtresse du couteau français, qui n’a rien de dramatique ; Que le matin même M.
L’homme seul, entre les animaux, a le sentiment de l’existence, et il ne l’a que par la parole. […] Elle porte donc en soi la raison de son existence, et elle va commencer une nouvelle mission.
Il lui arriva un peu ce qui arrive à de certaines jeunes filles qui épousent des vieillards : en très-peu de temps leur fraîcheur se perd on ne sait pourquoi, et le voisinage attiédissant leur nuit plus que ne feraient les libres orages d’une existence passionnée : Je crois que la vieillesse arrive par les yeux, Et qu’on vieillit plus vite à voir toujours les vieux, a dit Victor Hugo.
Parlant du grand sermonnaire Bourdaloue, et de son existence cachée, en apparence si calme, si régulière, et d’où il ne nous est parvenu qu’une parole éloquente, M.
Un moment, son désespoir est au comble ; l’ironie va le saisir, et, prenant l’existence pour l’amer sarcasme d’un maître jaloux, il est prêt à lui rendre mépris pour mépris, à le maudire et à le railler ; — ou bien, à d’autres instants, la défaillance le poussant à la mollesse, il se demande s’il n’est pas mieux de prolonger les voluptés jusqu’à la tombe et de se noyer l’âme sur des seins embaumés de roses.
Mickiewicz et en les retournant en un sens plus général, la France réelle, celle qui a tant aimé la Pologne, qui a tant saigné pour elle, la France qui a vaincu aux trois jours, et qu’on a liée par surprise, et qui souffre et qui attend, cette France dont nos gouvernants enhardis s’accoutument à nier l’existence, croyant l’avoir confisquée dans leurs petites Sibéries, cette France ne pourrait-elle pas répondre au poète : « Oh !
La galanterie des Maures, l’existence qu’elle donnait aux femmes, auraient pu approcher à quelques égards les Espagnols de l’esprit français ; mais les superstitions auxquelles ils se sont livrés, ont arrêté parmi eux tous les genres de progrès aimables ou sérieux ; et l’esprit paresseux du Midi a tout abandonné à l’activité du sacerdoce.
Ici encore on attribue à l’esprit une existence indépendante, une faculté de vivre à part, d’agir à volonté avec ou sans un corps.
Nieuwentit nous offre son excellent livre de l’existence de Dieu, démontrée par les merveilles de la nature, in-4°., qui est à la fois la meilleure Physique & le meilleur commencement d’une bonne Théologie.
Que veux-tu, ma colombe… il y a des hauts et des bas dans l’existence.
Rapetti, qui ne se contente pas de discuter le fait unique de cette défection dans laquelle tous les autres actes plus ou moins glorieux de la vie de Marmont se sont perdus comme dans un abîme, nous a résumé, en quelques pages fermes et profondes, cette existence que le maréchal nous a fastueusement étalée dans plusieurs volumes de Mémoires, et c’est de l’ensemble étreint de toute cette vie que le vigoureux et habile critique a déduit et fait sortir la défection.
Ce fut son talent qui fit sa vie ; et cette vie toujours calme, aisée, honorée, et qui monta sans luttes et sans obstacles jusqu’à cette dignité de rang qui est la dernière caresse de la fortune à ceux qui pourraient s’en passer, puisqu’ils ne vivent que pour les jouissances de l’esprit, a plus d’un rapport avec l’existence d’un homme heureux aussi parmi les poètes, mais qui, à son déclin, sentit dans le fond de son cœur le souci cruel de la confiance trahie et sur son front la sueur de sang du travail forcé.
par le coup d’État 2, a déjà plusieurs mois d’existence ; mais il tire du talent, et plus encore de la famosité de son auteur, une importance telle qu’on pourrait y revenir même de plus loin que nous ne sommes aujourd’hui.
La science positive préfère de n’y rien nier, de n’y rien affirmer ; en un mot, elle ne connaît pas l’inconnaissable, mais elle en connaît l’existence.
C’est là qu’occupé de grands travaux, on est frappé de la rapidité de la vie, et qu’on veut étendre sur l’avenir une existence si courte.
Rien de plus abstrait que l’idée d’existence.
Rien n’existe qu’en vertu du déséquilibre, de l’injustice ; toute existence est un vol prélevé sur d’autres existences ; aucune vie ne fleurit que sur un cimetière. […] On prouvait l’existence et la ténacité des Diables par l’inguérissable pourriture des trois éléments corruptibles, que le quatrième, le Feu, est impuissant à purifier. […] Ont-ils donc démontré leur existence objective mieux que les héros ou les saints ? […] Cette théorie n’y est contredite que par l’existence de quelques îlots ; mais nul doute que les histoires particulières ne les fassent rentrer dans l’explication générale. […] L’homme n’est rien, c’est vrai ; et il est tout, étant la condition même de l’existence du monde.
En admettant même la simultanéité des deux actes, l’acte fondamental, sans lequel ne surgirait point le désir de se communiquer à autrui, est nécessairement la création artistique, l’évocation d’émotions et d’images ; car il est logiquement impossible que ce désir se produise avant l’existence de la chose qui en est l’objet. […] À l’audition des drames de Wagner dans cet admirable cadre, nous ne sommes plus nous-mêmes ; il semble pendant quelques heures que tous les liens soient rompus entre nous et les réalités de l’existence, que nous vivions, en dehors du temps et de l’espace, d’une vie autre, dans une atmosphère plus légère ; nous n’avons plus de corps ; nous sommes de purs esprits ; c’est le ravissement absolu de l’intuition. […] Elle ne traduira donc pas la tristesse ou la joie d’un individu déterminé, ni telle tristesse ou telle joie, ou telle colère, ou telle terreur particulière ; elle traduira simplement la Joie, la Tristesse, la Colère, la Terreur, en quelque sorte d’une façon générale et abstraite, sans aucune des contingences qui font de ces sentiments la caractéristique d’un moment de notre existence, la joie, la tristesse, la colère, la terreur de l’espèce. […] C’est que le grand, on pourrait dire l’unique foyer d’art, pendant cette longue période, ce furent les couvents où se réfugia l’homme socratique, l’homme théorique par excellence, vivant en dehors de la nature une existence en quelque sorte négative, éloignée du tragique de la véritable vie, optimiste en son attente des félicités paradisiaques : le moine et le prêtre. […] Le renoncement nécessaire, le besoin de plus en plus pressant de me ressaisir moi-même, cela appartient aux expériences les plus dures et les plus mélancoliques de mon existence.
En effet, le christianisme, au moment où il prévaut et reçoit de Constantin une existence officielle, est une religion très vieille et très jeune, très raffinée et très naïve à la fois. […] Ce qui le prouve mieux encore, ce qui démontre l’existence d’une foule de causes naturelles et nouvelles, qui se manifestent en même temps que la Renaissance et la Réforme, ce sont les effets très divers que produisent ces dernières en se combinant avec les climats, les races, les tempéraments et les conditions matérielles de l’existence. […] D’abord ils s’attardent longuement à tout ce qui ne fait qu’encadrer ou meubler la scène de l’existence humaine. […] Quel vulgaire mode d’existence ! […] Ceux-ci n’admettent rien au-delà, rien au-dessus de la présente existence.
monsieur, c’est ça qui vous soulage une existence ! […] Son roman, enfin, « respirerait l’amour d’une existence meilleure ». […] Ils n’ont d’existence qu’en soi ; la vie ne rayonne pas d’eux alentour ; leur atmosphère est fausse. […] « Dans le train banal de l’existence », comme dit M. […] « Dans le train banal de l’existence », comme dit M.
C’est dire qu’elle inaugure le temps où l’œuvre du poète va commencer sa féconde existence posthume. […] Une technique si soigneusement disciplinée démontre en M. de Montesquiou l’existence d’une qualité que l’on doit priser particulièrement chez tout artiste : la volonté et son usage. […] Monsieur Lavedan n’est point abstrait, mais simplement dénué d’existence. […] Tout un fin petit monde y mène une existence délicate, et s’y montre — un peu apprêté, un peu maniaque — obsédé de soucis précieux et de préoccupations exquises. […] Dans le domaine des réalités, il ne peut s’intéresser à rien qui ne prenne corps et qui ne reçoive l’existence par ses soins.
N’est-ce pas misère que la brièveté où mène la longue durée de l’existence (car tout ce qui finit par la mort est court, la mort n’a point d’âge ; à la pensée de celui qui meurt, c’est un songe) ? N’est-ce pas misère que ces infirmités, ces maladies inévitables qui nous privent, nous vivants, d’un de ces sens si bornés dont la nature nous a si parcimonieusement doués en naissant, comme conditions nécessaires à notre existence ? […] Misère de l’âme, qui vit d’espérances et qui est obligée de passer par les ténèbres de l’existence et par l’ombre du tombeau, entre l’incertitude et le désespoir !
Lucrèce, c’est l’être ; Shakespeare, c’est l’existence. […] Je ne vois que lui dont l’existence m’inspire de la crainte : il intimide mon génie, comme César, dit-on, celui de Marc-Antoine. […] Il est aussi le mien, et notre inimitié est si sanglante, que chaque minute de son existence me frappe dans ce qui tient de plus près à la vie.
La modernité, c’est encore ce qui, dans les cervelles, a l’empreinte du moment où nous sommes ; c’est une certaine fleur de culture extrême ou de perversion intellectuelle ; un tour d’esprit et de langage fait surtout d’outrance, de recherche et d’irrévérence, où dominent le paradoxe, l’ironie et « la blague », où se trahit le fiévreux de l’existence, une expérience amère, une prétention à être revenu de tout, en même temps qu’une sensibilité excessive ; et c’est aussi, chez quelques personnes privilégiées, une bonté, une tendresse de cœur que les désillusions du blasé font plus désintéressée, et que l’intelligence du critique et de l’artiste fait plus indulgente et plus délicate… La modernité, c’est une chose à la fois très vague et très simple ; et l’on dira peut-être que la découverte de MM. de Goncourt n’est point si extraordinaire, qu’on avait inventé « le moderne » bien avant eux, qu’il n’y faut que des yeux. […] Il se trouvait que ce farceur, ce paradoxeur, ce moqueur enragé des bourgeois avait, pour les choses de l’art, les idées les plus bourgeoises, les religions d’un fils de Prudhomme… Il avait le tempérament non point classique, mais académique comme la France…12 … Ce tableau était, en un mot, la lanterne magique des opinions d’Anatole, la traduction figurative et colorée de ses tendances, de ses aspirations, de ses illusions… Cette sorte de veulerie tendre qui faisait sa bienveillance universelle, le vague embrassement dont il serrait toute l’humanité dans ses bras, sa mollesse de cervelle à ce qu’il lisait, le socialisme brouillé qu’il avait puisé çà et là dans un Fourier décomplété et dans des lambeaux de papiers déclamatoires, de confuses idées de fraternité mêlées à des effusions d’après boire, des apitoiements de seconde main sur les peuples, les opprimés, les déshérités, un certain catholicisme libéral et révolutionnaire, le Rêve de bonheur de Papety entrevu à travers le phalanstère, voilà ce qui avait fait le tableau d’Anatole … 13 Anatole présentait le curieux phénomène psychologique d’un homme qui n’a pas la possession de son individualité, d’un homme qui n’éprouve pas le besoin d’une vie à part, d’une vie à lui, d’un homme qui a pour goût et pour instinct d’attacher son existence à l’existence des autres par une sorte de parasitisme naturel, etc.
L’acceptation de la vie sociale implique un certain optimisme fondamental à l’égard de la société, comme l’acceptation de la vie, le simple fait de ne pas se tuer implique un certain optimisme à l’égard de l’existence. […] Seulement la condition à laquelle l’esprit s’adapte par la soumission à l’autorité c’est l’existence de la société, c’est l’ensemble même de la vie sociale. […] C’est là le tragique de notre existence.
Une histoire des « Origines du Christianisme » devrait embrasser toute la période obscure, et, si j’ose le dire, souterraine, qui s’étend depuis les premiers commencements de cette religion jusqu’au moment où son existence devient un fait public, notoire, évident aux yeux de tous. […] Strauss n’a jamais nié l’existence de Jésus, mais chaque page de son livre implique cette existence.
L’être conçu (par abstraction) comme purement matériel serait inerte : son existence serait tout entière immobile dans le présent, alors même qu’il parcourrait mille lieues par seconde. […] Par un dernier et radical expédient, les psychologues que fascine l’objectif ont nié non seulement l’activité de la conscience, mais son existence même. […] Une conscience vraiment objective ne peut pas exister, et on a raison d’en nier l’existence.
Nous avons conscience d’être incités à l’action par le dedans et psychiquement, non par le dehors et physiquement, mais nous ne pouvons complètement analyser ni les causes internes de notre acte ni celles de notre existence comme sujets conscients : nous ne pouvons mettre tous les termes du problème en équation. […] Jusqu’à quel point enfin est-elle concevable pour la philosophie générale, qui étudie les principes les plus élevés de la connaissance et de l’existence ? […] Son existence sera alors déterminée, totalement ou partiellement, par l’idée même et le désir de réaliser des possibles qui, sans cette idée et ce désir, seraient restés latents.
Où trouver un meilleur langage que celui-ci sur le libre arbitre : « c’est pour avoir confondu les désirs, les velléités, les penchants, avec la véritable volonté qu’on a cru trouver des difficultés insolubles relativement à la liberté morale ; on avait raison de nier la liberté relativement à l’existence et au mouvement des désirs, et par une fausse conséquence on a cru que la volonté et les actions manquaient également de liberté. » Entre les mains de Broussais, polémiste violent et vigoureux qui n’était pas précisément doué de ce que Pascal appelle l’esprit de finesse, la doctrine de Gall dégénéra en un matérialisme tranchant. […] C’est un champ qui reste ouvert à la spéculation ou à l’imagination, en dehors des conditions de l’existence actuelle ; mais, si l’on reste dans ces conditions, il n’y a plus maintenant à discuter la question de savoir si l’homme peut penser sans cerveau. […] Où trouver un esprit plus lucide que chez Pascal, une logique plus ferme, une pensée plus réfléchie et plus maîtresse d’elle-même à tous les moments de son existence maladive et tourmentée ?
L’esprit qui brille dans ses ouvrages n’est que la moindre partie de celui qu’il a dépensé dans tout le cours de son existence ; l’intrigue de Figaro est peu de chose à côté de ses propres aventures. […] Je vais rappeler ici quelques traits de cette existence si curieuse. […] L’existence d’Angelucci Guillaume (singulier prénom chez un juif !) […] Aussi on écrit des milliers de poésies dont le motif est nul, et qui simulent une espèce d’existence par une versification sonore. » M. […] Les hommes, outre leur existence matérielle, ont une existence morale : on ne doit pas hésiter à dire que la perfection de l’existence morale, comme de l’existence matérielle, a pour condition un amour bien entendu de soi.
Pour l’élite, l’existence assurée est une exception. […] Il n’y eut pas un instant de repos, pas une trêve de Dieu dans cette existence agressive. […] Les plus hautes existences furent à la merci des plus abjectes délations. […] Le parallélisme géométrique de leurs existences décrit à ce moment un léger écart. […] Cette existence spectrale répugnait à l’activité des temps héroïques.
Ils l’animent à cette existence seule qu’il pouvait avoir. […] Le poète parle avec une tendresse pénétrée des moindres existences, des objets eux-mêmes. […] L’univers n’est qu’une manière totale de ne pas être ce qui est107. » — Dieu, s’il est, épuise toute l’existence. […] Il n’a besoin de personne : son existence seule suffit à le combler ; il marche ; il connaît qu’il vit ; il mesure la force qu’il est ; à chaque pas il est tout présent ; il n’apaisera pas ce bonheur indompté. […] Dans les Posthumes on lit (p. 86) : « Il y a des moments de l’existence où le temps et l’étendue sont plus profonds, et le sentiment de l’existence immensément augmenté. » 30.
Il appuyait sa foi sur une suite régulière de discussions historiques905 ; il établissait l’existence de Dieu par une suite régulière d’inductions morales ; la démonstration minutieuse et solide était partout le guide et l’auteur de ses croyances et de ses émotions. […] Bossu dans mon premier article sur Milton, j’aurais daté l’action du Paradis perdu du discours de Raphaël au cinquième livre932. » — « Quoique l’allégorie du Péché et de la Mort puisse en quelque mesure être excusée par sa beauté, je ne saurais admettre que deux personnages d’une existence si chimérique soient les acteurs convenables d’un poëme épique. » Plus loin il définit les machines poétiques, les conditions de leur structure, l’utilité de leur emploi. […] — The genius being moved with compassion towards me, bid me quit so uncomfortable a prospect : look no more, said he, on man in the first stage of his existence, in his setting out for eternity ; but cast thine eye on that thick mist into which the tide bears the several generations of mortals that fall into it. — I directed my sight as I was ordered, and (whether or no the good genius strengthened it with any supernatural force, or dissipated part of the mist that was before too thick for the eye to penetrate) I saw the valley opening at the further end, and spreading forth into an immense ocean that had a huge rock of adamant running through the midst of it, and dividing it into two equal parts. […] Is death to be feared, that will convey thee to so happy an existence ?
Je me sens plus léger depuis que je porte, isolé, le poids de l’existence. […] Sur ce boulevard, pendant des heures entières, il cheminait à pas lents, voûté comme un aïeul, perdu en de vagues souvenirs, et s’affaissant de plus en plus dans le sentiment indéfinissable de son existence manquée. […] Voilà ce que je vois comme je vous vois : mais derrière ce tronçon de votre existence, ne me demandez plus rien, je n’y vois plus ! […] Ballanche, “toutes les pensées d’existence et d’avenir se tiennent ; pour croire à la vie qui doit suivre celle-ci, il faut commencer par croire à cette vie elle-même, à cette vie passagère”.
Je voudrais que les bourgeois songeassent, comme je le fais, à tous ces malheureux qui passent des nuits blanches sur les chemins ou dans des caves pour augmenter les agréments de leur existence. […] La preuve de la non-liberté de la volonté est dans l’existence même des personnalités, des caractères. […] Ils ne sont guère entrés dans la conversation, et ce qui a le plus contribué à les maintenir en dehors de l’usage, c’est peut-être que les chemins de fer ont ignoré leur existence. […] L’amour assez nouveau des passages a également redonné l’existence aux anciennes provinces.
Plus proche du réalisme véritable, est la théorie que nous en donne George Elliot : « Je trouve une source d’inépuisable intérêt dans ces représentations fidèles d’une monotone existence domestique, qui a été le lot d’un bien plus grand nombre de mes semblables, qu’une vie d’opulence ou d’indigence absolue, de souffrances tragiques ou d’actions éclatantes. […] Parmi nous, il n’en est pas comme dans les comédies, spécialement chargés de rire et d’être peureux, d’autres de souffrir ; la balance penche seulement pour quelques-uns un peu plus d’un côté que de l’autre ; ou tout simplement, peut-être, il en est qui se laissent affecter davantage par les tristesses inhérentes à l’existence. […] On a souvent blâmé Gœthe d’avoir fait se tuer son héros, au lieu de le laisser arriver à une vue plus nette, à un sentiment plus calme et à une existence tranquille après ses chagrins. […] Tout cela d’ailleurs, le plus souvent, n’aboutit même pas ; les vrais gens du monde ont à peine la force d’être franchement charnels, et vouloir sans pouvoir est le mot de leur existence.
Toutefois notre existence s’écoule au milieu d’objets en nombre restreint, qui repassent plus ou moins souvent devant nous : chacun d’eux, en même temps qu’il est perçu, provoque de notre part des mouvements au moins naissants par lesquels nous nous y adaptons. […] En d’autres termes enfin, les souvenirs personnels, exactement localisés, et dont la série dessinerait le cours de notre existence passée, constituent, réunis, la dernière et la plus large enveloppe de notre mémoire. […] Elle nous révèle l’existence de deux espèces absolument distinctes de cécité et de surdité psychiques, de cécité et de surdité verbales. […] Mais tous les faits concourent à démontrer l’existence d’une tendance motrice à désarticuler les sons, à en établir le schème.
Mais on a coutume de croire que pour avoir accepté cette doctrine on se trouve désarmé dans le combat de l’existence. […] Cependant on hésite à lier une autre existence à la sienne. […] Nous nous surprenons à être jaloux de notre propre conservation parce que des existences précieuses en dépendent. […] Ils ne savent pas faire de leur existence deux parts et respecter les convenances en violant les devoirs. […] Tout notre effort ne doit tendre qu’à mériter dans une existence supérieure des joies qui ne sont pas de celle-ci.
Il s’étonne de l’indifférence de ses compagnons, qui chantent la beauté des femmes, chassent le jaguar et s’enivrent tour à tour ; sa passion l’a tout d’un coup civilisé ; elle lui a révélé l’isolement de son existence, et, pour la première fois, les forêts lui ont paru solitaires.
Il sait que ce fut l’âge d’or de la société polie ; qu’en ce temps-là la vie mondaine fut l’idéal de tout ce qui comptait alors parmi les hommes ; que les jardins mêmes étaient des salons ; que les philosophes prouvaient l’existence de la matière par celle de la pensée ; que les poètes, acharnés à peindre l’âme humaine civilisée, laissaient à peine tomber quelques regards distraits sur la nature environnante.
La lettre du 15 novembre, en réponse, est ironique dans quelques expressions, sévère dans d’autres ; mais elle tend surtout au but que se proposait madame Scarron : c’était de faire croire que l’année qu’elle allait passer dans une solitude forcée, avec les enfants dont il fallait cacher l’existence, serait consacrée à une retraite pieuse et à une réforme dirigée par un savant théologien.
Ce Fabuliste est comme un Statuaire habile, qui sait former une figure accomplie d’un bloc informe & grossier, lequel, sans son ciseau, n’auroit eu qu’une existence obscure.
Et si quelques-uns d’entre nous ont des sentiments plus sincères, plus divins, n’oublions point que la plupart se contentent d’une calme existence, d’une médiocrité apathique et d’une fortune restreinte, vulgaire et mesurée.
» Ainsi le premier sentiment que l’homme éprouve est le sentiment de l’existence d’un Être suprême ; le premier besoin qu’il manifeste est le besoin de Dieu !
La Semaine, le Glaneur, le Conservateur, le Journal des Journaux, le Censeur hebdomadaire, le Spectateur, le Rédacteur, ont à peine laissé l’idée de leur existence.
Le hardi empirique auquel le malade s’adresse lorsqu’il est abandonné du facultaliste, le tue ou lui rend la santé et la jouissance de leur existence à ceux qui les soignaient.
La voici aux limites de son existence.
Il est de cette école historique qui n’a pas de nom encore, — car un nom compromet, — mais qui a une existence très positive et très puissante dans l’éducation et la littérature contemporaines.
Cette absence radicale de talent, qui implique celle de l’âme, quoi qu’on en dise, est, à ce qu’il nous semble, le meilleur argument à dresser contre la réalité des Lettres portugaises et l’existence de leur auteur.
Depuis le glorieux Balzac, — qui croyait à Dieu et même à l’Église, et qui introduisit dans les siens cette physiologie, mais dans la juste mesure de son existence, — elle a grandi immensément, comme le matérialisme dont elle est la fille.
Estimons-nous donc heureux d’avoir eu l’année 1846 dans le lot de notre existence ; car l’année 1846 a donné aux sincères enthousiastes des beaux-arts la jouissance de dix tableaux de David et onze de Ingres.
Un tel être n’existe pas encore, puisque nous n’avons que trois façons de constater l’existence d’un être, le voir, entendre parler de lui, voir son action, et qu’un être comme celui dont nous parlons n’est connu d’aucune de ces trois manières ; mais on conçoit la possibilité d’un état où, dans l’infinité de l’espace, tout vive. […] « C’est entendu ; mais vous ne nous avez pas expliqué comment on peut parler de réelle existence sans conscience. […] « La conscience est peut-être une forme secondaire de l’existence. […] Ceux qui prennent l’existence comme un devoir, non comme une jouissance, ont bien droit à cela. […] « Votre objection, décisive contre l’existence des âmes séparées et des anges, n’est pas décisive contre l’hypothèse d’un ressort intime dans l’univers.
Leur existence féconde et pleine, en tous ses degrés de maturité, a les fruits de chaque saison. […] Et c’est de ce fond que résulteront, soit en bien, soit en mal, les vocations et les entraînements presque irrésistibles vers tels ou tels objets, vers telles ou telles catégories de professions ou d’existences. […] On voit alors des penchants, des affections, dont l’existence était à peine soupçonnée, acquérir une vivacité extrême : un sentiment léger d’aversion se change en haine, un simple attachement, en passion déréglée. […] Broussais avait fait une remarque très juste : « L’homme n’est connu qu’à moitié, s’il n’est observé que dans l’état sain ; l’état de maladie fait aussi bien partie de son existence morale que de son existence physique. » La conclusion raisonnable est que, pour connaître l’homme tout entier, on doit l’observer tour à tour dans l’état sain et dans l’état de maladie, tant au physique qu’au moral. […] Cette même année, sa fortune incertaine et son existence précaire allaient le déterminer à accepter la place de maître de chapelle du roi de Westphalie, Jérôme Napoléon ; mais, comme il était sur le point de partir, on le retint dans son pays.
Les existences mouvementées de l’ambitieux s’achèvent d’ordinaire parmi la paix des sinécures ; tout l’intervalle, quel qu’il ait pu être, refleurit dans les potiches, en fleurs un peu amères. […] Cet art inconnu de différencier les existences, est pratiqué par M. […] Les hommes veulent que les hommes qu’on leur raconte soient logiques, sans s’apercevoir que la logique est la négation même d’une existence particulière. […] Tous les grands actes naturels de l’existence humaine sont dirigés ou dominés par l’inconscient. […] Enfin, et pour résumer l’impression que donne la vue panoramique de cette double existence, si noblement prolongée par l’un d’eux jusque vers l’extrême vieillesse, les Goncourt furent de miraculeux hommes de lettres.
Elle exprime la surprise qu’elle éprouva, lorsqu’un être mystérieux apparut dans son existence en conquérant : elle croyait que c’était la mort, et c’était l’amour. […] * * * Un trait de notre tempérament est si connu, qu’il suffit de le rappeler pour que chacun tombe d’accord sur son existence et sur ses attributs : notre besoin d’ordre et de clarté. […] Ils sont comme la garantie de son droit à l’existence ; un peuple dont les héros ont mené le monde vers les plus hauts sommets de la civilisation, a le droit de revivre. […] » L’esprit humain ne saurait les saisir, ces natures mystérieuses dont il pressent l’existence et l’action. […] S’il faut tout expliquer par le plus simple, il est plus simple de croire à l’existence de la seule matière, douée des qualités que l’on attribuait autrefois à l’esprit.
C’est qu’il y avait contradiction entre l’esprit du temps et les conditions mêmes d’existence ou de développement du lyrisme. […] Traducteurs, grammairiens, critiques ou rhéteurs, le théâtre — genre commun, s’il en fut, dont l’existence même dépend de la bonne volonté du public — achèvera ce qu’ils ont commencé. […] Bossuet a failli commettre cette erreur ; mais c’est Fénelon qui y est tombé, dans la première partie de son Traité de l’existence de Dieu. […] À l’égard de la religion, nier la Providence ou nier l’existence de Dieu, c’est exactement la même chose. […] Entrevue par les uns, ébauchée même par les autres, elle n’avait pas jusqu’au xviiie siècle d’existence philosophique.
Le sentiment de la nature vivante et champêtre lui créait en ces moments toute une nouvelle existence dont il s’enivrait. […] Si une fois vous pouviez compter sur une existence agréable et honorable, vous pourriez vous associer une femme de votre choix, et qui parviendrait peut-être à combler le vide qu’a laissé dans votre cœur la perte de vos anciennes affections. […] Il nous apprend aussi que, dans sa recherche sur le fondement de nos connaissances, il a commencé par rejeter l’existence objective et qu’il a été disciple de Kant : « Mais repoussé bientôt, dit-il, par ce nouvel idéalisme comme Reid l’avait été par celui de Hume, je l’ai vu disparaître devant l’examen de la nature des connaissances objectives généralement admises. » Tout ceci, on le voit, n’est qu’indiqué par lui, et laisse à désirer bien des explications.
C’est la devise de presque toutes les existences. Seulement ici, de ces existences littéraires d’alors qui ont manqué et qui auraient pu être, il en est une qui a surgi, qui, malgré tout, a brillé, qui, sans y songer, a hérité à la longue de ces infortunes des autres et des siennes propres, qui les résume en soi avec éclat et charme, qui en est aujourd’hui en un mot le type visible et subsistant. […] Sur ces entrefaites, son existence s’était assise enfin et fixée.
Seulement nous savons que ces systèmes sont tous des ondes, et nous mesurons la vitesse de chaque onde et sa longueur ; à cause de cela, nous pouvons définir exactement le déplacement élémentaire dont la répétition forme chaque système, montrer que, d’un système à l’autre, les déplacements élémentaires ne diffèrent que par la quantité, les ramener tous à un type unique, désigner l’action élémentaire correspondante du nerf optique et du cerveau, conclure à l’existence d’une sensation optique élémentaire dont les répétitions prodigieusement rapides et multipliées constituent les sensations totales de couleur que nous remarquons en nous. — Par malheur, la chimie n’est pas aussi avancée que l’optique ; elle ne fait que constater ses systèmes de déplacements, tandis que l’autre définit et mesure les siens ; il faut attendre qu’elle puisse, comme sa rivale, figurer les événements prodigieusement petits dont elle ne sait que l’effet final. — Mais, visiblement, dans les deux cas le problème et la solution sont semblables. […] « Dès que ces malades cessent de voir leurs membres, ils n’ont plus conscience de leur position ni même de leur existence. […] , 332. — « L’inverse s’observe rarement : lorsque le tact est aboli, du même coup la douleur se perd, ou, en d’autres termes, l’existence de l’anesthésie proprement dite implique presque toujours celle de l’analgésie. » 103.
Il y a en lui beaucoup du Saint-Évremond douteur, beaucoup du La Fontaine licencieux, beaucoup du Montaigne cynique, beaucoup du Voltaire plus éger que la plume, beaucoup de la bulle de savon qui brille et qui flotte, qui se balance et qui se colore, qui éclate et qui s’évanouit sans laisser d’autre trace de son existence qu’une goutte d’eau parfumée qui vous tombe d’en haut sur le front. […] Il ne laissa en mourant à Horace qu’un patrimoine très modique, à peine suffisant à l’existence d’un jeune homme élégant à Rome. […] Quand me sera-t-il donné, tantôt en relisant les livres des anciens, tantôt en m’assoupissant dans de faciles sommeils, tantôt en m’abandonnant à la molle paresse des heures qui ne doivent rien à la vie, de prolonger les doux oublis d’une existence autrefois si agitée !
Voilà pourquoi aussi le public goûte tant ces petits livres intitulés les Souvenirs : c’est qu’ils sont en littérature une protestation de notre fugitivité contre la mobilité du temps, contre la brièveté de notre existence et contre la pire des morts, la mort de notre nom, la sépulture de l’oubli. […] « Si j’ai parlé de ces premières années, malgré mon intention d’abréger tout ce qui m’est personnel, c’est à cause de l’influence qu’elles ont souvent à un si haut degré sur l’existence entière : elles la contiennent plus ou moins. […] On a remarqué que les hommes de cette nature recherchent hardiment pour épouses les femmes les plus renommées par leur figure, soit qu’ils redoutent moins que d’autres la célébrité des attraits pour les compagnes de leur vie, soit qu’une très belle femme paraisse à leurs yeux un luxe naturel qui attire sur leur maison l’attention publique, soit que, ambitieux de jouissance autant que de fortune, ils se donnent, sans penser au lendemain, toutes les fleurs de la vie pour en embaumer leur existence.
Robespierre combat l’athéisme et fait décréter que le peuple français reconnaît l’existence de l’Être suprême. […] Tant d’existences bouleversées ; tant de vieilles institutions jetées à bas ; tant d’exemples éclatants des vicissitudes de la fortune ; un lieutenant d’artillerie devenu empereur, presque maître du monde, et, après cette prestigieuse épopée, allant s’éteindre misérablement dans une île perdue de l’Océan ; des rois décapités, détrônés, chassés, remplacés par des fils d’aubergistes et des officiers d’aventure ; l’Europe entière partagée, remaniée, des populations entières passant d’un maître à l’autre comme un bétail ; voilà certes un amas de choses tragiques qui trouble, étonne, force à réfléchir, à s’interroger, à scruter les mystérieux replis de l’âme et de la société humaines, à chercher les ressorts secrets, les causes obscures des événements. […] Le suffrage universel, après cinquante ans d’existence, n’est pas organisé.
Ce retard, qu’on peut évaluer à un espace de quinze à vingt ans, n’a depuis lors jamais cessé d’exister et il durera autant que ce sénat littéraire ; il est dû en effet aux conditions de son existence ; il tient à la constitution de l’Académie elle-même ; il en explique les caractères essentiels. […] Elle a toujours été moins forte ; cependant elle s’est exercée et s’exerce encore sur les écrivains, surtout à trois moments de leur existence ; d’abord quand ils débutent ; puis quand ils sont candidats à l’Académie ; enfin quand ils en sont devenus membres. […] Il convient d’ajouter que l’Académie, au cours de son existence déjà longue, s’est affranchie de certaines conventions et timidités.
Dès lors le quotidien de l’existence, avec un désespoir d’atteindre la musique et le retour aux littératures, la rentrée aux chers travaux des choses littéraires et chimériques. […] L’aspiration universelle étant le sujet primitif du Parsifal, voyons, parmi l’infinité des extensions possibles, quelques figures de l’existence, sujets secondaires que vous pouvez supposer. […] Conclusion ; objection extra-artistique. — Le Parsifal est l’émotion née de la contemplation de l’éternel désir, et la synthèse de l’existence.
Mercredi 3 février Armand Baschet, ainsi qu’il en avait l’habitude, était allé vivre quelques jours à Blois, pour la fête de sa mère, sa mère, une femme de 80 ans passant son existence dans son lit. […] Vendredi 12 mars Une maîtresse inférieure n’est jamais complètement associée au monsieur, avec lequel elle couche ; elle aura pour lui le dévouement dans les révolutions, les maladies, les événements dramatiques, mais en pleine existence tranquille et bonasse, l’amant d’une autre caste trouvera chez elle, le retrait, l’hostilité même intérieure d’un peuple, contre une aristocratie. […] Et il s’apercevait à peine de la panne, dans laquelle il vivait, la cervelle, prise par un immense poème, en trois parties : « La Genèse, l’Humanité, l’Avenir », et qui était l’histoire cyclique et épique de notre planète, avant l’apparition d’une humanité, pendant ses longs siècles d’existence, et après sa disparition.
Elle n’est d’abord, comme encore en Grèce, que de l’histoire, s’il ne faut pas douter que les hommes du Moyen Âge ne fussent aussi convaincus de la réalité des exploits de Roland que de l’existence de Philippe-Auguste ou de saint Louis. Les enfants ne le sont-ils pas bien de l’existence du Petit Poucet et du Chat botté ? […] Et il est possible, après cela, il est même probable qu’à défaut de l’esprit de la Renaissance, un autre et nouvel esprit se fût emparé, pour le vivifier, de ce reste d’existence.
Cette année, Messieurs, l’Académie n’a pas d’action d’éclat à célébrer et à couronner ; elle a mieux, si j’ose dire : elle a des existences, des vies tout entières dévouées au bien à récompenser et à raconter devant vous. […] Elle s’aperçut de bonne heure que de toutes les privations que la maladie révèle dans ces existences pauvres, la plus fréquente de toutes, c’est le défaut de linge, si nécessaire pourtant en pareil cas.
« Quand je songe, écrivait-il à son ancien collègue, aux épreuves qu’une poignée d’aventuriers politiques ont fait subir à ce malheureux pays ; lorsque je pense qu’au sein de cette société riche et industrieuse on est parvenu à mettre, avec quelque apparence de probabilité, en doute l’existence même du droit de propriété ; quand je me rappelle ces choses, et que je me figure, comme cela est la vérité, l’espèce humaine composée en majorité d’âmes faibles, honnêtes et communes, je suis tenté d’excuser cette prodigieuse énervation morale dont nous sommes témoins, et de réserver toute mon irritation et tout mon mépris pour les intrigants et les fous qui ont jeté dans de telles extrémités notre pauvre pays. » C’était peut-être, il est vrai, pour consoler le chef de l’ancienne Opposition de gauche et le promoteur des fameux banquets qu’il écrivait de la sorte : quoi qu’il en soit, le philosophe est ici en défaut, et il paraît trop vite oublier ce qu’il a reconnu ailleurs, que ce ne sont pas les partis extrêmes qui ont renversé Louis-Philippe, mais que c’est la classe moyenne le jour où elle fit cause commune avec eux. […] Ici il n’y a pas de quoi s’offenser : c’est l’auteur même qui parle, qui se démontre, et la dissection ne porte que sur les procédés de l’intelligence ; ce que l’auteur ajoute sur sa disposition morale est digne de ce qui précède, et résume nettement sa profession de foi politique : « J’ai l’orgueil de croire que je suis plus propre que personne à apporter dans un pareil sujet une grande liberté d’esprit, et à y parler sans passion et sans réticence des hommes et des choses : car, quant aux hommes, quoiqu’ils aient vécu de notre temps, je suis sûr de n’avoir à leur égard ni amour ni haine ; et quant aux formes des choses qu’on nomme des constitutions, des lois, des dynasties, des classes, elles n’ont point, pour ainsi dire, je ne dirai pas de valeur, mais d’existence à mes yeux, indépendamment des effets qu’elles produisent.
En province surtout où les existences de quelques femmes sont plus souffrantes, plus étouffées et étiolées que dans le monde parisien, où le désaccord au sein du mariage est plus comprimant et moins aisé à éluder, M. de Balzac a trouvé de vifs et tendres enthousiasmes ; le nombre y est grand des femmes de vingt-huit à trente-cinq ans, à qui il a dit leur secret, qui font profession d’aimer Balzac, qui dissertent de son génie et s’essayent, plume en main, à broder et à varier à leur tour le thème inépuisable de ces charmantes nouvelles, la Femme de trente ans, la Femme malheureuse, la Femme abandonnée, c’est là un public à lui, délicieux public malgré ses légers ridicules, et que tout le monde lui envierait assurément. […] Pour résumer notre idée sur la première période presque clandestine d’une existence littéraire désormais si en évidence, voici ce qui nous semble : M. de Balzac, jeune, au sortir des bancs, bachelier ès-lettres, mena, comme il en convient dans Lambert, une vie passionnée et aventureuse.
Un voyage dans le Dauphiné, aux bords du Lignon, une visite à Vaucluse, rentrent davantage dans le genre d’existence bocagère qu’on lui suppose. […] Toujours le cœur brisé qui chante, toujours le cri en poésie de cette autre parole dite à voix plus basse, en prose plus résignée, et que bien des existences sensibles ont pensée en avançant : « Il n’y a qu’une date pour les femmes et à laquelle elles devraient mourir, c’est quand elles ne sont plus aimées. » Mais je touche à l’élégie moderne, et je n’y veux pas rentrer aujourd’hui196.
Les peuples sont à la longue ce que le gouvernement les fait être : guerriers, citoyens, hommes quand il le veut, populace, canaille quand il lui plaît », et c’est par l’éducation qu’il les façonne. « Voulez-vous prendre une idée de l’éducation publique, lisez la République de Platon447… Les bonnes institutions sociales sont celles qui savent le mieux dénaturer l’homme, lui ôter son existence absolue pour lui en donner une relative, et transporter le moi dans l’unité commune, en sorte que chaque particulier ne se croie plus un, mais partie de l’unité, et ne soit plus sensible que dans le tout. […] Ces articles sont « l’existence de la divinité puissante, intelligente, bienfaisante, prévoyante et pourvoyante, la vie à venir, le bonheur des justes, le châtiment des méchants, la sainteté du contrat social et des lois450.
Leur existence, mystérieuse aussi, est restée un mystère, malgré les savantes recherches des historiens les plus érudits. […] On pourrait excuser sur les mœurs de ce siècle une circonstance qui paraît démentir la gravité du caractère de Côme de Médicis : mais lui-même dédaigna une pareille apologie, et, reconnaissant les erreurs de sa jeunesse, il voulut réparer auprès de la société l’atteinte qu’il avait portée à des règlements salutaires, en s’occupant avec intérêt de donner à son fils illégitime des principes de vertu et une existence honorable.
Dans une existence agitée, tumultueuse, à travers deux prisons, des fuites, des exils, des alertes, des triomphes de salon et des faveurs de cour, Voltaire fait son éducation de philosophe : son séjour auprès de Frédéric est la dernière expérience qui achève de le former. […] Nous avons un témoin de l’existence qu’on menait à Cirey : cette « caillette » de Mme de Graffigny, une femme de lettres assez malchanceuse, y séjourna quelque temps en 1738.
Fénelon démontrant l’existence de Dieu « par les merveilles de la création », indique par le mot de merveilles, le caractère indistinct de ses peintures. […] N’est-il donc arrivé qu’aux seuls jeunes gens de se heurter partout à des bornes en cherchant un bien inconnu ; d’être habiles par les livres, les exemples, et point par l’expérience ; d’avoir « l’imagination riche, abondante, merveilleuse, et l’existence pauvre et désenchantée ?
Il sait que notre existence fut représentée à l’âge carbonifère par quelque chose — quelque chose au sang-froid et à la peau visqueuse — qui se cachait entre l’air et l’eau et fuyait devant les gigantesques amphibies de l’époque. […] Il reste toujours à expliquer l’existence, sous la forme d’un dieu comme sous celle du monde. » Albert Samain n’a pas mis son espoir dans le ciel vide.