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578. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) «  Chapitre treizième.  »

Quoiqu’il ne se détournât pas un moment de sa première et déjà ancienne idée, de faire aboutir toute l’histoire du monde ancien à l’établissement du christianisme, quand il en vint à voit les événements dans leurs causes humaines et leurs effets, il se prit d’une naïve admiration pour ce grand spectacle. […] Il est donné à peu d’esprits d’avoir cette force de regard qui saisit au passage, et sans se troubler, les grands traits de tant d’événements et de tant d’hommes. […] S’agit-il d’un politique, il entrera dans ses conseils ; il peindra les événements qu’il a dirigés ou suivis. […] Voilà pourquoi, ayant suivi Bossuet dans cette mêlée, et m’en étant retiré avec le doute, je me demande par quelles causes, vainqueur dans la doctrine, dans l’événement il a été vaincu. […] Cependant les événements ont donné tort à Bossuet sur la meilleure forme de gouvernement, comme sur l’incompatibilité du protestantisme avec l’existence d’un gouvernement réglé.

579. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre III. La nouvelle langue. » pp. 165-234

. —  Défilé de descriptions et d’événements. —  La Maison de la Renommée. —  Visions et rêves fantastiques. —  Poëmes d’amour. —  Troïlus et Cressida. —  Développement exagéré de l’amour au moyen âge. —  Pourquoi l’esprit avait pris cette voie. —  L’amour mystique […] En quoi Chaucer est Anglais et original. —  Conception du caractère et de l’individu. —  Van Eyck et Chaucer sont contemporains. —  Prologue des Contes de Cantorbéry. —  Portraits du franklin, du moine, du meunier, de la bourgeoise, du chevalier, de l’écuyer, de l’abbesse, du bon curé. —  Liaison des événements et des caractères. —  Conception de l’ensemble. —  Importance de cette conception. —  Chaucer précurseur de la Renaissance. —  Il s’arrête en chemin. —  Ses longueurs et ses enfances. —  Causes de cette impuissance. —  Sa prose et ses idées scolastiques. —  Comment dans son siècle il est isolé. […] Dans Arcite et Palémon, dans Troïlus et Cressida, il esquisse des sentiments, il ne crée pas de personnages ; il trace avec aisance et naturel la ligne sinueuse des événements et des entretiens, mais il ne marque pas les contours précis d’une figure frappante. […] Aujourd’hui il étudie la machine compliquée du cœur, découvre les suites de l’éducation primitive ou de l’habitude dominante, et trouve la comédie de mœurs ; demain il ne prendra plaisir qu’aux événements curieux, aux gentilles allégories, aux dissertations amoureuses imitées des Français, aux doctes moralités tirées des anciens. […] Au fond de chaque œuvre d’art est une idée de la nature et de la vie ; c’est cette idée qui mène le poëte ; soit qu’il le sache, soit qu’il l’ignore, il écrit pour la rendre sensible, et les personnages qu’il façonne comme les événements qu’il arrange ne servent qu’à produire à la lumière la sourde conception créatrice qui les suscite et les unit.

580. (1898) Émile Zola devant les jeunes (articles de La Plume) pp. 106-203

Elles passionnèrent autant qu’une affaire politique ou qu’un événement national. […] Je crois utile de prévenir le lecteur que cette étude, d’un ordre purement littéraire, a été écrite avant les récents événements et ne présente avec eux aucun rapport. […] Les plus bas intérêts, seuls, se trouvaient en jeu : d’un côté, les émigrants revenus d’exil s’efforçaient de reconquérir leurs anciennes prérogatives ; de l’autre, une caste nouvelle, qui devait son élévation à la faveur des événements, défendait ses conquêtes, sa fortune et ses biens. […] D’affreuses vagues maritimes interviennent afin que ces fades événements se teintent d’une manière plus sinistre encore. […] Cela lui plaît de reproduire dans leur simplicité les événements.

581. (1888) Épidémie naturaliste ; suivi de : Émile Zola et la science : discours prononcé au profit d’une société pour l’enseignement en 1880 pp. 4-93

L’imagination s’est ingéniée, depuis des siècles, à grouper de mille façons les événements, à différencier les caractères de même nature par des nuances minuscules, infinitésimales de telle sorte qu’il est quasi impossible de découvrir d’autres combinaisons. […] On avait étudié et reproduit les sentiments, les passions, les idées, les caractères, les aventures, les événements possibles et impossibles, les situations variées il restait à définir les sensations et les causes physiologiques qui les déterminent. […] L’éducation ne se fait pas seulement à l’école ; elle se fait en même temps, et après le stage voulu, sur une échelle bien plus vaste dans l’exercice de la vie extérieure au contact des choses, des événements, des personnes, par ce qu’on voit, ce qu’on entend et ce qu’on lit. […] Evénements, révolutions, restaurations, privilèges, spoliations, tout se déduit comme les termes d’un syllogisme. […] Adoptant le roman comme la forme la plus vivante et la plus capable d’impressionner la masse du public, il veut en faire une source d’enseignement social ; avec lui rien n’est livré au hasard, et les événements qu’il narre sont en parfaite concordance avec les lois universelles.

582. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre II. La parole intérieure comparée à la parole interieure »

L’antithèse de ces deux jugements est celle de l’espace et de la durée : la perception externe enveloppe toujours d’une façon ou d’une autre l’affirmation de l’étendue ; de même, la reconnaissance est l’affirmation du temps ; — non pas du temps, dira-t-on, mais du passé seulement ; — du passé, en effet, c’est-à-dire du temps, du temps réel, car le présent est un point indivisible, un néant de durée, qui ne peut contenir aucun événement ; l’avenir n’est qu’une hypothèse, un simple possible auquel nous croyons ; ce n’est pas une réalité dont nous ne puissions douter. […] Enfin, dans certains cas, l’esprit s’abstient de toute thèse à l’égard de ses états ; c’est lorsqu’ils n’ont pas les caractères qui motivent la perception externe, et que le passé, étant minime, homogène quant à son contenu, limité sans solution de continuité par le présent, est, en quelque sorte, négligeable ; alors il est, en effet, négligé, il passe inaperçu, il se confond avec sa limite, à laquelle il donne un contenu et une réalité ; le passé immédiat devient le présent empirique, le présent apparent, le présent du langage vulgaire, qui n’est pas vide comme le présent des logiciens, mais contient un événement, un seul, ou tout au plus quelques événements simultanés. […] Sans doute, tout mot a son histoire en nous ; son acquisition est un événement de notre passé ; mais ce n’est pas là ce qui nous intéresse on lui ; ce qui nous importe, c’est de connaître sa signification et son emploi, c’est de savoir en user à propos pour exprimer telle ou telle partie d’une idée complexe. […] Mais ces deux opérations peuvent se faire tout aussi bien avec la parole extérieure, et alors la reconnaissance coexiste avec le jugement de perception externe : car une parole extérieure répétée est nôtre, à titre d’événement de notre passé, en même temps qu’elle est extérieure.

583. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « L’abbé Fléchier » pp. 383-416

L’invention m’en semble même selon l’art, et je n’y ai rien trouvé qui me donne scrupule, sinon que vous y introduisez la Renommée comme une divinité qui pénètre dans les choses futures, quoique sa fonction ne soit que de parler des événements présents ou passés. […] Il a introduit habilement et ménagé, à travers son récit, quatre ou cinq de ces entretiens développés, dans lesquels les personnes du lieu lui racontent, sur l’histoire et les événements du pays, ce qu’il n’a pu savoir directement de lui-même. […] Il savait infiniment d’histoire, de généalogie, d’anciens événements de la Cour.

584. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

La prédiction d’un tel événement eût excité la rage ou le mépris de ceux qui gouvernaient alors la France, et qui se vantaient d’anéantir par leurs lois les croyances religieuses que la nature et l’habitude ont si profondément gravées dans les cœurs. […] Les grands événements dont il est le moteur, le centre et l’objet, semblent si peu conformes aux combinaisons vulgaires, qu’on ne devrait point s’étonner que des imaginations fortement religieuses crussent de semblables desseins dirigés par des conseils supérieurs à ceux des hommes. […] René avait toujours donné pour motif de ses refus le peu d’intérêt de son histoire, qui se bornait, disait-il, à celle de ses pensées et de ses sentiments. « Quant à l’événement qui m’a déterminé à passer en Amérique, ajoutait-il, je le dois ensevelir dans un éternel oubli. » « Quelques années s’écoulèrent de la sorte, sans que les deux vieillards lui pussent arracher son secret.

585. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre I. Polémistes et orateurs, 1815-1851 »

Magistrat, d’une vieille famille de magistrats de Savoie, jeté hors de chez lui par la Révolution française qui annexa son pays, Joseph de Maistre671, s’en alla à l’autre bout de l’Europe représenter son maître le roi de Sardaigne : il passa quatorze ans de sa vie (1802-1816) dans cet exil de Saint-Pétersbourg, vivant pauvrement, stoïquement, jugeant de haut les événements et les hommes, et composant dans son loisir ses principaux ouvrages. […] Sans cesse, il fallait recourir aux principes de l’ancien droit, ou du droit nouveau, les expliquer, les fonder, les dissoudre, rechercher le sens des grands événements d’où le présent était sorti, et dresser comme des inventaires de leurs résultats moraux ou sociaux. […] Il n’a supprimé le hasard, l’aventure, les poussées ingouvernables des événements, qu’à, force d’affirmations téméraires et de grosses approximations.

586. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « De l’influence récente des littératures du nord »

Événement considérable, mais non point surprenant. […] Et je doute même que, en dépit de leur grandeur extérieure, les événements publics  mêlés aux comédies et aux drames privés  que nous raconte Tolstoï, dépassent en intérêt et en importance ceux dont Flaubert nous offre le vaste et minutieux tableau. […] D’autres accueillent la leçon des événements, s’améliorent par l’expérience.

587. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le baron de Besenval » pp. 492-510

Vieux, il y revenait en souvenir et avec regret comme aux meilleurs instants de sa vie, « instants heureux, s’écrie-t-il, où, loin de s’occuper d’événements sinistres tels que ceux qui ont empoisonné la fin de notre carrière, on ne s’occupait que d’amours et de plaisirs ! » Mais les événements et les embarras de la fin du siècle tenaient plus qu’il ne croyait à ces jolis passe-temps de son milieu.

588. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset, professeur d’histoire au lycée Bonaparte. »

Nouer un commerce intime et de tête-à-tête avec les plus grands hommes d’un grand siècle ; tenir entre ses mains les lettres originales de Louis XIV, de Louvois, de Turenne, de Condé, de Vauban, de Luxembourg et de tant d’autres, dont l’écriture semble encore fraîche, comme si elle était tracée d’hier ; démêler sans peine tous les secrets de la politique et de la guerre ; assister à la conception et à l’éclosion des événements ; surprendre l’histoire, pour ainsi dire, à l’état natif, quelle plus heureuse fortune et quelle plus grande joie ! […] Cette histoire, telle qu’il a su l’établir et la bâtir, est tout à fait le contraire de ces histoires générales, systématiques, où l’auteur prête de ses intentions et de son parti pris aux personnages et aux événements eux-mêmes, tellement qu’en les lisant le vulgaire des esprits qui aime à être mené croit tout comprendre et se déclare charmé, tandis que tout esprit politique et qui a tâté des affaires humaines sent aussitôt que ce n’est pas ainsi que les choses ont dû se passer.

589. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Oeuvres inédites de la Rochefoucauld publiées d’après les manuscrits et précédées de l’histoire de sa vie, par M. Édouard de Barthélémy. »

Cousin que la publication de ce Mémoire soit un événement pour l’histoire littéraire : pourquoi cet éternel besoin de surfaire sa marchandise et de tirer de son côté la couverture ? […] Pascal le premier fit non pas même un livre, mais un pamphlet, une suite de lettres qui fut dès le premier jour un événement, et qui devint au bout de l’année un monument.

590. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Le maréchal de Villars. »

Parmi ces noms fameux, il en est un qui, pour nous Français, l’est moins encore par la grandeur de l’action que par l’à-propos et l’urgence, par l’imprévu de l’événement et les conséquences promptes qui en jaillirent ; c’est Denain, qui fit tourner la chance depuis si longtemps contraire et qui releva l’honneur de notre drapeau tout à la fin de Louis XIV. […] Aussi l’historien des Mémoires militaires, rédigés sous Louis XVI et publiés seulement de nos jours, n’hésite-t-il pas à conclure son récit de la campagne de 1710 en ces termes, si avantageux à Villars : « Ce général sauva, pour la deuxième fois, la France ; peut-être aurait-il conservé quelque place de plus si, d’un côté, un reste d’espérance de paix, et, de l’autre, le danger de mettre le royaume au hasard d’un événement douteux, n’eût dicté les ordres du roi à son général, et si le général lui-même n’eût été retenu et par la crainte des risques auxquels un combat pouvait l’exposer, et par le mauvais état dans lequel étaient les troupes.

591. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

La description des préparatifs est très-sentie, et l’événement qui a tant marqué depuis dans la vie de M. de Girardin y donne un sens particulier et comme prophétique : « Le mystère qu’il faut mettre à tous les apprêts d’un duel, ces apprêts mêmes, ont quelque chose d’horrible ; les soins, les précautions qu’il faut prendre, le secret qu’il faut garder, tout cela ressemble aux préparatifs d’un crime. […] M. de Girardin, marié en 1831 avec la personne si distinguée qui doubla pendant tant d’années son existence, était mis en demeure plus que jamais de se frayer son chemin dans une société que les événements de 1830 avaient fort mélangée à la fois et simplifiée.

592. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite.) »

« Nous avions beau nous attendre, écrivait-elle à sa mère, à l’événement devenu inévitable depuis deux jours, le premier moment a été atterrant, et nous n’avions pas plus l’un que l’autre de parole. […] Revenons aux choses graves et aux événements qui changèrent toute la direction de sa vie.

593. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire de la Grèce, par M. Grote »

Appliquant son procédé au plus grand événement de ces âges mythiques et héroïques, à la guerre de Troie, M.  […] Grote fait remarquer qu’il y a dans le XIe livre et les suivants plusieurs passages qui sont en contradiction formelle avec l’événement principal de ce IXe livre, où l’on a assisté à l’humiliation profonde, à la pleine et entière résipiscence d’Agamemnon.

594. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre »

Rousset a fait précéder la Correspondance d’une fort bonne Introduction qui la résume et qui donne sur les personnages et les événements tous les éclaircissements qu’on peut désirer. […] Ces soupçons, fruit d’une imagination échauffée et d’une haine recuite, n’avaient pu lui venir que longtemps après l’événement ; il s’est fait plus de tort à lui-même qu’à son ennemi, en ne se retenant pas de les exprimer.

595. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SOUZA » pp. 42-61

Une jeune fille qui sort pour la première fois du couvent où elle a passé toute son enfance ; un beau lord élégant et sentimental, comme il s’en trouvait vers 1780 à Paris, qui la rencontre dans un léger embarras et lui apparaît d’abord comme un sauveur ; un très-vieux mari, bon, sensible, paternel, jamais ridicule, qui n’épouse la jeune tille que pour l’affranchir d’une mère égoïste et lui assurer fortune et avenir ; tous les événements les plus simples de chaque jour entre ces trois êtres qui, par un concours naturel de circonstances, ne vont plus se séparer jusqu’à la mort du vieillard ; des scènes de parc, de jardin, des promenades sur l’eau, des causeries autour d’un fauteuil ; des retours au couvent et des visites aux anciennes compagnes ; un babil innocent, varié, railleur ou tendre, traversé d’éclairs passionnés ; la bienfaisance se mêlant, comme pour le bénir, aux progrès de l’amour ; puis, de peur de trop d’uniformes douceurs, le monde au fond, saisi de profil, les ridicules ou les noirceurs indiqués, plus d’un original ou d’un sot marqué d’un trait divertissant au passage ; la vie réelle, en un mot, embrassée dans un cercle de choix ; une passion croissante qui se dérobe, comme ces eaux de Neuilly, sous des rideaux de verdure, et se replie en délicieuses lenteurs ; des orages passagers, sans ravages, semblables à des pluies d’avril ; la plus difficile des situations honnêtes menée à fin jusque dans ses moindres alternatives, avec une aisance qui ne penche jamais vers l’abandon, avec une noblesse de ton qui ne force jamais la nature, avec une mesure indulgente pour tout ce qui n’est pas indélicat : tels sont les mérites principaux d’un livre où pas un mot ne rompt l’harmonie. […] Dans Eugénie et Mathilde, où elle a peint l’impression des premiers événements de la Révolution sur une famille noble, il est permis de lui attribuer une part du sentiment de Mathilde, qui se dit ennuyée à l’excès de cette Révolution, toutes les fois qu’elle n’en est pas désolée17.

596. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. L’Histoire »

L’essor que va prendre le genre historique s’annonce par les publications de documents originaux, par les collections de Mémoires et Journaux authentiques825, qui séduisent souvent les littérateurs et le public par le pittoresque des tableaux et le dramatique des événements. […] La haute conception qui jadis avait permis à Bossuet d’étudier si librement les sociétés païennes de l’antiquité, et de rechercher les causes physiques ou morales des événements, la croyance au gouvernement de la Providence, a mis Tocqueville à l’aise : assuré que la France allait où Dieu la menait, il a regardé sans haine et sans désespoir la civilisation issue de la Révolution.

597. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre IV. Ordre d’idées au sein duquel se développa Jésus. »

Chaque prophète a son hazar, ou règne de mille ans (chiliasme), et de ces âges successifs, analogues aux millions de siècles dévolus à chaque bouddha de l’Inde, se compose la trame des événements qui préparent le règne d’Ormuzd. […] Il n’attacha jamais beaucoup d’importance aux événements politiques de son temps, et il en était probablement mal informé.

598. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Discours sur l’histoire de la révolution d’Angleterre, par M. Guizot (1850) » pp. 311-331

Quand la chose est faite, on ne voit plus que l’événement. […] Clarendon se trompa sur son époque ; il méconnut le sens des grands événements auxquels il avait assisté… Ainsi, vous paraissez croire que la Providence s’y prend avec plus de façons quand il s’agit de ces hommes éminents qu’on appelle Mazarin ou Walpole, que quand il s’agit des simples honnêtes gens privés !

599. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Confessions de J.-J. Rousseau. (Bibliothèque Charpentier.) » pp. 78-97

En me livrant à la fois au souvenir de l’impression reçue et au sentiment présent, je peindrai doublement l’état de mon âme, savoir au moment où l’événement m’est arrivé et au moment où je l’ai décrit ; mon style inégal et naturel, tantôt rapide et tantôt diffus, tantôt sage et tantôt fou, tantôt grave et tantôt gai, fera lui-même partie de mon histoire. […] Nous courons risque d’être aujourd’hui trop peu sensibles à ces premières pages pittoresques de Rousseau ; nous sommes si gâtés par les couleurs, que nous oublions combien ces premiers paysages parurent frais et nouveaux alors, et quel événement c’était au milieu de cette société très spirituelle, très fine, mais sèche, aussi dénuée d’imagination que de sensibilité vraie, dépourvue en elle-même de cette sève qui circule et qui, à chaque saison, refleurit.

600. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

Pasquier écrit en français ses doctes et utiles Recherches de la France ; il publie en français ses Lettres, premier recueil de ce genre qui ait paru dans notre langue, et qui sont tout un miroir des événements, des mœurs et des opinions de son temps comme de la vie de l’auteur lui-même. […] Mais bientôt, avec l’âge et le cours des événements, les sujets deviennent plus sérieux : à partir d’un certain moment, toute l’histoire et la politique de son temps y passent, et nous y assistons avec lui, c’est-à-dire par les yeux d’un témoin judicieux, éclairé, placé au meilleur point de vue, ni trop près ni trop loin de la Cour, qui ne se pique point de parler en homme d’État, mais qui apprécie et sent les choses de sa nation avec le cœur et l’intelligence de cette haute bourgeoisie, alors si intègre et si patriotique, et qui se pouvait dire le cœur même de la France.

601. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — I. » pp. 84-104

On a essayé de dire qu’il y avait désaccord de vues politiques dès l’origine entre Carrel et ses deux amis : le plus simple examen, la lecture des articles que Carrel inséra dans le journal durant toute cette année 1830, avant et depuis les événements de Juillet, suffit pour détruire cette assertion. […] On le trouve très remarquable cependant, à y regarder de près, dès cette première partie un peu contrainte de sa rédaction au National et avant les événements de Juillet, depuis l’article sur la mort de Rabbe, qui est dans le premier numéro (3 janvier 1830), jusqu’à celui sur Vandamme, qui est du 23 juillet.

602. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le président de Brosses. Sa vie, par M. Th. Foisset, 1842 ; ses Lettres sur l’Italie, publiées par M. Colomb, 1836. » pp. 85-104

Cette thèse fit événement à l’Université ; le corps des professeurs, le doyen à leur tête, vint solennellement féliciter la mère du jeune licencié, et, le 13 février 1730, à peine âgé de vingt et un ans, de Brosses était assis sur le banc des conseillers au parlement de Bourgogne. […] Qui a su mieux peindre les situations, enchaîner les événements, perdre et retrouver d’une façon plus naturelle un si grand nombre de personnages, et, par une transition de deux vers, remettre son lecteur au fait de la suite d’une longue histoire racontée dans les chants précédents ?

603. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le cardinal de Richelieu. Ses Lettres, instructions et papiers d’État. Publiés dans la Collection des documents historiques, par M. Avenel. — Premier volume, 1853. — II. (Fin.) » pp. 246-265

Ce n’était pas même la déplacer que de se souvenir des événements où il avait pris tant de part, et qui ne faisaient qu’une même trame avec le présent. Et il y a mieux : quand on lit les Mémoires de Richelieu, on s’aperçoit à tout moment qu’au milieu des choses les plus éloignées et les plus anciennes qu’il raconte, il parle tout à coup au temps présent ; il est à croire que, de très bonne heure, il avait pris des notes sur les choses et sur les événements, et ces notes, tantôt vives, tantôt un peu longues, passèrent ensuite à peu près intégralement dans le corps de son ouvrage.

604. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1873 » pp. 74-101

Un grand nombre de dessins de Gavarni, sur les événements de 1848, sont faits d’après des croquis de Guys. […] Après le dîner, la princesse s’est absorbée dans le travail de la tapisserie : un moyen pour elle, au milieu des grands événements, de s’absenter de son salon, de s’appartenir.

605. (1892) L’anarchie littéraire pp. 5-32

Voici comment je me suis expliqué là-dessus dans L’Événement du 13 avril 1891 : « En fondant un journal que je mettais à la disposition des Jeunes, je ne voulais pas remorquer exclusivement une littérature. […] Dans l’article déjà cité de L’Événement j’ai expliqué leurs théories.

606. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXIII » pp. 133-140

M. de Maistre écrivait il y a bien longtemps : « Qu'on me donne la feuille des ordinations en France, et je pourrai prédire de grands événements. » Il voulait dire par là que, s’il avait vu, vers 1817, de grands noms, les enfants d’illustres familles entrer en foule dans le clergé pour réparer les brèches qu’avait faites l’impiété voltairienne de leurs pères, il aurait bien auguré de l’avenir de la religion en France.

607. (1874) Premiers lundis. Tome I « M.A. Thiers : Histoire de la Révolution française Ve et VIe volumes — I »

Les quatorze mois écoulés, depuis le 2 juin 1793 jusqu’au 9 thermidor 1794, sont les plus mémorables, les plus féconds en événements et en résultats de la Révolution française et, peut-être, de toute histoire humaine.

608. (1875) Premiers lundis. Tome III « Le roi Jérôme »

Et ici, franchissant les années pénibles, on n’a qu’à noter le bon sens avec lequel le roi Jérôme apprécia la situation que lui faisaient les événements de 1813 : « Roi par les victoires des Français, disait-il, je ne saurais l’être encore après leurs désastres. » Mais ce serait faire injure à sa mémoire que de louer la fidélité avec laquelle il s’exécuta, sans prêter un seul instant l’oreille aux fallacieuses promesses par lesquelles on essayait de le détacher.

609. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre V. Résumé. »

À l’instant où s’ouvrent les États Généraux, le cours des idées et des événements est non seulement déterminé, mais encore visible.

610. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre III. De la sécheresse des impressions. — Du vague dans les idées et le langage. — Hyperboles et lieux communs. — Diffusion et bavardage »

Ce n’est ni l’ascendant de l’esprit, ni la force du raisonnement qui séduisent le public : mais ils fournissent, toute préparée pour l’usage, la formule qui juge le dernier événement politique, la dernière œuvre littéraire.

611. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Rêveries sur un empereur »

Il considérerait que, si des iniquités ont été commises contre ses pères il y a quatre-vingts ans, Dieu ne permet plus d’en tirer vengeance, justement parce que l’humanité a quatre-vingts ans de plus, et que, du reste, les événements les avaient déjà réparées.

612. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Le termite »

Rosny : « Aussi, en Servaise, comme un clou formidable, perpétuelle, obsessionnelle, grandit l’idée de la note, la vie prise telle quelle, la vérité de la vision, de l’ouïe et de l’événement respecté en idole ; le tourment de se supprimer la réflexion et la transformation ; la recherche d’un absolu documentaire », etc… (page 35).

613. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les snobs » pp. 95-102

Je crois vraiment que quelques-uns des événements les plus heureux de notre littérature, et par exemple l’épuration et l’affinement de la langue dans la première moitié du dix-septième siècle, l’entrée des sciences politiques et naturelles dans le domaine littéraire au dix-huitième, le mouvement sentimental et naturiste provoqué par Jean-Jacques, et l’évolution romantique suivie de l’évolution réaliste qu’a suivie la réaction idéaliste, un peu trouble, à laquelle nous assistons, ne se seraient point accomplis aussi vite sans les snobs.

614. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Pour encourager les riches. » pp. 168-175

Mais, cela dit, il me sera peut-être permis, à l’occasion d’un événement récent, de hasarder une remarque fort simple.

615. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VIII. Les Fedeli » pp. 129-144

Ce fut sans doute à la suite de ces derniers événements, après la retraite de la reine mère à Blois, que les Italiens s’en retournèrent en Italie.

616. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre VII. L’Histoire de la Physique mathématique. »

Ils auraient cru être hardis dans leurs prédictions, et combien, après l’événement, nous les trouverions timides.

617. (1887) Discours et conférences « Discours à l’Association des étudiants »

Que de fois on arrive à se féliciter que l’avis qu’on avait émis n’ait pas été suivi et que les événements vous aient donné tort.

618. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXX » pp. 330-337

Cet événement fut au nombre de ceux qui concoururent, dans la période de 1670 à 1680, à opérer de grands changements dans la situation, dans l’esprit et le caractère du roi, et a confirmer l’ascendant qu’avaient pris sur les mœurs de la cour les exemples des personnes en qui s’étaient conservées les traditions morales de l’hôtel de Rambouillet.

619. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Avertissement » pp. -

À vrai dire, les Époques littéraires ne doivent être datées que de ce que l’on appelle des événements littéraires1 : — l’apparition des Lettres provinciales, ou la publication du Génie du christianisme ; — et non seulement cela est conforme à la réalité, mais c’est encore le seul moyen qu’il y ait d’imprimer à l’histoire d’une littérature cette continuité de mouvement et de vie, sans laquelle, à mon sens, il n’y a pas d’histoire.

620. (1818) Essai sur les institutions sociales « Préface » pp. 5-12

Bien des choses ont changé, et moi-même j’ai dû changer en présence des événements.

621. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Jean-Jacques Rousseau »

Toujours est-il qu’une fois créés, ce fut un événement superbe !

622. (1898) Essai sur Goethe

Ces détails furent fournis à Goethe par Kestner, qui envoya à son ami une relation circonstanciée de l’événement, accompagnée des réflexions judicieuses que peut faire, en pareil cas, un homme absolument incapable de comprendre le suicide. […] Une loi spéciale défendait de fumer dans les rues ; une autre, les visites trop fréquentes dans les villages de la banlieue ; une autre encore interdisait de tenir des propos inutiles sur les événements du jour. […] Derrière ces grands personnages et leur cercle, les 7 000 habitants de la modeste capitale continuaient à vivre en paix, sans se soucier encore des grands événements dont ils allaient bientôt subir le contrecoup. […] Pendant ces années, de graves événements se passaient, auxquels Goethe ne put éviter d’être mêlé, mais qui n’exercèrent sur sa pensée aucune action efficace. […] Baumgartner, entre autres, après avoir cité les lignes qu’on vient de lire, s’indigne avec véhémence : une comédie, s’écrie-t-il à peu près, des événements qui brisent le trône des rois de France, renversent les armées allemandes devant les Jacobins, traînent dans la boue le nom de l’Allemagne, — une comédie !

623. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

. —  Désaccord du style classique et des événements romantiques. —  Comment Dryden reprend et gâte les inventions de Shakspeare et de Milton. —  Pourquoi ce drame n’a pas abouti. […] Je reconnais derrière ces cascades d’invraisemblances et d’aventures les courtisans puérils et blasés qui, alourdis par le vin, ne sentaient plus les discordances, et dont les nerfs ne remuaient que par le choc des surprises et la barbarie des événements. […] Dryden veut garder le fond du vieux drame anglais, et conserve l’abondance des événements, la variété des intrigues, l’imprévu des accidents et la représentation physique des actions sanglantes ou violentes. […] Supposez une sorte de verve et de folie romanesque, le style le plus osé, tout bizarre et poétique, des chansons, des peintures, des rêveries à haute voix, le franc dédain de toute vraisemblance, un mélange de tendresse, de philosophie et de moquerie, toutes les grâces fuyantes des sentiments nuancés, tous les caprices de la fantaisie bondissante : la vérité des événements ne vous importera guère. […] Quelle misère que de réduire de tels événements à une pastorale, d’excuser Antoine, de louer par contre-coup Charles II, de roucouler comme dans une bergerie !

624. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Maurice Maeterlinck : « Il n’y a pour nous, dans notre vie et dans notre univers, qu’un événement qui compte, c’est notre mort. » Y pensons-nous ? […] Pour nous aider à en subir l’événement, y a-t-il un autre sentiment que celui de la lignée où nous trouvons notre place d’éternité, la lignée de nos morts ? […] Mais la cause de cet enchaînement, capricieux d’ailleurs, elle ne réside pas dans une fatalité mystérieuse : elle réside dans la volonté intelligente des hommes qui tantôt continuent, tantôt modifient la série des événements. […] Il n’intervient pas dans son œuvre : ses personnages, on ne voit pas qu’il ait pour eux de la tendresse ou de la haine ; les événements ne l’enchantent pas, ne l’offensent pas. […] … Deux événements ont eu beaucoup d’influence, et malheureuse, sur sa destinée : la mort de son père et le remariage de sa mère.

625. (1836) Portraits littéraires. Tome II pp. 1-523

Le temps et l’espace, les événements et les lieux lui arrivent sous forme d’émotions ; c’est à son cœur qu’ils s’adressent plutôt qu’à son intelligence. […] mais à travers les cascatelles coquettes des alexandrins académiques, j’ai vainement cherché l’ombre ou le retentissement d’un événement, si petit qu’il fût. […] Les trois premiers actes sont prolixes et languissants, malgré la multitude des événements qui les remplissent. […] Hugo nous mène à la cour, je ne vois pas pourquoi il nous fait grâce des caquets et des médisances où les plus grands événements se mêlent parfois, à la cour surtout. […] l’événement est-il venu démentir mes prophéties ?

626. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre III. — Du drame comique. Méditation d’un philosophe hégélien ou Voyage pittoresque à travers l’Esthétique de Hegel » pp. 111-177

Ces sentiments sont en petit nombre ; leur conflit n’est jamais qu’un duel ; les événements extérieurs ne peuvent pas empêcher la lutte de courir à son dénouement nécessaire, le retour du Divin à l’unité absolue de son essence : de là la simplicité du drame grec. […] C’est au contraire la haute raison des événements, quoiqu’elle ne se manifeste pas encore comme Providence ayant conscience d’elle. […] Par là paraissent, en opposition avec les conflits simples, tels que nous les offre le théâtre antique, la multiplicité des personnages et la richesse des caractères, les incidents extraordinaires et compliqués, le labyrinthe des intrigues, l’imprévu des événements. […] Là, il ne cache pas ses vues politiques, les événements et les situations du jour.

627. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (2e partie) » pp. 97-191

La profondeur et l’étendue, avec la haute moralité, ne messiéent pas plus à l’histoire des faits intellectuels qu’à l’histoire des événements militaires ou sociaux. […] « La fable doit être composée de telle sorte qu’il suffise d’entendre les choses, même sans les voir, pour frissonner et s’attendrir au récit des événements ; et c’est bien ce qu’on éprouve rien qu’à entendre raconter l’histoire d’Œdipe. […] Cherchons donc quels sont les objets qui excitent la terreur et la pitié dans les événements réels de la vie. […] « Mais quand ces douloureux événements arrivent entre des personnes qui s’aiment, et que, par exemple, un frère tue ou doive tuer son frère, un fils son père, une mère son fils, un fils sa mère, ou qu’il se commet d’autres malheurs de ce genre, voilà les situations qu’il faut rechercher. » Suivent des exemples célèbres et choisis dans la tragédie grecque.

628. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juin 1886. »

A vrai dire, il n’y a point d’autre analogie entre les deux versions que celle du « conte », Aussi Siegfried est-il le héros de l’opéra primitif, et non pas Wotan, et Wagner croyait pouvoir tout condenser dans la Mort de Siegfried, il est beaucoup question des dieux, dans l’ancien livret, on les invoque constamment, mais on ne les voit pas ; les Nornes, les Filles du Rhin, des chœurs de Walküres se chargent de nous raconter ce qu’il nous est indispensable de savoir sur les événements antérieurs. […] Lorsqu’il refondit ce poème dans celui aujourd’hui nommé la Gœtterdaemmerung, les passages se rapportant aux événement antérieurs durent être biffés, et furent remplacés par les scènes des Nornes (qui, dans la première version, annonçaient, banalement, que Siegfried « accomplirait ce que joyeusement il avait commencé »), du monologue de Hagen, de Waltraute ; de même quelques-uns des chœurs disparurent ; deux ou trois scènes furent transformées du tout au tout, — celle d’Alberich et de Hagen, les paroles de Siegfried mourant, la scène finale de Brünnhilde. […] Le romantique Dickens n’est point plus soucieux que Hugo de l’analyse rationnelle : mais déjà ses romans recréent une vie plus naturelle, d’événements plus simples et plus réels. […] Zola ne se résigne point à recréer les seules notions sensibles : il prend pour sujets des événements psychiques, et pour personnages des hommes supérieurs : il peuple ainsi de fantômes des œuvres qui pourraient être fort belles s’il les bornait à la description des couleurs et des gestes ; s’il variait, aussi, la musique trop régulière, et un peu facile, de ses phrases.

629. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Shakespeare »

un mérite qu’on n’attendait pas de celui qui, dix ans auparavant, écrivait l’Événement. […] J’ai dit, en rappelant plus haut l’Événement, ce que jusque-là avait été François Hugo : — rien de plus que le fils de son père, comme Louis Racine l’avait été du sien. […] » C’est parler un peu comme à l’Événement. […] mais excusable de la part d’un homme qui a été élevé de manière à croire que la première représentation d’Hernani fut un événement supérieur à la bataille de Tolbiac, la préface du Coriolan et du Roi Lear est un morceau très intéressant de renseignement, d’analogies heureuses, quelquefois même d’aperçu ; et entre tous les travaux critiques qu’a inspirés Shakespeare, ce n’est pas, à coup sûr, le moins distingué.

630. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Féval » pp. 107-174

Il le sait mieux que moi, sans doute, mais, moi, je parierais avec assurance que c’est un événement extérieur d’une forte action sur sa pensée qui a poussé dès l’origine son esprit vers la forme de roman qu’il a adoptée, et faussé ainsi sa vraie vocation. […] L’auteur des Mystères de Londres, des Amours de Paris, du Fils du diable, du Bossu, des Fanfarons du Roi, et de tant d’autres ouvrages, est, dans l’ordre du roman, ce que les mélodramaturges sont dans l’ordre du drame, et ils ont beau tresser et tordre, dans les implications et les complications de leur œuvre, les événements, les incidents, les péripéties, les surprises, les mélodramaturges du roman comme ceux du drame n’en sont pas moins obligés, dans une mesure quelconque, à la passion, sous peine de n’être plus que des joueurs d’échecs ou de casse-têtes chinois littéraires. […] Fils de ce romantisme qui, en passant, a laissé partout une lave incandescente de vie qu’on n’éteindra plus, Féval ne procède jamais à la manière incolore de ce pauvre diable de Le Sage, à peu près poétique comme son nom, mais il n’en trouble pas moins la hiérarchie des choses, dans son système de roman, en mettant en premier l’intérêt des événements, qui devrait être le second, et en second l’intérêt des sentiments, qui est certainement le premier… Et ne croyez pas qu’il n’en ait point l’intelligence ! […] Enfin, la comédie elle-même, dont le métier est d’être gaie, mais qui ne sait plus son métier, fait des dénouements avec des coups de pistolet et incruste, dans des dialogues sans chaleur et sans verve, des mots cherchés et travaillés pendant trois mois… Aussi, lorsque l’on en est là, il faut bien convenir que c’est un événement heureux que l’arrivée d’un livre gai, d’un éclat de frais et bon rire, d’une manière frisque, pétulante et légère, qui fait l’effet d’un flacon de sels anglais au cerveau, et, dans le néant littéraire où tout tombe, nous ragaillardit et nous ravigote l’esprit et le cœur !

631. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De l’état de la France sous Louis XV (1757-1758). » pp. 23-43

Il est certain que cet événement est glorieux en apparence, et qu’il donne à M. de Richelieu la facilité de se porter en avant ; mais gare les suites ! […] Choiseul, qui est militaire, aura droit d’avoir un avis sur les opérations de campagne : Vous avez du courage, lui écrit Bernis en le proclamant le meilleur de ses amis et le serviteur qui peut être le plus utile au roi (26 août), et les événements ne vous font pas tant d’impression qu’à moi.

632. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — I. » pp. 325-345

Le comte Roederer, dont le nom auprès des générations nouvelles ne réveillait guère que l’idée d’un personnage politique mêlé aux grands événements de la Révolution et du Consulat, s’est révélé tout d’un coup comme un écrivain très littéraire par son Mémoire sur la société polie et sur l’hôtel Rambouillet, imprimé en 1835. […] Quarante-huit ans après, c’était le même homme qui publiait son Mémoire sur la société polie ; ce qui faisait dire à M. de Talleyrand, parlant au fils de l’auteur : « Il y a une chose remarquable dans la vie de votre père, et qui n’est peut-être arrivée à personne avant lui, c’est qu’à cinquante ans de distance il a publié deux ouvrages, dont le premier a fondé sa réputation, et dont le second vient de la couronner. » En même temps et aux approches de 89, Roederer avait l’habitude et le besoin d’écrire sous forme plus courante et plus brève sur toutes les questions du jour, sur les événements ou conflits qui occupaient à Metz l’attention publique : en un mot, comme Franklin, il était par nature et par goût journaliste ; il le sera pendant une grande partie de sa vie, et conciliera, tant qu’il y aura moyen, ce genre de publication avec les hauts emplois et les dignités même de l’État.

633. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — I. » pp. 301-321

La conversation, ajoute-t-il, est pour eux un jeu, une mine d’événements. […] Nous avons eu, depuis, ce qui était alors l’idéal pour Beyle, ces drames ou tragédies en prose « qui durent plusieurs mois, et dont les événements se passent en des lieux divers » ; et pourtant ni Corneille ni Racine n’ont encore été surpassés.

634. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

Daru ne restait pas lié aux souvenirs les plus honorables de la littérature de son temps comme il l’est aux plus grands événements de notre histoire. […] Il était encore à l’armée dite du Danube, et à Zürich, lorsque s’accomplirent à Paris les événements du 18 Brumaire ; les correspondances de cette date entre lui et quelques-uns de ses amis littérateurs et auteurs de pièces de théâtre (Creuzé de Lesser, Barré, Goulard) le montrent plus préoccupé réellement des lettres que de la politique.

635. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Journal et mémoires du marquis d’Argenson, publiés d’après les manuscrits de la Bibliothèque du Louvre pour la Société de l’histoire de France, par M. Rathery » pp. 238-259

Il a des innovations de termes les plus inutiles : « Nous avions toujours un grand atlas sur la table, pour suivre la position du local des événements » ; pour dire, le lieu des événements.

636. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite.) »

Cette lettre qu’il crut devoir adresser au baron pour se mettre, à tout événement, en garde contre ce qu’il appelait les mensonges de Rousseau, et qu’il le priait de communiquer à toute la société philosophique, doit être des premiers jours de juillet 1766 ; répandue, colportée a l’instant par le baron et par ses amis, elle fit dans Paris l’effet d’une bombe qui éclate. […] Faisant équitablement et à vue de pays la balance des torts et admettant volontiers tous ceux de Rousseau, elle relève aussi ce qui est à reprendre dans le procédé de Hume, — et envers elle d’abord : « Quelque raison que vous me puissiez dire pour ne m’avoir pas instruite la première de l’étrange événement qui occupe à cette heure l’Angleterre et la France, je suis convaincue que par réflexion vous sentirez, si vous ne l’avez déjà senti, qu’il n’y en peut avoir de valable.

637. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite et fin.) »

Son arrivée fut un événement ; la Cour et la ville la fêtèrent à l’envi ; elle était la lionne du moment, le sujet de conversation à la mode ; elle faisait concurrence au célèbre Wilkes dont le procès se jugeait dans le même temps. […] Plus d’un événement empêcha Mme de Boufflers d’exécuter ce projet qui allait si bien à sa curieuse et voyageuse nature.

638. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.). Guerre des Barbets. — Horreurs. — Iniquités. — Impuissance. »

— Ce serait une folie, répondaient les prudents et sensés médiateurs, de compter aujourd’hui sur des événements miraculeux. […] Ses relations « critiques et dogmatiques » sont des plus intéressantes ; il a fait l’histoire critique de quelques-unes des campagnes de son temps en s’appliquant à juger les opérations selon les principes de l’art et « à mettre en lumière les rapports des événements avec ces principes ».

639. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite.) »

Après cela eût-il suffi d’avoir un plan arrêté, deux mois plus tôt, pour le faire prévaloir et pour éluder les événements ? […] L’autre incident, qui fit événement dans l’Assemblée et qui est resté mémorable, fut sa motion (15 août 1790) pour le rappel à Paris de l’abbé Raynal, frappé depuis 1781 par un arrêt du Parlement, et le singulier remerciement qu’adressa ensuite l’abbé Raynal à l’Assemblée dans le sens et par le conseil de Malouet.

640. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VIII. La question de gout ce qui reste en dehors de la science » pp. 84-103

Les faits sont déjà trop souvent difficiles à établir, témoin les discussions interminables que soulève la réalité de certains événements historiques. […] Un roman, très moral, s’il n’émeut pas, s’il nous promène parmi des personnages et des événements qui ne sont ni vrais ni vraisemblables, n’est qu’une ennuyeuse inutilité et la plus fade des lectures.

641. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Théodore Leclercq. » pp. 526-547

L’irritation et la fureur qu’excitèrent les événements de 1815 redonnèrent une fièvre qui fit oublier la fatigue et qui embrasa les cerveaux ; les partis se retrouvèrent aux prises comme s’il n’y avait pas eu déjà tout un cercle accompli de révolutions. […] Étranger, par ma position et mon caractère, aux grands événements qui ont agité le monde, mes amitiés et le désir de voir m’ont conduit dans divers pays, et, partout où je me suis trouvé, j’ai joué et fait jouer des proverbes.

642. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « M. Fiévée. Correspondance et relations avec Bonaparte. (3 vol. in-8º. — 1837.) » pp. 217-237

À la manière dont il y jugeait Rousseau, Voltaire, Mably, Raynal, Helvétius et tutti quanti, on sentait un esprit singulièrement dégagé de toute superstition envers les grandes illustrations littéraires : « Heureux, disait-il en concluant, heureux ceux qui n’ont pas fermé les yeux sur les événements pour ne les ouvrir que sur les livres !  […] Fiévée, après avoir vu Bonaparte, reçut par l’intermédiaire de M. de Lavalette l’invitation de lui écrire dans une série de notes ses impressions et ses vues sur les événements et les choses.

643. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — I. » pp. 127-148

Plus tard, dans les relations diplomatiques, lord Shelburne, traitant avec Franklin, observait que son caractère principal en affaires était « de ne point s’embarrasser de faire naître les événements, mais seulement de bien profiter de ceux qui arrivaient » ; et il lui reconnaissait la science de la médecine expectative. […] C’est par ces degrés de sagacité morale, de sagesse de conduite, de rectitude et d’adresse, d’amour du bien public et de bonne entente de toutes choses, que Franklin se préparait peu à peu, et sans le savoir, au rôle considérable que lui réservaient les événements.

644. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — II. (Fin.) » pp. 308-328

Il me semble toujours que, si l’auteur qui procède par cette méthode n’avait pas connaissance des événements historiques a posteriori, les principes dont il prétend les déduire ne lui en feraient pas deviner un seul ; preuve évidente que ces principes sont faits à la main et après coup, qu’ils sont plus ingénieux que solides, et qu’ils ne sont pas les véritables ressorts du jeu qu’on leur attribue… En fait de politique, rien n’arrive deux fois de la même manière. […] Sa Constitution, à lui, était toute dans les vers de Pope : « Laissez les fous combattre pour les formes de gouvernement ; celui, quel qu’il soit, qui est le mieux administré, est le meilleur. » Les événements qui suivirent ne furent que trop propres à le confirmer, sans doute dans cette pensée favorite, que« la cause du genre humain était désespérée », et que la seule ressource était tout au plus, çà et là, dans quelque grand et bon prince que le sort accorde à la terre, dans « une de ces âmes privilégiées » qui réparent pour un temps les maux du monde.

645. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre III. “ Fantômes de vivants ” et “ recherche psychique ” »

L’unique question, ici, est de savoir si l’événement a bien eu lieu à tel moment déterminé du temps, en tel point déterminé de l’espace, et comment il s’est produit. […] C’est pourquoi, si c’eût été le moment de discuter avec le docteur, je lui aurais dit : « je ne sais si le récit qu’on vous a fait était digne de foi ; j’ignore si la dame a eu la vision exacte de la scène qui se déroulait loin d’elle ; mais si ce point m’était démontré, si je pouvais seulement être sûr que la physionomie d’un soldat inconnu d’elle, présent à la scène, lui est apparue telle qu’elle était en réalité — eh bien alors, quand même il serait prouvé qu’il y a eu des milliers de visions fausses et quand même il n’y aurait jamais eu d’autre hallucination véridique que celle-ci, je tiendrais pour rigoureusement et définitivement établie la réalité de la télépathie, ou plus généralement la possibilité de percevoir des objets et des événements que nos sens, avec tous les instruments qui en étendent la portée, sont incapables d’atteindre. » Mais en voilà assez sur ce point.

646. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XI : M. Jouffroy moraliste »

Il parcourut l’univers, la science et la vie, montrant que tout spectacle, tout événement et toute pensée y ramènent l’homme, qu’elle est l’œuvre, non d’une curiosité tranquille, mais d’un besoin impérieux et âpre, qu’elle n’est point un divertissement de l’esprit, mais la vraie et la première nourriture du cœur. […] Si, comme dit Bossuet, Dieu a fait la révolution d’Angleterre pour sauver l’âme de Madame, le plus subtil historien n’aperçoit pas dans les événements la moindre trace de ce projet ; et si le soleil est fabriqué pour éclairer les hommes, les habitants du soleil, qui sont en bon lieu pour observer sa nature, n’ont pas encore découvert sa fin.

647. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre X. »

C’est bien Eschyle qu’on peut appeler le prophète du polythéisme, l’homme doué d’une seconde vue, sublime, énergique, terrible, et, avec les événements et les hommes de l’histoire, faisant apparaître les visions de son âme. […] Cet éclat extraordinaire que jetait dès lors la tragédie, et qui faisait d’un succès dramatique un événement des fastes nationaux, cette illustration du génie poétique sous la forme la plus vivante, était renfermée dans la cité de Minerve.

648. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « APPENDICE. — M. DE VIGNY, page 67. » pp. -542

M. de Vigny aurait pu réussir de même sans doute ; le choix de l’événement est heureux ; les documents sont nombreux, faciles, et il montre assez qu’il les connaît parfaitement ; enfin son talent n’est pas vulgaire : qu’a-t-il donc fait pour gâter tant d’avantages ?

649. (1874) Premiers lundis. Tome I « Madame de Maintenon et la Princesse des Ursins — II »

Dès lors son unique pensée est d’achever doucement de vivre, et de savourer à loisir la béatitude qu’elle s’est ménagée : dans sa lettre d’adieux à madame des Ursins, le rayonnement de l’amour-propre satisfait perce sous la froideur ascétique et les sentiments chrétiens : « Vous avez bien de la bonté, madame, d’avoir pensé à moi dans le grand événement qui vient de se passer ; il n’y a qu’à baisser la tête sous la main qui nous a frappés.

650. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Réception à l’Académie Française »

La solennité de la réception, retardée plusieurs mois par un douloureux accident, avait réuni jeudi, dans la salle de l’Institut, toute l’élite de la société : c’était en effet un véritable événement littéraire.

651. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIV. De la plaisanterie anglaise » pp. 296-306

Nous avons parlé des malheurs qui sont résultés pour les Athéniens de leur goût immodéré pour la plaisanterie ; et la France nous fournirait un grand exemple à l’appui de celui-là, si la puissance des événements de la révolution avait laissé les caractères à leur développement naturel.

652. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Préface »

D’ailleurs, l’événement par lui-même est si intéressant, qu’il vaut la peine d’être observé pour lui seul, et l’on n’a pas besoin d’effort pour exclure les arrière-pensées.

653. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre V. Figures de construction et figures de pensées. — Alliances de mots et antithèses »

Voici une large période qui n’est au fond qu’une antithèse : Cent mille hommes criblés d’obus et de mitraille, Cent mille hommes couchés dans un champ de bataille, Tombés pour leur pays par leur mort agrandi, Comme on tombe à Fleurus, comme on tombe à Lodi, Cent mille ardents soldats, héros et non victimes, Morts dans un tourbillon d’événements sublimes, D’où prend son vol la fière et blanche Liberté, Sont un malheur moins grand pour la société, Sont pour l’humanité, qui sur le vrai se fonde, Une calamité moins haute et moins profonde, Un coup moins lamentable et moins infortuné Qu’un innocent, un seul innocent, condamné, Dont le sang ruisselant sous un infâme glaive, Fume entre les pavés de la place de Grève, Qu’un juste assassiné dans la forêt des lois, Et dont l’âme a le droit d’aller dire à Dieu : “Vois !

654. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Introduction. Origines de la littérature française — 1. Éléments et développement de la langue. »

La terrible croisade des Albigeois fut un grand événement littéraire autant que politique et religieux : elle porta d’un coup la langue française jusqu’aux Pyrénées et jusqu’à la Méditerranée.

655. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — K — Kahn, Gustave (1859-1936) »

Nous préférons clore cette déjà longue notice par quelques scrupuleuses indications bibliographiques, rappelant la collaboration de Gustave Kahn à la Jeune Belgique, au Décadent, à la Basoche, à la Gazette anecdotique, au Paris littéraire, à la Vie moderne, au Réveil de Gand, à la Société nouvelle, à la Revue encyclopédique, au Monde moderne, à la Revue de Paris, à la Nouvelle Revue, au Livre d’Art, à l’Épreuve, au Supplément du Pan, au Mercure de France, au Journal, à l’Événement, aux Droits de l’Homme, à la Presse, à l’Almanach des poètes (Mercure de France, 1896-1897), aux Hommes d’aujourd’hui, et à la Revue blanche où, indépendamment de différentes études consacrées à Rodenbach, Anatole France, Émile Zola, Arthur Rimbaud, etc., il signe depuis plusieurs années la chronique des poèmes.

656. (1913) Le bovarysme « Troisième partie : Le Bovarysme, loi de l’évolution — Chapitre II. Bovarysme essentiel de l’être et de l’Humanité »

Ces héros ne conquièrent donc le sentiment d’une liberté antérieure que pour voir dans les événements de leur vie les effets incommutables de cette liberté et pour se poser en spectateurs devant l’image de leur destin.

657. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1851 » pp. 1-9

, Gerdès, hanté par l’idée qu’on pouvait interpréter un chapitre politique du livre comme une allusion à l’événement du jour, tout plein, au fond, de méfiance pour ce titre bizarre, incompréhensible, cabalistique, et qui lui semblait cacher un rappel dissimulé du 18 Brumaire, Gerdès, qui manquait d’héroïsme, avait, de son propre mouvement, jeté le paquet d’affiches au feu.

658. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « A Monsieur Naigeon » pp. 9-14

Chaque âge écrit et lit à sa manière : la jeunesse aime les événements ; la vieillesse, les réflexions.

659. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Wallon »

Dessins du temps et des époques qui ont suivi, gravures noires, gravures coloriées, portraits, éclaircissements sur la géographie et le costume de la guerre en 1430, théâtre des événements, histoire littéraire où l’on passe en revue les livres et les poèmes inspirés par Jeanne d’Arc, tout est là de ce qui se rattache à sa gloire, depuis le mystère du siège d’Orléans jusqu’au drame de Jules Barbier et de Gounod.

660. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XV. De Tacite. D’un éloge qu’il prononça étant consul ; de son éloge historique d’Agricola. »

qui est descendu plus avant dans les profondeurs de la politique ; a mieux tiré de grands résultats des plus petits événements ; a mieux fait à chaque ligne, dans l’histoire d’un homme, l’histoire de l’esprit humain et de tous les siècles ; a mieux surpris la bassesse qui se cache et s’enveloppe ; a mieux démêlé tous les genres de crainte, tous les genres de courage, tous les secrets des passions, tous les motifs des discours, tous les contrastes entre les sentiments et les actions, tous les mouvements que l’âme se dissimule ; a mieux tracé le mélange bizarre des vertus et des vices, l’assemblage des qualités différentes et quelquefois contraires ; la férocité froide et sombre dans Tibère, la férocité ardente dans Caligula, la férocité imbécile dans Claude, la férocité sans frein comme sans honte dans Néron, la férocité hypocrite et timide dans Domitien, les crimes de la domination et ceux de l’esclavage, la fierté qui sert d’un côté pour commander de l’autre, la corruption tranquille et lente, et la corruption impétueuse et hardie, le caractère et l’esprit des révolutions, les vues opposées des chefs, l’instinct féroce et avide du soldat, l’instinct tumultueux et faible de la multitude, et dans Rome la stupidité d’un grand peuple à qui le vaincu, le vainqueur, sont également indifférents, et qui sans choix, sans regret, sans désir, assis aux spectacles, attend froidement qu’on lui annonce son maître ; prêt à battre des mains au hasard à celui qui viendra, et qu’il aurait foulé aux pieds si un autre eût vaincu ?

661. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIVe entretien. Madame de Staël. Suite »

Quel accès ouvert à l’ascendant du pouvoir, aux transactions de la conscience, à tous les mobiles conseils des événements ! […] « C’est manquer, dit-elle, tout à fait de respect à la Providence, que de nous supposer en proie à ces fantômes qu’on appelle les événements : leur réalité consiste dans ce qu’ils produisent sur l’âme, et il y a une égalité parfaite entre toutes les situations et toutes les destinées, non pas vues extérieurement, mais jugées d’après leur influence sur le perfectionnement religieux. […] « En ce moment le tourment d’angoisse et de douleur de madame de Staël paraissait extrême, mais sans incertitude, et sa résolution était invariablement prise pour être exécutée sur l’heure, soit qu’elle sût déjà l’événement de Lons-le-Saulnier et toutes ses conséquences, soit quelle eût conclu de l’état intérieur des Tuileries, d’où elle venait, la perte absolue de toute espérance.

662. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVIe Entretien. Marie Stuart (reine d’Écosse) »

Ne pouvant la suivre en Écosse à cause de ses charges, il voulut y être perpétuellement représenté par un jeune gentilhomme de sa maison, du Chatelard, afin d’être entretenu sans cesse par ce correspondant des moindres événements et, pour ainsi dire, de la respiration même de son idole ; du Chatelard, pour son malheur, était lui-même amoureux jusqu’au délire de celle auprès de qui il allait représenter un autre amour. […] Laissons parler ici l’écrivain français, qui a étudié sur place et dans les sources les circonstances les plus minutieuses de l’événement, et qui les grave en les racontant : « Le roi, dit-il, avait soupé chez lui, en compagnie du comte de Morton, de Ruthven et de Lindsey ; son appartement, un rez-de-chaussée, élevé de quelques marches, était situé au-dessous de l’appartement de Marie, dans la même tour. […] Quoi qu’il en soit, Bothwell rentra chez lui sans donner aucune marque d’agitation sur ses traits, se recoucha avant la fin de la nuit, et, quand on vint l’éveiller pour lui apprendre les événements, témoigna toute la surprise et toute la douleur de bienséance, et s’écria en se précipitant hors de son lit : « Trahison ! 

663. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre I. Du comique en général »

Dans une société de pures intelligences on ne pleurerait probablement plus, mais on rirait peut-être encore ; tandis que des âmes invariablement sensibles, accordées à l’unisson de la vie, où tout événement se prolongerait en résonance sentimentale, ne connaîtraient ni ne comprendraient le rire. […] On devine que les artifices usuels de la comédie, la répétition périodique d’un mot ou d’une scène, l’interversion symétrique des rôles, le développement géométrique des quiproquos, et beaucoup d’autres jeux encore, pourront dériver leur force comique de la même source, l’art du vaudevilliste étant peut-être de nous présenter une articulation visiblement mécanique d’événements humains tout en leur conservant l’aspect extérieur de la vraisemblance, c’est-à-dire la souplesse apparente de la vie. […] Perrichon, au moment de monter en wagon, s’assure qu’il n’oublie aucun de ses colis. « Quatre, cinq, six, ma femme sept, ma fille huit et moi neuf. » Il y a une autre pièce où un père vante la science de sa fille en ces termes : « Elle vous dira sans broncher tous les rois de France qui ont eu lieu. » Ce qui ont eu lieu, sans précisément convertir les rois en simples choses, les assimile à des événements impersonnels.

664. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome IV pp. 5-

Regardez le cours des événements naturels : tout grand fait entraîne, depuis la première impulsion donnée jusqu’à son achèvement, une multitude de petites incidences que l’historien ramasse pour les ranger avec discernement dans leur ordre nécessaire. […] Ces tragiques événements, et quelques autres qui les suivent, se détachent en haut relief sur le tableau que le docte peintre a semé de groupes habilement distribués sur les divers plans, afin que des couleurs distinctes et des traits vivement prononcés échappassent à la confusion de mille objets horribles. […] Que d’événements ! […] Sous cet aspect, la Pharsale n’est pas faite à l’honneur particulier d’un héros, non plus que l’épopée de Milton, mais à la consécration d’un événement extraordinaire. […] Elle ne paraît qu’une courte incidence des derniers jours du siège d’Ilion, et pourtant la plupart des événements de cette époque fameuse en dépendent et s’y lient.

665. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

Il est familier, parfois plaisant, et toujours si précis, si imbu des événements réels et des particularités de la vie anglaise, qu’on peut tirer de ses sermons une description presque complète des mœurs de son temps et de son pays. […] Au milieu d’eux s’élève un écrivain de génie, poëte en prose, doué d’imagination comme Spenser et comme Shakspeare, Jeremy Taylor, qui, par la pente de son esprit comme par les événements de sa vie, était destiné à présenter aux yeux l’alliance de la Renaissance et de la Réforme, et à transporter dans la chaire le style orné de la cour. […] C’est que les sèches vérités générales sont une sorte d’algèbre, acquise par notre esprit fort tard et après beaucoup de peine, contre notre inclination primitive, qui est de considérer des événements détaillés et des objets sensibles, l’homme n’étant capable de contempler les formules pures qu’après s’être transformé par dix ans de lecture et de réflexion. […] Les événements et les discours semblent naître et s’ordonner en lui sans son concours. […] Voici l’abrégé des événements : Du haut du ciel, une voix a crié vengeance contre la cité de la Destruction où vit un pécheur nommé Chrétien.

666. (1889) Derniers essais de critique et d’histoire

Au centre des puissances morales qui mènent les événements sensibles, il trouvera un instinct dominateur et destructeur, comme un abcès énorme qui a tiré à lui tout le sang vital. […] « La France était jalouse des victoires prussiennes. » — Non pas jalouse, mais inquiète, et à juste titre ; l’événement ne l’a que trop prouvé, et M.  […] Ce sont là pourtant nos vrais sentiments, ceux qui subsistent en nous à demeure, et qui, si des événements extrêmes ne viennent pas les exaspérer, persisteront pour diriger notre volonté et notre conduite. […] Des choses intéressantes : cela exclut les événements trop plats ou trop bourgeois, les caractères trop effacés et trop ordinaires. […] Bref, en 1789, il connaissait la France et l’Europe. — Pendant les dix années qui suivent, il est au bon endroit pour juger les événements.

667. (1911) Psychologie de l’invention (2e éd.) pp. 1-184

Introduction Dans le monde matériel, deux événements, deux réalités quelconques ne sont jamais tout à fait identiques. […] Sardou a déduit toutes les conséquences de cette situation : il a cherché quels sont les événements qui devaient se passer avant et après la scène capitale. […] Tous les événements psychiques révèlent une part d’invention, une part d’imitation, et une part de routine. […] En 1848, Wagner s’intéresse au mythe de Siegfried, il écrit un résumé de la légende, il se sent profondément attiré par elle, mais les événements de sa vie après 1848 l’en détournent pendant quelque temps. […] Elle peut être un mal si le gain ne compense pas la perte (c’est le cas, par exemple, lorsqu’un événement imprévu en détraquant un esprit, lui inspire des conceptions nouvelles mais fausses), elle est un bien dans le cas contraire, un bien d’autant plus grand que plus d’ordre remplacera plus de désordre.

668. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre II. Le théâtre. » pp. 2-96

. —  Les événements tragiques. —  Les caractères excessifs. —  Le duc de Milan de Massinger. —  L’Annabella de Ford. —  La duchesse de Malfi et la Vittoria de Webster. —  Les personnages féminins […] Il commence à préparer les sentiments, à annoncer les événements, à combiner des effets, et l’on voit paraître le théâtre le plus complet et le plus vivant, et aussi le plus étrange qui fut jamais. […] En premier lieu, ils voient l’événement, quel qu’il soit et tel qu’il est ; j’entends par là qu’ils l’ont présent intérieurement avec les personnages et les détails, beaux et laids, même plats et grotesques. […] Les infinies myriades de circonstances qui accompagnent et nuancent chaque événement accourent avec cet événement dans leur tête, et non pas simplement les extérieures, c’est-à-dire les traits sensibles et pittoresques, les particularités de coloris et de costumes, mais aussi et surtout les intérieures, je veux dire les mouvements de colère et de joie, le tumulte secret de l’âme, le flux et reflux des idées et des passions qui griment les physionomies, qui enflent les veines, qui font grincer les dents, serrer les poings, qui lancent ou retiennent l’homme. […] C’est un règne entier, une guerre complète, ou tout un roman qu’ils entassent dans un drame ; ils découpent en scènes une chronique anglaise ou une nouvelle italienne : à cela se réduit leur art ; peu importent les événements : quels qu’ils soient, ils les acceptent.

669. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — II » pp. 454-475

Ce qu’il dit sur les événements qui se sont précipités depuis qu’il a quitté la France en 1791, il le devinait et le présageait à la date de sa sortie ; il est de ceux que la Révolution a le moins étonnés et déconcertés, même en allant à ses extrêmes conséquences. […] Grâce aux directions du président de Longueil, Saint-Alban a très bien vu, pour un si jeune homme, les premiers événements de la Révolution, et il en fait un tableau que ne désavouerait pas le président lui-même.

670. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid (suite.) »

Pour arriver à une œuvre qui enlève, qui passionne tout le public et fasse événement, il faut en venir au Cid représenté avec un applaudissement enthousiaste vers la fin de décembre 1636, et qui sacra Corneille grand poète. […] Les événements se pressent.

671. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Madame Roland, ses lettres à Buzot. Ses Mémoires. »

Il mourut bientôt après : je crus que c’était à propos pour sa gloire et la liberté ; mais les événements m’ont appris à le regretter davantage : il fallait le contre-poids d’un homme de cette force pour s’opposer à l’action d’une foule de roquets et nous préserver de la domination des bandits. » Or, Bosc avait cru bien faire en remplaçant l’expression si énergique : « impulser une assemblée », par cette autre qui n’a plus le même sens : « en imposer à une assemblée », et en mettant : « prendre la peine », au lieu de : « prendre le soin. » M.  […] Se sentant vouée par les événements à une fin tragique, elle y avait beaucoup réfléchi et elle s’était dit qu’il fallait, quand on est appelé à représenter en public, faire un peu de toilette, pour le corps et pour l’âme.

672. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.) »

Ceux qui en jugeront malicieusement et superficiellement, n’étant touchés que des événements heureux, diront ce qu’ils voudront de quantité de choses mal arrangées et qui pourraient se détruire par maintes bonnes raisons et sans réplique. […] Il y en a une infinité à me donner la vanité que tu m’inspires dans tes lettres ; mais, de bonne foi, cela ne me change point sur le jugement que je fais de moi-même, et je réfléchis combien aisément la fortune pouvait changer les événements qui m’ont procuré tant d’honneur, et toutes les raisons pour une affaire deviennent bien faibles contre me seule qui les fait manquer.

673. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

En 1812, comme les événements devenaient menaçants à l’horizon, et que les trônes groupés autour de l’Empire craquaient de toutes parts, Mme Hugo ramena à Paris ses deux fils cadets, Eugène et Victor ; l’aîné, déjà sous-lieutenant, demeura avec son père. […] Ses opinions politiques et religieuses ont subi quelque transformation avec l’âge et la leçon des événements ; ses idées de poésie et d’art se sont de jour en jour étendues et affermies.

674. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « HISTOIRE DE LA ROYAUTÉ considérée DANS SES ORIGINES JUSQU’AU XIe SIÈCLE PAR M. LE COMTE A. DE SAINT-PRIEST. 1842. » pp. 1-30

La réalité des choses, à chaque moment, me fait l’effet d’une grande mer plus ou moins agitée ; les événements qui surgissent et aboutissent sont les vagues dont se compose la surface mobile ; mais, sous ces vagues apparentes, combien d’autres mouvements plus profonds, plus essentiels, bien qu’avortés et sourds, de qui les derniers dépendent, et que pourtant il n’est donné à nul œil de sonder ! […] Cependant, une fois la surface levée d’une certaine façon, une fois les événements accomplis, il n’y a pas moyen de revenir.

675. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DE BARANTE. » pp. 31-61

J’ai cru trouver ainsi un moyen de circonscrire et de détacher de nos longues annales une des époques les plus fécondes en événements et en résultats. […] Monnard18, on trouve dans les tomes VII et VIII, à titre d’appendice, d’excellentes dissertations de M. de Gingins, qui prennent ces événements fameux par un revers assez inattendu, mais désormais impossible à méconnaître, sauf la mesure.

676. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre III. L’Histoire »

Très proche encore des chansons de geste, il en a le ton, les formules, la couleur : mais, à l’exemple des traducteurs du faux Turpin, il allège le genre du poids inutile des rimes, simple embarras quand elles ne sont pas moyen d’art et forme de poésie ; d’autre part, suivant les premiers narrateurs des croisades, et plus rigoureux qu’eux encore, il saisit les événements avant toute déformation, tels que ses yeux, et non son imagination, les lui donnent : enfin, de la même épopée qui achevait en ce temps-là de dégénérer en roman, il dégage définitivement l’histoire. […] Cette brièveté n’est pas la sécheresse d’un narrateur encore gauche qui ne sait pas faire sortir et distribuer sa provision intime d’images et de sentiments : c’est la précision d’un homme d’action qui coupe court, hait la digression, l’anecdote, et ne veut donner que l’utile et solide substance des événements.

677. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

Voyons les choses dont les petits livrets envolés de Ferney entretiennent le public : ce sont les événements du jour, ceux où apparaît quelque abus, quelque vice social, quelque effet des vieux préjugés et de la tradition oppressive ou fanatique. […] La noblesse a été ramenée par les événements à la foi.

678. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

Anatole France, le souci du plus singulier des événements historiques, de celui qui a le plus préoccupé depuis trente années quelques-uns des grands esprits de ce temps. […] L’habitude de la méditation et du repliement sur soi ne développe guère le don d’inventer des histoires, des combinaisons extraordinaires d’événements.

679. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre douzième. »

Les événements connus s’y réduisent à deux ou trois faits. […] La Bruyère voyait les habitudes, et, au lieu de visages échauffés par la passion, agrandis ou rapetissés outre mesure par les événements, des figures au repos, où les passions, devenues des manières d’être de chaque jour, avaient laissé des traces et comme gravé des rides ineffaçables.

680. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame Émile de Girardin. (Poésies. — Élégies. — Napoline. — Cléopâtre. — Lettres parisiennes, etc., etc.) » pp. 384-406

Distinguée et couronnée par l’Académie française en 1822 pour avoir chanté le dévouement des sœurs de Sainte-Camille pendant la peste de Barcelone, Mlle Gay ne cessa de célébrer depuis en vers tous les événements publics importants, les solennités monarchiques ou patriotiques, la mort du général Foy, le sacre de Charles X, l’insurrection de la Grèce, tous les beaux thèmes du moment. […] Car, pour les pièces consacrées à célébrer des événements publics, il n’en faut point parler.

681. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — II. (Lettres écrites du donjon de Vincennes.) » pp. 29-50

Songez à moi, monsieur, dans ce temps qui, si j’en crois ce qu’annonçaient les derniers mois où je vivais avec les vivants, doit être fécond en événements (la Guerre d’Amérique) ; songez à moi, dis-je, ou plutôt (car j’ai assez de preuves que vous daignez vous occuper de ma triste existence) rappelez-la à d’autres. […] Voici en quels termes singuliers le curé Vallet rend compte de la manière dont il s’acquitta de sa commission et de l’effet qu’il produisit : Mon beau-frère me fit le détail de cet affreux événement, et me donnait la commission d’y préparer M. de Mirabeau, s’imaginant qu’il y avait une âme sensible dans un pareil corps.

682. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Correspondance entre Mirabeau et le comte de La Marck (1789-1791), recueillie, mise en ordre et publiée par M. Ad. de Bacourt, ancien ambassadeur. » pp. 97-120

que Mirabeau le sentait lorsque, impatient de ces éternelles remises de l’« homme aux indécisions » (c’est ainsi qu’il appelle La Fayette), et de cette pudibonderie si hors de propos, irrité de voir en tout et partout les honnêtes gens de ce bord en réserve et en garde contre lui, il s’écrie : « Je leur montrerai ce qui est très vrai, qu’ils n’ont ni dans la tête, ni dans l’âme, aucun élément de sociabilité politique. » Et relevant la tête en homme qui, avec ses taches, avait son principe d’honneur aussi et le sentiment de sa dignité, il écrivait un jour (1er décembre 1789) à La Fayette, sans craindre d’aborder le point délicat et qui recelait la plaie : J’ai beaucoup de dettes, qui en masse ne font pas une somme énorme ; j’ai beaucoup de dettes, et c’est la meilleure réponse que les événements puissent faire aux confabulations des calomniateurs. […] monsieur, s’écriait celui-ci, je suis bien tranquille sur l’histoire ; si mon nom, lié à de grands événements, y surnage, il ne rappellera l’idée de grandes faiblesses qu’en y joignant celle d’un amour bien vrai de la liberté, d’un caractère très décidé et d’une loyauté vraiment voisine de la duperie.

683. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Rivarol. » pp. 62-84

Il raconte ce qui s’est passé aux États généraux avant la réunion des ordres, et il suit ce récit à mesure que les événements se développent. […] Tout le règne actuel peut se réduire à quinze ans de faiblesse et à un jour de force mal employée. » Dans tout le cours de ce Journal, Rivarol se dessine avec énergie, éclat, indépendance, et comme un de ces écrivains (et ils sont en petit nombre) « que l’événement n’a point corrompus. » Dès les premiers numéros du Journal et dans l’intervalle du 14 Juillet au retour de M. 

684. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — II. (Fin.) » pp. 411-433

Les événements dont il a été témoin et victime ont, en effet, modifié Volney ; ses opinions ne se sont point brisées, elles se sont émoussées cependant. […] Il est clair (en prenant pour exactes au pied de la lettre les paroles d’Hérodote) que, si l’on pouvait fixer avec précision par l’astronomie la date de cette éclipse, on aurait un point fixe pour classer bien des événements de l’empire des Mèdes.

685. (1889) L’art au point de vue sociologique « Introduction »

Ils consistent surtout à éloigner les choses ou les événements soit dans le temps, soit dans l’espace, « par conséquent à étendre la sphère de nos sentiments de sympathie et de sociabilité, de manière à élargir notre horizon ». […] Le vrai roman réunit donc en lui tout l’essentiel de la poésie et du drame, de la psychologie et de la science sociale ; c’est « de l’histoire condensée et systématisée, dans laquelle on a restreint au strict nécessaire la part des événements de hasard, aboutissant à stériliser la volonté humaine ; c’est de l’histoire humanisée en quelque sorte, où l’individu est transplanté dans un milieu plus favorable à l’essor de ses tendances intérieures.

686. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre I. Shakespeare — Son génie »

Les choses de l’inconnu, les problèmes métaphysiques reculant devant la sonde, les énigmes de l’âme et de la nature, qui est aussi une âme ; les intuitions lointaines de l’éventuel inclus dans la destinée, les amalgames de la pensée et de l’événement, peuvent se traduire en figurations délicates, et remplir la poésie de types mystérieux et exquis, d’autant plus ravissants qu’ils sont un peu douloureux, à demi adhérents à l’invisible, et en même temps très réels, préoccupés de l’ombre qui est derrière eux, et tâchant de vous plaire cependant. […] La comédie éclate dans les larmes, le sanglot naît du rire, les figures se mêlent et se heurtent, des formes massives, presque des bêtes, passent lourdement, des larves, femmes peut-être, peut-être fumée, ondoient ; les âmes, libellules de l’ombre, mouches crépusculaires, frissonnent dans tous ces roseaux noirs que nous appelons passions et événements.

687. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre II. Shakespeare — Son œuvre. Les points culminants »

Le poëte se mettant au lieu et place du destin, une invention d’homme et d’événements tellement étrange, ressemblante et souveraine, que certaines sectes religieuses en ont horreur comme d’un empiétement sur la Providence, et appellent le poëte « le menteur » ; la conscience de l’homme, prise sur le fait et placée dans un milieu qu’elle combat, gouverne ou transforme, c’est le drame. […] Une sorte de parti pris gigantesque, la mesure habituelle dépassée, le grand partout, ce qui est l’effarement des intelligences médiocres, le vrai démontré au besoin par l’invraisemblable, le procès fait à la destinée, à la société, à la loi, à la religion, au nom de l’Inconnu, abîme du mystérieux équilibre ; l’événement traité comme un rôle joué et, dans l’occasion, reproché à la Fatalité ou à la Providence ; la passion, personnage terrible, allant et venant chez l’homme ; l’audace et quelquefois l’insolence de la raison, les formes fières d’un style à l’aise dans tous les extrêmes, et en même temps une sagesse profonde, une douceur de géant, une bonté de monstre attendri, une aube ineffable dont on ne peut se rendre compte et qui éclaire tout ; tels sont les signes de ces œuvres suprêmes.

688. (1894) La bataille littéraire. Sixième série (1891-1892) pp. 1-368

Malgré sa teinte forcément sombre et que commandaient les événements dramatiques qui s’y déroulent, je dois conclure que l’Argent est un roman optimiste, chose rare dans l’œuvre de Zola, et que derrière ces catastrophes accumulées on voit s’élever l’espoir de jours réparateurs. […] De ce nombre se trouvaient de jeunes professeurs, des licenciés qui avaient rédigé au jour le jour les faits qui se passaient sous leurs yeux ; presque tous leurs cahiers racontant à peu près les mêmes événements, le contrôle en devenait plus facile ; le livre de M.  […] Anatole France qui contient une suite de récits ou plutôt de vivantes évocations, de véritables restaurations d’événements que le temps a fait disparaître dans son lointain. […] Les notes rapportent de curieuses conversations avec l’empereur de Russie, notes auxquelles les événements présents donnent un intérêt d’actualité. […] Non seulement il apprenait à être peintre, sculpteur, architecte, il apprenait aussi à être homme, et qui sait si les événements qui apportèrent et remportèrent Savonarole et tant d’autres, n’ont pas laissé quelque chose de leur terrible grandeur dans l’âme de Michel-Ange ?

689. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres mises en ordre par M. J. Sabbatier. (Tome II, 1844.) » pp. 144-153

Quant à l’Oraison funèbre du maréchal Bessières, qui fut demandée à l’auteur par Napoléon, et qui ne put être prononcée à cause des événements, l’éditeur nous dit en produisant aujourd’hui jusqu’aux variantes du morceau : « Je laisse aux lecteurs qui ont senti l’élévation de Bossuet et la profondeur de Tacite, le soin d’indiquer le rang où l’on doit placer Victorin Fabre. » Mais les lecteurs ne s’aviseront pas de donner le moins du monde dans ces rapprochements : l’oraison funèbre de Fabre est trop évidemment une copie, presque un pastiche de celles du grand Condé ou de Turenne.

690. (1874) Premiers lundis. Tome I « Madame de Maintenon et la Princesse des Ursins — I »

Elles jettent un grand jour sur les événements, et fixent l’opinion sur les deux femmes célèbres qui s’écrivent.

691. (1874) Premiers lundis. Tome I « Victor Hugo : Odes et ballades — I »

De jeunes esprits, nourris du Génie du Christianisme, tournés par leur nature et leur éducation aux sentiments religieux et aux croyances mystiques, avaient pensé, à la vue de tant d’événements mémorables, que les temps marqués étaient accomplis et que l’avenir allait enfin se dérouler selon leurs vœux.

692. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — II »

Comme l’état de la France se dessine de plus en plus nettement, et que d’ailleurs les souvenirs abondent, les erreurs matérielles y sont moins capitales que dans les premières parties de l’ouvrage, et elles se simplifient, en quelque sorte, avec le cours des événements.

693. (1874) Premiers lundis. Tome II « La Revue encyclopédique. Publiée par MM. H. Carnot et P. Leroux »

Pris ainsi au dépourvu par l’événement, les novateurs se sont crus obligés de finir en toute hâte ce qu’ils avaient jusque-là essayé avec plus de lenteur ; et sur quelques fondements réels, sur quelques faits ingénieusement observés, ils ont vite échafaudé leur monde ; ils ont bâti en un clin d’œil, temple, atelier, cité de l’avenir.

694. (1874) Premiers lundis. Tome II « Charles de Bernard. Le nœud Gordien. — Gerfaut. »

Par quelle série d’événements et quelle adresse de tactique Marillac et Gerfaut se trouvent-ils naturellement introduits au château, accueillis du baron, et pouvant s’y livrer en toute aisance, Marillac à l’art, comme il dit toujours, Gerfaut à sa passion ?

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