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912. (1914) Enquête : Les prix littéraires (Les Marges)

L’homme est un triste animal qui a tôt fait de corrompre ce qu’il touche.

913. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre I. Le broyeur de lin  (1876) »

Au moral, il est permis de dire ce qui n’est pas vrai au physique : quand les creux d’une coquille sont très profonds, ces creux ont le pouvoir de reformer l’animal qui s’y était moulé.

914. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VII. Repos »

Mais tous ces animaux bourgeois qui s’alimentent d’une « vaine pâture », argent ou vanité, nous les connaissons déjà, nous les avons rencontrés mille fois, et souvent dessinés d’un trait plus net, animés d’un mouvement plus vivant.

915. (1904) En méthode à l’œuvre

de notre moderne Savoir qui ne m’a paru que retrouver le sens sacré, par quoi, sous les signes monstrueux, les Initiés portaient occultement le poids du peuple, — des temps étaient maintenant révolus, remueurs des diaprures aux strophes, et du double mouvement de la poitrine animale scandés !

916. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — La déformation  »

Nombre de plantes sont venimeuses et nombre d’animaux sont vénéneux, si on s’en rapporte aux définitions des dictionnaires.

917. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Villemain » pp. 1-41

Depuis le serpent d’Ève (l’orateur d’alors), le plus rusé et le plus insidieux des animaux c’est toujours l’orateur.

918. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Ernest Feydeau » pp. 106-143

Né dans la bauge du xviiie  siècle, le malheureux qui a écrit cette opinion animale pensait peut-être à couvrir de cette orgueilleuse généralité le déshonneur de sa mère, et si cela fut, voilà son excuse !

919. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

Vous vous souviendriez alors que cet homme n’a point commencé, en effet, par être un « homme de lettres », qu’il ne s’est mis à écrire qu’à quarante ans, qu’il a mené pendant quinze années la vie la plus aventureuse ; que, seul, encore une fois, de tous les grands écrivains de son siècle, il a réellement vu et connu de près tous les mondes, toutes les conditions sociales, toutes les façons de vivre et toutes les espèces de l’animal humain. […] Il croit, secondement, qu’un grand artiste doit avoir des fauves parmi ses animaux domestiques. […] mais saute donc, animal !  […] Tholozan a tout deviné, et c’est lui qui, interpellant à la fois l’amant peureux et le bouchon récalcitrant, pousse le cri sauveur dont je reste émerveillé : « Mais saute donc, animal ! 

920. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome III pp. 5-336

Aussi se plaît-il à transformer les divers instincts en passions humaines ; et nos sentiments et notre voix, qu’il prête aux animaux, sont les ressorts du merveilleux des charmants récits dont ce fabuliste s’amuse et nous enchante. […] Circé, Médée, n’exercent pas la puissance régulière attribuée à chaque divinité dans son ministère céleste ou infernal, mais un pouvoir d’illusion emprunté de la magie : à leur caprice, elles renversent la nature, métamorphosent les hommes, les animaux, et changent l’aspect des lieux à l’aide de leurs enchantements ; mais les effets que produisent leurs prestiges ne représentent point les phénomènes moraux et physiques, et ne se rattachent à nulle idée raisonnable. […] Elle détrempe des flots de venin avec du sang et l’écume que distille la rage des animaux, et verse le tout dans les plaies du corps mutilé, qui reprend la chaleur vitale : ses fibres recommencent à palpiter dans son sein refroidi ; mais il tarde à se relever. […] Aussitôt cette divinité, soumise à d’innombrables métamorphoses, emprunta mille traits des animaux et des plantes, et, toujours fugitive, sans cesse reparut dans les airs, sur la terre, et dans les eaux, sous toutes les formes que prennent la vie et la végétation. […] « Ris-toi des changements de cet amas d’argile : « Comme ses animaux sa surface est fragile.

921. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

Les anciens croyaient que le cerveau était un animal ; mais cette hypothèse est une réalité pour le peuple anglais. […] « Cette nation, dit Emerson, a une nature épaisse, âcre, animale, que n’ont pu adoucir des siècles de christianisme et de civilisation. […] L’Anglais, animal domestique, possède une maison ; mais lorsque, pour une raison ou pour une autre, le home lui est refusé, nulle bête fauve n’a d’habitudes plus farouches. […] Cette matière pierreuse s’épanouit comme une fleur, cette plante respire comme un animal ; elle a des racines qui se meuvent comme des pieds, des feuilles qui se replient sous le toucher avec une sensibilité nerveuse. […] Vous hésitez à les nommer des fleurs et des plantes, vous hésitez à les nommer des animaux, et si, pour mettre un terme à cette indécision, vous les tirez de l’élément humide où elles fleurissent et se meuvent, vous ne trouvez plus qu’une gelée incolore qui se résout bien vite en quelques pâles gouttes d’eau.

922. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

Mais à quoi il faut croire fermement, c’est à un Dieu suprême, maître et gouverneur de l’univers et de tous les êtres, dieux inférieurs, hommes, animaux, végétaux, éléments qui s’y trouvent ou qui s’y peuvent trouver. […] Toute mauvaise vie, toute mauvaise conduite est une suite de dissonances ; tout mauvais acte est désaccord d’une partie de nous-mêmes avec une autre partie de nous-mêmes : « Le bien ne va pas sans le beau, ni le beau sans l’harmonie : d’où il suit qu’un animal ne peut être bon que par l’harmonie. […] Je peins des rochers avec ma plume, dit l’un ; moi, des clochers ; moi, des corps d’animaux ; moi, des corps humains, disent d’autres. […] On peut appeler, si l’on veut, « tyrannie » l’art « de gouverner un peuple par la violence » ; on peut et l’on doit appeler « politique l’art de gouverner volontairement des animaux bipèdes qui s’y prêtent volontiers ». […] Il s’étend en vérité jusqu’aux animaux : les chevaux et les ânes, accoutumés à marcher tête levée et sans se gêner, heurtent tous ceux qu’ils rencontrent si on ne leur cède le passage, et vous n’ignorez pas, puisqu’aussi bien c’est devenu proverbe, que les petites chiennes y sont exactement sur le même pied que leurs maîtresses. » La démocratie est donc insensée en soi.

923. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

Faire de l’homme un être fort muni de génie, d’audace, de présence d’esprit, de fine politique, de dissimulation, de patience, et tourner toute cette puissance à la recherche de tous les plaisirs, plaisirs du corps, du luxe, des arts, des lettres, de l’autorité, c’est-à-dire former et déchaîner un animal admirable et redoutable, bien affamé et bien armé, voilà son objet, et l’effet au bout de cent ans est visible. […] Pour l’Hébreu, pour les puissants esprits qui ont rédigé le Pentateuque347, pour les prophètes et les auteurs des Psaumes, la vie, telle que nous la concevons, s’est retirée des êtres, plantes, animaux, firmament, objets sensibles, pour se reporter et se concentrer tout entière dans l’Être unique dont ils sont les œuvres et les jouets. […] On l’entend causer la nuit, dans son lit, avec sa femme mistress Défiance, qui lui donne de bons conseils, parce que, dans ce ménage comme dans les autres, l’animal fort et brutal est le moins avisé des deux : « Elle lui conseilla de prendre les prisonniers, quand il se lèverait le matin, et de les battre sans merci.

924. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre III. La critique et l’histoire. Macaulay. »

L’objet de l’anatomie et des sciences zoologiques n’est pas de suggérer d’éloquents systèmes sur la nature de l’organisation, ou d’exposer aux yeux l’ordre des animaux par une classification ingénieuse, mais de conduire la main du chirurgien et les prévisions du médecin. […] Vous le verrez porter ses nombres jusque dans les valeurs morales ou littéraires, assignera une action, à une vertu, à un livre, à un talent sa case et son rang dans l’échelle avec une telle netteté et un tel relief qu’on se croirait volontiers dans un muséum cadastré non pas de peaux empaillées, je vous prie de le croire, mais d’animaux sentants, souffrants et vivants.

925. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1863 » pp. 77-169

Comme son domestique avait peine à le faire uriner, il aurait dit en grommelant : « L’animal ne va plus !  […] Alors nous, de nous récrier sur tous les mots de valeur qui passent dans la conversation et qu’on ne compte pas, parce qu’ils ne sont pas dits par des gens bénéficiant d’une haute position politique ou sociale, et nous citons le mot superbe de Grassot, à son animal à lui, dans une pissotière : « Que t’es bête, viens donc, c’est pour pisser ! 

926. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

Mis en demeure par moi, qui l’attendais sous l’orme, de déclarer qu’il n’était pas un mythe, un animal héraldique et fabuleux, une licorne, un farfadet, il eut la bonté de m’avertir, sous seing privé, qu’il existait réellement en chair, en os et en esprit, mais que, pour des raisons — à lui connues — il avait, contrairement à tout usage, renvoyé à la queue de l’édition ce qui devait être mis à la tête… Je ne sais pas ce que ruminait, pour plus tard, cet honnête bœuf de M.  […] Tous avaient pris Diderot avec ces deux taches ; ils l’avaient pris ruisselant de la boue dans laquelle il s’était vautré, et ils l’avaient admiré, nonobstant, comme un magnifique animal auquel la fange dont il est couvert n’enlève ni les belles proportions ni la vigueur des attitudes.

927. (1836) Portraits littéraires. Tome II pp. 1-523

XIII. Edgar Quinet. Napoléon. 1836[1836.] Jusqu’ici tous les travaux de M. 

928. (1853) Propos de ville et propos de théâtre

Les animaux savent tellement ce qui les menace en pareil cas, qu’entre eux-mêmes, au moindre bruit, ils se dispersent en hurlant. […] Bref, un oiseau rare, — avis rara, — dirait-il lui-même de lui-même. — C’est cet animal intelligent dont M.  […] L’animal comprend. […] Un spectacle bien cher à tous ceux dont le tempérament est fait avec une rognure de Gargantua, c’est le luxe apéritif des tavernes et la mise en scène pleine de séductions de leur étalage extérieur où, sous la blanche lumière du gaz, se rassemblent toutes les variétés connues du règne animal. — Les publics-houses de Hay-Market et de Piccadilly sont de préférence ceux où l’on va souper au retour du Wauxhall, de Cremorn et du Casino.

929. (1904) Le collier des jours. Souvenirs de ma vie

Mes compagnons m’assurèrent que je n’aurais pas dû me présenter ainsi, devant des dindons, avec une robe bleue, car ces animaux détestent le bleu, comme les vaches, le rouge. […] Tout à coup, un animal lancé au galop, jurant et criant, passa à côté de moi, presque sur moi : des chats, sans doute, qui se poursuivaient mais je crus que c’était le loup, le loup, que j’avais oublié ! […] Tandis qu’il écrivait, je regardais ces étonnantes images, où les personnes avaient des têtes d’animaux, d’incroyables coiffures cornues et des poses si singulières. […] Il n’y avait alors à la maison aucun animal, sauf des oiseaux dans une grande volière, qu’une amie, s’expatriant, avait donnée à garder à ma mère et ne reprenait plus.

930. (1901) Figures et caractères

L’imperceptible y vit à côté du gigantesque ; la science s’y mêle à la rêverie ; l’élément y explique l’animal. […] Michelet la suivit en sa douce passion pour les animaux et les plantes, les fleurs et les insectes, pour cette vie légère, imperceptible et lente qui anime les paysages amis. […] Les animaux presque seuls l’emplissent de leurs formes terribles, gigantesques ou minuscules. […] Ici les animaux ne sont point, comme chez le fabuliste, une allusion à l’homme. […] Il a un instinct presque animal de sa conservation.

931. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre I. Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. »

Je ne reviens pas du culte que je lui ai rendu (car c’en était un) ; je ne me consolerai pas qu’il en ait coûté la vie à l’illustre David Hume qui, pour me complaire, se chargea de conduire en Angleterre cet animal immonde. » 482.

932. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIIe entretien. Poésie lyrique. David (2e partie) » pp. 157-220

« La brebis, le bœuf, tout, et aussi les animaux sauvages des forêts !

933. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXVIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 385-448

Tout à coup, cependant, voilà qu’elle s’aperçut que les chèvres s’égaraient, par habitude, hors de la bruyère, sous les châtaigniers qui étaient à nous ; elle lança de la voix et du doigt le petit chien après les animaux pour qu’il les ramenât, comme il avait coutume, à leur devoir.

934. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre cinquième »

Il est le premier de cette famille de poètes qui n’a aucune des petites vertus de la vie civile, et pour lesquels on a épuisé les comparaisons de lions, d’aigles et autres espèces d’animaux fiers et solitaires.

935. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VIII, les Perses d’Eschyle. »

Le Magisme oriental forçait la tombe avec d’autres charmes, c’était en la comblant d’hommes et d’animaux égorgés qu’il en faisait surgir ses fantômes.

936. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre IV. Shakespeare l’ancien »

Eschyle semble ne voir dans l’animal qu’un chien.

937. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Crétineau-Joly »

On sent bien qu’elle a de la puissance, puisqu’elle a des passions ; mais les passions sont la force la moins noble, la plus animale de notre être.

938. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Balzac » pp. 17-61

Eu supposant qu’ils eussent influé sur l’animal « aux têtes frivoles » des salons et des boudoirs, auraient-ils assez régné sur la partie vraiment intellectuelle de la société à laquelle ils appartenaient pour que toute une littérature les reflétât et les caressât en les reflétant, comme un miroir d’Armide tenu par des mains amoureuses ?

939. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre II. Axiomes » pp. 24-74

Le même axiome nous démontre que les descendants des fils de Noé durent se perdre et se disperser dans leurs courses vagabondes, comme les bêtes sauvages, soit pour échapper aux animaux farouches qui peuplaient la vaste forêt dont la terre était couverte ; soit en poursuivant les femmes rebelles à leurs désirs, soit en cherchant l’eau et la pâture.

940. (1890) Impressions de théâtre. Quatrième série

D’autre part, l’image des basses fonctions corporelles s’associe d’elle-même à celle d’une vie animale aisée, copieuse, épanouie. […] C’est égal ; l’homme à l’état de nature, suivant Marivaux, est un animal singulièrement spirituel et d’une innocence bien compliquée… Je ne sais comment vous rendre mon impression. […] C’est un animal de joie et de ruse. […] Mme Guichard aime comme une brute, avec une jalousie toute animale. […] Ce n’est qu’un animal de proie qui raisonne, qui est tout juste capable de concevoir l’ensemble du monde comme une vaste et interminable bataille pour manger et pour jouir, et de se représenter à lui-même l’assouvissement de ses appétits comme l’exercice d’un droit.

941. (1890) La bataille littéraire. Troisième série (1883-1886) pp. 1-343

Cette impression de l’abîme inconnu dans lequel allait se plonger leur amour et qui l’eût épouvanté d’une terreur presque animale, se faisait plus tranquille parce qu’il descendait dans cet abîme avec elle. […] c’est vrai qu’il devait être godiche au lit, cet animal ! […] J’aurais voulu désobéir à mon père, je songeais même à faire du bruit, à tousser, à froisser rudement les branches, pour avertir le pauvre animal du danger. […] … Allons au fond de l’affaire… Elle te plante là la première, et trop tôt pour que tu t’en moques… Mais, animal, tu ne l’épouses pas ! […] Elle s’avançait avec la timidité craintive d’un pauvre animal que menace un châtiment.

942. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

L’auteur de ce passage me paraît un animal bien insociable. » Ailleurs, c’est-à-dire dans les Entretiens d’un sauvage et d’un bachelier, il va un peu plus loin dans la question et il me semble avoir entrevu la différence du droit et de la justice. […] … » « Il est dit qu’à peine Jéricho est sans défense que les Juifs immolent à leur Dieu tous les habitants, vieillards, femmes, filles, enfants à la mamelle et tous les animaux… Pourquoi tuer aussi tousles animaux, qui pouvaient servir ? […] Vous êtes des animaux calculants ; tâchez d’être des animaux pensants…  » « Ne voudriez-vous pas que nous perdissions notre temps à lire ensemble le livre de Bossuet, évêque de Meaux, intitulé la Politique tirée de l’Ecriture Sainte ? Plaisante politique que celle d’un malheureux peuple qui fut sanguinaire sans être guerrier, usurier sans être commerçant, brigand sans pouvoir conserver ses rapines, presque toujours esclave et presque toujours révolté, vendu au marché par Titus et par Adrien, comme on vend l’animal que ces Juifs appelaient immonde et qui était plus utile qu’eux.

943. (1916) Les idées et les hommes. Troisième série pp. 1-315

Potterat, son héros, qui habitait une maisonnette auprès du lac, tranquille maisonnette avec un jardin, des légumes, des animaux, déménage et, à contrecœur, se loge dans un appartement au quatrième étage d’un immeuble, à Lausanne. […] Il parle beaucoup, fût-il seul : c’est qu’il n’a pas l’impression d’être seul, les animaux, les arbres et les meubles étant ses amis, ses confidents ; il parle à son petit jardin, il parle au paysage qu’il aime et il parle à son bonheur. […] Veut-il que nous ressemblions à ces animaux élevés dans nos basses-cours, qui se rassasient en paix de l’ample nourriture qu’on leur prodigue, sans se douter que c’est pour les manger ?  […] C’est une opinion courante et c’est une banalité qui n’avait pas eu de contradicteurs, que la fourmi, l’abeille et le castor sont des animaux très laborieux, adroits et estimables, inférieurs cependant à l’homme. […] L’intelligence humaine serait destinée à se cristalliser en instinct, comme cela est advenu pour l’intelligence des autres espèces animales.

944. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

N’est-il pas déterminé par beaucoup de circonstances étrangères au contenu de cet ouvrage, dont la principale est l’esprit d’imitation, si puissant chez l’homme et chez l’animal ? […] Le folk-lore gascon est très riche en animaux fabuleux. […] Il n’a pas perdu tout souvenir des animaux fabuleux qui peuplaient l’Ardenne légendaire. […] Les murs de son salon sont couverts d’animaux bizarres peints par elle, dans la manière des kakémonos japonais, et qui trahissent à la fois son goût enfantin des images et son intelligence mystique de la nature. […] La géométrie est à la base de tout, ou plutôt elle est dans tout comme le squelette dans l’animal.

945. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

C’est d’avoir entrevu cette destination du poème que s’ennoblissent les plus beaux poèmes de Baudelaire, l’Invitation au voyage, la Mort des amants, l’Âme du vin, le Vin du solitaire, Recueillement, le poème en prose, les Bienfaits de la Lune, etc… La caractéristique spéciale de Baudelaire serait une vue très lasse de la vie, et des antinomies profondes qui ne permettent le bonheur qu’en quelques minutes d’excitation où l’on peut s’élever par l’extase et qu’on peut rechercher par des moyens artificiels, en les payant ensuite de terribles abattements ; il y a dans son œuvre la force de l’habitude qui gâche jour par jour la vie et éternise le mal, le manque de l’extase intellectuelle, de ce qu’il a dénommé la santé poétique, aussi cette vision triste de la femme égoïste et futile, animal cruel ou animal lassé, bête à voluptés ruminantes, de l’homme acagnardé à des actes identiques, dont il connaît la sottise, mais y revenant par la puissance de l’heure ; il pense que l’être, qui pourrait aller vers le clair et le sain, se sent comme tiré vers l’obscur et le putride, et s’enlise. […] Aussi, dans le tour plaisant des contes grotesques, Hoffmann lui fut inspirateur par cette double vision de la personnalité humaine ; des âmes pures presque invisibles, circulant au milieu de caricaturales et presque animales apparences. […] et c’est Musset, le Musset du début de Rolla qui lui inspirera Soleil et chair :                           Ô Vénus, o déesse, Je regrette les temps de l’antique jeunesse Des satyres lascifs, des faunes animaux, Dieux qui mordaient d’amour l’écorce des rameaux Et dans les nénuphars baisaient la Nymphe blonde. […] U, cycles vibrements divins des mers virides, Paix des pâtis semés d’animaux, paix des rides Que l’alchimie imprime aux grands fronts studieux.

946. (1864) Études sur Shakespeare

Cette supposition révolte aujourd’hui les commentateurs du poète ; mais une circonstance rapportée par Aubrey ne permet guère d’en douter, et révèle en même temps cette imagination déjà incapable de s’assujettir à de vils emplois sans y joindre quelque idée, quelque sentiment qui les ennoblit : « Quand il tuait un veau, dirent à Aubrey les gens du voisinage, il le faisait avec pompe et prononçait un discours. » Qui n’entrevoit le poëte tragique inspiré par le spectacle de la mort, fût-ce celle d’un animal, et cherchant à le rendre imposant ou pathétique ? Qui ne se représente l’écolier de treize ou quatorze ans, la tête remplie de ses premières connaissances littéraires, l’esprit frappé peut-être de quelque représentation théâtrale, élevant, dans un transport poétique, l’animal qui va tomber sous ses coups à la dignité de victime, ou peut-être à celle de tyran ? […] Il gardera courageusement sort poste malgré les huées du parterre, dût même la populace qui le remplit « lui cracher au nez et lui jeter de la boue au visage » ; ce qu’il convient au gentilhomme de supporter patiemment, en riant « de ces imbéciles animaux-là. » Cependant si la multitude se met à crier à pleine gorge : « Hors d’ici le sot ! 

947. (1890) Derniers essais de littérature et d’esthétique

Ce sont là des rimes qui se suivent, reliées moins par le son que par le sens, en des pays où de brillantes fleurs sont dépourvues de parfum, où de brillants oiseaux sont dépourvus de chant, où, le feu et l’ardente sécheresse dans ses tresses, l’insatiable été opprime les tardives forêts, les mélancoliques déserts, les troupeaux et les animaux défaillants. […] « La vitalité animale de l’Irlandais a survécu quand tout le reste avait disparu, et s’ils vivent sans avoir de but, ils jouissent du moins de l’existence. […] Comme anthropologiste, il est extrêmement intéressant, et il décrit notre ancêtre, le primitif habitant des arbres, où il vivait dans l’épouvante d’animaux plus forts que lui, et ne se connaissant d’autre parent que sa mère, et il le dit avec autant de précision qu’un conférencier de la Société Royale. […] Les animaux parlants ont aussi leur rôle dans les paraboles et les histoires de Chuang-Tzù et son étrange philosophie sait s’exprimer d’une manière musicale par le mythe, la poésie, et la fantaisie.

948. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIe entretien. Vie du Tasse (2e partie) » pp. 65-128

Au même instant vint un jeune homme d’une vingtaine d’années, grand, beau, élégant, mince et musculeux, qui, grondant et frappant les chiens, leur arracha l’animal qu’ils avaient tué.

949. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviie entretien. Un intérieur ou les pèlerines de Renève »

Non-seulement les hommes, mais les animaux eux-mêmes me demandent compte de leur nourriture ; voilà la prairie où depuis quinze ans j’avais, comme à un brave et pauvre invalide, rendu la liberté sans service à mon cheval, pour qu’il pût, dans sa vieillesse, errer oisif parmi les herbes de la montagne, et hennir auprès de son compagnon frappé d’une balle aux barricades de Juin, sous Pierre Bonaparte, qui combattait ce jour-là à mes cotés !

950. (1834) Des destinées de la poésie pp. 4-75

Mes Arabes avaient donné l’orge dans le sac de poil de chèvre à mes chevaux attachés çà et là autour de ma tente ; les pieds enchaînés à des anneaux de fer, ces beaux et doux animaux étaient immobiles ; leur tête penchée et ombragée par leur longue crinière éparse, leur poil gris luisant et fumant sous les rayons d’un soleil de plomb.

951. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre premier »

Oui, le talent, qu’on le définisse comme Fontenelle et Lamotte, instinct, partie animale du génie, opération involontaire, — ils ont dit tout cela, — qu’on le ravale jusqu’au mécanisme de l’abeille pétrissant son alvéole, le talent est ce qui fait le poète.

952. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre III. Les immoralités de la morale » pp. 81-134

L’humanité a toujours vécu de rêves, elle vivra de rêves, vraisemblablement tant qu’elle ne sera pas arrêtée, comme l’animal, dans quelque forme imparfaite qui ne se transformera presque plus.

953. (1914) Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne pp. 13-101

  De même que les révolutions de l’anatomie et de la physiologie dans les sciences naturelles n’ont point consisté à opposer le règne animal au règne végétal ou réciproquement mais à poursuivre parallèlement dans les deux règnes une certaine resituation de la pensée en face de deux réalités parallèles, ainsi la révolution de la philosophie bergsonienne n’a point consisté à opposer ni à déplacer les royaumes de la pensée ni de l’être.

954. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IV »

Le 13 mars 1861, c’est dans la salle que les sifflets ont éclaté, et que « l’élite de la société parisienne » s’est exercée à imiter des cris d’animaux.

955. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Lettres de m. l’Abbé Sabatier de Castres ; relatives aux trois siecles de la littérature françoise.ABCD » pp. -641

S'il est foible en quelque chose, ce n'est pas, selon moi, dans l'Histoire, mais dans ce qui a rapport au physique de l'Homme, à la constitution animale de notre espece ; car il donne presque toujours à gauche toutes les fois qu'il raisonne sur ces matieres.

956. (1908) Dix années de roman français. Revue des deux mondes pp. 159-190

Lui qui, dans ses délicieux volumes sur le Japon, nous donna des albums d’un pittoresque si aigu, lui qui sut évoquer avec une si lumineuse fidélité des paysages de féerie, des scènes comiques ou attendries, voire des gestes de simple grâce animale, il a découvert ici l’élan aveugle de la brute humaine déchaînée et l’épouvante des tortures ingénieuses, affinées par des siècles de pratique infernale.

957. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — IV. La Poësie dramatique. » pp. 354-420

Enfin, au lieu d’éteindre, elle fomente d’ordinaire les passions, « les agréables impostures de cette partie animale & déréglée, qui est la source de toutes nos foiblesses ».

958. (1888) Petit glossaire pour servir à l’intelligence des auteurs décadents et symbolistes « Petit glossaire »

— Animal fantastique dont il est parlé au livre de Job.

959. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Proudhon » pp. 29-79

La science a gâté en lui la nature. « Tout homme qui « pense est un animal dépravé », a dit Rousseau, dont Proudhon est un des bâtards, mais cinquante fois plus fort que son père.

960. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Victor Hugo. Les Contemplations. — La Légende des siècles. »

………………………………………………… Donc la matière pend à l’idéal et tire L’esprit vers l’animal, l’ange vers le satyre ; Le sommet vers le bas, l’amour vers l’appétit.

961. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Edmond et Jules de Goncourt »

D’un autre côté, le dénouement pathologique est une des faiblesses ordinaires des naturalistes, qui ne croient qu’aux faits de la matière, et celui de M. de Goncourt en rappelle d’autres antérieurement connus : le delirium tremens de L’Assommoir, et la mort de la rage, dans un des romans les plus passionnés de Léon Cladel… Conséquences inévitables du naturalisme, qui se dit, malgré son ignorance, expérimental et scientifique, nous serons peut-être obligés de faire prochainement, dans les livres qui s’adressaient autrefois au cœur ou à l’esprit, le tour des maladies humaines, et nos romans ne seront plus que de dégoûtantes nosographies… M. de Goncourt, l’auteur de la Sœur Philomène, marqué depuis longtemps de ce carabinisme qui a aussi timbré Sainte-Beuve, devait prendre très facilement le fil d’un siècle qui allait, de toutes parts, aux préoccupations physiques, et qui ne trouve plus d’autre terrible et d’autres sources de pathétique, dans ses romans de sentiment et de passion, que la hideuse mort animale de ses héros.

962. (1858) Du vrai, du beau et du bien (7e éd.) pp. -492

L’animal ne va pas au-delà de la sensation, et la pensée pure n’appartient qu’à la nature angélique. […] Considérez la figure de l’homme en repos : elle est plus belle que celle de l’animal, et la figure de l’animal est plus belle que la forme de tout objet inanimé. […] Si de l’homme et de l’animal on descend à la nature purement physique, on y trouvera encore de la beauté, tant qu’on y trouvera quelque ombre d’intelligence, je ne sais quoi qui du moins éveille en nous quelque pensée, quelque sentiment. […] Nous avons dit que chez l’homme et chez l’animal même la figure est belle par l’expression. […] Alors on ne punit pas le coupable ; on le frappe ou même on le tue, comme on tue sans scrupule l’animal qui nuit au lieu de servir.

963. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

Sa plume habile, un peu froide, mais correcte, active et claire, était digne de raconter tant et tant de travaux de l’esprit français, dont nous avons joui quelque peu à la façon de l’animal glouton qui dévore le gland tombé du chêne, sans regarder l’arbre glorieux qui portait cette glandée ! […] Victor Hugo est plus fort que Macchabée, il se dégagera de l’animal qui l’étouffe, il comprendra que le théâtre a des limites, pendant que sa passion, à lui, Victor Hugo, n’a pas de limites. […] Un animal encore plus maltraité que le cochon d’Inde, c’est le journaliste. […] une médaille d’honneur, et pour la fondation perpétuelle de cette médaille d’argent, « ledit sieur Monteil, habitant du village de Cély (canton sud), consent à la vente de deux ares quatre centiares (quatre perches) de bois taillis, essence de chêne… » ; lui-même, du fond de sa tombe, il désigne aux récompenses à venir l’homme qui aura desséché une mare du village, celui qui aura planté les plus belles treilles autour de sa maison ; il donne une médaille au plus habile laboureur, une médaille à la bonne garde-malade, une récompense à la bonne servante, à la villageoise conteuse de la veillée ou du lavoir qui ne dit que des fables décentes, une médaille au berger qui traite avec douceur les animaux confiés à sa garde et qui se rappelle que nous avons tous le même Créateur.

964. (1898) Impressions de théâtre. Dixième série

Chassé pour son crime, il s’en va chez les Trolls, des êtres mystérieux qui ont des têtes d’animaux, et refuse d’épouser la fille de leur roi, parce qu’il lui faudrait pour cela être changé lui-même en animal. […] Et le gros bébé d’archiduc, qui est tout de même un animal religieux, de s’écrier dans un accès de colère furieuse : « Allez-vous-en, sacrilège ! […] Nous en sommes d’autant plus étonnés que Jean connaît bien Germaine, qu’il la voit telle qu’elle est, qu’il la sait incurable, qu’il la respecte comme on respecte les idiots, qu’en réalité il la méprise, tout en reconnaissant en elle un séduisant animal, et que, dans les trois premiers actes (cela est dit vingt fois), il n’a pour elle, tout au plus, qu’une pitié affectueuse.

965. (1897) La vie et les livres. Quatrième série pp. 3-401

On voyait des hommes de génie qui étaient, en même temps, de beaux animaux. « Il faut jouir », disait le poète Laurent de Médicis. « Qu’il fait bon d’être nu !  […] Georges Renard, a remarqué, avant moi, que la matière de ce récit est contenue dans cette phrase de la Littérature anglaise : Si Shakespeare avait fait une psychologie, il aurait dit avec Esquirol : « L’homme est une machine nerveuse, gouvernée par un tempérament, disposée aux hallucinations, emportée par des passions sans frein, déraisonnable par essence, mélange de l’animal et du poète, ayant la verve pour esprit, la sensibilité pour vertu, l’imagination pour ressort et pour guide, et conduite au hasard par les circonstances les plus déterminées et les plus complexes, à la douleur, au crime, à la démence et à la mort. » M.  […] « L’émancipation de la femme, dit une Polonaise, est un élément de morale et de paix, qui fera faire à l’humanité un grand progrès vers le bonheur général… » Une Américaine, au Woman’s World’s Congress de la Columbian Exposition, terminait son speech par ces paroles mémorables : « Plus importante que la découverte de Christophe Colomb, que nous célébrons aujourd’hui, est celle que le gouvernement vient de faire, la découverte de la Femme, en envoyant jusqu’à nous un rayon de lumière électrique… » « À nous, dit une Allemande, à nous la vie intense, sans entrave, le libre développement… » « L’homme, dit enfin une Française, reprenant un axiome cité plus haut, l’homme est le seul animal qui méprise sa femelle10. » Et donc, on est allé jusqu’à dire que nous sommes trop galants, nous autres hommes ; que nous gênons les femmes d’à présent par l’excès de notre courtoisie ; que nous cédons trop volontiers nos places, en omnibus, aux voyageuses qui se morfondent sur la plate-forme ; que nous évitons, avec affectation, d’envoyer au nez de nos voisines la fumée de nos cigares, de nos cigarettes et de nos pipes ; que nous surveillons notre langage de façon à ne jamais choquer la délicatesse féminine ; que les théâtres, ordinairement dirigés et approvisionnés par des hommes, respectent trop scrupuleusement les susceptibilités de l’autre sexe ; qu’enfin notre République, d’ailleurs si recommandable, pèche par un certain excès de politesse et de bon goût11. […] Plusieurs messieurs, à ces solennelles assises, se plaignirent de n’avoir pas été consultés sur une question si grave, et eurent l’audace, dit-on, de troubler la discussion par des cris d’animaux ; Mme Pognon, afin de les faire taire, prit une voix de sirène et fit appel à leur galanterie. […] Les Grecs s’époumonaient à hurler des refrains guerriers et de vieux péans, tandis que les tribus des steppes poussaient des cris d’animaux.

966. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Notes et pensées » pp. 441-535

On peut avoir son talent et sa valeur spéciale, et n’être pas moins fâcheux, insolent, grossier, choquant pour les autres, un animal en un mot dans la vraie acception, comme tant d’animaux (témoin le castor) qui ont aussi leur talent.

967. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

Allez, allez, petits symbolistes, vous pouvez continuer à sécréter du venin, à intriguer dans vos parlotes, à organiser des cabales, à jeter, pour ennuyer M. de Bouhélier, des oignons au visage de Mlle Rabuteau, vous pouvez, à la représentation de nos pièces, venir pousser des cris d’animaux. […] Le Blond sur le compte de certains « petits Symbolistes » qui, paraît-il, abreuvent ces pauvres grands Naturistes d’outrages et de calomnies, sécrètent à leur égard du venin, poussent à la représentation de leurs pièces des cris d’animaux — de taupe et de fouine sans doute — et qui, pour comble de grossièreté, jettent ces fameux oignons au visage de Mlle Rabuteau que les mêmes Symbolistes avaient pourtant si souvent applaudie à l’Odéon.

968. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

Passionné pour l’étude, avide d’émotions scientifiques, impatient de trouver une carrière à l’incroyable activité de son esprit ; mais obscur, sans autres antécédents que quelques essais de critique et des voyages de recherches géologiques en France, en Suisse et en Amérique, où de cruels chagrins l’avaient quelque temps exilé, sans autre fortune qu’une instruction immense, Victor Jacquemont avait accepté avec enthousiasme la mission que lui avait confiée le choix intelligent du Conservatoire d’Histoire naturelle ; et il avait compris que sa destinée, en le conduisant aux Indes pour y faire collection de plantes, de couches coquillières et d’animaux, le chargeait aussi d’y représenter la France, et particulièrement cette génération si ardente, tant calomniée, mais si estimable dans sa vivacité même, à laquelle il appartenait. […] Tout le reste du temps, dans le Punjaub comme ailleurs, il n’a été que l’envoyé du Jardin des Plantes, beaucoup plus occupé des intérêts de la science que des querelles de la politique, et ne dressant d’embûches diplomatiques qu’aux animaux qui peuvent entrer dans ses collections.

969. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

 ) Et je vous fais grâce du passage sur « les animaux farouches, mâles et femelles, répandus dans la campagne. » — Eh bien, ces phrases d’un Bourgeois de France d’il y a deux cents ans, ces phrases écrites par le précepteur du petit-fils du grand Condé, expriment, en somme, assez exactement la disposition d’esprit où nous conduit et où nous laisse le drame de l’auteur allemand. […] Mæterlinck aime les cheveux (vous vous rappelez ceux de Mélisande), les cheveux qui sont si beaux, et par où nous continuons d’appartenir un peu au règne végétal, — comme nous appartenons au règne animal par les racines du désir, — lequel, d’autre part, épuré et spiritualisé par l’illusion, nous rapproche du règne angélique… C’est d’abord avec ses beaux cheveux que la petite Alladine est bâillonnée et enchaînée par le roi Ablamore… Je goûte aussi… comment dire ?

970. (1908) Jean Racine pp. 1-325

Hamon, qui, comme j’ai dit, avait l’imagination riante, et qui mettait dans ses méditations spirituelles, pour en tirer de subtiles comparaisons à la manière de saint François de Sales, beaucoup de fleurs, d’arbres et d’animaux. […] L’Indien, conducteur de l’éléphant, croyant que le roi descendait, fit, selon sa coutume, tomber à genoux l’animal. […] Dans sa lettre sur Alexandre, Saint-Évremond écrivait que « le climat change les hommes comme les animaux et les productions, influe sur la raison comme sur les usages, et qu’une morale, une sagesse particulière à la région y semble régler et conduire d’autres esprits dans un autre monde ». […] » Roxane est un des animaux les plus effrénés qu’on ait mis sur la scène. […] Certains vers nous révèlent subitement que ces personnages, qui tout à l’heure nous semblaient si proches, appartiennent à une époque extraordinairement lointaine, pleine du souvenir de grands cataclysmes naturels et où vivaient peut-être des espèces animales maintenant disparues, au temps des premières cités, au temps des monstres et des héros.

971. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

C’est un utile stimulant pour mettre en mouvement leurs lourds esprits animaux, pour secouer leur âme opaque et même pour la faire repentir des joies grossières et bruyantes auxquelles elle se complaît. […] Il est une autre classe de personnes qui liront aussi Wilhelm Meister avec fruit : ce sont ceux qui, au contraire des premiers, regorgent de santé, qui abondent en esprits animaux et en activité physique, ceux que cette vie pratique et active tant recommandée par Goethe entraîne dans son tourbillon sans loi et sans frein, et qui marchent en aveugles à la conquête de la matière avec une sorte d’élan farouche. […] J’ignore quels sont les défauts de caractère des habitants de cette ville, mais je réponds qu’il y a deux classes d’animaux humains qu’ils ne nourrissent pas parmi eux : je veux dire les badauds et les niais. […] Je n’ai pas encore pu déterminer quel est l’animal qu’il représente. […] On dirait un des animaux des visions d’Ézéchiel ou de l’Apocalypse traduit d’une manière enfantine par une imagination enfantine.

972. (1889) La bataille littéraire. Première série (1875-1878) pp. -312

Personne ne parle mieux des arbres, des animaux, de la terre que M.  […] — Et elle était mère… — Mieux vaut, grommela Akenty Prow, exterminer l’engeance du même coup, comme on fait pour les animaux de proie. […] À ce mot, toute la classe poussait de formidables éclats de rire et imitait tous les cris d’animaux qu’entendit l’arche de Noé. […] si je t’attrape, animal, tu vas voir !

973. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

Le vaillant pape Alexandre, un Espagnol aussi, avait, par ses bulles, confirmé les droits de la couronne de Castille et débouté les Portugais de leurs prétentions insolentes… L’orateur passait alors du spirituel au temporel : Il disait la richesse métallique, les trésors cachés, l’exubérance de la terre de Darien, ses fleuves, ses forêts immenses où rôdent les léopards, les chats sauvages, les loups cerviers, les tigres, les lions sans crinière, moins hardis et furieux que ceux de Barbarie, le nombre épouvantable des guenons et des singes, les cerfs, les chevreuils et les daims, dont le pelage est couleur de gris d’argent et qui n’ont point de cornes, les lézards monstrueux, et, parmi d’autres animaux inconnus, une bête qu’ils nomment Anta, laquelle a la taille d’un bœuf, la tête d’éléphant, le poil de vache et les ongles de cheval. […] Omne animal… Il regrettait alors le brassard blanc qu’il avait porté le jour de sa première communion. […] Quant à la comtesse Hélise-Quède, elle était ajustée dans une cheviotte roux-écureuil, à longs poils laineux, qui faisait valoir par contraste sa figure sombre et brune ; et ses noirs cheveux là-dessus lui complétaient l’aspect d’un étrange et superbe animal, à corps clair et à tête foncée.

974. (1908) Esquisses et souvenirs pp. 7-341

L’animal était d’une belle taille, vif et capable, sans doute, de détacher une ruade en secouant son cavalier. […] Ce ne sont pas à présent ces palpitations d’un vivace soleil sur les collines surchargées d’odorants bocages, ni le miroitement de la mer bleue où glissent les barques des joueurs de mandoline et des chanteuses de seize ans : beautés drues, aux lourdes hanches, à la face animale, aux chignons épais. […] Bien assuré sous ses œillères, l’animal prenait tranquillement sa pitance dans un sac qui lui emprisonnait la mâchoire… Songez-vous quelquefois à l’âme des bêtes ? […] Il est la fougue débraillée, ébouriffée : il est le cri animal de la passion.

975. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

L’animal, inquiet sur sa vie, lui dit alors : « Homme de Dieu, tu n’auras pas beaucoup de profit en me vendant et fort peu d’avantage en me mangeant ; ainsi, il est inutile que tu me gardes. De plus, si tu me lâches, je te donnerai trois164 avis dont chacun équivaudra à une perle de grand prix. » ces mots, le derviche s’empressa d’ouvrir la cage, et tenant l’animal par les pattes, sur sa main, il écouta ce qu’il avait à lui dire : « Le premier de ces avis », dit le moineau, « c’est que bien des gens assurent que, si Dieu voulait, il ferait passer par le trou d’une aiguille une rangée de soixante-douze chameaux 165 ; rien, en effet, n’est en dehors de la puissance de Dieu ; mais il ne faut pas faire grand cas des efforts de l’homme. […] écoute cet autre conseil que jeté donne : Ne tente pas d’arriver où tu ne peux parvenir ; et180 dans les démêlés entre mari et femme, ou entre les frères, ne dis aucune parole indiscrète, pour ne pas en rougir ensuite181. » Il y a bien des cas dans lesquels on peut prouver qu’un récit dont les personnages primitifs étaient exclusivement des animaux les a plus tard remplacés en tout ou en partie par des hommes ; mais la conformité des autres versions et l’état visiblement altéré de celle-ci nous font écarter, sans hésiter, une semblable hypothèse pour le cas qui nous occupe ; le contraste de la malice et de la sagesse de l’oiseau avec la crédule sottise de celui qui l’a pris est d’ailleurs plus piquant, s’il se produit entre un animal et un homme.

976. (1868) Rapport sur le progrès des lettres pp. 1-184

Feydeau, le montreur de cet animal obscène connu désormais sous le nom de M. de Saint-Bertrand. […] L’âme universelle circule du minéral à la plante, de la plante à l’animal, de l’animal à l’homme. […] Ses ongles d’airain ont poussé, ses yeux jaunes sont comme des soleils dans des cavernes, et, s’il rugit, les autres animaux se taisent.

977. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

Mais quand il faut rejoindre cette action du monde extérieur, ces opérations mécaniques ou animales, avec ce qui se passe dans le monde intérieur de l’âme, l’inexplicable reparaît, et la chaîne, soit qu’on la prenne d’un côté, soit qu’on la prenne de l’autre, arrive toujours à se rompre. […] Ce fut ainsi que, ne voulant plus, pour établir, la morale, partir du sentiment de justice et de sympathie qui vit dans l’âme de tous les hommes, et qui combat plus ou moins d’autres dispositions, on chercha à la fonder sur un fait commun à toute la nature animale, le besoin de la conservation et du bien-être, d’où dérive l’amour de son propre intérêt. […] Cependant il n’osa pas risquer cette absurde assertion, et ne fît point de l’homme un animal perfectionné. […] Le caractère et les habitudes des animaux, l’aspect et la physionomie des contrées furent retracés par son pinceau avec une inconcevable magie.

978. (1911) Visages d’hier et d’aujourd’hui

Les animaux sont mieux pourvus. […] Les beaux gestes sont de qualité animale ; les hommes les souillent d’intelligence. […] Ils peignent ou sculptent des animaux, avec une insignifiante habileté, ou maladroitement. […] Or, selon Marcelin Berthelot, le progrès matériel s’arrêtera en même temps que le progrès intellectuel : « Quand l’homme aura capté les chutes d’eau, utilisé les forces des marées, la chaleur solaire, la chaleur terrestre, et qu’il aura remplacé les produits de la terre et des animaux par des aliments artificiels en tout semblables aux aliments naturels, on aura, semble-t-il, atteint les termes du progrès matériel.

979. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Année 1871 » pp. 180-366

Les animaux sont silencieux. […] À l’instar des guerres d’animaux, cette invention doit amener la mangerie d’une race par l’autre, et cela condamne, dans un avenir prochain ; les Français ou les Allemands à disparaître de l’Europe. […] Il parle du besoin pour le travail de l’homme, de la science de la cuisine, de la séparation et de la division des aliments, sans quoi l’homme se nourrissant comme les animaux de viandes crues, sa digestion serait aussi longue que la leur, et il ne lui resterait pas de temps pour le travail.

980. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. RODOLPHE TÖPFFER » pp. 211-255

Tout au travers passe et repasse plus d’une fois, avec complaisance et non-chaloir, un certain âne qui sert à l’auteur de démonstration familière à ses théories, et cela le mène à venger finalement l’honnête animal, son ami, calomnié par cet autre ami La Fontaine.

981. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (5e partie) » pp. 145-224

Il faut avoir pitié des animaux.

982. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIe entretien. Le Lépreux de la cité d’Aoste, par M. Xavier de Maistre » pp. 5-79

Depuis quelques années un petit chien s’était donné à nous : ma sœur l’avait aimé, et je vous avoue que depuis qu’elle n’existait plus ce pauvre animal était une véritable consolation pour moi.

983. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre II. Prière sur l’Acropole. — Saint-Renan. — Mon oncle Pierre. — Le Bonhomme Système et la Petite Noémi (1876) »

Une de mes moitiés devait être occupée à démolir l’autre, comme cet animal fabuleux de Ctésias qui se mangeait les pattes sans s’en douter.

984. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1882 » pp. 174-231

Et l’animal — bibelot, à la fois doré et locomobile, — l’égayait beaucoup, jusqu’au moment, où, tout à coup, il lui venait l’idée de faire sertir la tortue par un bijoutier.

985. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

C’était l’homme intellectuel couché sur ses œuvres : une litière de pensées humaines sous l’animal pensant !

986. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre III. Poëtes françois. » pp. 142-215

Esope, l’inventeur de l’Apologue, ne prit d’abord pour acteurs que des animaux.

987. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre V. Le souvenir du présent et la fausse reconnaissance »

C’est ainsi que les choses se passent probablement chez la plupart des animaux.

988. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre III. Le comique de caractère »

Sans doute l’homme est déjà très supérieur à l’animal sur ce point.

989. (1910) Muses d’aujourd’hui. Essai de physiologie poétique

j’ai empoigné ta grande chevelure Pour la mordre, pour m’y coucher, pour m’y cacher ; Ma bouche que j’entr’ouvre au vent est toute pleine Des fleurs et des moissons qui chargent ton haleine ; Je mets mes yeux ardents dans les étangs profonds Qui sont ton regard trouble ouvert parmi les joncs ; J’entends chanter ta voix multiple dans les gorges Des animaux et des oiseaux dont tu regorges, Et dans les arbres dont j’étreins l’énormité, Je te serre entre mes deux bras, Été, Été ! […] Il y a dans ces aveux d’une femme une belle sensualité animale, et jamais peut-être les secrètes sensations de la maternité n’avaient été exprimées avec cette sincérité.

990. (1868) Curiosités esthétiques « II. Salon de 1846 » pp. 77-198

Tout animal, dans une espèce semblable, diffère en quelque chose de son voisin, et parmi les milliers de fruits que peut donner un même arbre il est impossible d’en trouver deux identiques, car ils seraient le même ; et la dualité, qui est la contradiction de l’unité, en est aussi la conséquence17. […] Dans le sens le plus généralement adopté, Français veut dire vaudevilliste, et vaudevilliste un homme à qui Michel-Ange donne le vertige et que Delacroix remplit d’une stupeur bestiale, comme le tonnerre certains animaux.

991. (1881) Le roman expérimental

Il traite ensuite de la pratique expérimentale sur les êtres vivants, de la vivisection, des conditions anatomiques préparatoires, du choix des animaux, de l’emploi du calcul dans l’étude des phénomènes, enfin du laboratoire du physiologiste. […] « Le corps vivant, dit-il, surtout chez les animaux élevés, ne tombe jamais en indifférence physico-chimique avec le milieu extérieur, il possède un mouvement incessant, une évolution organique en apparence spontanée et constante, et bien que cette évolution ait besoin des circonstances extérieures pour se manifester, elle en est cependant indépendante dans sa marche et dans sa modalité. » Et il conclut comme je l’ai dit. […] Il y a là une solidarité organique ou sociale qui entretient une sorte de mouvement perpétuel, jusqu’à ce que le dérangement ou la cessation d’action d’un élément vital nécessaire ait rompu l’équilibre ou amené un trouble ou un arrêt dans le jeu de la machine animale. […] Que de fois on a voulu nous prouver que, du moment où nous n’acceptions pas le libre arbitre, du moment où l’homme n’était plus pour nous qu’une machine animale agissant sous l’influence de l’hérédité et des milieux, nous tombions à un fatalisme grossier, nous ravalions l’humanité au rang d’un troupeau marchant sous le bâton de la destinée ! […] Claude Bernard disait lui-même “Le physiologiste n’est pas un homme du monde, c’est un savant, c’est un homme absorbé par une idée scientifique qu’il poursuit ; il n’entend plus les cris des animaux, il ne voit plus le sang qui coule, il ne voit que son idée et n’aperçoit que des organises qui lui cachent des problèmes qu’il veut découvrir.

992. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Heureusement, dès que Régine (qui représente la joie de vivre toute pure, toute naturelle, tout animale) sait qu’elle ne pourra pas épouser le jeune Monsieur, elle ne tient nullement à être sa gardemalade. « Ainsi, ma mère était une… » murmure-t-elle ; et elle sort allègrement, bien décidée à en devenir une autre. […] La petite gantière Gabrielle montre si joliment dans sa subite métamorphose en grande dame (encore qu’il y reste de la gantière ainsi qu’il fallait) la particulière souplesse de l’animal féminin dans la grand’-ville ! […] Lassouche s’apprêtait à le dégonfler cruellement avec sa spada, deux sergents de ville, représentants officiels de la sensibilité française, ont mis fin à ce spectacle ; meurtrier en prenant l’animal chacun par une jambe et en le conduisant au poste. […] Il était impossible de rendre avec plus de vérité cette danse et ce chant à la fois burlesque et passionné, ce débridement rythmique d’un petit animal gracieux, sensuel et violent. […] Au reste, il vous avait prévenus ; et, si vous sentiez s’inquiéter en vous la vieille hermine qui sommeille si plaisamment, à côté de l’autre animal signalé par Préault, dans le cœur de la plupart des boulevardiers sur le retour, personne ne vous obligeait à rester.

993. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre troisième. Les sensations — Chapitre II. Les sensations totales de la vue, de l’odorat, du goût, du toucher et leurs éléments » pp. 189-236

Tous ces faits conduisent à cette conclusion que les molécules dissoutes du corps sapide pénètrent dans le tissu de la langue jusqu’au contact de ses papilles nerveuses, et que là, sous l’influence de la chaleur animale, elles forment avec nos liquides sécrétés une combinaison chimique, variable avec la variation de ces liquides92. — Pareillement un corps n’a d’odeur que s’il est à l’état gazeux ; il faut en outre que la membrane pituitaire ne soit pas sèche ; de plus, on a constaté que, pour être odorant, un gaz doit se combiner sur la membrane pituitaire avec l’oxygène.

994. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

« Maintenant, chante-t-il, que je suis devenu un animal qui ne hante que les forêts, maintenant que d’un pas indécis, solitaire et lassé, je promène un cœur lourd et des regards humides, inclinés vers le sol, dans un monde devenu pour moi aussi vide qu’une cime dépouillée des Alpes, etc. » « Je vais explorant chaque contrée, chaque place où je la vis autrefois, et toi seule, ô passion qui me tortures !

995. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIe entretien. Balzac et ses œuvres (2e partie) » pp. 353-431

Sa parole, son vêtement, ses gestes, le clignement de ses yeux, faisaient loi dans le pays, où chacun, après l’avoir étudié comme un naturaliste étudie les effets de l’instinct chez les animaux, avait pu reconnaître la profonde et muette sagesse de ses plus légers mouvements.

996. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVI. La littérature et l’éducation publique. Les académies, les cénacles. » pp. 407-442

Ce n’est plus le désespoir qu’ont produit les classiques et dont les romantiques se sont follement enorgueillis ; c’est tout simplement un ennui bête, animal, un écœurement, un dégoût170… » La roue tourne, tourne ; et les symbolistes ont eu déjà leur apogée, leur déclin, et leurs enterreurs.

997. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1886 » pp. 101-162

Rodin fait tourner sur les selles, les terres, grandeur nature, de ses six otages de Calais, modelés avec une puissante accusation réaliste, et les beaux trous dans la chair humaine, que Barye mettait dans les flancs de ses animaux.

998. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre neuvième. Les idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Les successeurs d’Hugo »

La grande société vivante et souffrante n’embrasse pas seulement l’humanité, mais aussi les animaux, dont Leconte de Lisle s’est plu à peindre les vagues pensées, la conscience obscure et les rêves, comme pour y mieux saisir, dans ses premières manifestations, le sens de la vie universelle.

999. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Gustave Flaubert. Étude analytique » pp. 2-68

Aussi ai-je un petit Bouddha que je crois aimable. » Et pour l’extravagant final de ce livre : « Dans la journée, je m’amuse à feuilleter des belluaires du moyen âge ; à chercher dans les « auteurs » ce qu’il y a de plus baroque comme animaux.

1000. (1840) Kant et sa philosophie. Revue des Deux Mondes

L’histoire naturelle des animaux, des plantes et des minéraux, une partie de la physique, etc., se rangent dans cette division.

1001. (1885) Les étapes d’un naturaliste : impressions et critiques pp. -302

Et ce démon, cette fois, il le trouvera tel qu’il l’a rêvé, parce que tout se trouve en ce monde, même cette chose exquise : une drôlesse… Il a cette volupté enviée de                              gagner le quine D’un ange contenant en germe une coquine, …………………………………………… Voir aboutir au mal L’innocence à tâtons dans l’instinct animal. […] Misérable enfant, amené comme un joli petit animal dans les soupers de cabinet, et qu’on oubliait, et qu’à moitié réveillé, un garçon de café ramenait, au petit jour, à sa mère. » Et puis quel détail, quel fini dans les riens de la mise en scène : la visite au bonhomme Athanassiadis, la répétition au Théâtre-Français, la réception chez Bonne-Ame, le choix d’un hôtel pour loger leurs amours par lord Annandale et sa maîtresse, que sais-je encore ? […] Bède le Vénérable, Alcuin, Aldhelm sont, avant tout, des Latins, et seul, le dernier, par ses chants profanes et populaires, pieuse supercherie qui avait pour but d’amener la foule à venir entendre la parole divine, rappelle l’œuvre de Cœdman qui, comme un animal pur, écrivait Bède, ruminait les versets de la Vulgate et les mettait en vers très doux. […] Nombre de végétaux ne font pas fi du meurtre ; nombre de végétaux mangent maint animal. […] VERANET Que veut-il, cet animal ?

1002. (1900) La vie et les livres. Cinquième série pp. 1-352

Ève promenait parmi les animaux de la création sa beauté flamande. » C’est ainsi que M.  […] Tous les animaux, jadis réunis dans l’arche de Noé, se trouvaient rassemblés au Jardin des Plantes. […] Les animaux du Jardin des Plantes ne sont pas les hôtes ni les compagnons de l’humanité. […] M. de Tocqueville n’étant pas embarrassé d’idées pareilles, pouvait désigner nommément et montrer du doigt ceux de ses collègues dont la physionomie lui semblait assez particulière pour mériter d’être fixée en traits individuels : le politicien Duchâtel, ministre de l’intérieur, gros homme « toujours prêt à obliger quand son intérêt ne s’y opposait pas » ; — le procureur Hébert, garde des sceaux, « face grippée, chafouine, un nez et un menton pointus, des yeux secs et vifs, des lèvres retirées et sans rebords », bref, « un animal carnassier » ; — M.  […] Intime avec les animaux et les plantes avant d’étudier les passions humaines, il a conquis une belle place de romancier, mais il est resté, tout de même, fleuriste, forestier, oiselier.

1003. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

D’autres critiques assimilaient l’épopée grecque aux animaux et aux plantes et la qualifiaient de production organique. […] Vous croyez que les chiens et les cochons… — Pressentent le tremblement, comme la plupart des animaux. […] Les choses trompent peut-être autant que les hommes et les animaux.

1004. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome II

Serait-il donc vrai que le cœur humain n’est susceptible que d’une passion extravagante et brutale, qui naît le plus souvent dans les cœurs les plus abjects, et semble effacer l’auguste caractère qui distingue l’homme des animaux ? […] Mithridate ne savait pas, aussi bien que Pulchérie, soumettre à ses lois                                         la partie animale, Dont l’appétit grossier aux bêtes nous ravale. […] L’Hippolyte d’Euripide est véritablement un animal farouche qui vit dans les bois : le poète grec a cru devoir présenter ce fils de l’Amazone tel que la fable le dépeint : il arrive avec fracas sur la scène, escorté d’une troupe de chasseurs qui, comme lui, viennent de faire la guerre aux sangliers et aux loups, et entonnent les louanges de Diane : on le prendrait pour un gentilhomme anglais revenant de la chasse du renard ; si ce n’est que les gentilshommes anglais, sans être galants, sont fort libertins, au lieu qu’Hippolyte n’est ni libertin ni galant ; il parle des femmes précisément comme le Misanthrope de Molière parle des hommes ; il a conçu pour tout le sexe une effroyable haine. […] Le héron n’est point glorieux de l’usage qu’on fait de ses plumes, usage qu’il ne voit ni ne connaît : cette idée n’est point naturelle ; et un héron qui ne veut manger que des perches et des truites, parce que ses plumes servent à faire des aigrettes pour les rois, est un animal bien bizarre.

1005. (1857) Causeries du samedi. Deuxième série des Causeries littéraires pp. 1-402

Autant vaudrait soutenir qu’il a créé le jour pour blesser nos regards, la nuit pour nous tourmenter de visions sinistres, les fleurs pour répandre des miasmes, les fruits pour se changer en poisons, les animaux pour nous dévorer, les prairies, les futaies, les vallons, les eaux jaillissantes, pour nous apprendre à le renier et à le maudire. […] Les plus robustes admirateurs de M. de Balzac conviennent in petto que les Nucingen et les Gigonnet étaient passés sous sa plume à l’état de scie d’atelier, et que son monument gagnerait beaucoup à être débarrassé de ces importuns, qui font l’effet d’animaux rongeurs dans une tapisserie. […] Goriot aime ses filles par une sorte de besoin ou d’instinct animal, où vous chercheriez en vain une lueur de sens moral ou seulement d’intelligence et de raison. […] L’animal descend encore d’un degré et se change en machine ; la machine se détraque, et nous assistons alors à une agonie réaliste, telle que la tragédie, le drame et le roman, dans leurs épilogues les plus pathétiques, ne nous en avaient jamais présenté. […] Victor Hugo n’a pas songé à une chose fort inquiétante : c’est que, parmi ces animaux et ces végétaux, dont il fait des âmes émigrantes ou châtiées, il y en a un bon nombre que les vulgaires humains ont pris la mauvaise habitude de manger.

1006. (1874) Portraits contemporains : littérateurs, peintres, sculpteurs, artistes dramatiques

Depuis les Animaux peints par eux-mêmes, son vrai chef-d’œuvre, parce qu’il n’y a peint que les bêtes, depuis cette œuvre, qui restera comme une des plus curieuses de notre temps, Grandville avait dit son dernier mot. Grandville, quand il abandonnait la critique de l’homme par l’animal, était un esprit plus bizarre qu’original, plus chercheur que primesautier, d’une étrangeté laborieuse et d’une fantaisie compliqué ; nature à la fois craintive et audacieuse, hardie dans la pensée, timide dans l’exécution, il s’est souvent mépris sur la portée et les moyens d’expression de son art. […] Les conséquences excessives tirées d’une idée heureuse et qui a fait sa réputation — les animaux jouant la comédie humaine — ont donné au talent de Grandville quelque chose de contraint, de pénible et de peu naturel. […] Souvent cette gêne est si grande, que, malgré tout le soin et toute la précision de Grandville, l’homme et l’animal se confondent dans une création hybride dont il est difficile de démêler les types, surtout dans ses dernières œuvres, où il a essayé de plier à sa méthode des formes rebelles et des physionomies tout à fait réfractaires. Ses chefs-d’œuvre sont les Métamorphoses du jour, les illustrations des Fables de la Fontaine, et, en première ligne, la Vie privée et publique des animaux ; il est là tout à fait dans le milieu naturel de son talent et digne de la vogue dont il a joui.

1007. (1774) Correspondance générale

Comme je suis très-sensible aux belles choses, depuis, monsieur, que j’ai vu votre Mort, votre Hercule, votre France, et vos Animaux, j’en suis obsédé14. J’ai beaucoup pensé aux critiques qu’on vous a faites, et je me crois obligé en conscience de vous avertir que celles qui tombent sur votre Amour ne marquent pas une véritable idée du sublime dans les personnes à qui elles se sont présentées ; que ces critiques passeront, et que ce casque dont vous aurez couvert la tête de votre enfant restera et détruira en partie ce contraste du doux et du terrible que quelques artistes anciens ont si bien connu, et qui produit toujours le frémissement dans ceux qui sont faits pour admirer leurs ouvrages… Celui qui saura voir sera frappé dans le vôtre d’un enfant et d’une femme en pleurs, mis en opposition ici avec votre Hercule, là avec un spectre effrayant ; d’un autre côté, avec ces animaux que vous avez si bien renversés les uns sur les autres. […] Si l’on s’impatiente, si l’on jure, si l’on mord la pierre, c’est que dans l’homme le mieux constitué, le plus heureusement modifié, il reste toujours beaucoup d’animal avant que d’être misanthrope : voyez si vous en avez le droit. […] Quoi qu’il en soit, nous sommes ce petit nombre de têtes qui, placées sur le cou du grand animal, traînent après elles la multitude aveugle de ses queues.

1008. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Littré. »

Littré, qui invoque ce passage, répéter les paroles de la femme de l’Écriture au sujet de l’apparition de l’homme sur la terre, des races animales, du plus humble des insectes, du moindre des végétaux, de la plus petite chose vivante.

1009. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Delille »

Le dernier triomphe, et comme le bouquet du genre, est aussi la dernière grande production de Delille, les Trois Règnes, qu’on peut définir la mise en vers de toutes choses, animaux, végétaux, minéraux, physique, chimie, etc.

1010. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Théocrite »

Cet homme d’esprit, qui manquait de plusieurs sens, se croyait fort en état de juger des diverses sortes de peintures, et en particulier de celles de l’amour : « Les anciens, dit-il dans son discours sur l’Églogue, n’ont guère traité l’amour que par ce qu’il a de physique et de grossier ; ils n’y ont presque vu qu’un besoin animal qu’ils ont daigné rarement déguiser sous les couleurs d’une tendresse délicate.

1011. (1929) Dialogues critiques

L’instinct littéraire n’a pas la sûreté de l’instinct animal.

1012. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre deuxième. Les images — Chapitre premier. Nature et réducteurs de l’image » pp. 75-128

Une ancienne domestique, la fille G…, « sitôt qu’elle ferme les yeux, voit des animaux, des prairies, des maisons, etc.

1013. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (1re partie) » pp. 397-476

C’est là qu’enfant Léopold errait dans les herbages, au milieu des pâtres et des troupeaux. » La nature, le ciel, les eaux, les arbres, les animaux, les figures simples, graves et d’une gracieuse sévérité de traits des pasteurs et des faneuses suisses furent ses seuls maîtres et ses seuls modèles.

1014. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Troisième partie de Goethe. — Schiller » pp. 313-392

L’atmosphère est brûlante comme dans la gueule d’un four ; les solives tremblent, les poutres tombent, les fenêtres éclatent, les enfants pleurent, les mères courent égarées, et les animaux mugissent sous les débris.

1015. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (1re partie) » pp. 413-491

le pauvre petit animal !

1016. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIe entretien. Balzac et ses œuvres (1re partie) » pp. 273-352

Mon père se moquait souvent des hommes, qu’il accusait de travailler sans cesse à leur malheur ; il ne pouvait rencontrer un être disgracié sans s’indigner contre les parents et surtout contre les gouvernants qui n’apportaient pas autant de soins à l’amélioration de la race humaine qu’à celle des animaux.

1017. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxve entretien. Histoire d’un conscrit de 1813. Par Erckmann Chatrian »

De temps en temps on entendait un mur tomber dans le village, un toit s’affaisser ; les animaux, effarouchés par la bataille, reprenaient confiance et sortaient au petit jour : une chèvre bêlait dans l’étable voisine ; un grand chien de berger, la queue traînante, passa, regardant les morts ; le cheval en le voyant se mit à souffler d’une façon terrible ; il le prenait peut-être pour un loup, et le chien se sauva.

1018. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIe entretien. Ossian fils de Fingal, (suite) »

« Les gémissements de ces vieillards, nous dit-il, les cris de ces animaux fidèles, l’éclat soudain de ces chants de douleur ont attendri mon âme, cette âme jusqu’alors insensible comme l’acier de mon épée.

1019. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre troisième »

Dans presque toutes, la prolixité, ce trait commun de tous les ouvrages en vers du xiiie  siècle, détruit les proportions du genre ; les propriétés des animaux n’y sont pas observées ; ce ne sont ni des bêtes ni des gens de l’époque.

1020. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre onzième »

Ainsi il proclame l’homme libre, et il retranche de l’éducation la seule chose par laquelle l’homme reconnaît qu’il est autrement libre que les animaux, cette obéissance qu’un moraliste bien autrement sûr que lui, saint Paul, appelle du nom si beau d’obéissance raisonnable.

1021. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IX »

Oui, même les Géants, car ils ne s’étaient pas entretués comme Fafner et Fasolt, et le dragon que Siegfried tue est simplement un animal à leur service !

1022. (1909) De la poésie scientifique

… Donc, c’est à une induction Métaphysique que nous mène la méditation sur données de science, si, suivant le processus de l’Etre, nous sentons progressivement, avec l’émotion de nous référer continuement à l’Universel, la matière à travers les pensées animales et la pensée humaine aller son effort illimité à se savoir et se contempler harmonieusement. ..

1023. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIe entretien. Boileau » pp. 241-326

Alors, guerrier débile et chancelant, il dépose sa couronne pour prendre ses armes impuissantes, et succombe au pied de l’autel de Jupiter, tel qu’un bœuf vieilli qui tend à la hache de son maître un cou mince et décharné par le travail, pauvre animal devenu maintenant importun à son maître ingrat ! 

1024. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXe entretien. Dante. Deuxième partie » pp. 81-160

Quelques chèvres noires se posent sur les blocs détachés de la montagne comme des statues égyptiennes d’animaux symboliques sur des piédestaux de marbre.

1025. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVIII. J.-M. Audin. Œuvres complètes : Vies de Luther, de Calvin, de Léon X, d’Henri VIII, etc. » pp. 369-425

Des vies éparses, détachées de la trame de l’histoire générale, encadrant plus étroitement un homme public, un personnage célèbre, il y en avait partout, dans toutes les littératures, à toutes les époques ; mais ces vies, ces récits, ces portraits, n’avaient rien de la biographie telle que les modernes l’ont réalisée, et qui consiste à étudier l’individualité humaine dans l’individualité historique, comme les naturalistes étudient une plante ou un animal dans tous ses mystères et toutes ses manifestations.

1026. (1903) La renaissance classique pp. -

Outre les qualités originales que l’artiste doit y apporter de lui-même, cela suppose une grande somme d’expérience, puis une grande somme de culture, non pas cette science indiscrète et chaotique des Allemands, mais une science à la fois étendue et précise, toujours guidée par un goût délicat, qui permet à l’écrivain, comme l’instinct permet à l’animal, de discerner sa pâture parmi les choses indifférentes et nuisibles.

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