Plus que toutes les autres, nos sociétés démocratiques refusent de laisser expliquer leurs idées directrices par les caractères anatomiques d’une race, puisque, dans nos sociétés démocratiques, on ne trouve justement plus de vraies races au sens biographique du mot39. […] En ce sens, comme le dit Spencer, avant que le grand homme réforme la société, elle le forme. […] Le succès de l’égalitarisme ne doit plus dès lors être présenté comme la résultante pure et simple de mouvements de propagation qui auraient traversé indifféremment toutes les sociétés, quelles que fussent leurs formes, pourvu seulement qu’un homme de génie s’y fût rencontré pour donner la chiquenaude initiale : cette propagation même a pour condition l’existence de certaines formes sociales qui, modelant les esprits en un certain sens, les prépare à recevoir l’empreinte des idées égalitaires.
Quelle que soit l’interprétation à laquelle on s’arrête, qu’on prenne ce morceau dans le sens littéral ou dans le sens figuré, il est impossible de méconnaître le mérite singulier de l’expression. […] Dans ses élégies si remarquables à tant d’égards, les sens tiennent plus de place que le sentiment. […] C’est à la foi chrétienne qu’il faut demander le sens intime, le sens profond du Canzoniere. […] J’en ai dit assez pour montrer nettement le sens de cette composition. […] Ce serait, à mes yeux, se méprendre étrangement sur le sens de Claudie.
Ces vers, je les ai là sur ma table, et je m’applique à en pénétrer le sens dans leur ensemble, à trouver l’idée capitale qui relie ces diverses pièces l’une à l’autre. […] Comme si l’école du Bon Sens pouvait jamais avoir une fin, elle qui n’a point eu de commencement ! […] Ponsard est le fondateur de cette école et l’inventeur du Bon Sens ? […] L’école du Bon Sens en profita pour lui faire passer sur le corps, à l’exemple de Tullie, sa lourde charrette attelée de bœufs comme le char de nos anciens rois ; et elle empocha la victoire. […] Barbara a commis, dans un sens inverse, la maladresse ordinaire de ces niais d’atelier ou de salon qui ne manquent jamais de vous dire, en manière d’exorde : — Ah !
Cette biographie documentaire, officielle dans le meilleur sens du mot, il appartient aux concitoyens d’Amiel de l’écrire, et particulièrement à M. […] On discerne si un enfant prend le pli conformiste ou le pli de la résistance, et on voit souvent l’élan d’une famille entière aller dans le sens de l’accord ou dans le sens de la discorde, tous deux important à l’éclat ou à la force, à la santé ou au mouvement du corps social. […] Mais Paris, le monde, le sens artistique, offraient à Mérimée un champ de compensation, d’équilibre et d’éclat que l’air natal refusa à Amiel. […] Déjà, en août 1844, de Heidelberg, Amiel écrivait à Bordier une lettre où la géographie de l’Asie le fait déborder de lyrisme et de sens planétaire. […] Leur loi est de s’arrondir sous le souffle de l’espérance, et de se tisser en globe avec un grain de vérité, développé en tout sens par la fantaisie et l’illusion.
L’esprit débute par la sensation, mais on ne reconnaît pas aux sens la faculté de juger. […] « L’intelligence, poursuit-il, étant faite pour donner à l’homme la connaissance, elle aime la connaissance pour elle-même d’abord, car rien n’est plus délicieux pour l’esprit que la lumière, et elle l’aime ensuite pour ses conséquences pratiques ; c’est pourquoi l’intelligence exerce ses sens, invente les arts comme des sens nouveaux qu’elle donne à l’homme et donne assez d’évidence et de force à la philosophie pour produire enfin la vertu, cette chose excellente qui met l’ordre dans la vie ! […] Ce qui pense en nous, ce qui sent, ce qui veut, ce qui nous meut, est donc nécessairement incorruptible et éternel ; nous ne pouvons pas même concevoir l’essence divine autrement que nous ne concevons celle de notre âme, c’est-à-dire comme quelque chose d’absolument séparé et indépendant des sens, comme une substance spirituelle qui connaît et qui meut tout. […] — J’ai grand plaisir à les suivre, répondit Lucius avec une honnête timidité ; mais vous avez parlé de Charmadas : je me sens entraîné de ce côté-là. […] Mais les âmes qui auront toujours été sous le joug des sens auront peine à s’élever de dessus la terre, lors même qu’elles seront hors de leurs entraves.
Le sens de ce proverbe est celui-ci : celui qui change d’opinion a tort ; celui qui reçoit les leçons de la vie et qui en profite pour rectifier ou modifier sa pensée est un grand coupable. […] Thiers n’était pas encore ce qu’il est ; l’âge et la vie publique pleine de bon sens, de fautes expiées, de leçons terribles, n’avaient pas donné encore à son esprit ce sens de la moralité ou de l’immoralité des événements et des caractères qui est la vertu de l’histoire. […] Je m’empressai d’écrire à mon éditeur dans ce sens, et de lui envoyer une variante qui faisait disparaître toute allusion à ce fâcheux souvenir. […] Si jamais j’avais besoin de chercher des vengeurs de ce rire à contre sens, qui se trompe de but et qui s’attache au revers, je sais où je les trouverais ! La jeunesse a le sens du juste.
Lavedan, ceux-ci et ceux-là semblent s’éloigner également, quoiqu’en sens contraire, de « l’humble vérité ». […] Notez que le sens même du titre reste incertain. […] Ainsi, — et là est, à mon sens, l’idée vraiment originale de M. […] Telle qu’elle est, Zaza est une pièce amusante, au sens un peu humble du mot, mais enfin amusante. […] Il y a, en ce sens, des « bourgeois » même parmi ceux qui font profession de « tomber » les bourgeois.
« Et si pourtant ce monde n’avait aucun sens ? […] Elle a l’instinct, le besoin du dévouement, avec un grand sens pratique, un peu amer. […] Amour des sens ? […] Je sais de moins en moins où j’en suis et quel est le sens de ma vie. […] Seulement, voilà, il faudrait s’expliquer sur le sens de « fort ».
Il aime à redonner à un mot son sens primitif, qui souvent s’est oublié et perdu de vue dans l’acception figurée, et à lui rendre tous les sens qu’il avait en passant de la langue latine dans la nôtre, et que nos vieux écrivains lui avaient conservés.
et n’est-ce pas déjà être pédant, au pire sens du mot, que d’agir de la sorte ? […] Est-ce qu’il croit, par exemple, que je ne sens pas comme lui, bien que je me la définisse moins strictement que lui, la nuance qu’il y a entre se souvenir et se ressouvenir ?
C’est donc, sous une forme plus concrète, dans des conditions qui rendent la leçon autrement émouvante et démonstrative, la même histoire que nous a contée dans le Sens de la vie M. […] Je me sens moi-même, après des lectures comme celles-là commencées avec ennui, achevées avec émotion tout plein de confiance et tout prêt à me laisser consoler de la vie.
Voyons cette lettre en entier : c’est au lecteur qu’il appartient d’en déterminer le sens. […] Je ne veux pourtant pas en sortir encore ; trop de charmes m’y attachent, et à ma faiblesse, je sens que je ferais des efforts inutiles, on vous a dit vrai, si l’on vous a peint mon directeur comme un homme rigide ; mais vous ne devriez pas vous le figurer ridicule, Il ne défend point les plaisirs innocents ; mais il ne permet pas de traiter d’innocents ceux qui sont criminels.
On recherché quelles vérités, c’est-à-dire quels procédés présidèrent à la formation de cette réalité, durant combien de temps ces vérités eurent le pouvoir de sculpter ses contours, dans quel sens précis elles agirent. […] Elle ne peut se mouvoir désormais que dans le sens général qui lui fut d’abord infligé.
Ces mots pleut, vente, pour dire, fait pleuvoir, fait venter, ne sont pas français en ce sens. […] Pour un pauvre animal, Grenouilles, à mon sens, ne raisonnaient pas mal.
Rien de plus pudique que leur pensée, rien de plus libre que leur expression : nous, au contraire, nous bouleversons les sens, en ménageant les yeux et les oreilles. […] Nous avons fait aussi disparaître quelques traits de mauvais goût, en particulier la comparaison allégorique du sourire de Jupiter, que nous avons remplacée par un sens propre.
Croire avec Hutcheson, Smith et d’autres que nous ayons un sens moral propre à discerner le bon et le beau, c’est une vision dont la poésie peut s’accommoder, mais que la philosophie rejette. […] Au reste, le philosophe a raison de se moquer du sens moral des métaphysiciens anglais ; mais il n’explique pas pour cela la manière dont se fait sur nos organes l’impression d’une belle action.
Le pinceau maigrelet d’un homme qui ne se doute ni de la taille et de la musculature de ses modèles, ni de la profondeur de leurs physionomies, ni du caractère des événements qui les éclairent et qui les colorent, et dont la petitesse de raison philosophique fausse à tout instant le sens même extérieur de l’histoire. […] … Voit-il juste, même au sens le plus borné, quand, démocrate d’hier, talonné par son opinion jusque dans le fond du xe siècle, il s’étonne (ce ne peut pas être par ignorance) de ce que Richard II punit son frère d’avoir enfreint la loi fondamentale de la féodalité, et qu’il écrit, avec le point d’admiration et les italiques de la niaiserie : il avait refusé l’hommage !
Que la raison, fuyant aux accords de ma lyre, De mes sens emportés respecte le délire. […] Je cherchai vainement le sens de ses paroles, Et crus que mes voisins allaient être indignés Des bulles de savon qu’il leur jetait au nez.
Sa curiosité s’aventurait en tous sens. […] Il avait le sens du mystère, le respect des choses saintes. […] Les deux poutres qui traversent la salle dans le sens de la longueur, les solives latérales, sont rehaussées d’or et brodées de rosaces découpées. […] Pris en petite quantité, il communique aux sens une ébriété douce et inoffensive. […] Presque partout la routine machinale a tué l’âme des liturgies et aboli le sens divin des hymnes.
Mais « les maladies nous gâtent le jugement et le sens. […] Désiré Nisard a montré supérieurement le sens et la portée d’un tel éloge. […] Au premier sens, le mot de caractère exprime donc ce qu’il y a de plus général dans la peinture de l’avarice ou de l’hypocrisie ; et dans le second sens, il exprime au contraire ce qu’il y a de plus particulier dons la peinture de Clarisse ou de Lovelace. […] Ce n’est pas lui qui a changé, c’est nous ; ce n’est même pas nous, c’est le temps ; et, bien plus que le temps, c’est peut-être le sens des mots. […] C’est l’art de s’emparer des cœurs par principes et par règles, ou même des sens ; — et quelquefois aussi des fortunes.
Elle reconnaît désormais, comme règle fondamentale que toute proposition qui n’est pas strictement réductible à la simple énonciation d’un fait, ou particulier ou général, ne peut offrir aucun sens réel et intelligible. […] Si la perte d’un sens important suffit pour nous cacher radicalement un ordre entier de phénomènes naturels, il y a tout lieu de penser, réciproquement, que l’acquisition d’un sens nouveau nous dévoilerait une classe de faits dont nous n’avons maintenant aucune idée, à moins de croire que la diversité des sens, si différente entre les principaux types d’animalité, se trouve poussée, dans notre organisme, au plus haut degré que puisse exiger l’exploration totale du monde extérieur, supposition évidemment gratuite, et presque ridicule. […] En ce sens, nous ne devons chercher d’autre unité que celle de la méthode positive envisagée dans son ensemble, sans prétendre à une véritable unité scientifique, en aspirant seulement à l’homogénéité et à la convergence des différentes doctrines. […] Comme tous les termes vulgaires ainsi élevés graduellement à la dignité philosophique, le mot positif offre, dans nos langues occidentales, plusieurs acceptions distinctes, même en écartant le sens grossier qui d’abord s’y attache chez les esprits mal cultivés. […] On conçoit pareillement, en sens inverse, que la règle du classement suppose celle de l’évolution, puisque tous les motifs essentiels de l’ordre ainsi établi résultent, au fond, de l’inégale rapidité d’un tel développement chez les différentes sciences fondamentales.
C’est du patriotisme tout à fait dans le sens de Montesquieu et des hommes de 1792. […] Dans le sens, impropre du reste, qu’on donne généralement depuis 1789 au mot « aristocratique », la liberté est aristocratique, et tout ce qui est aristocratique est libéral. […] Ainsi de suite et dans tous les sens. […] » — Il y a pourtant dans la boutade de Montesquieu un sens très sérieux, qu’il n’a eu que le tort, fréquent chez lui, de ne pas démêler pour les yeux du lecteur inattentif. […] Il fait exactement la même remarque que Montesquieu et conclut en sens contraire, ses principes étant le contraire même de ceux de Montesquieu.
À ses yeux sereins, l’amiral est toujours un père, et le nom d’époux n’a pour cette vierge aucun sens. […] Une première tentative fut faite dans ce sens, il y a quelques années. […] Il fut dénué, je l’accorde, du sens pratique qui permet aux littérateurs de tirer des revenus de leurs œuvres. […] Que Victor Hugo était jusqu’au fond, jusqu’au tréfond de l’âme, poète, au sens primitif et profond du mot. […] Elle se précipite vers le Rhin, puis bat en retraite, et refait en sens contraire le chemin qu’elle vient de parcourir.
Il les emplit de son rêve, il les modifie suivant son rêve, et s’il les transforme, c’est dans le sens d’une vérité plus profonde. […] Dans une note de Laforgue, on lit ceci : « J’aime, j’ai bu un bon coup de vertige… Je me sens tout solennel… Je me sens généreux, céleste, humain, palpitant, si plein de choses que je n’ose me regarder entre quat’z yeux. […] Tout cela confondu dans une même exaltation dont l’être tout entier vibre, dont tous les sens et l’intellect sont enflammés. […] Chaque vers constitue un tout, pour le sens comme pour l’harmonie et, avec les autres, entre aisément dans l’unité de la strophe. […] Nous voilà donc revenus à la doctrine classique, à celle de Boileau, qui voulait qu’un arrêt du sens marquât la fin du vers.
Le critique peut et doit être artiste en un certain sens. […] Comme il a pris plaisir à pousser dans le sens opposé ! […] Quel sens aurait la vie, s’il n’y avait pas à lutter ? […] Il a ainsi agi dans le sens du mouvement littéraire contemporain. […] l’association des idées s’opère en sens inverse.
Il comprenait qu’il faut parler à tous les sens à la fois. […] Heureux encore quand je n’en sens que deux ! […] Je la sens ! […] je sens qu’au fond ce mariage te déplaît : je ne veux plus. […] Je sens mon néant devant ce victorieux.
Et celui-là, je sens bien qu’il m’est indifférent. […] Est-ce l’esprit de mot, le sens du saugrenu, la charge ? […] certes, avec la joie et la folie de leurs jeunes sens, avec de rapides voluptés de colombe. […] Je renvoie sur ce très beau livre, Le Sens de la vie, à un excellent article de M. […] Ainsi la vie « prend un sens » pour lui.
C’est l’imagination qui a enseigné à l’homme le sens moral de la couleur, du contour, du son et du parfum. […] Comme elle a créé le monde (on peut bien dire cela, je crois, même dans un sens religieux), il est juste qu’elle le gouverne. […] Pour bien comprendre l’étendue du sens impliqué dans cette phrase, il faut se figurer les usages nombreux et ordinaires du dictionnaire. On y cherche le sens des mots, la génération des mots, l’étymologie des mots ; enfin on en extrait tous les éléments qui composent une phrase et un récit ; mais personne n’a jamais considéré le dictionnaire comme une composition dans le sens poétique du mot. […] On n’entendra pas, je présume, le mot dans un sens désagréable.
Ils partent au galop, chargent les groupes d’infanterie qu’ils aperçoivent debout, et, parcourant le terrain en tous sens, complètent la destruction du centre de l’armée russe, dont les débris achèvent de s’enfuir vers les bouquets de bois qui lui ont servi d’asile. […] Il faut à chaque instant dans cette histoire redresser le sens moral qui est dans l’intention de la phrase et qui trébuche sous le mot ; on sent qu’il en coûte trop à l’écrivain de faire justice tout entière, et qu’il réserve toujours une indulgence à la victoire et une amnistie au bonheur. […] Administrer et se combattre, c’est tout le sens de cet immense récit. […] Le monde a un sens, car il est l’œuvre de Dieu, le suprême Penseur des choses mortelles et immortelles ; celui qui ne découvre pas ce sens divin dans le spectacle des choses humaines n’est pas seulement un aveugle, il est un impie : Cœli enarrant gloriam Dei ! […] Un nouveau sens politique ou moral est-il né en vous ?
« Ces goûts changeront ; cette sincérité s’altérera ; le poète se révélera avec plus de pudeur ; il nous montrera les blessures de son âme, les pleurs de ses yeux, mais non plus les flétrissures livides de ses membres, les égarements obscurs de ses sens, les haillons de son indigence morale. […] Je sens que je suis honnête homme, et qu’il me serait impossible de ne pas l’être, non pour plaire à un Être suprême qui n’existe pas, mais pour me plaire à moi-même, qui ai besoin de vivre en paix avec mes préjugés et mes habitudes, et pour donner un but à ma vie et un aliment à mes pensées. […] Pollion fit preuve jusqu’au bout d’habileté et d’un grand sens, et il sut vieillir d’un air d’indépendance sous Auguste, avec dignité et dans une considération extrême. […] En mourant, il doutait qu’il l’eût accompli : c’est à nous de rendre aux choses et à l’œuvre tout leur sens, d’y voir toute l’harmonieuse ordonnance, et de dire que Virgile mourant, au lieu de se décourager et de défaillir, aurait pu se faire relire son hymne glorieux du troisième chant des Géorgiques, et, satisfait de son vœu rempli, rendre le dernier souffle dans une ivresse sacrée27. » Les Géorgiques sont, dans leur genre, le plus parfait modèle de poésie didactique qui ait enchanté les agriculteurs de tous les âges, la limite précise où la nature et la poésie se rencontrent pour s’embrasser. […] On a supposé que ce morceau du IIIe livre des Géorgiques y avait été inséré après coup par le poète, et lorsque déjà il s’occupait de l’Énéide ; il y a des détails qui semblent en effet avoir été ajoutés un peu plus tard ; mais le cadre premier existait, je le crois, et le sens général, selon l’opinion de Heine, est plutôt prophétique qu’historique.
C’étoit un poëte qu’elle expliquoit, car elle n’aimoit pas la prose, et elle n’a pas lu Cicéron ; mais comme elle se plaisoit fort à la poésie, elle lisoit particulièrement Virgile et Horace ; et comme elle avoit l’esprit poétique et qu’elle savoit tout ce qui convenoit à cet art, elle pénétroit sans peine le sens de ces auteurs. » Un peu plus loin, il revient sur les mérites de M. […] L’imagination de Mme de La Fayette, en composant, se reportait volontiers à l’époque brillante et polie des Valois, aux règnes de Charles IX ou de Henri II, qu’elle idéalisait un peu et qu’elle embellissait dans le sens où les gracieux et discrets récits de la reine Marguerite nous les font entrevoir. […] Il avait peu étudié, nous dit Segrais, mais son sens merveilleux et sa science du monde suppléaient à l’étude. […] Celle-ci nuisit en un sens à la société polie, comme certains révolutionnaires ont nui à la liberté, en la poussant trop loin et jusqu’aux excès qui appellent la réaction contraire. […] On sent qu’on a vécu jusque-là dans l’illusion et le mensonge ; qu’on s’est nourri de viandes en peinture ; qu’on n’a pris de la vertu que l’ajustement et la parure, et qu’on en a négligé le fond, parce que ce fond est de rapporter tout à Dieu et au salut, et de se mépriser soi-même en tout sens, non par une vanité plus sage et par un orgueil plus éclairé et de meilleur goût, mais par le sentiment de son injustice et de sa misère. » Le reste de la lettre est également admirable, et de ce ton approprié et pressant. — Ainsi, vous qui avez rêvé, cessez vos rêves !
La pratique des hommes et des affaires donnait au consul un sens des réalités qui manquait totalement au Platon de Genève. […] « Quelle prérogative, quoique vos académiciens la dépriment, et même la refusent à l’homme, de connaître parfaitement les objets extérieurs par la perception des sens, jointe à l’application de l’esprit ! […] « L’esprit invente, les sens examinent, la main exécute. […] « La divination ne s’applique donc à aucun des objets de nos sens ; je dis de plus qu’elle est tout aussi inutile dans ce qui est du ressort de l’art. […] Aussi je ne sais quel charme s’y trouve, qui touche mon cœur et mes sens, et me rend peut-être ce séjour encore plus agréable.
Il s’était exercé jusque-là dans de petites compositions, dans des jeux d’esprit scolaires ou académiques ; il va continuer dans le même sens, en étendant un peu ses cadres. […] L’abbé Ducreux, éditeur des Œuvres complètes de Fléchier (1682), l’a publié en entier pour la première fois : seulement il avoue qu’il a cru devoir en quelques endroits substituer quelques termes à ceux de l’original : « non qu’ils aient rien de messéant, dit-il, mais nous avons pensé que cette attention était due aux personnes d’une imagination qui se blesse aisément, et qui découvre, sous les expressions les plus innocentes, des sens détournés et peu modestes dont ne se doutaient pas ceux qui les ont employés ». […] Par cette disposition de bel esprit qui s’arrête et se complaît à la bagatelle, Fléchier n’est point de l’école sévère et judicieuse de Boileau : il a en lui de ce goût qu’aura Fontenelle, et qu’avait Benserade, un goût de ruelles dans le meilleur sens du mot. […] [NdA] À la date de 1682, Fléchier écrivait encore à Mlle des Houlières dans le style de l’hôtel Rambouillet : « J’aurais assez bien reposé la nuit, si je n’avais eu aucune inquiétude de votre mal, et je sens bien que la joie de vous voir achèvera de me guérir. […] [NdA] Copie dans le sens d’exemplaire, comme copy en anglais.
Nous traduisons nous-même, en nous aidant pour le sens et pour les mœurs de la traduction de M. […] Un vent du midi, tiède et harmonieux, soufflait par bouffées de la colline des Oliviers, en face de moi ; ce vent apportait aux sens la saveur amère et la senteur âcre des feuilles d’olivier qu’il avait traversées. […] C’est le musicien convié à toutes les fêtes et à tous les deuils du foyer, et, plus heureux que ces musiciens de nos sens, ce n’est pas à l’oreille qu’il chante, il chante au cœur. […] Je les retrouve avec leurs sens suspendus, et leurs lacunes, et leurs ratures au crayon, sur le papier jauni par la poussière du désert et par la fumée de la tente. […] de l’instrument j’ai parcouru la gamme, De la plainte des sens jusqu’aux langueurs de l’âme, Chaque fibre de l’homme au cœur m’a palpité, Comme un clavier touché d’une main lourde et forte, Dont la corde d’airain se tord brisée et morte, Et que le doigt emporte Avec le cri jeté !
Cet homme endure tous les maux avec l’humble résignation de la bête de somme ; il regarde le comte Pierre avec un bon sourire innocent ; il lui adresse des paroles naïves, des proverbes populaires au sens vague, empreints de résignation, de fraternité, de fatalisme surtout. […] Et les humbles qu’elle aime, je sens trop qu’elle « condescend » à les aimer ; qu’elle est à leur égard dans la disposition d’âme artificiellement chrétienne d’une protestante philosophe et éclairée, en visite chez des inférieurs. […] Parfois, disais-je, chez les écrivains de mon pays, même chez les meilleurs, — et surtout chez les romantiques je discerne et je sens quelque phraséologie, une rhétorique inventée ou apprise, des artifices systématiques de langage ; et il arrive que cela me fatigue un peu. […] Là où ils sont peut-être médiocres ou mauvais, ils ne me semblent que bizarres, et c’est peut-être à ces endroits-là que je me crois le plus tenu de les goûter, pour ne pas avoir l’air d’un homme totalement dépourvu du sens de l’exotisme. […] Il est évident que, dans ces moments-là, le fond chez eux ne se distingue plus de la forme : je sens, même dans la traduction, que tous les mots sont nécessaires, qu’on ne pouvait en employer d’autres.
Nous voilà loin du poète du dix-septième siècle, qui savait être homme de génie au théâtre et homme de sens dans sa vie. […] Enfin, quand on me fait voir, « dans cette île où les triumvirs firent les proscriptions et le partage du monde, la scène s’obscurcir, les éclairs sillonner la nue, et Julie paraître dans l’enfoncement, couchée entre des rochers46 », je m’y prête très volontiers, pourvu que le tonnerre ne soit pas une machine qui remplace la terreur ; que la scène ne s’obscurcisse pas pour porter dans mes sens un trouble que la pièce ne porte pas dans mon esprit ; pourvu que cet enfoncement, ces rochers, où est couchée Julie, ne la dispensent pas de me dire en un beau langage ce qu’elle a dans le cœur. […] Mais quand il se charge lui- même de faire la comparaison, il se traite plus durement que ses critiques, et dans la façon dont il plaisante ses pièces je sens une généreuse inquiétude. […] Voltaire a des vers simples qui ont la précision et la plénitude de sens de ceux de Corneille ; il en a de tendres, il en a de poétiques, comme Racine. […] Il faut des sentiments généraux et profonds pour une forme que la plénitude du sens fait trouver si simple, que des pensées vagues ou communes font trouver si vide ; il faut des diamants pour de pareils chatons.
Il désavoue toute autre passion antérieure récente, et celle même de Rome qui a fait de l’éclat : « Ne soyez plus jalouse de la princesse de Hanovre, je n’ai jamais rien senti pour elle qui approche de ce que je sens pour vous. » Si on avait à être jalouse de quelqu’un, ce serait du seul souvenir et de l’ombre de Marianne : La mort et bien des années ne pouvaient, sans vous, effacer de mon cœur le seul amour qu’il ait jamais senti avant que de vous aimer ; il durerait encore si je ne vous avais point connue : je ne sais pas même si tout celui que j’ai pour vous l’a bien éteint ; et, si vous avez à être jalouse, c’est de cet amour que vous devez l’être. […] Lassay était de ces esprits tempérés, bien faits et polis, que l’usage du monde a perfectionnés en les usant, qui ont peu d’imagination, qui n’ajoutent rien aux choses, et qui prisent avant tout une observation juste, une pensée nette dans un tour vif et concis : « Un grand sens, disait-il, et quelque chose de bien vrai renfermé en peu de paroles qui l’expriment parfaitement, est ce qui touche le plus mon goût dans les ouvrages d’esprit, soit en vers, soit en prose. » Il n’allait pas pourtant jusqu’à la sécheresse, et il tenait à rester dans le naturel ; il croyait que les choses qu’on dit ont quasi toujours chance de plaire quand elles sont plutôt senties que pensées : « Il y a des gens qui ne pensent qu’à proportion de ce qu’ils sentent, observait-il ; et il semble que leur esprit ne sert qu’à démêler ce qui se passe dans leur cœur : ces gens-là, qui sont toujours vrais, ont quelque chose de naturel qui plaît à tout le monde. » Chamfort, qui prête quelquefois de son âcreté aux autres et qui est homme à la glisser sous leur nom, a écrit dans ses notes : « M. de Lassay, homme très doux, mais qui avait une grande connaissance de la société, disait qu’il faudrait avaler un crapaud tous les matins pour ne trouver plus rien de dégoûtant le reste de la journée quand on devait la passer dans le monde. » On ne voit rien ou presque rien dans ce que dit et dans ce qu’écrit Lassay qui soit en rapport avec une si amère parole54. Suard, qui la citait aussi quelquefois en conversation comme étant de Lassay, nous l’explique et la rend toute vraisemblable en lui ôtant le sens général et absolu que lui a donné Chamfort. […] À quatre-vingt-six ans, arrivé au terme, il écrivait : « Je sens que je suis usé : je tombe avec le soleil ; le soir je me trouve dans un état misérable ; le sommeil me redonne des forces, et le matin, en m’éveillant, je me porte bien. » — M. de Lassay mourut à Paris, le 21 février 1738.
L’activité presque fébrile, qui nous caractérisa en tout temps, quitte la politique pour se porter vers le bien-être matériel : ou je me trompe fort, ou nous allons voir d’ici à peu d’années d’immenses progrès dans ce sens. […] Je ne pouvais approuver le langage révolutionnaire et propagandiste de la plupart des partisans de la guerre ; mais abonder dans le sens de ceux qui demandaient à grands cris et à tout prix la paix, était plus périlleux encore. […] Les dix dernières années, qui ont été assez stériles pour moi sous beaucoup de rapports, m’ont cependant donné des lumières plus vraies sur les choses humaines et un sens plus pratique des détails, sans me faire perdre l’habitude qu’avait prise mon intelligence de regarder les affaires des hommes par masses. […] Si, par hasard, dirai-je en idée à M. de Tocqueville, la philosophie que vous avez puisée dès l’enfance auprès du bon abbé Lesueur n’était pas absolument la vraie ; si l’homme venait de moins haut ; s’il n’avait pas moins pour cela le besoin et l’aspiration de monter, il n’y aurait pas lieu à être tant humilié de se sentir quelquefois conduit, aidé dans le sens du bien, fût-ce même du bien-être.
de vastes et hautes intelligences se souiller : l’amour des places, de l’or, de la table, des sens, les saisit ou se prolonge en elles. […] Grands hommes à tant d’égards, ils ne sont plus des hommes dans le sens intime de l’antique sagesse ; ils ne nous offrent plus des intelligences servies par des organes, mais des intelligences qui mentent à des organes qui les trahissent. […] Il n’eut donc qu’à vérifier d’un coup d’œil la cité du jour, et s’il perdit, en y marchant, quelques préjugés de détail, si très-souvent il eut à rabattre en ce sens qu’il lui avait attribué d’abord plus qu’elle n’avait, sa direction prescrite n’en fut pas déviée ; il ne fit plutôt que s’affermir. […] La révolution de Juillet, en brisant, du moins en droit, le système insoluble de la Restauration, a permis à M. de La Mennais de se produire enfin politiquement dans une pleine lumière : après sa mémorable série dans l’Avenir sur la réorganisation catholique et sociale, il n’est plus possible à un lecteur de sens et de bonne foi de garder l’ombre d’un doute aujourd’hui.
Sue sont donc vrais en ce sens qu’ils ont, au moins passagèrement, des modèles ou des copies dans la société qui nous entoure. […] Mais est-ce une raison de méconnaître ses qualités et sa grandeur, un sens naturel et droit, un haut sentiment d’honneur et de majesté souveraine, l’ordonnance de son règne si bien comprise, le discernement des hommes, de ceux qui ornent et de ceux qui servent, la part faite à chacun des principaux et assez librement laissée, l’art du maître, le caractère royal enfin, indélébile chez lui, et l’immuabilité dans l’infortune60 ? […] Sue s’aperçoit qu’il est allé trop loin en un sens, vite il fait chanter les oiseaux de Rigolette. » — Je ne prétends pas que l’homme de talent, une fois lancé dans l’exploitation de cette veine socialiste et humanitaire, n’ait pas trouvé en effet des scènes dramatiques et pathétiques, n’ait pas touché avec l’habileté dont il est capable quelque fibre vive et saignante ; cela seul peut expliquer l’étendue de son succès. […] — Ce qu’on a écrit de plus juste à mon sens sur les Mystères de Paris se peut lire dans la Revue suisse, année 1843, pages 550, 618, 666 ; et année 1844, page 68.)
Montesquieu, sans aller jusqu’au sens mystique, croyait également à des lois dans l’histoire ; tous les esprits supérieurs les aiment au point de les créer plutôt que de s’en passer. […] Cette existence considérable, qui s’étendait et s’affermissait dans tous les sens, procurait bien des occasions à son talent et lui imposait des obligations aussi dont il n’a laissé tomber aucune. […] Il en eut de tout temps la vocation reconnaissable aux signes les plus manifestes : les faits lui disaient naturellement quelque chose, ils prenaient pour lui un sens, un enchaînement étroit et une teneur. […] mais en réalité nous ne nous arrangerions pas mieux, si nous y étions condamnés, de l’ordinaire du style écrit de ce temps-là que de l’ordinaire du régime politique de ce grand règne. — Cela est très-vrai. » (Longueur rebutante de phrases et enchevêtrement continuel, amphibologie de sens, manque de précision, de netteté, etc., etc.)
Il resterait toujours à savoir si ce procédé attentif et curieux, employé à l’exclusion de tout autre, est dramatique dans le sens absolu du mot ; et pour notre part nous ne le croyons pas : mais il suffisait, convenons-en, à la société d’alors, qui, dans son oisiveté polie, ne réclamait pas un drame plus agité, plus orageux, plus transportant, pour parler comme madame de Sévigné, et qui s’en tenait volontiers à Bérénice, en attendant Phèdre, le chef-d’œuvre du genre. […] Depuis quelque temps, et le premier feu de l’âge, la première ferveur de l’esprit et des sens étant dissipée, le souvenir de son enfance, de ses maîtres, de sa tante religieuse à Port-Royal, avait ressaisi le cœur de Racine ; et la comparaison involontaire qui s’établissait en lui entre sa paisible satisfaction d’autrefois et sa gloire présente, si amère et si troublée, ne pouvait que le ramener au regret d’une vie régulière. […] Euripide lui-même laisse beaucoup sans doute à désirer pour la vérité ; il a déjà perdu le sens supérieur des traditions mythologiques que possédaient si profondément Eschyle et Sophocle ; mais du moins chez lui on embrasse tout un ordre de choses ; le paysage, la religion, les rites, les souvenirs de famille, constituent un fond de réalité qui fixe et repose l’esprit. […] La scène se passe sous un péristyle grec un peu nu, et je me sens déjà moins disposé à admettre le sacrifice de sang et l’immolation par le couteau sacré, que si le poëte m’avait transporté dans ce temple colossal où Salomon, le premier jour, égorgea pour hosties pacifiques vingt-deux mille bœufs et cent vingt mille brebis.
Il faudrait qu’il eût encore l’imagination religieuse et que ses sens fussent demeurés pieux, en sorte qu’il pût être encore délecté par l’orgue, l’encens, les cérémonies, l’atmosphère spéciale des églises. […] Il est prêtre enfin, c’est-à-dire (pesez bien les mots et tâchez d’en concevoir tout le sens : ils sont étranges et stupéfiants) ministre et représentant de Dieu sur la terre, choisi et consacré par lui pour distribuer ses grâces aux autres hommes par les sacrements, investi du pouvoir exorbitant de changer du pain et du vin au corps et au sang de Dieu lui-même. […] III L’abbé Courbezon est un Vincent de Paul absolument dénué de sens pratique. […] Puis le scepticisme, le sens critique, le sentiment du ridicule, l’ironie, qui vient du diable, sont tout ce qu’il y a de plus opposé à l’esprit de sa profession.
Je me sens ivre de mots et d’images. […] Je les sens absolument sincères, et que leur poésie s’écoule d’eux involontairement. […] » Je sens là-dedans un air d’insincérité. […] Au-delà de sa rhétorique, il n’y a rien… On peut dire en un sens qu’il ferme un cycle.
Il voit des desseins où il a plu à la pensée divine de rester inexplicable, et des lois manifestes où il n’y a que des énigmes dont le sens nous sera éternellement caché. […] Il suffit de mêler à la pensée religieuse quelque souvenir éloigné et comme épuré des plaisirs qui nous viennent par les sens, dans la contemplation ou dans l’usage des choses de la nature. […] Mais rien n’égale, pour la grâce et la pureté de la peinture, cet amour qui naît comme à l’abri de l’amitié fraternelle ; cet éveil des sens chez le jeune homme qui se trahit le premier, parce qu’il se défie le moins de ce qu’il sent : les troubles de la pudeur qui agitent la jeune fille avant que sa conscience soit avertie, et qui lui parlent sans paroles ; le malaise secret dans ce qui ressemble le plus au bonheur, le premier amour ; les joies permises qui ne laissent guère plus de paix à l’âme humaine que les joies défendues. […] Quel ne fut pas mon chagrin en voyant, à chaque rature, la pensée s’éloigner du vrai et les mots de leur sens propre, et tout le morceau jeter de vains rayons qui m’éblouissaient en me laissant l’âme vide !
Avec l’instinct, et la sagacité du génie, Eschyle remania en tous sens le récit épique pour l’adapter à l’action tragique. […] Elle jouit du sens secret d’exécration et de mort qu’elle donne à cet accueil passionné ; elle met une ironie méchante à couronner la victime, à l’amener sous le couteau, aveuglée de fleurs. […] Mais Cassandre parle à des esprits assourdis par l’âge ; les vieillards comprennent ce qu’elle dit du passé, ils s’obstinent à ne pas entendre le sens urgent de ses prédictions. […] Tout y est inspiré ; dans le sens immédiat du mot ; tout y respire l’égarement divin.
Le cardinal de Fleury avait dirigé toute son éducation en ce sens de mollesse ; ce vieillard, de plus de quatre-vingts ans, à la fois par habitude et par ruse, avait tenu constamment son royal élève à la lisière, le détournant de tout ce qui ressemblait à une idée ou à une entreprise, attentif à déraciner en lui la moindre velléité ; il ne l’avait accoutumé qu’aux choses faciles. […] Il n’avait aucune étincelle en lui, que celle qui bientôt se déclara pour les choses des sens. […] C’est dans ce sens surtout qu’il y eut scandale ; la grande ombre de Louis XIV fut invoquée. […] Il n’en était pas ainsi des personnes qui avaient su gagner les bonnes grâces de Louis XIV… » Malgré tout, elle fut bien la maîtresse qui convenait à ce règne, la seule qui pût venir à bout d’en tirer parti dans le sens de l’opinion, la seule qui pût diminuer le désaccord criant entre le moins littéraire des rois et la plus littéraire des époques.
Sans doute M. de Tocqueville a raison de dire, après beaucoup d’autres, que les souverains eux-mêmes, dans leur lutte contre la féodalité, ont travaillé à répandre l’égalité parmi les sujets, et à ce point de vue on peut dire que la révolution démocratique a commencé en France avec Philippe-Auguste ; mais n’est-ce pas changer singulièrement le sens des termes que d’appeler démocratie le règne et le progrès de la monarchie absolue ? […] Au reste, si l’on résolvait cette terrible difficulté dans le sens le moins favorable, on ne s’éloignerait cependant pas des vues générales de M. de Tocqueville, car cet esprit de nivellement à outrance appelle le pouvoir absolu, soit qu’il triomphe, soit qu’il succombe. […] Il en parle avec un sens très-juste et très-fin dans cette belle lettre à M. de Corcelles : « Comme vous, mon cher ami, je n’ai jamais eu beaucoup de goût pour la métaphysique, peut-être parce que je ne m’y suis jamais livré sérieusement, et parce qu’il m’a toujours paru que le bon sens amenait aussi bien qu’elle au but qu’elle se propose ; mais néanmoins je ne puis m’empêcher de reconnaître qu’elle a eu un attrait singulier pour plusieurs des plus grands et même des plus religieux génies qui aient paru dans le monde, en dépit de ce que dit Voltaire, que la métaphysique est un roman sur l’âme. […] Il n’y pas, je crois, d’homme d’État qui dût voir avec indifférence que la métaphysique dominante dans le monde savant prît son point de départ dans la sensation ou en dehors decelle-là, car les idées abstraites qui se rapportent à l’homme finissent toujours par s’infiltrer, je ne sais comment, jusque dans les mœurs de la foule. » Quelque peu métaphysicien qu’il fût, il avait bien pénétré le sens de certaines doctrines, en particulier du panthéisme, et il expliquait parfaitement le secret de son empire dans le siècle où nous vivons.
On lui reproche cependant un peu de sécheresse, & ce nombre infini de récits consécutifs, qui ne donnant rien à la représentation, laissent sans occupation un des principaux sens, par l’organe duquel les hommes sont le plus facilement touchés, celui de la vue. […] Dans d’autres il a employé des termes d’une signification différente, mais susceptibles du même sens.” […] Mais le génie italien y est moins conservé que dans la premiére traduction, & l’exactitude même à rendre le sens de l’original n’est pas si entiere. […] Le traducteur fidéle au sens de l’original, ne l’est pas moins à la pureté du langage.
A citer en ce sens : Hâbleurs tfambara — Les six géants Môssi. […] Il a dit le nécessaire, à mon sens, pour condamner cette hypothèse et soutenu victorieusement la thèse que la littérature indigène est presque absolument originale. […] Malgré de nombreux efforts et quoique je me sois renseigné près de divers Indigènes, je n’ai pu trouver d’explications satisfaisantes ni surtout concordantes du sens de ces mots : soutoura, hakilé et dyiké, et, par suite, il m’est impossible de déterminer le sens des symboles auxquels ils correspondent.
Dom Rivet n’était pas, on peut le conjecturer d’avance, un esprit de ceux qu’on appelle philosophiques ; il n’était même pas de ceux qu’on peut appeler éclairés dans le sens le plus chrétien du mot : il avait ses préventions, son coin de secte. […] Le Lion empereur, entendant le Loup faire éclat de la séduction de sa femme, lui parle en homme de sens : Ysengrin, lui dit-il, laissez tomber cela. […] En ce sens seulement, et pour le détail heureux, ils n’ont pas à craindre la comparaison avec La Fontaine.
Dans cette nouvelle et dernière forme, Renart est pris pour synonyme de mal, de vice et de péché dans le sens le plus absolu du mot ; c’est Satan en personne usurpant le règne de la terre. […] Les poètes ont fait à ce sujet des pièces de vers en divers sens, et l’on a de Simonide cette épitaphe triomphante des Spartiates : Nous les trois cents, qui avons, ô Sparte notre mère, combattu pour Thyrée contre un pareil nombre d’Argiens, — sans tourner la tête, — là où nous avions marqué le pied, là même nous avons laissé la vie. […] Depuis que l’on connaît le Roman de Renart, La Fontaine, même dans ce sens peu rigoureux et tout favorable où on l’entend, ne peut vraiment être dit que le second Homère dans son genre.
Pour lui, il est classique en un sens, mais il faut bien savoir en quel sens. […] Marcotte en juillet 1832, c’est la passion que je me sens pour faire quelque chose.
Je sens toute l’exagération de cet éloge sous le rapport des talents ; mais je ne serai jamais au-dessous par la vérité de mon caractère, par la noblesse de mes sentiments, par ma tendre affection pour mon frère… Dans la position où je suis, il me faut une confiance absolue, Sire ; si je ne l’ai pas, la retraite absolue, comme vous le voudrez. […] L’auteur évidemment y abonde dans son sens : « Chacun, a dit Mme de Staël, se fait la poétique de son talent. » M. […] Mais aussi il y a un historien des plus heureusement doués dont le procédé est autre : il lit, il étudie, il se pénètre pendant des mois et quelquefois des années d’un sujet, il en parcourt avec étendue et curiosité toutes les parties même les plus techniques, il le traverse en tous sens, s’attachant aux moindres endroits, aux plus minutieuses circonstances ; il en parle pendant ce temps avec enthousiasme, il en est plein et vous en entretient constamment, il se le répète à lui-même et aux autres ; ce trop de couleur dont il ne veut pas, il le dissipe de la sorte, il le prodigue en paroles, en saillies et en images mêmes qui vaudraient souvent la peine d’être recueillies, car, plume en main, il ne les retrouvera plus : et ce premier feu jeté, quand le moment d’écrire ou de dicter est venu, il épanche une dernière fois et tout d’une haleine son récit facile, naturel, explicatif, développé, imposant de masse et d’ensemble, où il y a bien des négligences sans doute, bien des longueurs, mais des grâces ; où rien ne saurait précisément se citer comme bien écrit, mais où il y a des choses merveilleusement dites, et où, si la brièveté et la haute concision du moraliste font défaut par moments, si l’expression surtout prend un certain air de lieu commun là où elle cesse d’être simple et où elle veut s’élever, les grandes parties positives d’administration, de guerre, sont si amplement et si largement traitées, si lumineusement rapportées et déduites, et la marche générale des choses de l’État si bien suivie, que cela suffit pour lui constituer entre les historiens modernes un mérite unique, et pour faire de son livre un monument.
C’est de vive voix et dans le plus particulier détail qu’il faudrait faire sentir ces choses ; mais indiquons du moins en quelques mots le sens de la critique, telle qu’on peut l’appliquer à ces pièces légères : Oh ! […] Les sorciers y font leur sabbat ; Les démons follets s’y retirent, · Qui d’un malicieux ébat Trompent nos sens et nous martyrent ; Là se nichent en mille trous Les couleuvres et les bibous. […] Saint-Évremond dit cela en pensant à Pétrone, et il continue en appliquant ses observations à ce qui n’est que grossier et répugnant à la propreté et aux sens : Notre délicatesse va plus loin, et l’on n’aimerait pas aujourd’hui la description d’un objet rebutantt.
Il est certainement très compromis, et c’est un mot et une chose qui n’a plus guère de sens aujourd’hui ni d’application. […] Si Napoléon eût été à la place de l’archevêque de Sens (de toutes les spirituelles suppositions qu’on pouvait faire, voilà certes la plus inattendue), il eût recommencé en 1789 les conquêtes de Louis XIV, ou réalisé les rêves de nos meilleurs princes. […] Tous les esprits s’y montraient sous un jour imprévu… La vicomtesse de Noailles est fidèle encore au salon de la maréchale de Beauvau et de ses grands-parents, en nous le montrant ainsi, aux approches de 89, traversé en bien des sens et agité de ces courants d’opinion qui rafraîchissaient si agréablement les esprits et y remuaient les idées avant qu’on eût la tempête.
Le biographe peut prendre de ces soucis pour son propre compte, mais il est mieux qu’il les garde pour soi, et qu’il dirige son lecteur vers quelque but, dans quelque sens déterminé. […] Ses amis, devenus ministres après 1830, le nommèrent professeur ; on put d’abord regretter que ces fonctions nouvelles le détournassent des grands travaux historiques qu’il poursuivait depuis des années : en y songeant mieux pourtant, je ne sais s’ils ne lui rendirent pas service, à lui et à nous, dans tous les sens. […] Vivre par la pensée dans d’autres temps et s’y oublier à volonté, tandis que l’on continue dans l’heure présente de jouir insensiblement et par tous les sens de l’air, de la lumière, de la pureté du ciel, de la limpidité des eaux, de la majesté des horizons, de tous les bienfaits naturels qui sont encore la plus vraie jouissance pour des êtres vivants, que faut-il de plus à l’homme qui est sorti de l’âge des passions et en qui elles n’ont point laissé la lie de leur philtre empoisonneur ?
Au sens littéraire, il n’y aurait rien à objecter à cette définition, et elle serait heureuse. […] Tite-Live, de même, en évitant ces reliefs en tous sens qu’un Plutarque peut indiquer dans le détail et qu’on recherche si fort aujourd’hui, obéit à une pensée de peintre plus que d’orateur, à un sentiment d’accord, de composition et de nuance, qui lui fait assortir ses principales figures avec le noble monument qu’il élève. […] Si l’on ôte quelques passages où la simplicité est affectée et la sagacité raffinée, on croit entendre un des anciens jurisconsultes ; Montesquieu a leur calme solennel et leur brièveté grandiose ; et du même ton dont ils donnaient des lois aux peuples, il donne des lois aux événements… Suivant moi, pour que le livre sur Tite-Live fût entièrement vrai (car il l’est sur presque tous les points, et pleine justice est rendue d’ailleurs à l’historien), il eût suffi de laisser au sens du génie oratoire, du génie de l’éloquence déclaré dominant chez lui, la valeur d’un aperçu littéraire, sans lui attribuer la valeur d’une formule scientifique ; il eût suffi enfin de ne pas inscrire à la première ligne de cette étude, de n’y pas faire peser le nom et la méthode de Spinosa, de ne pas rapprocher des termes aussi étonnés d’être ensemble que Spinosa et Tite-Live.
Buffon lui accorde le génie créateur qui tire tout de sa propre substance : « Il n’existera jamais, lui dit-il, de Voltaire second » ; c’était une réplique au compliment de Voltaire qui avait appelé Archimède de Syracuse Archimède premier, pour donner à entendre que Buffon était Archimède second ; et faisant ainsi à son rival de Ferney les honneurs du génie, Buffon ne se réserve pour lui que le talent, lequel, si grand qu’il soit, dit-il, « ne peut produire que par imitation et d’après la matière. » Cette lettre à Voltaire, comme plus tard celles qui seront adressées à l’impératrice Catherine, passe la mesure ; Buffon y est deux fois solennel ; il y fait de la double et triple hyperbole, et l’homme qui, à son époque, avait le plus de sens et de jugement, nous fait sentir par là que ces qualités solides d’une éminente intelligence ne sont pas du tout la même chose que le tact et le goût. […] Et cependant il ne saurait se contraindre à être le collecteur, l’investigateur minutieux, l’observateur de détail ; ses sens même y faisaient obstacle ; ses yeux étaient mauvais ; sa taille droite et haute était d’un maréchal de France, on l’a dit, plus que d’un homme de laboratoire ou de cabinet. […] Il aura du moins réussi à faire valoir en Buffon et à mettre de plus en plus en lumière l’honnête homme, l’homme de cœur, de sagesse et de sens.
Ce livre dégage et illumine un sens que nous avons tous, mais voilé, vague et privé presque de toute activité, le sens qui recueille les beautés physiques et les livre à l’âme. » Et il insiste sur ce second travail de réflexion qui spiritualise, qui fond et harmonise dans un ensemble et sous un même sentiment les traits réels une fois recueillis. […] Ses moindres croquis ont ainsi leur sens et leur charme : Le 19 (mars). — Promenade dans la forêt de Coëtquen.
En rabattant tout ce qu'on voudra des impressions de De Maistre, qui varient d’ailleurs au jour le jour au gré des nouvelles et des bruits divers, mais qui n’excèdent pas (car rien ne saurait les excéder) de pareilles réalités, il reste très curieux d’observer avec lui cette grande et unique année par le revers russe, de passer par toutes les vicissitudes d’émotions qui, là-bas, répondaient aux nôtres en sens inverse, et de connaître autrement que par nos bulletins ces physionomies singulières et expressives des Koutousov, des Tchitchagov, du Modenais Paulucci et de tant d’autres ; de comprendre enfin le génie russe dans son originalité, dans sa religion nationale et sa foi inviolable. […] L’impression que cet homme fait sur les esprits est inconcevable. — I… (un Piémontais prisonnier), qui était présent à la revue qui se fit avant de sortir de Moscow, m’a fait peur à moi-même en me disant : « Lorsque je le voyais passer devant le front, mon cœur battait comme lorsqu’on a couru de toutes ses forces, et mon front se couvrait de sueur, quoiqu’il fît très froid. » Ici nous touchons au grand problème que de Maistre se pose sans cesse, mais qu’il ne résout pas, ou du moins qu’il ne résout jamais que dans un sens exclusif, celui du passé. […] C’est ainsi qu’il pense en tous sens, même en avant, et de droite et de gauche, surtout de haut ; au risque de tirer parfois sur ses propres troupes.
Les esprits me semblent tout à fait à l’état révolutionnaire, en ce sens qu’ils aspirent à un changement, à une crise, qu’ils l’attendent, qu’ils l’appellent, sans qu’aucun puisse dire pourquoi. […] Je la formulerai, si l’on veut, par un aphorisme : En tout corps organisé une perturbation violente se traite utilement par une perturbation en sens contraire. […] En l’absence d’un homme énergique supérieur et capable de gouverner dans l’autre sens, c’était peut-être ce qu’il y avait de mieux à faire.
Elle reste dans l’ignorance obstinée des lettres jusqu’à ce qu’un jour, ayant vu des signes gravés sur la tombe de ses père et mère, et ayant voulu savoir le sens de ces épitaphes sans pouvoir obtenir de réponse satisfaisante, elle se met à profiter incontinent des leçons du curé, qui, dès ce moment, ne reconnaît plus son élève. […] Le roman frise parfois le poème ; si nous avions affaire à un vrai poème, et que tout cela fût en beaux vers, en belle musique, nous n’aurions trop rien à dire : on est moins sévère pour le sens, quand on peut se rattraper à chaque instant sur l’exécution. […] Vous faites de Clotilde, par opposition à votre héroïne, une femme de passion, dirigée par ses instincts positifs, par son tempérament et par ses sens, et aussi par le sens commun vulgaire.
Byron, qui avait pour la première fois, non-seulement traversé, comme Chateaubriand, mais parcouru en tous sens et habité la Grèce et l’Orient en 1809, 1810, 1811, en avait rapporté, déjà écrits ou en germe, cet immortel Childe Harold, dont les deux premiers chants parurent en 1812, le Giaour et tous ces poëmes bientôt populaires en Europe, qui mirent le feu aux imaginations à partir de 1816, et qui bientôt consacrèrent dans une même admiration, dans un intérêt commun, à demi mystérieux, les noms de Byron et de la Grèce. […] Grenier est un esprit essentiellement moderne ; il l’a assez prouvé dans une brochure curieuse intitulée : Idées nouvelles sur Homère (1861), dans laquelle il s’exprime en pleine liberté sur ce père de toute poésie, et en sens contraire de l’opinion commune. […] Je ne le puis faire ici, et je me borne à remarquer que sa conclusion, tout à fait dans le sens des Fontenelle, des Lamotte, des Terrasson et de quelques modernes de ma connaissance, a plus de chance qu’on ne le croit d’être reprise et accueillie un jour.
Alquier jugea que son premier secrétaire s’était trop avancé, que la reine n’avait pas changé de sentiments, et qu’il n’y avait rien à espérer de cette Cour dans le sens d’une neutralité sincère. […] Édouard Lefebvre, en croyant devoir tenter une démarche de conciliation, avait donc agi dans le sens des désirs de l’Empereur et avait deviné juste. […] Lefebvre, pour l’arrêter dès le premier effort qu’il tenta en ce sens (17 mars 1808) : « Les circonstances doivent vous rendre extrêmement circonspect dans vos démarches, et Sa Majesté ne peut approuver toute la peine que vous vous donnez pour nouer une négociation : n’en prenez aucune.
Il était depuis cinq années à Paris, et à bout de voie dans tous les sens (1838), lorsque tout d’un coup une grande révolution s’opéra un matin dans sa manière de voir et de sentir : son âme tout entière se retourna. […] Il entra, dès lors, dans un ordre de considérations le plus antirévolutionnaire possible : il eut des théories et des perspectives sur l’avenir des nations catholiques ou protestantes, des vues historiques aussi vagues et aussi fausses peut-être qu’auparavant ; il prophétisa encore, et en sens inverse. […] À ces doux noms mon âme en sursaut se réveille ; Je sens frémir mon sang et se mouiller mes yeux ; Ainsi qu’Abbadona, l’ange exilé des cieux, Le jour où je quittai les monts de la Savoie, De nos cœurs à la fois s’exila toute joie ; Au fond de nos vallons, pèlerin de malheur, Je laissai mon repos et j’emportai le leur !
Il est naturel et il paraît juste qu’au moment même où l’unité de la France s’accomplit et se consomme en tous sens par l’immense réseau des communications et par une facilité, pour chacun, d’un déplacement à la minute, et presque d’une omniprésence universelle, il y ait un sentiment de résistance sur quelques points, un reploiement sur soi et un suprême effort de quelques fidèles pour sauver les vieilles mœurs ou du moins les vieilles chansons, pour les préserver et les clôturer, s’il est possible, pour leur assurer même, comme par défi, et grâce à un stimulant nouveau, une sorte de regain et de renaissance. […] C’est dommage, vraiment, que de telles strophes n’aient pas été faites il y a deux siècles, au lendemain de Malherbe : on s’en souviendrait peut-être ; mais elles viennent trop tard ; c’est trop de mots pour trop peu de sens : Ô Rose, en toi que l’amour rende Hommage aux fragiles destins ! […] — Je sens mes yeux en pleurs.
Il faut rappeler ici de nouveau le sens que j’ai constamment attaché au mot philosophie dans le cours de cet ouvrage. […] C’est une langue d’une mélodie si extraordinaire, qu’elle peut vous ébranler, comme des accords, sans que vous donniez votre attention au sens même des paroles. […] Cependant, en examinant le sens de ces paroles, on n’y trouve rien de sublime : c’est comme grand musicien que le Tasse vous fait trembler dans cette strophe ; et les beaux airs de Iomelli produiraient sur vous un effet à peu près semblable.
Des hommes tels que le ministre d’Argenson526, le magistrat La Chalotais, ne sont pas des philosophes : ils travaillent à côté d’eux et dans le même sens. […] Desfontaines, dans ses Observations, Fréron, dans son Année littéraire, s’accrochèrent presque au seul Voltaire, y usèrent ce qu’ils avaient d’esprit, de sens, d’honnêteté même, sans autre résultat que de l’amener à s’avilir un peu dans des polémiques injurieuses. […] En ce sens, l’œuvre où aboutit toute la pensée du siècle, c’est la fameuse Esquisse de Condorcet539.
Je l’aime pour tout ce que je sens d’inconnu en elle. […] au sens où on emploie le mot dans les ateliers. […] À certains moments, ils se précipitent d’un tel train qu’on n’entend plus que leur bruit sans en concevoir le sens ; c’est assurément un défaut que mon parti pris d’extase ne saurait m’empêcher de reconnaître.
Et même, si j’ose dire toute ma pensée, lorsque Dorine répond : Vous êtes donc bien tendre à la tentation, Et la chair sur vos sens fait grande impression ? cela est sans doute fort plaisant ; mais enfin pourquoi Dorine, pourquoi les femmes montrent-elles leur sein nu, si ce n’est en effet pour « faire impression sur nos sens » ? […] Celui-ci, du moins, n’aura pas été entièrement vain, puisque, ayant retourné Tartuffe dans tous les sens, me voilà, finalement, plus assuré de la vérité et de l’unité secrète de cette illustre figure.
Charles Maurras, soucieux de restaurer le règne de l’Intelligence, y luttait contre les empiètements de la sensibilité brouillonne et, à rebours des esthètes névropathes, nous invitait à ne pas réduire le monde à soft décor et à ne pas juger des choses, en dernier ressort, sur l’unique témoignage des sens. […] Desrousseaux, nanti d’un vaste savoir, était la Providence à laquelle tous avaient recours dans les cas litigieux, lorsqu’il s’agissait d’invoquer l’autorité d’un texte ancien ou de rétablir le vrai sens d’une version mutilée. […] Le dandysme apparaît, quand sous la menace de la confusion générale, quelques modalités de l’ancien ordre jaillissent plus riches de sens et qu’une ligne de démarcation subsiste encore entre l’aristocratie déclinante et le flot démagogique envahisseur.
Il lui fallut paraître au balcon ou s’en retirer à la voix d’une populace furieuse, et, dans ces flux et reflux de l’orage populaire dont elle s’efforçait de deviner le sens, elle ne sentait bien qu’une seule chose, l’étreinte de la main de sa mère qui la pressait contre elle avec le froid de la mort. […] S’il manquait à ces lectures ce qui les eût vivifiées dans le sens mondain et littéraire, dans le sens politique et profane, si l’intelligence et le souffle du nouveau siècle ne pénétraient pas dans ces horizons tracés, peut-on s’en étonner, peut-on l’en plaindre ?
Pourtant, en fait de musique comme en tout, il est évident que Franklin n’aime que la partie simple ; il veut une musique toute conforme au sens des mots et du sentiment exprimé, et avec le moins de frais possible. […] Un excellent critique anglais (Jeffrey) en a touché un mot dans le sens où il est permis à des littérateurs comme nous d’aborder ce sujet. […] Je vais partir du vieux monde pour le nouveau, et je me figure que je sens quelque chose de pareil à ce qu’on éprouve quand on est près de passer de ce monde à l’autre : chagrin au départ ; crainte du passage ; espérance de l’avenir.
Une telle transposition a pour effet, on le sait, de modifier quelque peu le sens que comporte le mot dans l’œuvre de Flaubert. […] Mais sitôt que l’on considère une des branches de l’éventail en dirigeant l’observation dans le sens qui va vers son extrémité, on voit diminuer, à mesure que l’on approche de cette extrémité, le nombre des variations possibles. […] Si l’instinct de conservation continue de l’animer, elle n’évoluera que dans le sens nécessité par ses antécédents historiques.
Ce n’était que scientifiquement que pouvait s’établir une sûreté pareille — et en recherchant quel est le sens intime et directeur de tout idiôme, mais ici particulièrement de notre langue. […] Or, compris comme plus haut et c’est ainsi qu’on le doit comprendre, le langage est au-dessus de la musique, car il décrit, suggère, et définit strictement le sens. […] Ces choses dites rapidement, qu’il me soit permis de montrer que cette forme nouvelle de l’expression de l’idée, l’Instrumentation poétique, enferme et perd en elle tous les modes d’art : Elle est l’éloquence, évidemment : plastique pour la variété la plus ordonnée des rythmes : picturale, parce que (nous avons négligé de le dire au long) le moins de hasard a été établi aussi pour la coloration à attribuer aux voyelles, que la généralité des vues maintenant, c’est un fait scientifique, distingue nettement de telle ou telle couleur : musicale parce qu’elle est le sens enfin trouvé du langage, qui, scientifiquement, est musique, et qu’elle est l’immatérialité des instruments de la musique proprement dite : Elle est, au gré de la pensée qui la conduit et la mesure, la plus complète et intime possibilité de mouvement intellectuellement exprimé.
Par elle, l’esprit découvre une planète que les sens n’ont jamais vue ; par elle, il explique une langue qu’aucun homme ne comprenait plus ; il déchiffre des caractères mystérieux dont le secret était perdu ; il pénètre bien au-delà des époques historiques, et, en l’absence de tout témoignage direct, jusqu’aux origines de la civilisation indo-européenne ; il calcule enfin ce qui paraît échapper à toute prise, le hasard et l’infini. […] Au reste, Dugald Stewart rapporte les opinions d’un grand nombre de savants et de philosophes tels que Hooke, Hartley, S’Gravesande, Lesage, Boscowitch, qui tous s’accordent à défendre la méthode hypothétique dans le sens et dans les limites que nous venons de dire. […] Un enfant voit osciller une lampe ou tomber une pomme : c’est un jeu pour ses sens et pour son imagination ; pour un Galilée, pour un Newton, ces deux phénomènes ne sont que les signes des lois générales et universelles.
Ainsi les oracles des sibylles annonçaient un siècle nouveau ; et cette grande prophétie, née du besoin des peuples, inspirait à Virgile de beaux vers dont lui-même ignorait le sens profond. […] Il serait peut-être permis d’affirmer, dans un autre sens, que tout est fait dans le monde pour un certain nombre d’hommes. […] Une telle épithète renferme un vaste sens : elle signifie non seulement chef d’un peuple, mais encore père du siècle futur, fondateur d’une société humaine, souche d’une race destinée à régner.
II L’amour chez l’homme est un sentiment moral ; ce n’est que par dégénération qu’il se transforme quelquefois, et qu’il devient l’irrésistible appétit des sens comme chez les animaux. […] Lorsque nos parents nous ont donné la naissance, ils ont été ministres de Dieu, en ce sens qu’ils savaient ce qu’ils faisaient. […] La légitimité est ce lien mystérieux qui forme l’unité morale des nations ; et en ce sens elle est le consentement même des peuples.
mais comme aiment les sens dans un homme. […] C’est un amour qui reste un amour des sens paternels. […] Gustave Droz, l’auteur d’Autour d’une source, a vu dans les derniers faits miraculeux qui ont réjoui les cœurs catholiques et que des plumes catholiques ont attestés, un prétexte, non pas à discussion, mais à roman, et il a fait le sien, d’un point de vue humain qui pourrait très bien être… Il a supposé que l’ardente Spéculation moderne, qui met ses mains avides sur tout, pouvait se servir d’un miracle, ou plutôt du mirage d’un miracle, pour faire ses affaires impudemment, malhonnêtement, abominablement, et il a construit un récit dans ce sens qui pourrait être vrai, qui ne l’est pas encore dans l’histoire de nos mœurs, mais qui pourrait l’être, et en construisant ce récit — rendons-lui cette justice !
Certes, je comprends très bien qu’on n’aime pas les vers libres ; moi-même, tout en m’y intéressant fort, je me sens incapable d’en user. […] Gustave Kahn qui contiennent des poèmes d’un sens exquis, tels ces Paysages de Provence que je ne puis parcourir sans émotion, malgré qu’en vers libres. […] Fondons nos âmes, nos cœurs Et nos sens extasiés, Parmi les vagues langueurs Des pins et des arbousiers.
L’abbé de Pons, né en 1683, avait pour père le sieur de Pons d’Annonville, d’une noble famille de Champagne et chevalier d’honneur du présidial de Chaumont (sur Marne) ; il naquit à Marly, chez son oncle qui en était alors seigneur, et de qui le roi ne tarda pas à l’acquérir, « fit ses premières études au collège des jésuites à Chaumont, puis vint à Paris et entra au séminaire de Saint-Magloire, d’où il suivit l’école de Sorbonne : « Il était bon humaniste, nous dit-on ; il possédait les principes de la théologie ; mais surtout il était grand métaphysicien, dans le sens le plus étendu qu’on donne à présent (1738) à ce terme. […] Je réponds, dans les termes d’un bon juge, que toute assemblée publique où les bienséances sont observées est une école utile… Il continue dans ce sens cette apologie des cafés.
Et d’abord, dans l’ordre de l’action, il y avait le Premier Consul, celui qui disait un matin, en mettant la main sur sa poitrine : Je sens en moi l’infini ; et qui, durant quinze années encore, entraînant le jeune siècle à sa suite, allait réaliser presque cet infini de sa pensée et de toutes les pensées, par ses conquêtes, par ses monuments, par son Empire. […] Sautelet aussi vivait alors dans ces idées : inquiet, mélancolique et fervent, il hésitait entre l’action et la contemplation ; je lis dans une lettre de lui que j’ai sous les yeux : « On ne peut guère faire une vie double, agir et contempler ; je sens, comme je te le disais cet été, que l’homme est placé sur la terre pour l’action, et je ne puis cependant laisser l’autre.
D’abord du 10 août au 9 thermidor, l’influence directe des royalistes fut nulle ; tout le monde en convient : le nom de royaliste alors n’était plus qu’un mot vide de sens, que les partis se jetaient à la tête comme une injure et une menace. […] Soit effroi réel, soit calcul d’ambition, l’ancien parti thermidorien, avec Tallien son chef, revint presque à la Montagne, proposa de suspendre la Constitution, et d’exclure le tiers, librement choisi, qui l’avait été dans le sens des réactionnaires.
La vie, le sentiment de la réalité, y respirent ; de frais paysages, l’intelligence poétique symbolique de la nature, une conversation animée et sur tous les tons, l’existence sociale du xviiie siècle dans toute sa délicatesse et sa liberté, des figures déjà connues et d’autres qui le sont du moment qu’il les peint, d’Holbach et le père Hoop, Grimm et Leroy, Galiani le cynique ; puis ces femmes qui entendent le mot pour rire et qui toutefois savent aimer plus et mieux qu’on ne prétend ; la tendre et voluptueuse madame d’Épinay, la poitrine à demi nue, des boucles éparses sur la gorge et sur ses épaules, les autres retenues avec un cordon bleu qui lui serre le front, la bouche entr’ouverte aux paroles de Grimm, et les yeux chargés de langueurs ; madame d’Houdetot, si charmante après boire, et qui s’enivrait si spirituellement à table avec le vin blanc que buvait son voisin ; madame d’Aine, gaie, grasse et rieuse, toujours aux prises avec le père Hoop, et madame d’Holbach, si fine et si belle, au teint vermeil, coiffée en cheveux, avec une espèce d’habit de marmotte, d’un taffetas rouge couvert partout d’une gaze à travers la blancheur de laquelle on voyait percer çà et là la couleur de rose ; et au milieu de tout ce monde une causerie si mélangée, parfois frivole, souvent souillée d’agréables ordures, et tout d’un coup redevenant si sublime ; des entretiens d’art, de poésie, de philosophie et d’amour ; la grandeur et la vanité de la gloire, le cœur humain et ses abîmes, les nations diverses et leurs mœurs, la nature et ce que peut être Dieu, l’espace et le temps, la mort et la vie ; puis, plus au fond encore et plus avant dans l’âme de notre philosophe, l’amitié de Grimm et l’amour de Sophie ; cet amour chez Diderot, aussi vrai, aussi pur, aussi idéal par moments que l’amour dans le sens éthéré de Dante, de Pétrarque ou de notre Lamartine ; cet amour dominant et effaçant tout le reste, se complaisant en lui-même et en ses fraîches images ; laissant là plus d’une fois la philosophie, les salons et tous ces raffinements de la pensée et du bien-être, pour des souvenirs bourgeois de la maison paternelle, de la famille, du coin du feu de province ou du toit champêtre d’un bon curé, à peu près comme fera plus tard Werther amoureux de Charlotte : voilà, et avec mille autres accidents encore, ce qu’on rencontre à chaque ligne dans ces lettres délicieuses, véritable trésor retrouvé ; voilà ce qui émeut, pénètre et attendrit ; ce qui nous initie à l’intérieur le plus secret de Diderot, et nous le fait comprendre, aimer, à la façon qu’il aurait voulu, comme s’il était vivant, comme si nous l’avions pratiqué. […] » « Au milieu de cela, j’envoie quelquefois ma pensée aux lieux où vous êtes, et je me distrais… Avec vous, je sens, j’aime, j’écoute, je regarde, je caresse, j’ai une sorte d’existence que je préfère à toute autre.
Il jugeait l’usurpateur de brumaire au point de vue des républicains et idéologues français, comme un grand capitaine peut-être, mais comme un dévastateur au civil, comme un ignorant et audacieux pirate des libertés, dénué de tout sens moral de droit et de justice. […] Il admet dans l’homme un sens du juste qui nous a été donné pour nous diriger ; il regrette que le profond auteur du Commentaire sur l’Esprit des lois, ait emprunté sa base morale à Hobbes.
Où était-il alors, en cette triste plaine champenoise, harassé et pesant, presque inquiet au toucher d’un des siens, le radieux Consul qui s’était écrié, la main sur son front : « Je sens en moi l’infini ! […] Les intelligences qui s’élargissent passivement en tous sens et font de l’âme une surface glacée qui réfléchit habituellement chaque objet et chaque nuage, ces intelligences, belles peut-être comme miroirs, n’ont jamais le tranchant ni le fil du glaive.
Autrier est un bourgeois : et son théâtre exprime les idées d’un bourgeois de 1850, qui aurait l’âme saine, sens droit, volonté ferme, moralité intacte. […] Un vigoureux sens des réalités soustrait l’œuvre aux dangers de la thèse, et l’empêche de s’évanouir dans l’abstraction comme de se dessécher dans le symbole.
Le jour où Copernic a prouvé que ce qu’on croyait le plus stable était en mouvement, que ce qu’on croyait mobile était fixe, il nous a montré combien pouvaient être trompeurs les raisonnements enfantins qui sortent directement des données immédiates de nos sens ; certes, ses idées n’ont pas triomphé sans peine, mais, après ce triomphe, il n’est plus de préjugé si invétéré que nous ne soyons de force à secouer. […] Aujourd’hui, une hypothèse ne nous paraîtra plus absurde, parce qu’elle nous oblige à imaginer des objets beaucoup plus grands ou beaucoup plus petits que ceux que nos sens sont capables de nous montrer, et nous ne comprenons plus ces scrupules qui arrêtaient nos devanciers et les empêchaient de découvrir certaines vérités simplement parce qu’ils en avaient peur.
Qu’on se figure la multitude de tours, d’images, de mouvements qui ont dû naître de ces conversations, où les sens, l’imagination, le cœur, étaient en jeu ; où l’émulation de plaire et d’étonner excitait les amours-propres ; où la critique n’était pas moins exaltée par les rivalités que le besoin de produire par l’émulation de plaire ! […] On trouvait ridicule qu’un amant dît à sa maîtresse : Je ne fais des vers qu’en rêvant, mais je vous aime avec étude et de tout mon sens.
C’est un critique d’histoire renseigné, qui discute et compare des textes avec la pénétration de la droiture, mais ce n’est point un critique dans un autre sens, et, dans l’acception élevée et connaisseuse du mot, un écrivain. […] Seulement il fait quelquefois des phrases comme celle-ci, qui ne sont pas de tout le monde : « La France fit de son échine adulatrice le premier degré de cette unité de foi où le monarque voyait pour lui l’échelle du ciel. » Quand on veut être insolent pour Louis XIV, il ne faut pas être grotesque, ou l’on manque l’insolence… Le sens d’historien, qui est très vif chez de Lescure, le fait entrer en plein dans l’histoire, et sur La Grange-Chancel il en a partagé les émotions.
Théophile Gautier était le poète de la matière, somptueux ou dégoûtant comme elle, la prenant toute dans le terrible contraste de ses phénomènes, n’ayant pas plus d’horreur que le chimiste qui ne voit, lui, que des compositions ou des décompositions de gaz où nos sens voient des choses qui les font cabrer, indiffèrent enfant de la terre, comme dit Shakespeare, à tout ce qui n’est pas le rendu plastique de l’objet matériel, quel qu’il soit. […] Quant aux autres progrès que le livre d’Émaux et Camées nous atteste, ils sont moins faits pour étonner parce qu’ils sont dans le sens et dans la donnée des facultés connues du poète et de ses puissances.
Pour être pris et dominé par l’Asie, il faut la prendre où elle est puissante, c’est-à-dire dans sa nature extérieure et son énergique matérialité ; il faut avoir le sens du visible plus développé que le sens de l’invisible, qui est le plus beau visible pour les poètes, ces grands spirituels ; il faut, enfin, être beaucoup plus peintre que poète, et c’est malheureusement l’histoire de M. le Conte de L’Isle, peintre, de facultés, auquel la toile a manqué.
Dans l’état qu’on appelle état de nature, et qui fut celui des familles, les pères de familles ne pouvant recourir à la protection des lois qui n’existaient point encore, en appelaient aux dieux des torts qu’ils souffraient, implorabant deorum fidem ; tel fut le premier sens, le sens propre de cette expression.
Un certain sens de la mesure est nécessaire à l’homme d’État. […] Il faut agir conformément à la nature, comme disaient les stoïciens, en un tout autre sens. […] On a dit : « Ceci est précisément en sens contraire de l’évolution universelle. […] Avec chat le fragment n’a guère de sens. […] C’était, dans le sens absolu du mot, une âme chrétienne.
Leslie n’est point un étourdi au sens où nous prenons le mot aujourd’hui. […] Ce ne sont point les termes exprès du feuilleton que je n’ai plus sous les yeux ; c’en est au moins le sens. […] Régnier m’assura que ce sens était de tradition, et que pour lui il n’avait jamais songé à un autre. […] Elle y manque, à mon sens, de profondeur et de sensibilité. […] Les fait-il rire, du moins, de ce rire franc, sain, sans réticence, qui épanouit les sens et rafraîchit l’âme ?
Plusieurs fois il avait eu des velléités de réforme, et fait des efforts et des tentatives dans ce sens. […] Mais on dirigera soigneusement, toujours sans en avoir l’air, l’éducation de ses sens. […] L’auteur nous parle trop des « sens » et des « désirs » de Sophie, et même de son « tempérament combustible ». […] Cela n’a aucun sens. […] Le mot droit n’a de sens qu’en corrélation avec le mot devoir.
Ses Poésies offrent de l'esprit & de la facilité, & sa Traduction des Satires de Perse avec des Remarques, lui donne le droit de figurer parmi les Traducteurs qui ont su réunir le mérite de l'élégance & celui de la fidélité à rendre le sens de l'original.
Cet article 14 n’avait nullement dans la pensée de Louis XVIII le sens que lui prêtèrent les ministres de Charles X. […] Dans un sens général, il n’est pas bon que celui qui possède soit incapable de défendre ce qu’il possède. […] Nous avons été nous-mêmes assez loin dans ce sens, et ce n’est pas là une des moindres causes de notre abaissement. […] Mais il y avait deux pays où l’ambition dans le sens d’autrefois, l’envie de s’agrandir, la foi nationale, l’orgueil de race duraient encore. […] Mais on peut affirmer aussi que, dans un sens supérieur, la France aura sa revanche.
Il a le sens du grand, et même du grandiose.
Ils ont le charme mystérieux des choses qu’on ne mesure pas d’un coup d’œil et dont le sens se devine mieux qu’il ne s’analyse.
Adam Le Prométhée qu’Adam a attaché à un rocher et qu’un vautour déchire, est un morceau de force dont je ne me sens pas capable de juger.
Pierre Quillard Il me paraît avoir un sens très affiné des paysages, et j’ai goûté beaucoup une suite de sonnets.
Sa gaîté fit pardonner à son audace, et l’enveloppe du badinage voilait quelquefois d’un sens prudemment énigmatique le langage trop hardi de son patriotisme. […] Ces deux causes obscurcissent pour vous le sens des choses que mes compatriotes ont trouvé très claires. […] Tel fut à peu près le sens des paroles de Fabre d’Églantine ; sa leçon me parut si bonne, et si bien mise en pratique dans son Philinte, que je ne l’oubliai plus. […] il ne déguisera pas l’affectation de ce refrain, où le poète trahit son art par une coupe uniforme de vers dont le sens revient trois ou quatre fois en rondeau. […] « Je me sens là pourtant remuer une bile « Qui veut me conseiller quelque action virile.
Théodore de Banville Plus que tous les récents recueils de poèmes, il (Le Livre d’un inconnu) paraît répondre au véritable idéal actuel, car le poète s’y montre réaliste dans le beau sens du mot, et il est facile de voir que toutes ses descriptions sont vues, que tous les sentiments qu’il exprime ont été éprouvés et non supposés.
Cet esprit se montra tout à coup et tout entier dans ses premiers actes. « Son grand sens, dit Mme de Motteville, et ses bonnes intentions firent connaître les semences d’une science universelle qui avaient été cachées à ceux qui ne le voyaient pas dans le particulier ; car il parut tout à coup politique dans les affaires d’Etat, théologien dans celles de l’Eglise, exact en celles de finance195. » On était frappé tout d’abord de la précision de ses paroles, image, dit Bossuet, de la justesse qui régnait dans ses pensées196. […] Que dirai-je des jardins, dont le dessin est si grand, qu’en même temps que les sens y sont flattés par toutes les commodités de la promenade, la majesté du lieu y tient sans cesse l’esprit occupé de l’idée du beau, dont l’étendue est si vaste, qu’à côté de ces immenses allées, où il peut y avoir foule sans entassement, il est, pour ceux qui n’aiment pas la foule, des solitudes secrètes et salubres ? […] Je suis Français et chrétien ; je sens, je sens le bonheur public, et je décharge mon cœur devant Dieu217. » Cette admiration universelle des lettres pour Louis XIV n’est pas une conspiration de flatterie, mais l’impression forte que de grands écrivains recevaient des qualités du roi et de la grandeur de la France, depuis que sous ce roi, comme dit encore Bossuet, elle avait appris à se connaître218. […] Toujours profond et noble, on ne le confondit point avec ce désordre grossier de l’imagination et des sens, qui usurpe son nom et prétend vainement à l’intérêt qu’il inspire ; toujours combattu, souvent sacrifié au devoir, Louis XIV n’en put regarder la peinture comme une flatterie adressée à ses fautes, ni le public garder des doutes dangereux sur les suites toujours funestes d’un amour illégitime. […] Celles-ci sont à citer pour la bonté et le grand sens : « Je ne vous ai point parlé de votre pièce à la première représentation226, parce que j’ai appréhendé d’être séduit par la manière dont elle avait été représentée ; mais, en vérité, Molière, vous n’avez encore rien fait qui m’ait plus diverti, et votre pièce est excellente. » Ainsi jugeait Louis XIV, toujours de sens rassis, jamais sur une première impression.
C’est pour ce motif et dans ce sens que Nous avons dit aux catholiques français : « Acceptez la République, c’est-à-dire le pouvoir constitué et existant parmi vous ; respectez-le ; soyez-lui soumis comme représentant le pouvoir venu de Dieu ». […] Mais ce qui est essentiel, et ce qui est certain, c’est que la morale et la religion ne prennent tout leur sens, elles ne réalisent la totalité de leurs définitions, pour ainsi parler, qu’en se pénétrant l’une l’autre, et si je l’ose dire, qu’en s’amalgamant. […] Combien, me disais-je, le catholicisme n’a-t-il pas été sage, et politique même, en refusant toujours de livrer l’Écriture aux interprétations du sens individuel ! […] Plus j’ai relu cette phrase et moins j’y ai trouve de sens. […] Et dans l’un comme dans l’autre cas, orthodoxe ou rationaliste, l’exégèse a dû prendre intérieurement son parti de répondre dans un sens ou dans l’autre avant même que de procéder à ses investigations.
Anonyme Il faut dire que le commandant Bertout est plus philosophe que poète, au sens réel de ce dernier mot ; il faut ajouter qu’il est plus encore un homme d’action qu’un philosophe.
Antonin Bunand Il se révèle entièrement dans ces récents Mémoires d’un Centaure, poème qui, tout en exprimant, par son panthéisme de consolation et de sérénité, un original et très généreux sens de la vie et de ses fins, renoue, en sa forme, la noble tradition de prose enrythmée, aux graves ondes symphoniques, des Chateaubriand, des Ballanche, des Sénancour, des Maurice de Guérin.
. — Le Sens de la vie (1898). — Les Joies humaines (1899). — De Messidor à Prairial (1899).