Car le défaut de la Pléiade, c’était le pastiche, l’artificiel ; et il ne fut pas mauvais que les poètes fussent rappelés à l’actualité, sollicités de vivre de la vie de leur temps, de tirer de leurs âmes les communes émotions de toutes les âmes contemporaines. […] Les Discours sur les misères de France ou sur le tumulte d’Ambroise, la Remontrance au peuple de France, et la Réponse aux calomnies des prédicans, l’Institution pour l’adolescence du roi Charles IX, débordent tantôt d’indignation patriotique, tantôt de passion catholique, et tantôt de dignité blessée : quand Ronsard montre l’héritage de tant de générations, de tant de vaillants hommes et de grands rois, follement perdu par les furieuses discordes de ses contemporains, quand il oppose le néant de l’homme à l’énormité prodigieuse de ses passions, quand il donne aux peuples, aux huguenots, au roi des leçons de bonne vie, quand enfin il dépeint fièrement son humeur, ses goûts, ses actes, alors il est vraiment un grand poète. Il enseigne à la poésie que le monde et la vie lui appartiennent, et que des plus familières comme des attristantes réalités elle peut sortir en ses plus belles formes. […] Œuvres, 2 vol. in-fol., 1611. — A consulter : Pellissier, la Vie et les Œuvres de Du B. […] Recherches historiques sur la vie et les œuvres du chancelier de l’Hospital, in-8, Didot, 1861 ; M.
3º En même temps elle entendait dire qu’il faut de l’unité dans la vie comme dans toute œuvre. […] Il faut appliquer à la vie ce que la pensée dicte. […] Cette rhétorique modulera sur le thème sonore de l’altruisme, qu’on choisira comme principe, fond et unité de la vie, et qu’on imposera ensuite au voisin conformément aux habitudes d’influence si parlementaires et si françaises. […] Dans sa préface, la rengaine a priori (du désenchantement par l’intelligence et de la vie dorée par l’Effort) est fortifiée par des considérants philosophiques. […] Et puis que signifie « métaphysique intellectualiste » et quel rapport avec une conception intellectualiste de la vie ?
Ce n’est certes pas moi qui médirai de Pope ni de ses excellents disciples, surtout quand ils ont douceur et naturel comme Goldsmith ; après les plus grands, ce sont les plus agréables peut-être entre les écrivains et les poètes, et les plus faits pour donner du charme à la vie. […] Non loin de lui, et avec le regret d’être séparé d’un ami si cher, Horace présiderait à son tour (autant qu’un poète et qu’un sage si fin peut présider) le groupe des poètes de la vie civile et de ceux qui ont su causer quoiqu’ils aient chanté, — Pope, Despréaux, l’un devenu moins irritable, l’autre moins grondeur : Montaigne, ce vrai poète, en serait, et il achèverait d’ôter à ce coin charmant tout air d’école littéraire. […] Et, malgré tout, ces demi-dieux une fois honorés, ne voyez-vous point là-bas une foule nombreuse et familière d’esprits excellents qui va suivre de préférence les Cervantès, les Molière toujours, les peintres pratiques de la vie, ces amis indulgents et qui sont encore les premiers des bienfaiteurs, qui prennent l’homme entier avec le rire, lui versent l’expérience dans la gaieté, et savent les moyens puissants d’une joie sensée cordiale et légitime ? […] Il vient une saison dans la vie, où, tous les voyages étant faits, toutes les expériences achevées, on n’a pas de plus vives jouissances que d’étudier et d’approfondir les choses qu’on sait, de savourer ce qu’on sent, comme de voir et de revoir les gens qu’on aime : pures délices du cœur et du goût dans la maturité. […] ………………………………………………… J’ai vécu plus que toi : mes vers dureront moins ; Mais, au bord du tombeau, je mettrai tous mes soins À suivre les leçons de ta philosophie, À mépriser la mort en savourant la vie, À lire tes écrits pleins de grâce et de sens, Comme on boit d’un vin vieux qui rajeunit les sens.
La question n’est pas là : elle est pour le lendemain et pour les intervalles, pour ce qui est le courant de la vie littéraire en un mot. […] La vie humaine, l’histoire, la nature, sont plus larges assurément qu’on ne les voit quand on s’accoutume à les regarder seulement à travers la fente d’un créneau ou par l’embrasure où fume la mèche d’un canon. […] « Vivre à l’ombre de la beauté qu’on aime, à la regarder, à l’entendre, savez-vous une plus belle vie : une paresse agitée et contente, une oisiveté pleine de caprices ? […] C’est une idylle rustique empruntée à la vie réelle, et peut-être imitée des Grecs, dans laquelle le poète nous représente un pauvre laboureur se levant avant l’aube et préparant avec peine, avant de se rendre à l’ouvrage, son mets frugal composé d’ail et d’autres ingrédients : c’est ce mets qui avait nom Moretum. […] Les chapitres en sont divers, variés, bigarrés comme la vie littéraire de ce temps-ci.
On ne saurait s’étonner qu’il ait mis trente ans de sa vie à ce travail curieux et d’un détail infini, à cette fabrique industrieuse, où la verve ne le soutenait pas. […] Cependant les ressorts de la vie étaient usés chez lui ; on a remarqué que le désir de plaire, « qui fut peut-être sa passion dominante », l’abandonnait insensiblement ; un deuil habituel enveloppait son âme ; la Révolution lui semblait, comme il l’appelait, une révélation qui déconcertait les idées modérément indulgentes qu’il s’était formées jusque-là de la nature humaine. […] Ceux qui l’ont connu ne savent lequel admirer le plus, ou son immortel Anacharsis, ou l’ensemble de sa vie. […] Doux, savant, modeste, né pour la vie académique et pour ses ingénieuses recherches, né pour la vie privée, pour ses plus affectueuses et ses plus agréables élégances, il offre en lui un composé des plus distingués et tout à fait flatteur ; mais il n’eut pas le grand goût, ni même cet autre goût qui n’est pas le plus simple ni le plus pur, mais qui, aux époques avancées, trouve des rajeunissements imprévus. […] L’abbé Barthélemy, dans les dernières années de Louis XVI, privé du salon de Mme de Choiseul et ne pouvant vivre sans habitude, passait sa vie chez Mme de La Reynière.
Puisque Babou sait tout cela, puisqu’il a l’expérience de la vie littéraire, — la plus cruelle des expériences, — il reste donc, pour expliquer la publication de son volume, cette fierté d’artiste qui se prend où est sa tendance et là où est aussi la difficulté, et qui a écrit laborieusement de courtes nouvelles où d’autres auraient écrit facilement de très gros romans. […] Dans le Dernier Flagellant, ce sont les « Dames noires », la femme et la fille de ce Rouziac, de ce mauvais riche qui a sucé, par l’usure, le sang et la vie de toute une contrée, et qui, vouées à un deuil éternel et grandiose, tiennent, pour les restituer un jour, le livre des biens volés de Rouziac, à mesure qu’il les vole, et chantent à Dieu, quand l’émeute furieuse met le feu chez elles, un si bel hymne de délivrance devant leur château incendié ! […] » N’est-ce pas là une touche excellente, et, quoique la bonhomie n’y soit pas encore, la bonhomie, cette fleur tardive qui ne croit dans le talent qu’à travers les expériences et quand la vie nous a simplifiés, ne peut-on prévoir que Babou l’aura un jour et qu’il deviendra le peintre complet qu’il n’est que fragmentairement aujourd’hui ? […] Si, un jour qui n’est pas très éloigné dans sa vie littéraire, il y eut pour Hippolyte Babou des Païens innocents, — dans le pays des romans, il est vrai, qui ne peuvent jamais (c’est sa théorie) être trop romanesques, — il n’y a pas à ses yeux de sots innocents sur le terrain de la réalité. […] Il se venge de cette pluie de sots obscurs, dont nous avons tous souffert dans la vie, sur le dos de ceux qui portent l’étiquette d’une célébrité quelconque.
Si de la vie sociale nous passons à la vie individuelle, que suppose la vie sociale, le signe nous apparaît sous un aspect un peu différent. Dans la vie psychique purement intérieure, le nom de signe appartient à l’image la plus forte et la plus distincte d’un groupe donné, que cette image soit ou non matériellement réalisable. […] En apparence pourtant, il fait l’unité de notre vie individuelle, comme le signe extérieur fait l’unité de la vie sociale : il sert d’intermédiaire entre plusieurs apparitions d’une même idée dans la même conscience ; sans lui, nous oublierions nos idées, et notre passé s’évanouirait à mesure ; les mots gardent pour l’avenir nos pensées d’autrefois ; à notre appel, ils nous les rendent, et nous permettent ainsi de nous en servir comme de matériaux pour de nouvelles entreprises intellectuelles ; les mots semblent la matière propre de la remémoration et, par suite, l’unité empirique de notre existence, dont la loi du souvenir est l’unité formelle. […] Après avoir créé le langage à son usage, l’esprit doit lutter pour la vie contre le langage. […] Eyma) [Référence exacte de la traduction de l’essai du philosophe américain Ralph Waldo Emerson (1803-1882), Nature (1836), à laquelle renvoie Egger : Les Lois de la vie, traduit par Xavier Eyma, Bruxelles/Paris, Lacrois, s. d.
Jamais de la vie ! […] J’ai vu cela dans la vie. […] Droit de vie et de mort ! […] Jamais de la vie ! […] — Ennuyé, jamais de la vie !
Edmond Pilon C’est ainsi qu’est notre sort : nous nous éveillons héroïques ou triomphants, puis la vie vient et nous baise sur la bouche avec des fruits entre les dents ; nous connaissons l’amour au lieu des armes, et les airs pastoraux des flûtes, nous les rythmons dans nos caresses. […] Ce sont bien des confidences, en effet, ces poèmes où le rythme semble dérouler tout ce qui, dans la nature, souffre, s’effraie et s’atténue : l’automne et les suprêmes parfums passant dans le sillage des départs ailés ; les couchants dont des nuages en fuite pansent la gloire meurtrie ; les yeux stagnants des vieilles résignant, songe à songe, leur vie ; les vaisseaux que cerne la brume marine ; les pleurs que font tinter dans l’air les clochers exhalant l’Angélus ; — et la mélancolie du Désir, nostalgique et toujours inassouvi, qui supplante aux fins de l’étreinte la fougue lassée du déduit.
Ce n’est point pour lui une fonction, une de ces places de jurés-experts comme l’entendent messieurs les critiques ; il ne sent là qu’une occasion de dire, au hasard de l’actualité, ce qu’il voit « dans les faits journaliers de la vie des lettres de Paris ». […] D’un côté, le rêve, presque l’idéal, de l’autre, la vie malpropre, avec tous les gestes de ces pantins qui s’appellent des hommes.
Depuis ce temps, il ne s’occupa qu’à répondre à la confiance du Roi, non en achetant des conversions, comme l’a prétendu l’Auteur du Siecle de Louis XIV, mais en les procurant par son zele, par ses écrits, plus encore par une vie édifiante, qui ne se démentit jamais. […] Si sa derniere maladie ne lui laissa pas le temps de recevoir les Sacremens, la vie qu’il avoit menée, son exactitude à remplir les devoirs d’un vrai Catholique, doivent placer cet événement au rang de ceux que la prudence ne sauroit prévoir, & il n’en peut résulter aucun soupçon au préjudice de l’intégrité de sa foi.