/ 2467
2393. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre deuxième. L’idée de l’espace. Son origine et son action »

Si la ligne est un peu longue, il faudra la parcourir du regard, la décrire par des mouvements de l’œil, et alors la perception d’une série de sensations motrices viendra obscurément se joindre à la perception d’une série de sensations visuelles ; mais, pour saisir une ligne bien courte, un petit trait, il n’y a besoin que d’un coup d’œil, que d’un mouvement rapide d’accommodation visuelle.

2394. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1860 » pp. 303-358

Nous causons ce soir de la vie antédiluvienne qu’on doit mener ici, une vie qui ne doit pas avoir plus de conscience d’elle-même que la conscience du sable dans le sablier… Et comme, en causant, nous tripotons quelques bibelots achetés ici, Saint-Victor nous conte à ce sujet le plus beau trait d’amour et de bibeloterie qui soit : Charles Blanc rapportant à sa maîtresse, de Copenhague à Paris, un service à thé de porcelaine de Saxe, — sur ses genoux.

2395. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1886 » pp. 101-162

C’est un homme aux traits de peuple, aux yeux clairs, clignotants sous des paupières maladivement rouges, à la longue barbe flave, aux cheveux coupés ras, à la tête ronde, la tête du doux et obstiné entêtement — un homme tel que je me figure les disciples de Jésus-Christ.

2396. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre premier. » pp. 15-203

Je trouve dans ce trait de l’hypocrisie ; j’admire davantage Néron, lorsque, partageant le consulat avec C. […] Un délateur vénal et formidable, un scélérat justement exécré de la multitude des citoyens, un prévaricateur, un concussionnaire, qui ne pardonnait pas à Sénèque le châtiment de ses extorsions : Suilius110, autrefois questeur de Germanicus, chassé de l’Italie par le sénat, et relégué dans une île par l’ordre de Tibère, punition qui parut sévère dans le moment, mais qu’on regarda comme un trait de sagesse de l’empereur, après le rappel du coupable ; un homme que le siècle suivant vit également vénal, plus puissant, et jouissant de l’amitié du prince dont il fit, sans revers, un long et jamais un bon usage. […] Nous nous arrêtons avec intérêt devant les portraits des hommes célèbres ou fameux ; nous cherchons à y démêler quelques traits caractéristiques de leur héroïsme ou de leur scélératesse, et il est rare que notre imagination ne nous serve pas à souhait. […] On trouve dans Sénèque un grand nombre de traits sublimes : c’est cependant un auteur de beaucoup, mais de beaucoup d’esprit, plutôt qu’un écrivain de grand goût.

2397. (1913) Le mouvement littéraire belge d’expression française depuis 1880 pp. 6-333

Même chez ceux de ces écrivains qui ont cherché à se dénationaliser le plus possible, écrit Louis Dumont-Wilden15, il ne serait pas difficile, par une analyse un peu attentive, de montrer que les traits de caractère, les façons de sentir propres aux Flamands, se retrouvent toujours. […] N’es-tu pas l’oasis où je rêve, et la gourde Où je hume à longs traits le vin du souvenir57 ! […] Mais les scènes de Francis de Croisset restent amusantes, ses dialogues pétillants de traits incisifs, mordants, cinglants, fouettés d’une verve railleuse et insolente sans méchanceté, dont le judicieux dosage produit cet esprit très spécial qui a cours entre la Madeleine et la Porte Saint-Denis.

2398. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 11-15754

Nous nous servons du tiret ou trait d’union pour cet usage, porte-manteau, arc-en-ciel ; ce mot hyphen est purement grec, ὑπὸ, sub, & ἕν, unum. […] Trait piquant. […] Il y a quelques adjectifs qu’il a plû aux Maîtres à écrire de terminer par un x au lieu de s, qui finissant en dedans ne donnent pas à la main la liberté de faire de ces figures inutiles qu’ils appellent traits ; il faut regarder cet x comme une véritable s ; ainsi on dit : il est jaloux, & ils sont jaloux ; il est doux, & ils sont doux ; l’époux, les époux, &c. […] Celui qui écrivoit, tortilloit sur son rouleau une laniere de parchemin, sur laquelle il écrivoit en long ce qu’il vouloit ; ensuite il l’envoyoit à son correspondant qui l’appliquoit sur son cylindre ; ensorte que les traits de l’écriture se trouvoient dans la même situation en laquelle ils avoient été écrits ; ce qui pouvoit aisément être deviné : les Modernes ont usé de plus de rafinemens.

2399. (1897) Aspects pp. -215

Il n’était pas oiseux de résumer à grands traits ces épisodes de l’existence d’un homme libre à la fin du xixe  siècle. […] S’ils croient avoir réussi à offenser quelqu’un, leur bouche se tord, remonte de travers en une grimace affreuse qui convulse leurs traits. […] Nombre de personnages, entre autres madame Mathilde Demidoff, sont dessinés d’un trait cursif, allègre ; et ces silhouettes nous amusent. […] Le poète, lui, donnera seulement les traits principaux, il réduira la description au minimum, il relèvera chaque détail d’une image — il évoquera.

2400. (1905) Promenades philosophiques. Première série

Ceux dont il aparté auront toujours au moins leur profil dans l’histoire littéraire ; de ceux sur lesquels il s’est tu, nous aurons toujours quelque peine à nous figurer les traits. […] Ces traits sont un peu généraux et peut-être aussi les trouvera-t-on trop exclusifs : ils se rapportent en vérité plutôt au saint mystique et contemplatif qu’au martyr ou à l’hospitalier, mais je crois que le saint véritable est inactif, l’action étant une jouissance humaine. […] La science a le droit de la chercher, parce qu’elle poursuit un but très différent du but littéraire ; elle l’a trouvée par la considération des traits fixes, spécifiques des groupes de faits ou des groupes d’êtres. […] Traits saillants. — Buffon.

2401. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIVe entretien. Littérature, philosophie, et politique de la Chine » pp. 221-315

Il est au-dessus de toute crainte quand il fait ce qui est du devoir ; une conduite irréprochable, jointe à des intentions pures et droites, lui sert de bouclier contre tous les traits qu’on pourrait lui lancer : la justice et les lois sont les armes dont il se sert pour se défendre ou pour attaquer.

2402. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (2e partie) » pp. 161-239

Il arrive au bord de quelque large fleuve ; qui ne connaîtrait ses habitudes pourrait craindre que ce ne fût là pour lui un obstacle insurmontable : point du tout, il déploie ses ailes, s’élance et glisse comme un trait au-dessus du redoutable courant.

2403. (1922) Enquête : Le XIXe siècle est-il un grand siècle ? (Les Marges)

Et ce sont ces hommes, dont les traits, aux yeux de l’univers, représentent la France moderne, que l’on voudrait montrer aujourd’hui dans une sorte de fresque grotesque, brossée avec des fards et des tons cadavériques, à la Van Dongen, comme une troupe de bouffons noirs, de canailles emphatiques, de gâteux grandiloquents, de diaboliques gredins, je ne crains pas de le dire, ceux qui agissent ainsi font, au regard de la vérité critique, une œuvre impie et méprisable, et, si l’on se place au point de vue national, une besogne de malfaiteurs.

/ 2467