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28. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 7172-17709

Tout verbe est nécessairement uni à son sujet, pour ne faire avec lui qu’un seul & même tout ; il exprime une propriété que l’on conçoit dans le sujet, qui ne peut subsister sans le sujet, qui détermine le sujet à être d’une certaine façon, & qui le fait nommer tel : un grammairien vraiment logicien doit donc voir que le verbe n’est qu’une même chose avec le sujet. […] Ainsi la concordance est ordinairement d’un mot modificatif avec un mot subjectif, parce que la modification d’un sujet n’est autre chose que le sujet modifié. […] h , celui que j’adopte sur le même sujet. […] le verbe exprime l’existence d’un sujet sous un attribut. […] il est à la troisieme personne du singulier ; quel en est le sujet ?

29. (1759) Réflexions sur l’élocution oratoire, et sur le style en général

L’éloquence, on ne saurait trop le redire, n’est jamais que dans le sujet ; et le caractère du sujet, ou plutôt du sentiment qu’il produit, passe de lui-même au discours. […] De la propriété des termes naissent la précision, l’élégance et l’énergie, suivant la nature des sujets qu’on traite, ou des objets qu’on doit peindre ; la précision dans les matières de discussion, l’élégance dans les sujets agréables, l’énergie dans les sujets grands ou pathétiques. Ces qualités, en rendant le style convenable au sujet, lui donneront nécessairement de la noblesse, puisque l’orateur doit écarter avec soin les idées populaires et les sujets bas. Il est vrai que la bassesse des idées et des sujets est trop souvent arbitraire. […] Revenons à notre sujet.

30. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre I. La tragédie de Jodelle à Corneille »

Ils reprirent ou constituèrent un certain nombre de sujets tragiques, et il est notable que ces sujets sont précisément ceux que notre tragédie à ses débuts traita le plus volontiers : Sopfionisbe. […] De l’ail, leur pratique correspond à leur talent : ils traitent chaque sujet comme une succession de thèmes poétiques. […] Mais il y a deux autres catégories de sujets, où les poètes étaient plus libres, et contraints même à développer quelque originalité : ce sont les sujets modernes, et les sujets bibliques. […] Mais la nature de ces sujets, par malheur, n’a inspiré aux poètes que de l’éloquence ou du lyrisme : elle n’a pas pu leur faire créer un drame. […] Le drame, si précis, si positif, si raisonnable, s’enveloppe d’une grâce chevaleresque par où le sujet révèle son lieu d’origine.

31. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

Chez les grands écrivains n’a-t-il pas tous les tons, ne s’adapte-t-il pas à tous les sujets avec une merveilleuse aisance ? […] Sainte-Beuve aurait mille fois raison de dire que le style des Laplace est le seul qui convienne à ce genre de sujets. […] Plus les sujets étaient difficiles, plus il convenait que le poète gardât toute sa liberté pour les exprimer. […] Le culte du sonnet, appliqué à de pareils sujets, est un reste du vieil homme, un souvenir du parnassien dans M.  […] Je ne discute pas sur le sujet lui-même, mais sur la manière dont il a été entendu et traité par l’auteur.

32. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VII : Théorie de la raison par M. Cousin »

Or, il n’y a pas d’attributs sans sujet. […] Vous accordez vous-même qu’entre l’attribut ou qualité, et le sujet ou substance, il y a un rapport nécessaire. […] Tous voyez que le mot donnée plus complexe se trouve dans le sujet comme dans l’attribut de la phrase, qu’ainsi l’attribut ne fait qu’isoler ce qui est déjà dans ce sujet, et que par conséquent il n’y a là qu’une analyse. […] L’attribut est toujours enfermé dans le sujet, et on l’en extrait par analyse. […] Je puis séparer cette étendue de son sujet, et par abstraction la considérer à part.

33. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre IV. Racine »

Il étale, naturellement, la morale et les maximes de l’opéra, une éternelle invitation à aimer, que les sujets mythologiques amenaient. […] L’action se proportionnera aux sujets, et les ressorts qu’elle emploiera seront « vulgaires » comme eux. […] Cela veut dire que chacun de ses sujets éveille en lui une vision poétique. […] Mais à chaque sujet il s’efforce de garder son caractère, de faire revivre en son imagination les âges lointains, les civilisations disparues. […] Les sujets s’évanouissent dans le vague et l’abstrait.

34. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 6, de la nature des sujets que les peintres et les poëtes traitent. Qu’ils ne sçauroient les choisir trop interressans par eux-mêmes » pp. 51-56

Section 6, de la nature des sujets que les peintres et les poëtes traitent. […] Nous loüons l’art du peintre à bien imiter, mais nous le blâmons d’avoir choisi pour l’objet de son travail des sujets qui nous interessent si peu. […] Ils les ont peuplez, ils ont introduit dans ces tableaux un sujet composé de plusieurs personnages dont l’action fût capable de nous émouvoir et par consequent de nous attacher. […] Un conte en vers dont le sujet ne seroit point plaisant par lui-même, ne feroit rire personne quelque bien versifié qu’il pût être. […] Si le trait de l’épigramme n’est pas vif, si le sujet n’en est pas tel qu’on l’écoutât avec plaisir, quand même il seroit raconté en prose, l’épigramme, quoique bien versifiée et rimée richement, ne sera retenuë de personne.

35. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — [Introduction] » pp. 132-142

Le candidat a eu à traiter, suivant l’usage, un double sujet en latin et en français. […] Elle se croit la première, et elle l’est à son heure un moment. — Le sujet de thèse traité par M.  […] Là commence proprement le sujet de M.  […] Rigault a tiré bon parti de ces exactes ressemblances et de cette espèce de miroir où son sujet se dessine à l’avance et se réfléchit. […] Classique à tant d’égards et si au courant de l’art des anciens, l’auteur n’a pas assez profité de l'avantage inappréciable d’avoir un sujet limité.

36. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — II. (Fin.) » pp. 198-216

Bossuet n’est pas de ces talents ingénieux qui ont l’art de traiter excellemment des sujets médiocres et d’y introduire des ressources étrangères ; mais que le sujet qui s’offre à lui soit vaste, relevé, majestueux, le voilà à son aise, et plus la matière est haute, plus il va se sentir à son niveau et dans sa région. […] De toutes les passions, la plus pleine d’illusion, c’est la joie. » Demandons-nous toujours : D’où nous vient-elle et quel en est le sujet ? […] Toutefois, ce qui frappe dans ces deux oraisons funèbres, surtout dans la dernière, c’est un notable désaccord entre le ton et le sujet. […] Bossuet a besoin de sujets amples et élevés ; en attendant qu’il lui en vienne, il agrandit et rehausse ceux qu’il traite ; mais il y paraît quelque disproportion. […] Enfin la mort de la reine d’Angleterre vint lui offrir (1669) le plus majestueux et le plus grandiose des sujets.

37. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite.) »

Cette pièce, assurément, n’était pas la seule en son genre ; il y en eut sans aucun doute plus d’une sur le même sujet depuis, le xiie  siècle, et chaque fois qu’on y revenait ( on peut le conjecturer sans crainte) le sujet était traité avec un développement croissant, était poussé plus loin. […] Une grande discussion s’est émue à ce sujet entre les érudits. […] Le sujet porte de soi-même. […] On hésite à sourire en ces graves sujets, mais pourquoi pas un peu ? […] Paris sur ce sujet, non sans un assaisonnement de polémique, qui aime et qu’on pourrait lui rendre ; car, sauf respect estime, il prête flanc sur bien des points.

38. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 20, de quelques circonstances qu’il faut observer en traitant des sujets tragiques » pp. 147-156

Section 20, de quelques circonstances qu’il faut observer en traitant des sujets tragiques Il importe beaucoup aux poëtes tragiques de nous faire admirer des personnages dont il faut que les malheurs nous coûtent des larmes afin que la tragedie réussisse. […] Ainsi j’approuve les auteurs qui, lorsqu’ils ont pris pour sujet quelque évenement arrivé en Europe depuis un siecle, ont masqué leurs personnages sous le nom des anciens romains ou de princes grecs, ausquels personne ne prend plus d’interêt. […] Quand Monsieur Campistron voulut mettre au théatre l’avanture tragique de dom Carlos, le fils aîné de Philippe II roi d’Espagne, il traita ce sujet sous le nom d’Andronic. […] Je n’ajouterai plus qu’un mot à cette observation : c’est qu’à l’exception de Bajazet, et du comte d’Essex, toutes les tragedies écrites depuis soixante ans, dont le sujet étoit pris dans l’histoire des deux derniers siecles, sont tombées, leurs noms mêmes sont oubliez. La définition qu’Aristote fait de la comedie, quand il l’appelle une imitation du ridicule des hommes, enseigne suffisamment quels sujets lui sont propres.

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