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264. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre premier. De la louange et de l’amour de la gloire. »

ôtez-la de dessus la terre ; tout change : le regard de l’homme n’anime plus l’homme ; il est seul dans la foule ; le passé n’est rien ; le présent se resserre ; l’avenir disparaît ; l’instant qui s’écoule périt éternellement, sans être d’aucune utilité pour l’instant qui doit suivre. En parcourant l’histoire des empires et des arts, je vois partout quelques hommes sur des hauteurs, et en bas, le troupeau du genre humain qui suit de loin et à pas lents. […] Ainsi nous suivrons de siècle en siècle les révolutions de l’éloquence et des arts, nous marquerons leur décadence ou leurs progrès.

265. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome IV pp. 5-

Est-il un défaut qui les blesse davantage que de diriger les hommes qui suivent une autre croyance par l’intervention des dieux d’un culte qu’ils méprisent ? […] Cléridan s’évade dans l’obscurité, se croyant suivi de Médor, à qui le péril fait rejeter trop tard le faix qu’il ne veut pas quitter, et qui ralentit sa fuite. […] » Parole digne des héros de l’antiquité, parole que suivit bientôt sa mort. […] Déjà trois vers pour un seul ; et quatre pour les deux qui suivent. […] Mais par quel étonnant privilège un poète, sorti du premier berceau des muses, a-t-il constamment gardé son rang supérieur à celui des autres poètes qui le suivirent ?

266. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Appendice. »

Je n’ai pas employé un seul mot spécial sans le faire suivre de son explication immédiatement. […] L’incendie qui suit m’a été inspiré par un épisode de l’histoire de Massi-nissa, par un autre de l’histoire d’Agathocles et par un passage d’Hirtius, — tous les trois dans des circonstances analogues. […] « Je m’incline devant ce qui suit. […] « Et puis mon exemple sera peu suivi. […] C’était pour moi comme une conversation que j’aurais suivie en me promenant dans un jardin, de l’autre côté de la haie ou de la charmille : il ne m’en arrivait que quelques mots qui me suffisaient et qui, dans leur incomplet, prêtaient d’autant mieux au rêve.

267. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. (Suite et fin.) »

En tout cela ils allaient trop loin, et on ne les a pas suivis. […] Transfuge, comme en latin Transfuga, est quiconque quitte son parti pour suivre celui des ennemis. » Pour que ce mot s’établît de plain-pied et d’un si prompt accord, il fallait peut-être que l’idée de patrie elle-même fût bien établie, et encore mieux qu’elle ne l’était il y avait environ un siècle, du temps du connétable de Bourbon. […] Vaugelas, qui nous a transmis toutes ces piquantes fortunes et aventures de mots, et qui était l’homme de France le mieux renseigné sur l’usage, n’oublie pas, chemin faisant, d’y joindre toutes sortes de petites règles et de maximes pratiques trop négligées par les grammairiens qui ont suivi ; il nous initie à sa manière de procéder et d’expérimenter, à sa méthode. […] Nous ne l’y suivrons pas. […] On peut vérifier et suivre ce goût général d’amusements et de récréations philologiques, ce goût à la Vaugelas, jusque dans ces derniers temps, jusqu’à Charles Nodier si connu et presque populaire à ce titre.

268. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXIXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (2e partie) » pp. 5-63

Un moment relégué à Rome par le ministère de conciliation qui suivit la disgrâce de ce ministre, M. de Chateaubriand espérait le remplacer. […] Que la pitié de la terre et la bénédiction de Dieu la suivent dans sa tombe ! […] — Je ne puis vous suivre, reprit-il, jusqu’à ce bon abri ; car je me figure qu’il faut interpréter ainsi le nom de Kalender, souillé vers sa fin d’une terminaison turque. […] Pour plus de sûreté, il m’avait engagé à suivre sa lecture sur mon exemplaire, où je notais au crayon ses pauses et ses remarques. Plus tard, ces notes m’ont rendu mes souvenirs, et je les retrace ici, en substituant au texte grec ma traduction, où je l’ai suivi d’aussi près qu’il m’a été possible.

269. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIVe entretien. Mélanges »

Ses gros souliers, ses bas de laine noire mal étirés sur ses jambes grêles, sa redingote étroite et râpée suivait et dessinait la charpente de ses côtes. […] » L’abbé de Lamennais parut convaincu, me promit de suivre ces conseils et me laissa parfaitement persuadé qu’il était résolu à les suivre à son retour de la campagne. […] Il quitta la Chambre et il suivit dans tous ses excès les différentes phases de l’opinion qu’il avait adoptée. […] Je suivais alors ma carrière diplomatique. […] Il avait épousé l’actrice d’un petit théâtre, objet de sa passion, et elle n’avait pas hésité à suivre au bout d’un autre monde la destinée qui s’était perdue pour elle dans ce monde-ci.

270. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre IV. Racine »

Le succès de son contemporain Quinault ne put qu’encourager Thomas à suivre cette voie : et on le voit constamment occupé à doser d’heureux mélanges de Quinault et de Corneille. […] Il suivit la cour en divers voyages, pendant plusieurs campagnes, jusqu’en 1695. il avait pris sa tâche à cœur, et s’instruisait avec soin : mais était-il possible de faire histoire de Louis XIV pour Louis XIV ? […] Seulement des mêmes passions, de la même situation, du même moyen, l’un tire du comique, et l’autre du tragique : chacun suit la loi du genre qu’il traite. […] Cette façon de juger les forces respectives de l’instinct et de la raison pousse le drame aux dénouements funestes : où la passion domine, le crime et le malheur doivent suivre. […] Cette ode fut suivie de la Convalescence du Roi (1663), puis de la Renommée aux Muses, qui lia Racine avec Boileau.

271. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIX. M. Cousin » pp. 427-462

N’y a-t-il pas, en effet, pour certaines imaginations, un attrait secret et irrésistible à suivre les traces, disparues dans les brumes, d’une renommée qui eut, un moment, sa splendeur ? […] « Nous ne donnons pas Mme de Chevreuse, — dit-il nonchalamment, — comme un modèle à suivre, mais nous espérons (ajoute-t-il) que tant de grandeur d’âme, de constance, d’intrépidité, d’héroïsme bien ou mal employé, trouvera grâce pour des fautes que nous n’avons pas voulu dissimuler. » Mais on se lave en vain les mains dans la cuvette de Pilate. « Vous ne donnez pas », mais vous faites prendre ! […] On n’attend point que nous la suivions pas à pas… » Hélas ! il l’a bien trop suivie ! Il l’a suivie comme le petit chien d’Épicure aurait suivi les pas de Ninon, mais nous, nous ne le suivrons pas davantage.

272. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre II. L’âme et le corps »

Il en est qui se traduisent par ce que nous appelons des sensations, d’autres par des souvenirs ; il en est, sans aucun doute, qui correspondent à tous les faits intellectuels, sensibles et volontaires : la conscience s’y surajoute comme une phosphorescence ; elle est semblable à la trace lumineuse qui suit et dessine le mouvement de l’allumette qu’on frotte, dans l’obscurité, le long d’un mur. […] Exercé à l’observation intérieure, le philosophe devrait descendre au-dedans de lui-même, puis, remontant à la surface, suivre le mouvement graduel par lequel la conscience se détend, s’étend, se prépare à évoluer dans l’espace. […] Les découvertes qui suivirent la Renaissance — principalement celles de Kepler et de Galilée — avaient révélé la possibilité de ramener les problèmes astronomiques et physiques à des problèmes de mécanique. […] De fait, à travers tout le xviiie  siècle, nous pouvons suivre à la trace cette simplification progressive de la métaphysique cartésienne. […] Celui qui pourrait regarder à l’intérieur d’un cerveau en pleine activité, suivre le va-et-vient des atomes et interpréter tout ce qu’ils font, celui-là saurait sans doute quelque chose de ce qui se passe dans l’esprit, mais il n’en saurait que peu de chose.

273. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XX » pp. 84-86

» Moi, je partis de la cause, je m’en emparai, et la fécondant, j’en suivis l’effet. […] de l’élément même qui la fit la première fois, du cœur et du sang de l’homme, des libres mouvements de l’âme qui ont remué ces pierres, et sous ces masses où l’autorité pèse impérieusement sur nous, je montrai quelque chose de plus ancien, de plus vivant, qui nia l’autorité même, je veux dire la liberté… » J'ai suivi la même marche, porté la même préoccupation des causes morales, du libre génie humain dans la littérature, dans le droit, dans toutes les formes de l’activité.

274. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 66-69

Dans les Pieces d'intrigue, Regnard est supérieur à tous ceux qui l'ont suivi. […] S'il avoit eu soin d'unir la morale à la force comique ; de suivre les regles indispensables de la Comédie, destinée par son institution à instruire & à corriger ; de donner aux travers qu'il expose, les couleurs qui en font sentir & détester la difformité ; de punir sur la Scene les Personnages vicieux qu'il y introduit ; en un mot, de travailler à rendre les hommes meilleurs, autant qu'il s'appliquoit à les amuser : il est certain qu'il auroit droit de prétendre à une gloire plus brillante & plus solide que celle dont il est en possession.

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