On est un peu las de la vie, du festin, non pas assez pour quitter la table ; c’est le dessert. « Je ne sors point, si ce n’est pour aller un peu à l’Académie, afin que cela m’amuse, disait La Fontaine. […] Ceux qui vous ont précédés dans la carrière y ont dirigé vos premiers pas… Vous ne sentez peut-être pas assez vous-mêmes tout le prix de ces biens que vous avez reçus ; croyez-en celui qui les regrettera jusque dans sa vieillesse, et dont l’enfance sans protection, sans guide, n’eut de leçons que celles du malheur. » — On s’étonnait un jour devant M. d’Andilly que son très-jeune frère, le docteur Arnauld, au sortir des écoles, eût pu produire en français un livre aussi bien écrit que celui de la Fréquente Communion. […] Un brave capitaine, homme instruit, lui conseilla de sortir de ce vague douloureux par des études précises, et s’offrit de lui enseigner les mathématiques. […] La Harpe, au Lycée, rouvrait son cours ; les acteurs français, sortis de prison, rendaient la vie aux chefs-d’œuvre.
On se pique de jouer avec l’amour, de traiter une femme comme une poupée mécanique, de toucher en elle un ressort, puis l’autre, pour en faire sortir à volonté l’attendrissement ou la colère. […] La duchesse de Bourbon sort le matin incognito pour faire l’aumône et « chercher des pauvres dans leurs greniers ». […] Ils ne savaient pas même ouvrir ou fermer une porte ; ils n’avaient pas la force de soulever une bûche pour la mettre dans le feu : il leur fallait des domestiques pour leur avancer un fauteuil ; ils ne pouvaient pas entrer et sortir tout seuls. […] Un gentilhomme de Marseille, retiré dans sa bastide et proscrit, se munit d’un fusil, d’une paire de pistolets et d’un sabre, ne sortit plus sans cet attirail, et déclara qu’on ne l’aurait point vivant.
Dante et son guide sortent ensemble des ténèbres et des flammes de l’abîme par des routes fort étroites ; mais ils ont à peine passé le point central de la terre, qu’ils tournent transversalement sur eux-mêmes, et la tête se trouvant où étaient les pieds, ils montent au lieu de descendre. […] La plupart de ses peintures ont encore aujourd’hui la force de l’antique et la fraîcheur du moderne, et peuvent être comparées à ces tableaux d’un coloris sombre et effrayant, qui sortaient des ateliers des Michel-Ange et des Carrache et donnaient à des sujets empruntés de la religion une sublimité qui parlait à tous les yeux. […] Énée, faisant des libations à son père, voit sortir du mausolée un beau serpent, emblème de la haute sagesse de ce héros. […] Il suppose aussi, d’après les anciens, que les ombres parlent la bouche béante, parce que la parole leur sort toute formée du fond de la poitrine ; et il est reconnu lui-même pour un homme encore vivant, aux mouvements de ses lèvres.
Il était impossible que le jet naturel d’une telle veine se contînt et ne sortît pas. […] Il en sortit, essaya un autre ordre moins méprisable, de celui des Bénédictins, mais ne put s’en accommoder davantage ; c’est alors qu’il quitta l’habit régulier, c’est à dire monacal, pour prendre l’habit de prêtre séculier ; il jeta, comme on dit, le froc aux orties, et alla à Montpellier pour y étudier la médecine. […] Après quoi, vers l’heure de deux ou trois heures après midi environ, on sort de l’hôtel, et l’on va en compagnie de l’écuyer Gymnaste s’essayer à l’art de la chevalerie et à la gymnastique. […] Il y a pourtant du vrai dans cette manière d’envisager Rabelais le franc rieur, au sortir des terreurs du Moyen Âge et du labyrinthe de la scolastique, comme ayant consolé et rassuré le genre humain.
Ce fut le dernier grand succès littéraire du xviiie siècle, au moment où la société française tout entière sortait de son lac heureux et, en quelque sorte, de sa Méditerranée paisible, et s’engageait dans les détroits inconnus d’où le Génie des temps nouveaux allait, d’une main puissante, la lancer sur l’Océan. […] Après avoir relevé les principaux traits de cette constitution populaire d’Athènes et de l’esprit du peuple athénien, après avoir signalé l’influence souvent souveraine de ses grands hommes, des Thémistocle et des Périclès, Grimm (ou l’auteur, quel qu’il soit, de ce chapitre) tirait hardiment cette conclusion : Il est donc permis de dire que la démocratie la plus démocratique qu’il y ait eu peut-être au monde n’eut point de moyen plus sûr de se soutenir que de cesser souvent de l’être, et que c’est toutes les fois qu’elle fut le moins démocratique de fait qu’elle jouit aussi du sort le plus brillant, le plus véritablement digne d’envie. […] Les images qu’il affecte, emphatiques et vagues, ne sortent guère des tonnerres, des volcans, et de cet arsenal commun qui n’est bon que dans les dictionnaires de poésie. […] Barthélemy sortit de prison après seize heures d’arrestation seulement.
Il sortit brusquement, comme, au chant guerrier de Timothée, Alexandre avait saisi ses armes. […] se démêla de ce déluge de métaphores et d’hyperboles, et en sortit, une belle ode à la main, pour célébrer sainte Cécile et le pouvoir divin de la musique : et combien encore, dans cette ode, sous le jeu brillant des images et les marches précipitées du rhythme, un art trop visible dément-t-il l’inspiration, pour laisser voir un calcul de contrastes qui descend quelquefois jusqu’à la puérilité ! […] Elle sortit de l’étude et de la méditation, dans une vie obscure, mais libre et fière. […] De ce fond sortit un chant et la gloire des anciens bardes calédoniens, où brille bien mieux que dans l’Ossian de Macpherson lu flamme vraie du patriotisme et de la poésie.
… Ainsi le cœur n’a de murmures Que brisé sous les pieds du sort ! […] Agréez donc, madame, ces stances trop imparfaites où j’ai essayé d’exprimer ce qu’une situation si indigne de vous et du sort m’a si souvent inspiré en pensant à vous ou en parlant de vous. […] « J’espère que la fortune rougira aussi de son injustice, et vous accordera un sort indépendant et digne de vous.
C’est de ce fatalisme effronté, mais naïf, qui est toute sa philosophie, que sortent tous les défauts de son histoire, et il n’y en a pas qu’un : ils sont nombreux. […] oratoires qui ne sortent pas de la poitrine, mais de la plume de l’historien, comme la goutte d’eau de savon sort du fuseau, sous le souffle de l’enfant, pour être une bulle qui s’en va crever tout à l’heure.
I Ce volume, très intéressant, est moins une histoire qu’une dissertation historique sur ce grand événement dont le monde moderne est sorti, — la Réforme. […] Que surtout les ennemis du catholicisme apprennent d’un homme qui ne déclame point une seule fois, qui ne crie point et qui s’est peut-être comprimé le cœur pour ne pas crier, en écrivant ces choses désespérées qui, pour lui, sortent de son livre ; qu’ils apprennent ce que fut ce Sixte-Quint qui aima la France, et même Henri IV, mais qui sut résister à Henri, à la France, à la Ligue elle-même, à l’Espagne, la catholique Espagne, qu’il finit par impatienter, — car, chose curieuse ! […] Cela ne rabaisse point Sixte-Quint d’avoir été un de ceux que Jésus-Christ appelle « ses membres » avant d’avoir été son représentant sur la terre, et, au contraire, la grandeur d’un si grand homme se voit mieux quand on la mesure à la profondeur d’abjection dont il est sorti.
Publiée immédiatement après nos défaites, l’étude sur Gœthe fut regardée par les journaux allemands de ce temps-là comme une vengeance tardive de vaincu ; mais les opinions qui y étaient exprimées n’étaient pas de la veille à l’état fixe dans la tête de l’auteur, et pas n’était besoin de la guerre pour les en faire sortir. […] … Je sais bien que l’esprit français, l’esprit de la race, s’était laissé entamer bien avant l’avènement de Gœthe par l’idée protestante et philosophique dont l’Allemagne moderne et Gœthe sont sortis. […] , qui égara l’esprit français — si clair même quand il est profond — dans la brume épaisse de ces systèmes où l’on voit tout ce qu’on veut y voir, comme dans la musique et les nuages… De son côté, le Romantisme, en train d’accomplir, vers ce temps, la révolution dont nous sommes sortis, accepta, dans l’ébriété de sa jeune vie, — car il était la vie alors !
Ému à la manière des ivrognes, sceptique et larmoyant, Hoffmann ne sort pas de la chambre noire de son cerveau. […] La fameuse Correspondance entre le baron Walborn et le maître de chapelle Kreisteren en est un exemple frappant… On peut rendre le squelette d’un roman, d’un tableau ; il est impossible de rendre le squelette d’une symphonie… » — « Je ne conseillerais à personne — ajoute un peu plus bas Champfleury — de renouveler ces tentatives, qui ne peuvent être comprises que par une vingtaine de personnes dévouées, intelligentes, s’attachant à tout ce qui sort de la plume d’un auteur et prenant la peine de l’étudier pendant des années entières. » Éloge, en langage négligé, plus singulier encore que les singularités d’Hoffmann lui-même ! […] Hoffmann, brumeux et maladif (ce sont ses titres, selon Champfleury, au respect des hommes, moi, j’aurais dit à leur pitié), aura le sort des brumes et des maladies.