— Et par conséquent le saint et l’impie sont la même chose. […] Un « saint » est un coquin qui prend une assurance contre les Enfers et qui, pour l’avoir prise, se confirme dans le propos d’être un coquin. […] Il a eu des héros et il a eu des saints, dans le sens vrai de ce mot.
Il pénétra, comme il le dit, dans son « unité sainte ». […] Vivre solitaire, car la solitude est sainte. […] Elle est de pierre jaunie, fruste et spongieuse ; le soleil l’a effritée : on sent que les grands vents d’équinoxe doivent disperser autour d’elle un peu de sa sainte poussière.
Une femme y chante : Ma bouteille, si la saveur, De ce vin répond à l’odeur, Je prie Dieu et Sainte Hélène, Qu’ils te maintiennent toujours pleine. […] Dans la nouvelle italienne, un saint abbé, qui se trouve avec Feronde dans la même situation que Tartuffe avec Elmire, dit : Comeche io sia abbate io sono huomo come gli altri ; tanta forza ha havuta la vestra vaga bellezza che amore mi constrigne a cosi fare. […] Voilà ce qu’ils ont prétendu, en exposant sur le théâtre, et à la risée publique, un hypocrite imaginaire ; en tournant dans sa personne les choses les plus saintes en ridicule ; en lui faisant blâmer les scandales du siècle d’une manière extravagante ; le représentant consciencieux jusqu’à la délicatesse et au scrupule sur des points moins importants, pendant qu’il se portait d’ailleurs aux crimes les plus énormes ; le montrant sous un visage pénitent, qui ne servait qu’à couvrir ses infamies ; et lui donnant, selon son caprice, un caractère de piété la plus austère, mais, dans le fond, la plus mercenaire et la plus lâche. » Bourdaloue ne jugeait que sur parole ; mais on dit tout bas que le prédicateur fut voir la pièce, et se joignit aux gens de bien désabusés, qui ne cessaient de féliciter l’auteur : il est beau, lui disaient-ils, de mettre la vertu dans son jour ; « oui, répondait Molière, mais je vois, par ce qu’il m’en coûte, qu’il est très dangereux de prendre ses intérêts ».
Le long des fenêtres s’étendait une longue table de hêtre, les jambes en X, avec un banc de chaque côté ; derrière la porte, à gauche, se dressait le fourneau de fonte en pyramide, et sur la table se trouvaient cinq ou six petits gobelets et la cruche de grès à fleurs bleues ; de vieilles images de saintes, enluminées de vermillon et encadrées de noir, complétaient l’ameublement de cette pièce.
Hélène est le développement dramatique et lyrique de la légende bien connue qui explique l’expédition des tribus guerrières de l’Hellade contre la ville sainte d’Ilos.
Ce fut Bossuet qui lui parla le premier, « avec le respect d’un sujet, mais aussi avec la liberté d’un prédicateur. » A ce jeune prince si porté à la tendresse, si bien fait, si magnifique, « dont les belles qualités, dit Mme de Motteville, causaient toutes les inquiétudes des dames », il peignit la violence des désirs de la jeunesse, « ces cœurs enivrés du vin de leurs passions et de leurs délices criminelles, l’habitude qui succède à la première ardeur des passions, et qui est quelquefois plus tyrannique247. » Il lui découvrit les pièges de l’impudicité, « laquelle va tête levée, et semble digne des héros, si peu qu’elle s’étudie à se couvrir de belles couleurs de fidélité, de discrétion, de douceur, de persévérance 248. » Il lui représenta le « plaisir sublime que goûtent ceux qui sont nés pour commander, quand ils conservent à la raison cet air de commandement avec lequel elle est née ; cette majesté intérieure qui modère les passions ; qui tient les sens dans le devoir, qui calme par son aspect tous les mouvements séditieux, qui rend l’homme maître en lui-même249. » A ce roi si absolu, si maître de tout, si obéi, il montra le cœur d’un Nabuchodonosor ou d’un Balthasar, dans l’histoire sainte, d’un Néron, d’un Domitien dans les histoires profanes, « pour qu’il vît avec horreur et tremblement ce que fait dans les grandes places l’oubli de Dieu, et cette terrible pensée de n’avoir rien sur sa tête250. » Le premier, devant ce roi si plein de vie, et qui paraissait si loin de la mort, devant cette cour si attachée aux choses du monde, il ne craignit pas de soulever la pierre d’un tombeau, et d’y faire voir « cette chair qui va changer de nature, ce corps qui va prendre un autre nom, ce je ne sais quoi qui n’a plus de nom dans aucune langue, tant il est vrai que tout meurt en lui, jusqu’à ces termes funèbres par lesquels on exprimait ses malheureux restes251. » A ce roi entouré de tant de faveur, d’une si grande complaisance des jugements humains, il révéla les secrets de la justice « de ce Dieu qui tient un journal de notre vie, et qui nous en demandera compte dans ces grandes assises, dans cette solennelle convocation, dans cette assemblée générale du genre humain252. » Ce qui sied le mieux à l’âge où l’imagination et la passion dominent, ce sont de fortes peintures.
Les petites pudeurs n’existent pas pour les mères : elles sont, comme les saintes et les religieuses, au-dessus de la femme.
Il existe une certaine scène dans la Curée qui se passe dans une serre ou plutôt un jardin d’hiver, c’est véritablement un cauchemar d’incube et de succube tel que devaient l’avoir saint Antoine et saint Jérôme dans le désert et sainte Thérèse dans sa cellule.
Pourquoi, me disais-je, les mots les plus généraux, les plus saints, les plus usités : loi, goût, beau, bon, vrai, usages, mœurs, vice, vertu, instinct, esprit, matière, grâce, beauté, laideur, si souvent prononcés, s’entendent-ils si peu, se définissent-ils si diversement ?
À ce sentiment se joint, chez cette travailleuse, qui passe trente-six heures d’une traite près d’une malade, un dédain, quelquefois colère, contre les fainéants du métier, contre les ordres qui ne travaillent pas, contre les ordres qui ne passent pas la nuit, et même contre les curés, que la sainte fille regarde comme des paresseux. […] Puis, au moment de la séparation, à la rue d’Amsterdam, il me confie que la défaite finale du saint est due à la cellule, la cellule scientifique.
Sainte piété, que vous allez apporter de bien au monde ! […] L’auteur y parle de la douleur d’un chrétien « en voyant le théâtre révolté contre l’autel, la Farce aux prises avec l’Évangile, un comédien qui se joue des mystères, et qui fait raillerie de ce qu’il y a de plus saint et de plus sacré dans la religion ».