Les premiers poèmes et les premiers romans ont conté les aventures des dieux ou des rois ; dans ce temps-là, le héros marquant de tout drame devait nécessairement avoir la tête de plus que les autres hommes.
Où sont nos lyres d’or, d’hyacinthe fleuries, Et l’hymne aux Dieux heureux, et les vierges en chœur, Eleusis et Délos, les jeunes théories, Et les poèmes saints qui jaillissent du cœur ?
[Les stances du poème « A Ninon » commencent effectivement par ces deux vers : « Si je vous le disais pourtant, que je vous aime, / Qui sait, brune aux yeux bleus, ce que vous en diriez ?
Dans un autre cas cité par le même auteur 63, le sujet avait oublié des langues qu’il avait apprises et aussi des poèmes qu’il avait écrits.
C’est la musique qui fait corps avec le poème, c’est l’absence d’airs et de remplissages ; c’est enveloppé, large, magnifique, grandiose… Massenet est certainement un grand artiste et désormais une gloire nationale. […] Le poème, d’abord, n’est pas bon, et puis, et puis… À Monsieur *** Je pourrais vous retourner votre : Ce sont des ânes tous.
On a conservé le souvenir d’un grand nombre de poèmes grecs qui avaient pour sujet la fondation d’une ville. […] Peut-être n’y avait-il pas une seule ville qui ne possédât son poème ou au moins son hymne sur l’acte sacré qui lui avait donné naissance. […] Virgile s’empara de ce sujet et écrivit le poème national de la cité romaine. […] Il est, an contraire, le fondement sur lequel repose le poème tout entier ; car c’est par lui qu’Énée est devenu le dépositaire des dieux de la cité et que sa mission sainte lui a été révélée. […] Il ne faut pas s’y tromper : le vrai héros du poème n’est pas Énée : ce sont les dieux de Troie, ces mêmes dieux qui doivent être un jour ceux de Rome.
Par malheur, ceux qui ne savent que cela ne savent pas grand-chose ; Voltaire lui-même, qui parle ainsi, ne savait pas qu’Homère, dans toute la partie dramatique de son poème, est simple et naturel, que ses héros causent ensemble avec une familiarité et une naïveté charmante, très capable de scandaliser le sublime auteur de Mahomet, et tous ceux qui, comme lui, font consister le sublime dans cette espèce de phébus admiré du petit peuple. […] Il n’y a pas dans toute l’Iliade la moindre trace d’amour et de galanterie ; et la seule douceur que l’on dise à la belle Hélène dans tout le poème, est dans la bouche de quelques vieillards troyens, qui n’en sont pas moins d’avis de la renvoyer. […] Achille n’est pas, à beaucoup près, si petit-maître et si indévot dans Homère ; car, au premier livre de l’Iliade, beaucoup plus occupé de la peste qui ravage l’armée que de sa chère Briséis, c’est lui qui le premier s’adresse au devin, et qui le somme, au nom de toute l’armée, de déclarer les causes de la colère d’Apollon : ainsi c’est lui qui fait dans le poème d’Homère les fonctions qu’il dédaigne dans notre tragédie française. […] Et de même que l’épopée est le plus sublime des poèmes, l’histoire des Juifs est la plus sublime des histoires, quoique la nation juive ait été elle-même une des moins estimables nations du monde. […] Je ne sais s’il faut beaucoup féliciter Boursault d’avoir imaginé le premier de mettre sur la scène Ésope et ses fables : cela paraît directement contraire à la nature du poème dramatique ; et cette manière de mettre l’instruction et la morale en apologue, au lieu de la mettre en action, loin d’être ingénieuse, a quelque chose de grossier.
La poésie étant la langue de la jeunesse, tous les peuples parlent d’abord en vers ; partout les chants et les poèmes précèdent la prose, qui ne peut naître qu’avec l’esprit d’analyse, de réflexion et de critique. […] Le peintre, nous restons en dehors de son œuvre ; mais celle du musicien se mêle à nous, et, en l’écoutant, nous y prenons part, nous y faisons intérieurement notre partie, et chaque auditeur, sur la même musique, brode un poème différent. […] Tous deux Florentins et passionnés ; tous deux nervoso-bilieux : teint jaune, tirant sur le vert Michel-Ange se plaisait à lire le poème de l’Enfer dans une édition in-folio qui avait des marges de six pouces, et en lisant dessinait sur ces marges tout ce que le poète lui faisait voir.
C’est un poète d’une espèce peu commune, un poète qui fait des poèmes, j’entends de longs poèmes majestueusement déroulés en milliers d’alexandrins. […] Plus exactement, c’est un anathème à l’adresse de l’esprit d’analyse, cet esprit dissolvant, cet acide rongeur, que Sully-Prud’homme, au début de son poème La Justice, montre aux prises avec la poésie : Plus de hardis coups d’aile à travers le mystère, Plus d’augustes loisirs !
Ainsi, à travers ses essais et ses poèmes, le jeune écrivain qui allait si rapidement conquérir la faveur du public apparaissait alors comme un désabusé, sceptique, pessimiste, indifférent, aristocrate, bien décidé à s’isoler du troupeau vulgaire des humains, curieux de joies et de douleurs plus rares que celles du commun, prêt à aller chercher une consolation au mal de vivre dans les égoïstes jouissances artistiques que Schopenhauer et M. de Hartmann recommandent comme le moins illusoire de nos plaisirs. […] Dans la préface d’Édel, déjà, le poème idéal de l’avenir lui paraissait être « un poème en bottes vernies et en habit noir ».
Son poème est plein de beaux vers dans la plus mauvaise acception du mot.