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324. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

Que ne m’est-il permis de faire partager à d’autres le bien qu’elle m’a fait ! […] Je me suis dérobé un grand plaisir en prenant pour moi l’espace que je voulais consacrer à des citations ; j’espère qu’on m’en permettra quelques-unes. […] Il y a du caractère de la musique dans tel vers, peut-être dans telle ligne de prose, où les liens logiques un peu relâchés laissent plus librement flotter la pensée, et lui permettent d’occuper dans l’âme un espace, et de couler dans des retraites où une forme plus précise ne lui eût pas permis de pénétrer. […] Quinet permettait de rattacher d’avance Ahasvérus à la philosophie de l’histoire. […] et, dans le point de vue social ou humanitaire où sans doute il est permis de se placer, il mérite toute notre attention.

325. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la liberté de l’enseignement »

Je ne puis te rendre combien je suis eu colère de ce décret, il faudrait bien mieux se soumettre et attendre avec résignation la punition que le Ciel nous réserve, car il ne permettra pas que cette faute reste sans vengeance… » Cette noble et vertueuse personne parlait comme une croyante, au nom de sa vérité religieuse ; elle en était restée au point de vue le plus opposé à celui où doit se placer l’État moderne et le souverain de cet État. […] nous avons de la peine à suivre vos paroles : c’est dans votre intérêt même que je me permets cette interruption. […] Et, par exemple, pour éclairer ma pensée, je me permettrai ici une remarque critique. […] Monsieur Sainte-Beuve, permettez que je vous interrompe et vous prie de ne pas vous servir d’expressions qui ne doivent pas se faire entendre dans une assemblée comme la nôtre. […] Permettez-moi de reprendre et d’ajouter… Le parti clérical !

326. (1914) Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne pp. 13-101

Et leurs troubles appris, leurs troubles artificiels, (intellectuels), ne leur ont jamais permis d’obtenir que des profondeurs superficielles. […]   On me permettra d’ouvrir ici une note dans cette Note. […] Il est permis de se demander si l’expérience n’est point venue au devant de lui jusqu’au commencement du ciel. Il est presque permis de se demander si l’expérience n’est point venue au devant de lui jusqu’au commencement de Dieu. […] La raideur au contraire permet tout, elle ne signale rien.

327. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre IV. Le Séminaire d’Issy (1881) »

On s’était tout permis, parce qu’on avait manié l’escopette et porté le mousquet pour la bonne cause. […] L’enfant s’approcha et balbutia en rougissant : « Citoyen, voulez-vous me permettre de vous servir la messe   Chut ! […] Je lui dois beaucoup ; mais l’instinct d’apprendre qui est en moi et qui fera, j’espère, que j’apprendrai jusqu’à l’heure de ma mort, ne me permettait pas d’être de sa bande. […] Le formalisme rigide de la scolastique ne permet pas de clore la démonstration d’une proposition sans l’avoir fait suivre de la rubrique : Solvuntur objecta. […] Mais l’impression de mortel ennui qui se dégage de ces milliers de pages permet à peine d’être équitable pour cette œuvre édifiante de l’excellent abbé Gérard.

328. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VII. La littérature et les conditions économiques » pp. 157-190

Les chemins de fer, les télégraphes, tant d’inventions éclatant coup sur coup, rendant commun et banal ce qui eût semblé fabuleux à nos pères, permettant à des navires d’aller sans voiles ni rames, à des enfants de mouvoir les fardeaux les plus énormes, à tout le monde d’accomplir en quelques heures des trajets qui demandaient jadis des semaines et des mois, à la pensée et à la voix de voyager avec la vitesse de l’éclair, tous ces miracles devaient exalter les imaginations et fournir aux poètes des thèmes nouveaux. […] Ils ne sont pas toujours les plus laborieux ; comme il leur est permis de produire peu, ils sont enclins à une certaine nonchalance ; ils laissent volontiers leurs facultés naturelles s’arrêter au demi-talent des amateurs ; mais en revanche ils peuvent se payer le luxe d’une indépendance de pensée qui décèle leur sécurité et d’un raffinement de forme qui prouve leur loisir. […] Quoique la condition matérielle des ouvriers de la pensée se soit certainement élevée du moyen âge à nos jours, et d’un mouvement presque constant, ces contrastes fréquents, ordinaires même, d’opulence et de gueuserie ne permettent guère de suivre avec précision les phases par où elle a passé. […] Qu’est-ce qui permet aux écrivains cette émancipation relative et par moments ce complet renversement des rôles ? […] Puisque nous parlons choses économiques, il nous sera permis de donner quelques chiffres64.

329. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Variétés littéraires, morales et historiques, par M. S. de Sacy, de l’Académie française. » pp. 179-194

Il aime les livres ; il en a réuni depuis des années une fort belle et riche collection qui, si l’on y jetait seulement les yeux, permettrait d’apprécier l’esprit du collecteur ; — chose rare ! […] Elles sont, si la comparaison est permise, comme les œuvres mêmes de la nature et de Dieu : c’est une matière infinie d’étude et de contemplation. » M. de Sacy, certes, a ses défauts, et je puis dire qu’ayant habituellement suivi une tout autre voie, une tout autre méthode que la sienne en critique littéraire, j’y suis sensible, à ces défauts, comme il doit l’être aux miens : il a ses redites, il a ses longueurs ; il a des excès de louange sans nuances à l’égard de certaines personnes ; il a des humilités soudaines par lesquelles il se dérobe et s’interdit presque le droit de juger en des cas où il serait sans doute très compétent : voilà les inconvénients de sa manière et qui sont presque des conséquences de ses vertus. […] Et pour finir, qu’on me permette, à ce sujet, une petite histoire.

330. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Mais notre siècle, mal abrité et ouvert à tous les vents, ne permet plus ces établissements éphémères : les beaux nuages d’un Malebranche seraient de nos jours bien vite balayés par les tempêtes ou les moindres souffles qui partent chaque matin de tous les points de l’horizon. […] Par une licence unique, on lui permettait d’aller au Collège de France entendre M.  […] Mais la netteté de notre esprit, comme la sécheresse de nos formes et le cassant de notre règle, ne permet pas ces indécisions souvent nourricières et fécondes ; il faut choisir par oui ou par non.

331. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VIII. De l’éloquence » pp. 563-585

Si tout est permis, rien ne peut produire un grand effet. […] Vous adresserez-vous aux hommes avides d’acquérir de la fortune, nouveaux qu’ils sont aux habitudes comme aux jouissances qu’elle permet ? […] Néanmoins il en est d’elle comme de tous les biens que permet notre destinée : ils ont tous des inconvénients, que l’on fait ressortir seuls, si le vent de la faction souffle dans ce sens ; mais en se livrant ainsi à l’examen des choses, quel don de la nature paraîtrait exempt de maux ?

332. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre III. La commedia dell’arte en France » pp. 31-58

« En ce mois, dit l’Estoile, les comédiens italiens commencèrent à jouer leurs comédies dans la salle des États à Blois ; et leur permit le roi de prendre demi-teston de tous ceux qui les viendraient voir jouer. » Le demi-teston avait alors une valeur nominale de sept sous, mais il valait effectivement quinze sous, malgré les ordonnances, et c’était un prix élevé pour assister à un spectacle, puisqu’à Paris, le prix d’entrée à l’Hôtel de Bourgogne ne dépassait pas quatre ou cinq sous. […] Le Tiers-État refusa inflexiblement au roi qui l’avait régalé de ces divertissements imprévus le moindre subside ; il lui refusa même l’autorisation d’aliéner aucune partie du domaine royal, de sorte que le monarque s’écriait en versant des larmes de colère : « Ils ne me veulent secourir du leur, ni me permettre que je m’aide du mien !  […] Henri leur permit par lettres patentes de s’installer à l’Hôtel de Bourbon.

333. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre premier. La critique et la vie littéraire » pp. 1-18

N’aimer que les poètes lyriques, voire que les conteurs scatologiques, est permis. […] La haine n’est jamais permise au critique : elle en fait aussitôt un pamphlétaire, l’égard de qui tous les ressentiments sont permis.

334. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VI. Les localisations cérébrales »

Aussi les anatomistes qui, avec Desmoulins, voyaient dans le développement des circonvolutions les indices du progrès intellectuel voulaient-ils simplement dire que plus il y a de circonvolutions, plus il y a de matière cérébrale dans un espace donné, il n’y a pas là toutefois cette délimitation précise qui permet de distinguer un organe d’un autre. […] Une dernière objection très grave contre la phrénologie, et même contre le principe des localisations cérébrales en général, se tire des vivisections, qui n’ont jamais permis de surprendre une faculté isolée des autres. […] Il faut remarquer toutefois que les plissements ne se font pas d’une manière arbitraire, et que les circonvolutions ont des places fixes et déterminées, ce qui a permis de les désigner par des chiffres ; mais cela ne détruit pas ce que nous venons de dire de la continuité et de l’homogénéité de l’organe cérébral.

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