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29. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VI. De la littérature latine sous le règne d’Auguste » pp. 164-175

Les écrivains qui ont existé pendant la république, ne s’étant jamais permis d’exprimer les affections qu’ils éprouvaient, c’est dans le court passage des mœurs les plus sévères à la plus effroyable corruption, que les poètes latins ont montré une sensibilité plus touchante que celle qu’on peut trouver dans aucun ouvrage grec. […] Descartes, Bayle, Pascal, Molière, La Bruyère, Bossuet, les philosophes anglais qui appartiennent aussi à la même époque de l’histoire des lettres, ne permettent d’établir aucune parité entre le siècle de Louis XIV et celui d’Auguste, pour les progrès de l’esprit humain. […] qu’il me soit permis maintenant de briser ma vie malheureuse, tandis que des inquiétudes douteuses, tandis que l’espérance incertaine de l’avenir m’agitent, tandis que je t’embrasse encore, toi mon enfant, toi la seule volupté du soir de ma vie, qu’il me soit permis de mourir, de peur qu’un messager cruel ne déchire mon cœur… 30.

30. (1762) Réflexions sur l’ode

Un poète est un homme qu’on oblige de marcher avec grâce les fers aux pieds ; il faut bien lui permettre de chanceler quelquefois légèrement. […] Qu’on me permette à cette occasion une réflexion qui tient à mon sujet. […] Il est permis d’en douter beaucoup ; une grande partie de leur admiration sera sur notre parole ; ils sentiront faiblement, et se récrieront au hasard. […] J’avouerai au reste, avec le même Horace, que si dans les jugements sur les anciens, quelque excès peut être permis, la liberté de penser paraît encore plus excusable que la superstition.

31. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » pp. 489-496

S’il nous est permis de faire quelques réflexions sur son caractere, nous serons autorisés à dire, que l’amour de la célébrité & trop de penchant à se laisser séduire par des insinuations artificieuses, ont été la vraie cause de l’abus qu’il a fait de ses talens, propres d’ailleurs à le faire estimer. […] pour celui-ci, M., il n’est pas permis d’en rire : c’est un fatras morne, langoureux, indigeste ; une triste doléance de M. de Voltaire, qui y parle en son propre nom. […] Comme on décrédite jusqu’à la vérité même, quand on se permet de pareilles impostures !

32. (1767) Sur l’harmonie des langues, et en particulier sur celle qu’on croit sentir dans les langues mortes

De même une langue qui permet l’inversion, et par conséquent où l’arrangement des mots est libre jusqu’à un certain point, donne certainement plus de facilité pour l’harmonie du discours, qu’une langue où l’inversion n’est pas permise, et par conséquent où l’arrangement des mots est forcé. […] Je dis plus ; il ne serait peut-être pas difficile de montrer par des exemples, qu’un écrivain français, qui pour paraître bien posséder sa langue affecterait dans ses ouvrages beaucoup de gallicismes (même de ceux qu’on peut se permettre en écrivant), se ferait un style qu’il faudrait bien se garder d’imiter. […] Cicéron a écrit dans bien des genres, et ces genres demandaient des styles différents ; il a écrit des dialogues qui pouvaient permettre des expressions familières ou moins relevées que les harangues ; il a écrit surtout un grand nombre de lettres, où certainement il a employé bien des tours de conversation, que le style grave et soutenu n’aurait pas permis ; que faudrait-il penser d’un écrivain qui risquerait ces mêmes phrases dans un discours sérieux ? […] On me permettra même de douter que ses vers italiens fussent aussi bons qu’on nous l’assure, lorsque je vois que ses vers français étaient détestables. […] Il me semble qu’aucun moderne, autant encore une fois qu’il nous est permis d’en juger, n’a approché de si près de la manière de Cicéron.

33. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre III. La complication des sociétés »

C’est-à-dire qu’elle peut répartir ses membres en sections nettement distinctes, sans permettre à aucun d’entre eux d’appartenir à la fois à plusieurs d’entre elles. […] Tandis que le progrès biologique, sauf exceptions accidentelles, asservit les cellules une fois spécialisées à un certain organe unique, le progrès social permet aux hommes de participer, pour la satisfaction de leurs fins diverses, à diverses associations. […] La multiplicité en même temps que la diversité de ces groupements nous permet de supposer qu’un même individu appartenait à plusieurs d’entre eux. […] Non seulement ils lui permettaient de sortir de la famille où il était sévèrement enfermé, mais encore de dépasser son rang ordinaire, et, nommé trésorier ou président, de dominer, pour quelques instants au moins, des hommes libres. […] La mobilité physique, qui permet aux hommes de courir d’un point à l’autre d’un territoire, est déjà, nous l’avons vu, favorable à l’égalitarisme : a fortiori cette mobilité proprement sociale, grâce à laquelle les hommes montent et descendent les différents degrés de l’échelle des situations.

34. (1889) Méthode évolutive-instrumentiste d’une poésie rationnelle

Pour ce, que l’on me permette de feuiller (en disant là, des noms, quant à la première partie) les pages de mon Traité du Verbe : tel qu’après deux éditions progressives et scientifiquement avérantes, écrit en mars 88, il est édité en préface par l’éditeur de mon Œuvre entière, à Bruxelles : et que cet article soit commentaire à ce Traité du Verbe. […] Et cette Poésie demeure, grande, nécessaire, digne à travers tous les temps de l’admiration profonde de tous, car ses poètes firent leur devoir : devoir le seul à des époques de sensation ; de foi et de non-savoir seuls — et ne disaient-ils dès lors en le vers seul logique et, lorsque sa loi sue permet de le délivrer de monotonie, seul magnifique, l’alexandrin. […] , tel est mon principe social… Ceci dit : que l’on me permette de prendre du Traité du Verbe les titres de mon œuvre et de ses parties et des livres, du livre I, le meilleur devenir, qui est l’historique poétique de la Matière éthérée évoluant à l’animal instinctif et sensationnel — au livre dernier, la loi. […] C’est en m’appliquant au résultat des expériences de Helmoltz sur les Harmoniques, qu’il me fut permis d’en déduire ma Théorie de l’Instrumentalisation parlée. […] C’est au mois de mars 1888, qu’il me fut donné, sûr de ma pensée, à vingt-cinq ans (l’âge des autres dit plus haut, il m’est permis de dire le mien), d’écrire en son intégralité mon Traité du Verbe, en argument à mon Œuvre entière — édition où sont développées mes présentes méthode de Philosophie évolutive et manière d’art, l’Instrumentation poétique.

35. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre II. Marche progressive de l’esprit humain » pp. 41-66

Marche progressive de l’esprit humain L’esprit humain marche dans une route obscure et mystérieuse, où il ne lui est jamais permis de rétrograder ; il ne lui est pas même permis d’être stationnaire. […] Cependant, s’il m’est permis de m’arrêter un instant sur les parties moins élevées du sujet qui nous occupe, nous n’aurons pas besoin du vaste regard de l’aigle de Meaux. […] Il serait peut-être permis d’affirmer, dans un autre sens, que tout est fait dans le monde pour un certain nombre d’hommes. […] Qu’il me soit permis de citer ici la théocratie des Juifs, parce que chez ce peuple, qui à cause de cela, fut appelé le peuple de Dieu, la Providence a rendu visibles ses voies. […] Celle qu’il n’a point aperçue, ou qu’il a négligée, donnerait ici lieu à d’importantes observations : je m’en abstiendrai aussi, parce que je ne veux point être accusé d’être guidé par un esprit de système ; mais qu’il me soit permis de puiser, dans le peu que nous connaissons de ce génie allégorique, une hypothèse qui pourra servir à faire mieux sentir, par la suite, plusieurs choses qu’il me serait assez difficile d’expliquer.

36. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre V. Mme George Sand jugée par elle-même »

Nous avons, depuis plus de trente ans, polissonné avec les choses les plus sacrées, la Religion, la Morale, les Pouvoirs publics… et aujourd’hui, il n’est pas permis de juger librement M.  […] Aujourd’hui, il ne sera pas permis non plus de juger librement Mme George Sand ! […] Elle cause assez de peine et d’embarras à, ceux qui se la permettent. […] Chose commode de ne croire à rien pour se permettre tout ! […] N’ont-elles pas vieilli assez déjà pour nous permettre de prévoir qu’un jour elles pourraient bien mourir ?

37. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Appendice. »

Napoléon Ier a dit, parlant d’un de ses serviteurs, qui n’était autre que le comte Rœderer : « Je lui crois trop d’activité dans l’esprit pour être un grand administrateur, et peut-être même pour être constant dans ses affections. » Je ne me permettrai pas d’appliquer le mot tout entier à M.  […] Il savait mon fonds d’admiration pour sa nature de talent, et qu’avec lui, dans les occasions, tout en me permettant parfois de le contredire, j’observais les rangs. […] Au commencement de la Restauration, elle accompagna son père, ambassadeur à Turin et à Londres ; elle présidait avec goût au cercle diplomatique et politique qui se formait naturellement chez l’ambassadeur de France ; elle ne permettait même pas qu’on s’aperçût, vers la fin, de la fatigue de l’âge chez le marquis d’Osmond, tant elle s’entendait avec discrétion aux grandes affaires. […] Sa maison de Trouville, où elle allait passer chaque été, était agréable encore pour d’autres que pour elle, lorsque sa santé lui permettait de recevoir. […] Elle est marquée à tout jamais dans mon respect, dans mon esprit et, permettez-moi d’ajouter, dans mon cœur.

38. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Avertissement sur la seconde édition. » pp. 23-54

D’un autre côté, on nous permettra de le dire, c’étoit demander pour soi-même le privilége exclusif de tout attaquer, de tout détruire, sans vouloir supporter la moindre réplique ; c’étoit s’exposer à la réponse de Pharasmane aux Romains. […] A quels traits a-t-il été permis de reconnoître cette malignité qu’on nous impute ? […] Depuis quand ne sera-t-il plus permis de s’élever contre les usurpations de la vanité, de confondre l’orgueil, de démasquer l’artifice, sans passer pour malin, parce qu’on aura employé les armes les plus efficaces, la plaisanterie ou l’essor d’une juste indignation ? […] Si notre conduite peut être regardée comme maligne, quel nom donnera-t-on à ce qu’ils se sont permis dans tous les temps, & en particulier dans cette circonstance ? […] Le seul plaisir qu’elle se soit permis, a été celui qu’on goûte à voir ses Adversaires se décrier eux-mêmes, justifier, par leurs excès, les censures portées contre leurs Ecrits ; & si elle eût aimé à se flatter, elle eût pensé, comme tous les honnêtes gens, que la preuve la plus certaine de la bonté de notre Ouvrage étoit l’acharnement qu’on témoignoit contre lui.

39. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — V » pp. 123-131

» À l’Académie française, où il allait quelquefois, et le plus souvent qu’il le pouvait, il a laissé d’assez bons souvenirs : « Il paraissait, a dit d’Alembert, s’intéresser à nos exercices, opinait avec autant de goût que de dignité sur les questions qui s’agitaient en sa présence, et finissait toujours par témoigner à la compagnie les regrets les plus obligeants de ce que la multitude de ses autres devoirs ne lui permettait pas de s’acquitter, comme il l’aurait voulu, de celui d’académicien. » Un jour, dans un de ces moments d’effusion comme il en avait volontiers, il demanda à ses chers confrères la permission, ne pouvant être aussi souvent qu’il l’aurait voulu parmi eux, de leur être présent au moins en peinture et de leur envoyer son portrait. […] Venez ici manger de bons potages à des heures réglées, ne faites que quatre repas par jour, couchez-vous de bonne heure, ne voyez ni papier ni encre, ni biribi, ni lansquenet, je vous permets le trictrac : deux mois d’un pareil régime valent mieux que Vinache. […] Je vous charge de mille compliments pour M. le duc et Mme la duchesse de Sully, auxquels je souhaite une bonne santé et qui leur permette de venir faire un tour ici. […] Le chevalier était fort incommodé d’une chute qui ne lui permettait pas d’être spadassin : il prit le parti de faire donner, en plein jour, des coups de bâton à Voltaire, lequel, au lieu de prendre la voie de la justice, estima la vengeance plus noble par les armes.

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