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1500. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Halévy, secrétaire perpétuel. »

Placé aux confins de l’école française, un des représentants de cette école, non plus chez elle et dans les douceurs du chez-soi, dans les grâces légères de l’insouciance et du loisir, mais en marche et comme en voie de conquête, lorsque, chargée déjà de butin étranger, elle a un pied par-delà le Rhin, il fait la chaîne d’Auber à Meyerbeer ; d’un genre un peu mixte sans doute, mais non pas hybride ; élevé, savant, harmonique, très-soigneux de bien écrire musicalement parlant, sachant plaire toutefois, ne négligeant pas la grâce, cherchant et trouvant agréablement ce qu’Auber trouve sans le chercher, mais enclin surtout et habile à exprimer dramatiquement la tendresse et la passion. […] Il donnait une foule d’étymologies. — Il avait une passion pour les dictionnaires.

1501. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Ajoutez que la pièce est dans la vraie mesure de l’art ; la moralité y est plutôt conclue qu’affichée ; elle reste à tirer, l’auteur ne l’impose pas ; et si l’on veut à toute force conjecturer que le jeune artiste au cœur trop faible, s’il avait écarté différemment, aurait trouvé un autre genre d’écueil dans le bonheur somnolent du mariage, comme il a trouvé sa perte sur la mer orageuse de la passion, il n’y a pas de raison absolue qui s’y oppose : vous êtes libre d’y rêver tout à votre aise. […] Vous faites de Clotilde, par opposition à votre héroïne, une femme de passion, dirigée par ses instincts positifs, par son tempérament et par ses sens, et aussi par le sens commun vulgaire.

1502. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La Grèce en 1863 par M. A. Grenier. »

Aller en Grèce dès 1824, c’était, pour bien des âmes lassées et rassasiées de tout, le réveil moral, la guérison des passions factices, des vagues ennuis ; — pour le vieux soldat des grandes guerres, c’était retrouver un digne emploi de son épée non rouillée encore ; — pour le jeune homme en proie aux lâches oisivetés et aux inoccupations rongeantes, c’était la réalisation inespérée d’un beau rêve, cette fois saisissable et palpable ; c’était le baptême et la consécration pour une grande cause. […] Beaucoup peuvent appartenir à des bandits, à des pirates, à des gens de sac et de corde ; mais la plus ingrate a un cachet de vigueur, d’astuce et de passion, qui la sauve de la trivialité. » Les Grecs sont sobres.

1503. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre. »

Sa sagacité même était un danger de plus : il ne pouvait plus être un instrument de conciliation, et l’on eût dit qu’il n’avait été maintenu dans son poste que pour envenimer les passions indomptées de la reine, et la pousser à quelque extrémité qui la perdît sans retour… « Le premier secrétaire d’ambassade, M.  […] La reine, déclarée déchue, et à regret fugitive, rentra, pour n’en plus sortir, dans le vrai de sa passion, de ses haines, de ses exécrations et de ses vengeances.

1504. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Poésies, par Charles Monselet »

Hors de là il est terre à terre : il broche et publie ses feuilles moins pour dire la vérité qui le possède et l’enflamme, moins pour satisfaire à une passion de bon sens et de raison, que pour s’en faire un moyen de subsistance ou de fortune. […] Notez-le bien : les excès de la passion littéraire, chez ce La Harpe si souvent mis en cause, valent mieux que les mêmes écarts ou les manquements chez Fréron, ils partent d’un meilleur principe ; ils sont d’un ordre supérieur, de l’ordre tout intellectuel, exempts et purs de tout trafic, sans alliage d’industriel et de mercantile.

1505. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine. (suite et fin.) »

Racine ; car, comme il avait le cœur fort pénitent depuis longtemps, il y a sujet de le croire, par la miséricorde du Seigneur, en possession de ce bienheureux repos où l’on prie efficacement pour ceux qui sont dans le trouble des passions de la vie. » Touchante et sainte confiance ! […] Il était assez naturel, en effet, que Racine sensible, tendre, ouvert aux passions, timide en même temps et peu courageux, s’effrayât en vieillissant des touchantes faiblesses auxquelles il s’était livré, qu’il revînt en idée à l’innocence de ses premiers jours, qu’il se replongeât tant qu’il le pouvait en arrière, se reprochât ses fautes passées en se les exagérant, et noyât tout son amour-propre dans ses larmes.

1506. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Préface »

Louis Blanc y écrivait, et que c’était au moins une feuille d’un radicalisme impartial, sans parti pris ni passion : orléaniste n’en restait pas moins l’injure tombée de haut, à la veille du triomphe des anciens partis qu’elle caractérisait le mieux4. […] Troplong, qui lui rendait dans le particulier en bienveillance ce que les passions déchaînées l’empêchaient de lui témoigner à la tribune et en séance. — Je ne parle pas (bien entendu) de ses deux amis de tous les temps et confrères de l’Académie, M. 

1507. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les deux Tartuffe. » pp. 338-363

Ce qu’il a exprimé peut-être le plus fortement, c’est l’ardente passion sensuelle dont Tartuffe est dévoré. […] Et, par cela seul qu’il applique à une passion profane le vocabulaire et les images de la « mystique » chrétienne, il se trouve presque composer, sans le savoir, une sorte d’élégie idéaliste aux airs déjà vaguement lamartiniens : Ses attraits réfléchis brillent dans vos pareilles… Il a sur votre face épanché des beautés Dont les yeux sont surpris et les cœurs transportés ; Et je n’ai pu vous voir, parfaite créature, Sans admirer en vous l’auteur de la nature, Et d’une ardente amour sentir mon cœur atteint, Au plus beau des portraits où lui-même il s’est peint.

1508. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre V. Premiers aphorismes de Jésus. — Ses idées d’un Dieu Père et d’une religion pure  Premiers disciples. »

Ses relations intimes et libres, mais d’un ordre tout moral, avec des femmes d’une conduite équivoque s’expliquent de même par la passion qui l’attachait à la gloire de son Père, et lui inspirait une sorte de jalousie pour toutes les belles créatures qui pouvaient y servir 212. […] La grande théorie de l’apocalypse du Fils de l’homme est en effet réservée, dans les synoptiques, pour les chapitres qui précèdent le récit de la passion.

1509. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Les regrets. » pp. 397-413

De toutes les passions, le dépit est la plus petite ; et, de tout temps, ç’a été peut-être la plus grande des passions françaises53.

1510. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — II. (Fin.) » pp. 206-223

» L’abbé Barthélemy devait avoir, au fond du cœur, moins de facilité à bien augurer de l’avenir : c’est lui qui avait écrit dans une lettre de Callimédon à Anacharsis, en parlant des préjugés et des superstitions populaires : « Mon cher Anacharsis, quand on dit qu’un siècle est éclairé, cela signifie qu’on trouve plus de lumières dans certaines villes que dans d’autres, et que, dans les premières, la principale classe des citoyens est plus instruite qu’elle ne l’était autrefois. » Quant à la multitude, sans excepter, disait-il, celle d’Athènes, il la croyait peu corrigible et peu perfectible, et il ajoutait avec découragement : « N’en doutez pas, les hommes ont deux passions favorites que la philosophie ne détruira jamais : celle de l’erreur et celle de l’esclavage. » Tout en pensant ainsi, il n’avait nulle misanthropie d’ailleurs, et n’était point porté à se noircir la nature humaine : « En général, disait-il, les hommes ont moins de méchanceté que de faiblesse et d’inconstance. » Les événements de la Révolution vinrent coup sur coup contrister son cœur, et détruire l’édifice si bien assis de sa fortune. […] Cependant les ressorts de la vie étaient usés chez lui ; on a remarqué que le désir de plaire, « qui fut peut-être sa passion dominante », l’abandonnait insensiblement ; un deuil habituel enveloppait son âme ; la Révolution lui semblait, comme il l’appelait, une révélation qui déconcertait les idées modérément indulgentes qu’il s’était formées jusque-là de la nature humaine.

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