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338. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — I » pp. 39-56

  Louis-Hector de Villars, né en mai 1653, à Turin, disent les uns, où son père aurait été alors ambassadeur, ou plus probablement, selon les autres, à Moulins en Bourbonnais7, était fils de Pierre de Villars et de Marie de Bellefonds. Son père, qui avait poussé assez loin sa fortune, jusqu’à être lieutenant général et ambassadeur, avait eu à souffrir des revirements politiques du temps et des suites de la Fronde. […] De même s’il avait un peu de romanesque dans l’humeur, il le devait sans doute à son père, à qui sa belle mine et ses airs de héros de roman avaient valu dans la société le surnom d’Orondate. […] On saura de plus que le fils du maréchal, le duc de Villars du xviiie  siècle, et qui succéda à son père dans le fauteuil académique, possédait au plus haut degré le talent de la déclamation dramatique et était un excellent tragédien de société. […] Il a paru résulter de cet acte assez grossièrement dressé, et où manquent les noms du père et de la mère, que l’enfant avait atteint l’âge de trois semaines lors du baptême, ce qui reporterait la naissance de Villars à la date du 3 mai environ.

339. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — I » pp. 107-125

Parmi les pères chartreux du Liget qui étaient assez proches voisins, il y avait un dom Marc Durant qui avait fait un poème français sur Sainte Madeleine intitulé : La Magdaliade. […] Son père l’envoie d’abord au collège de Clermont, tenu par les jésuites ; mais comme l’Université, en ce temps-là (1611), mit opposition à cet enseignement par les jésuites, on dut faire passer presque aussitôt le nouvel écolier au Collège de La Marche ; il y étudia assez mollement. […] Colletet père, Marcassus, un de Molières qui n’est pas le grand Molière, et bien d’autres, étaient de cette société académique, qui naissait d’avance un peu surannée. […] Son père la lui avait obtenue du roi et du cardinal de Richelieu, en gagnant de vitesse les autres compétiteurs. À peine le précédent abbé avait-il rendu le dernier soupir, que Marolles, alors sur les lieux, en donna avis en toute hâte à son père, grâce à l’obligeance d’un maître de poste qui par un très mauvais temps, à dix heures du soir, expédia un courrier qui devança tous les autres.

340. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourg, par M. Michelet. (suite.) »

En avril 1711, à la mort de son père, le duc de Bourgogne devint le Dauphin immédiat, et, comme le dit M.  […] En voici la première page, où se fait d’abord sentir l’empressement et comme le débordement de phrase habituel à Saint-Simon : « Il ne faut point d’autre éloge pour un prince prêt à régner suivant le cours ordinaire de la nature, que les projets qu’on va voir qu’il avait formés et qu’il avait fortement résolu de suivre et d’exécuter sagement de point en point l’un après l’autre ; surtout si l’on fait réflexion au pouvoir sans bornes qui l’attendait, auquel il fut tout à fait associé par la volonté du roi son aïeul, aussitôt après la mort du prince, fils unique du monarque, père de celui qui, aux dépens de cette autorité qui enchante les plus grands hommes, mettait toute son étude et toute sa satisfaction à rendre son règne juste et ses peuples heureux. […] Muni de ces leçons si dures dans le rang suprême, dont sa vertu et son excellent esprit avaient su si bien profiter, il se trouva, à la mort d’un père que sa piété lui fit regretter, l’unique appui et repos de l’âge avancé du roi, qui n’eut plus pour lui de réserve, qui ordonna à tous ses ministres d’aller travailler chez lui, de lui rendre compte de tout sans exception, de recevoir même ses ordres comme les siens sur les affaires qu’il lui renvoyait et dont il se déchargeait sur lui en grand nombre. […] De toute cette discussion, et sans nous y engager, il résulte bien clairement qu’au moment où le duc de Bourgogne se vit Dauphin par la mort de son père, bien des ambitions et des espérances se donnèrent carrière à son sujet, qu’on dévora en idée ce règne futur et qui paraissait si rapproché et immanquable ; que bien des honnêtes gens et de vertueux utopistes crurent que leur heure, d’une minute à l’autre, allait sonner, et qu’il se fit dans ces têtes ardentes, et en vue de leur idée favorite, bien des rêves de pot au lait qu’un souffle de fièvre maligne renversa. […] honneur à Machault, tant célébré de Droz pour les projets qu’on lui suppose ou qu’on lui prête ; à Mirabeau père, provocateur et précurseur, à son insu, de son puissant et glorieux fils !

341. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Poésies, par Charles Monselet »

Il appert de l’un et de l’autre que l’auteur, personnage d’une quarantaine d’années, portant lunettes, bonne mine, mâle encolure, tête posée avec aplomb, menton ras et double, lèvre fine, ferme, prompte à la malice, est né à Nantes, que son père y était libraire ; j’ajouterai, — car je ne suis pas homme à me contenter à demi en matière de biographie, — qu’il fut élevé à Bordeaux, qu’il y fit des études classiques succinctes et fut mis de bonne heure à la pratique, je veux dire au journal, au Courrier de la Gironde. […] De l’Époque, après le naufrage, il fut recueilli au journal la Presse, et, dès lors, on le vit un peu partout ; romans, nouvelles, feuilletons de théâtre, articles de critique, il ne se refusa rien : Le principal étant de vivre, Fidèle au : « Tel père, tel fils », Ma ressource devint le livre ; Mon père en vendait, — moi, j’en fis. […] Est-ce un père, un aïeul qu’on puisse revendiquer, qu’on doive rechercher, avouer hautement, dont on doive mettre le portrait dans son cabinet comme on peut avoir son recueil (et je l’ai) sur quelque rayon perdu et poudreux, dans les combles de sa bibliothèque ? […] On sent que Grimod de La Reynière, qui les a inspirées, est, parmi les Pères de la table, aussi supérieur à Brillat-Savarin que Mathurin Régnier l’est à Boileau.

342. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Alphonse Daudet  »

Ce fils, devenu grand garçon, vient voir son père, « seulement pour le voir, pour le connaître. C’est vrai, ça m’a toujours un peu taquiné de ne pas connaître mon père  Sans doute, sans doute ; vous avez bien fait, mon garçon », dit le père Achille. […] demande le père ; moi, je suis dans la charpente. […] — Allons, mon père, je ne veux pas vous retarder davantage ; je vous ai vu, je m’en vais content. […] Ils se serrent la main froidement ; l’enfant part de son côté, le père remonte chez lui ; ils ne se sont plus jamais revus.

343. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Gustave Droz » pp. 189-211

… Profanateur de nature et d’éducation, flétrissant, pourrissant, un peu pourri lui-même, tel est Mistigris ; et je souffrirais d’avoir à dire qu’il reste quelque chose de cet affreux enfant terrible dans le talent élégant, désinvolte et presque aristocratique de Gustave Droz, si, en tournant les pages de son livre, je ne trouvais, à ma grande joie, le La Bruyère mauvais sujet corrigé, marié et père, — comme ces bons cœurs de mauvais sujets le deviennent, — le Bébé arrivé et Mistigris parti, par respect pour cette innocence, qui a fait tout à coup sûr l’auteur un peu immodeste de Monsieur et de Madame l’assainissant effet d’une contagion de pureté. […] Voilà un amour de Bébé qui ne refera pas certainement une virginité à monsieur son père, oh ! […] Il faut que la Critique se tienne ferme ici… Parce que l’auteur, à la plume leste, de Monsieur et de Madame, devient père et qu’il se purifie au seul souffle de son enfant, il ne change pas de nature pour cela, et, je l’ai dit plus haut, sa nature est épicurienne. […] Très élégante, très spirituelle, mais très extravagante, ayant déjà les taches de la corruption parisienne sur l’esprit au moins, si elle ne les a pas sur le cœur, possédant au plus haut degré le génie de l’ironie et de la plaisanterie parisiennes, aveugle sur son père qu’elle admire d’enfance et de confiance, parce qu’il a toujours été heureux dans ses plans et qu’il est fou d’elle, madame de Manteigney est la femme amoureuse de son mari, maigre, mièvre, mal fait, chétif, jaunâtre, roussâtre, un crevé du temps, qui lui mange sa dot et ses diamants avec des filles. […] L’abbé Roque, épris de la comtesse de Manteigney, est certainement coupable aux yeux de Dieu, des hommes et de lui-même ; mais il combat avec fureur contre sa passion qui ne l’a égaré qu’une seule fois, mais il est dévoré de remords, mais il se met humblement au pied de la croix, mais, tout le reste de sa vie, il est irréprochable, héroïque et sublime. — Et lorsque, dans le roman de Droz où la Comédie alterne avec le Drame, Larreau, le père de la comtesse, qui dès le premier jour a visé ce prêtre pour son miracle et veut, à force de sophismes et de bagout industriel et progressif, et même religieux, le faire complice de son grotesque et abominable mensonge, le prêtre indigné, dont la colère monte devant le Seigneur, ne fléchit pas une minute dans son indignation et sa colère, — une colère terrible !

344. (1841) Discours aux philosophes. De la situation actuelle de l’esprit humain pp. 6-57

L’inégalité de naissance et de races existait sur la terre ; on était prédestiné de père en fils ; le fils souffrait à cause de son père : pourquoi cette iniquité ? […] Aujourd’hui les croyances de nos pères sont ensevelies et dorment avec eux dans les tombeaux. […] Il n’y a plus aujourd’hui qu’incrédulité pour ce Christianisme si fermement cru par nos pères. […] Les rois se disaient les pères des peuples, les prêtres s’en disaient les éducateurs, les nobles s’en disaient les aînés. […] J’obéissais au roi, et le roi s’appelait fils aîné de l’Église, tenait son pouvoir de ses pères, et reconnaissait le tenir de Dieu.

345. (1910) Propos de théâtre. Cinquième série

Votre père a fait mourir le mien. […] Son père était désespéré. […] Frédéric maçonnait mal et son père le rouait de coups. […] comme c’était joué par Berton père !) […] Elle supplie père, mère, sœur et beau-frère.

346. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « François Villon, sa vie et ses œuvres, par M. Antoine Campaux » pp. 279-302

Depuis sa mort, ce Villon qui avait frisé la potence, considéré comme l’un des pères de la poésie, s’est vu, à chaque reprise et à chaque renaissance littéraire, recherché des meilleurs et salué. […] Antoine Campaux, homme de cœur et d’imagination, qui s’est épris du poète, qui l’a de bonne heure lu, relu, imité peut-être dans des vers de jeunesse et pour ses parties avouables59 ; qui l’aime comme un fils indulgent et innocent, avocat désintéressé d’un père prodigue, et qui, concentrant sur lui toute l’affection et l’érudition dont il est capable, a résumé, poussé à fond et comme épuisé les recherches à son sujet. […] Un érudit allemand a essayé, dans ces derniers temps, de déterminer au juste quelle était la part du père et de la mère de Villon dans le caractère de leur fils, et leur double influence sur son œuvre. […] Celui-ci a donc découvert et imaginé que toute la veine satirique, railleuse, irrévérente et sensuelle de Villon lui venait de son père, et que la veine tendre et religieuse qu’on lui suppose par moments, ses velléités du moins et ses retours de mélancolie venaient de sa mère. […] Le docte Allemand de tout à l’heure, qui sait si bien ce que le père et la mère de Villon lui avaient transmis dans le sang, a conclu, de ce que Villon a dit qu’il n’était pas maître en théologie (je le crois bien), qu’il était, au moins, maître en quelque chose.

347. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

Donc, Victor-Marie Hugo naquit en 1802 (26 février), dans Besançon, vieille ville espagnole, de Joseph-Léopold-Sigisbert Hugo, colonel du régiment en garnison, et de Sophie Trébuchet, fille d’un armateur de Nantes ; d’un père soldat et d’une mère Vendéenne . […] Au printemps de 1811, il partit avec sa mère et ses frères pour l’Espagne, où il rejoignit son père, général dès 1809, puis premier majordome du palais et gouverneur de deux provinces ; il logea quelque temps au palais Macerano, à Madrid, et de là fut mis au séminaire des nobles, où il resta un an ; on le destinait à entrer dans les pages du roi Joseph, qui l’aimait  beaucoup. […] En 1812, comme les événements devenaient menaçants à l’horizon, et que les trônes groupés autour de l’Empire craquaient de toutes parts, Mme Hugo ramena à Paris ses deux fils cadets, Eugène et Victor ; l’aîné, déjà sous-lieutenant, demeura avec son père. […] Vinrent les Cent-Jours : les dissidences domestiques entre madame Hugo et le général s’étaient envenimées : celui-ci, redevenu influent, usa des droits de père, et reprit d’autorité ses deux fils, ce qui augmenta encore la haine des enfants contre le gouvernement impérial. […] Il passa une année dans une petite chambre rue Mézières, puis rue du Dragon, étudiant et travaillant à force, jaloux de prouver à son père qu’il pouvait se suffire à lui-même.

348. (1887) Discours et conférences « Rapport sur les prix de vertu lu dans la séance publique annuelle de l’Académie française »

Elle débuta dans la charité en achetant une petite fille que son père vendait pour boire. […] Dans son enfance, elle voit l’intempérance du père ruiner la petite industrie qui fait vivre la famille. […] Les scènes déplorables, les traitements indignes, les paroles offensantes, les injustices les plus criantes sont les conséquences de l’ivrognerie du père. Ce qu’il y a d’admirable, c’est la patience, la résignation, la douceur avec lesquelles cette jeune fille supporte tout ; lors même que son père la rudoie, elle est caressante et dévouée. Souvent on la voit assise sur une chaise, dans la salle du cabaret, attendant que son père veuille la suivre ; elle espère abréger ainsi la séance et diminuer des dépenses funestes à la famille.

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