M. de Montgaillard n’a jamais eu l’intelligence des grands mouvements politiques qu’il enregistre et qu’il narre dans son journal ; il n’a été dirigé, en écrivant, par aucun système de principes, auquel il soit resté conséquent et fidèle ; les variations de son humeur se retrouvent dans ses opinions sur les partis et sur les hommes ; il réduit tout en personnalités, et, à propos d’un même personnage, il n’est pas rare qu’il passe, à quelques pages de distance, de l’éloge à l’injure. […] A cet égard l’opinion de M.
Depuis ce temps-là je n’avois pas changé d’avis, & je me reposois de bonne foi dans ma première opinion. […] Mais ils s’obstinèrent dans leur opinion, & chargèrent Benserade de traits satyriques.
Écarlate d’opinion, écarlate de sentiment, écarlate d’expression : toutes les intensités d’écarlate, il les a, quoique rural, ce rural endiablé ! […] Son Mage (une des grandes figures de sa Fête votive) n’est, au fond, qu’un prêtre catholique paganisé ; mais c’est d’un accent qu’une intelligence pénétrée de catholicisme pouvait seule trouver… Homme d’impression bien plus que d’opinion, Cladel reviendra par la plus belle des routes — celle du Beau — à la Vérité.
Mais il se distingua surtout dans cette partie de l’esprit philosophique, utile lors même qu’il se trompe, qui analyse les principes du goût, n’admire rien sur parole, et avant d’adopter une opinion, même de deux mille ans, cherche toujours à s’en rendre compte. […] Le public n’aime ni les tyrans d’autorité, ni les tyrans d’opinions.
Mais Charron va ici plus loin ; il ne permet pas à l’homme de s’arrêter ; il ne lui concède que des opinions provisoires. […] Que d’idées, que de goûts imposés par l’opinion, par la coutume ! […] Combien peu d’hommes, en effet, peuvent dire que leur opinion est à eux ! […] En physique, en médecine, en philosophie, on invoquait sans cesse l’opinion de ceux qui avaient vécu auparavant. […] Sans doute l’opinion à laquelle nous sommes attachés semble, au premier abord, nous appartenir tout entière ; mais prenons la peine de remonter jusqu’à la source historique d’où elle découle, et nous verrons presque toujours que cette opinion individuelle a pris naissance en grande partie dans une opinion reçue.
Lorsque Pascal écrivait aux jésuites : « Vous avez bien mis ceux qui suivent vos opinions probables en assurance du côté des confesseurs, mais vous ne les avez point mis en assurance du côté des juges, de sorte qu’ils se trouvent exposés au fouet et à la potence en suivant vos probabilités » ; lorsqu’il ajoutait : « Obligez les juges d’absoudre les criminels qui ont une opinion probable, à peine d’être exclus des sacrements, afin qu’il n’arrive pas, au grand mépris et scandale de la probabilité, que ceux que vous rendez innocents dans la théorie, soient Fouettés ou pendus dans la pratique9 » ; quand Pascal flagellait ainsi les jésuites, il s’armait d’une sanglante ironie, mais certes il n’y mettait pas de gaieté ; il n’y a donc point là de comique. […] Dans toutes ses pièces à caractères, Molière a cru devoir mettre en regard de chaque ridicule l’opinion raisonnable qui lui est opposée, de peur, sans doute, que le spectateur ne s’amusât sans s’instruire, et qu’il n’eût la fleur sans le fruit93. […] Selon toute apparence, ce sont ses propres opinions que Molière a exprimées dans la doctrine étroite de Chrysale sur la destination des femmes, dans celle de Clitandre sur le peu d’utilité du savoir, et ailleurs encore dans des dissertations sur la mesure de connaissances qui convient à un homme comme il faut. […] Présenter toujours à côté d’un travers de l’esprit l’opinion raisonnable qui lui est opposée, c’est manifester d’une manière trop méthodique l’intention d’instruire le spectateur. […] Le but de l’auteur a été de peindre à fond un caractère ; mais les hommes ne parles guères de leur caractère, et ils ne le font connaître que par les relations qu’ils soutiennent avec leurs semblables, et comment se fait-il qu’Alceste choisisse pour son ami un personnage tel que ce Philinte, dont les opinions sont diamétralement opposées aux siennes ?
Entre ses Ïambes, il en est trois que l’opinion générale a distingués dès le premier jour, la Curée, l’Idole et la Popularité ; et l’opinion plus sévère et plus dédaigneuse des hommes lettrés, des hommes qui font profession d’étudier ou de pratiquer la poésie, s’est ralliée à l’opinion générale. […] Cette rapide expression de notre pensée soulèvera peut-être bien des colères, bien des récriminations et cependant nous avons l’assurance que notre opinion n’est pas une opinion salutaire. […] Il est au moins permis de discuter cette opinion, et dès que cette opinion est discutée, il n’est plus nécessaire d’attribuer à notre temps la raison suprême, la souveraine clairvoyance. […] Delavigne répondent parfaitement à l’opinion générale de la bourgeoisie. […] Un jour viendra où la foule, en adoptant l’opinion du juge, imposera silence à la colère.
Voilà, ainsi que nous l’avons annoncé en commençant, les côtés les plus caractéristiques de notre opinion au sujet des romans. […] N’est-ce pas dans ce triste hasard que le vulgaire a puisé ses opinions sur l’obscurité indispensable des vers et sur l’ennui qu’ils doivent causer ? […] Il est donc temps de résumer notre opinion. […] Nicolas Becker, ne professe pas sur lui-même des opinions aussi avantageuses et se souvient fort bien de mille petites circonstances dont il n’est pas sorti aussi immaculé qu’on le veut prétendre. […] Janin l’instabilité de son opinion et combien il a peu de ménagement pour ses propres avis.
L’opinion qu’on s’est formée de cette loi et qu’il n’est pas aisé de résumer ne saurait se séparer de son historique, car la loi a été en quelque sorte successive ; elle n’a pas été faite d’un seul jet. […] Et voilà que, sous prétexte d’indépendance et de scrupule de conscience, une portion de la magistrature agissant tout à fait isolément, et absolument comme si elle eût vécu dans une île déserte en dehors de notre atmosphère morale, ne tenant aucun compte du moment, du courant de l’opinion, de la crise politique, à l’une de ces heures toujours périlleuses où le vent est en train de tourner ; voilà que, saisie d’une superstition judaïque, elle se met à distinguer entre tel ou tel article rétrospectif chez tous les journaux indistinctement ; et, après examen, toute réflexion faite, elle en traduit la plupart en police correctionnelle ! […] Quant à moi, si j’avais un article à écrire à propos d’une séance pareille, il me semble que les lois les plus simples et les plus naturelles de la rhétorique me diraient de commencer par mettre le lecteur au fait, de lui expliquer brièvement l’état de la question et le rôle des orateurs, de le faire par ordre et avec suite pour en venir après à discuter à fond l’objet du débat et à apprécier, à juger les différentes opinions en présence. […] J’avais dessein d’abord, messieurs, de traiter à fond ce point devant vous, d’établir à ce propos le vrai principe de la tolérance en matière d’opinions, telle que je la conçois et que je la crois digne du xixe siècle ; mais une occasion prochaine devant s’offrir où, si on daigne me le permettre, je me propose de vous exposer mes idées à ce sujet, je passe rapidement, et j’exprime seulement mon regret de trouver dans la Ici présente l’absence absolue de la seule juridiction de laquelle la presse me paraît devoir relever ; je déplore que, du moment qu’on prétendait rentrer dans la voie libérale, on ait tenu si peu de compte des grandes traditions que nous avaient léguées nos maîtres en politique : la loi, à ce titre, me paraît profondément défectueuse, et, s’il faut parler franc, profondément viciée dans sa constitution même. — Je passe outre. […] L’opinion tout d’abord s’en est-elle exagéré la portée ?
Renan, échangeaient cette opinion (étonnante pour eux, juste pour moi) : « Moi, — disait ! […] Mais c’est justement parce qu’il était empereur qu’il pouvait le faire sans danger… parce que l’opinion de l’empereur — de ce détenteur absolu du pouvoir suprême — pouvait tout sur un peuple sénile, corrompu et dégénéré, usé au frottement des tyrannies, comme était le peuple romain même quand ce détenteur du pouvoir suprême était un monstre, à plus forte raison quand il s’avisait d’être un sage !… Mais l’opinion d’un peuple qui n’en avait plus, n’avait pas besoin d’être subjuguée. […] XI Voilà ce que je voulais seulement dire à propos de l’Antechrist, ce livre qui n’a pas monté d’un cran plus haut la réputation de son auteur, immobile, maintenant, dans l’opinion, comme une pagode. […] Le classé d’Académie a sa case dans l’opinion comme un saint en pierre a sa niche, mais on passe devant, sans le regarder.
On a besoin, pour comprendre que ce livre de Naudé a été utile et presque courageux, de se représenter l’état des opinions en France au moment où il parut. […] Ce qui se marque plus volontiers pour nous dans le livre, et peut nous y intéresser encore, c’est un goût de science reculé et recélé du vulgaire, et le tenant à distance lui et ses sottes opinions, c’est le culte secret d’une sagesse qui, comme il le dit, n’aime pas à se profaner. […] Et en cette opinion extrême, n’admirez-vous pas comme Naudé et de Maistre se rencontrent ? […] Parmi les opinions particulières qui ne font faute, est celle qui range dans les inventions des coups d’État la venue de la Pucelle d’Orléans, « laquelle, ajoute Naudé en passant, ne fut brûlée qu’en effigie. » Il ne daigne pas s’expliquer davantage. […] Naudé se complaisait un peu à ces sortes d’opinions paradoxales, et il admettait très-aisément la mystification du vulgaire en histoire.