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545. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre III. Les dieux »

La nation lui est assujettie, mais il est assujetti à son rang. […] Il a le droit de préparer de toute éternité le malheur infini des âmes qu’il répand sur le monde, et, si quelque âme lui agrée davantage, de bouleverser une nation pour la sauver.

546. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre I. Place de Jésus dans l’histoire du monde. »

Un coffre ou arche portative, ayant des deux côtés des oreillettes pour passer des leviers, constituait tout leur matériel religieux ; là étaient réunis les objets sacrés de la nation, ses reliques, ses souvenirs, le « livre » enfin 84, journal toujours ouvert de la tribu, mais où l’on écrivait très discrètement. […] Défenseurs de l’ancien esprit démocratique, ennemis des riches, opposés à toute organisation politique et à ce qui eût engagé Israël dans les voies des autres nations, ils furent les vrais instruments de la primauté religieuse du peuple juif.

547. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre II. Le dix-neuvième siècle »

Oui, tous tant que nous sommes, grands et petits, puissants et méconnus, illustres et obscurs, dans toutes nos œuvres, bonnes ou mauvaises, quelles qu’elles soient, poëmes, drames, romans, histoire, philosophie, à la tribune des assemblées comme devant les foules du théâtre, comme dans le recueillement des solitudes, oui, partout, oui, toujours, oui, pour combattre les violences et les impostures, oui, pour réhabiliter les lapidés et les accablés, oui, pour conclure logiquement et marcher droit, oui, pour consoler, pour secourir, pour relever, pour encourager, pour enseigner, oui, pour panser en attendant qu’on guérisse, oui, pour transformer la charité en fraternité, l’aumône en assistance, la fainéantise en travail, l’oisiveté en utilité, la centralisation en famille, l’iniquité en justice, le bourgeois en citoyen, la populace en peuple, la canaille en nation, les nations en humanité, la guerre en amour, le préjugé en examen, les frontières en soudures, les limites en ouvertures, les ornières en rails, les sacristies en temples, l’instinct du mal en volonté du bien, la vie en droit, les rois en hommes, oui, pour ôter des religions l’enfer et des sociétés le bagne, oui, pour être frères du misérable, du serf, du fellah, du prolétaire, du déshérité, de l’exploité, du trahi, du vaincu, du vendu, de l’enchaîné, du sacrifié, de la prostituée, du forçat, de l’ignorant, du sauvage, de l’esclave, du nègre, du condamné et du damné, oui, nous sommes tes fils, Révolution !

548. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Chine »

Les autres, moins persuadés que le Céleste Empire soit céleste, ont fait du peuple-phénomène qui l’habite une nation de la date de beaucoup d’autres dans la chronologie asiatique, malgré ses prétentions exorbitantes à l’antiquité ; ni plus grand, ni plus fier, ni plus sage que tous les idolâtres de la terre, que toutes les races tombées et dispersées aux quatre vents de la colère de Dieu, abominablement corrompu, — ce qui lui donne ce petit air vieux qui nous fait croire à sa vieillesse, car la corruption vieillit le multiple visage des peuples comme la chétive figure de l’homme, — laid jusqu’à la plus bouffonne laideur, et, si l’on s’en rapporte aux œuvres qui sortent des mains patientes et industrieuses de ce peuple stationnaire, encagé dans son immuable empire du Milieu, ces œuvres de prisonnier qui s’ennuie et qui apparaissent comme des prodiges à notre fougue occidentale, ayant l’intérieur de la tête aussi étrangement dessiné que le dehors, le cerveau conformé comme l’angle facial ! […] La Chine, qu’on nous peint, sur son plateau, dans l’immobile position d’un stylite, la Chine, cette nation au piquet sur le globe, mais qui est fort turbulente dans le rayon tracé par la longueur de sa corde, a eu une trentaine de dynasties : elle a eu la dynastie des Tcheou, des Tchsin, des Tcin, des Tsi, des Tchin, des Taï-Thsing, et vous pouvez monter ainsi toutes les octaves des éternûments de La Jeunesse dans le Barbier de Séville.

549. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’ancien Régime et la Révolution »

Cela conduisit, affirme-t-il, aux conséquences les plus singulières, et il en cite quelques-unes, qui sont fort simples, et qui peuvent se ramener à ceci : qu’on ne s’entendit pas. « La nation — dit-il alors avec une superficialité inouïe — ne tenant plus debout dans aucune de ses parties, un dernier coup put la mettre en branle… et produire le plus vaste bouleversement et la plus grande confusion qui ait jamais existé. » Telle est la thèse de Tocqueville, et, comme on le voit, elle est assez mince. […] C’est là un spectacle déconcertant et cruel pour des parlementaires malades de leurs institutions rentrées, et qui s’en vengent en écrivant de ces généralités désintéressées : « Une nation fatiguée de longs débats « consent volontiers qu’on la dupe, pourvu qu’on la « repose, et l’histoire nous apprend qu’il suffit alors « pour la contenter de ramasser dans tout le pays « un certain nombre d’hommes obscurs et dépendants, « et de leur faire jouer devant elle le rôle d’une « assemblée politique, moyennant salaire. » Voilà comme Tocqueville entend le trait.

550. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les civilisations »

Campez-vous où vous voudrez dans l’Histoire, jusqu’à l’avènement du Christianisme, cette grâce surnaturelle pour les nations comme pour l’homme, le monde tout entier n’est qu’un fauve. […] Le Christianisme a donné aux nations plus que cette politesse qui est le signe des civilisations, puisqu’il leur a donné la charité.

551. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « L’Angleterre depuis l’avènement de Jacques II »

« Si le parlement l’eût permis, — disait-il avec un regret amer, — j’aurais élevé ma nation au rang des premières nations du monde. » Il applaudissait, au combat de la Hougue, à la charge des vaisseaux anglais qui se battaient contre lui !

552. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes d’Amérique » pp. 95-110

L’amour effréné de l’argent a toujours été mis au ban de tous les mépris dans l’Histoire, et même dans l’opinion des nations robustes qui savaient le mieux le gagner. […] À part le fond des choses, qui, selon nos ridicules et chers préjugés, déshonore une nation dont on ose les dire, nous ne voudrions pas, même pour la forme, du panégyrique de Bellegarrigue, fût-il une flatterie !

553. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. le vicomte de Meaux » pp. 117-133

Le Protestantisme a fendu en deux la France, — la plus belle unité qui fut jamais parmi les nations !  […] Il a vu, en effet, avec un bon sens que sa préoccupation de tolérance n’a pas toujours égaré, que la nation française était encore, à cette époque, catholique jusque dans le fond de ses entrailles, et que le Protestantisme, qui éteint tout, était essentiellement antipathique à l’esprit français, qui n’aime que ce qui est brillant.

554. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Christophe »

Mais si on n’a pas craint d’aborder cette vaste histoire, l’histoire des nations les plus colossalement grandes paraît mince à côté. […] à ce parlementarisme politique dont les nations sont actuellement excédées, ne fait pas illusion à son bon sens éclairé par la foi ; mais, au moment où il écrit, j’aurais voulu qu’il en eût marqué davantage la radicale erreur, tombée de si haut dans le monde, ne fût-ce que pour ajouter à la force d’opinion qui doit un jour l’emporter !

555. (1888) Portraits de maîtres

Ne l’oublions pas, c’est Chateaubriand qui le premier a fait du critique le médiateur intellectuel de toutes les nations. […] Est-ce ainsi que l’on apprend à une nation à apprécier ses droits ?  […] En face des nations envieuses et traîtresses pouvons-nous prolonger ce beau songe ? […] Notre parti, qui avait au début fait corps avec la nation, s’était lui-même anéanti par coupes réglées ou éliminations alternatives. […] Et ce que l’histoire a fait de plus grand, la nation française, c’est là ce que l’Allemagne jalouse veut détruire en un jour.

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