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14. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre III. Le lien des caractères généraux ou la raison explicative des choses » pp. 387-464

. — Éléments primitifs de la ligne. — Découverte d’un caractère commun à tous les éléments ou points d’une ligne. — Définition d’une ligne par le rapport constant de ses coordonnées. — La géométrie analytique. — Éléments primitifs d’une grandeur. — Le calcul infinitésimal. — Dans toute loi énoncée par une science de construction, — la dernière raison de la loi est un caractère général inclus dans les éléments de la première donnée de la loi. […] À présent, suivons sa marche : il commence par construire des composés, très simples la ligne droite toute seule, la ligne droite qui en coupe une autre, la ligne droite perpendiculaire à une autre, deux lignes droites parallèles. […] Dans celui qu’on nomme cercle, on met une infinité de lignes droites égales, qui ont un point commun. […] Chacune d’elles a une forme, et, une fois la ligne tracée, nous voyons cette forme en bloc. […] Du caractère exprimé par une équation, on tire toutes les propriétés de la ligne ; en d’autres termes, on trouve, pour rattacher à la ligne ses propriétés, un intermédiaire, une raison, un parce que inclus dans l’équation qui est sa définition.

15. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Appendices de, la deuxième édition »

« 2° Si l’on se place en dehors de la théorie de la Relativité, on conçoit très bien un personnage Pierre absolument immobile au point A, à côté d’un canon absolument immobile ; on conçoit aussi un personnage Paul, intérieur à un boulet qui est lancé loin de Pierre, se mouvant en ligne droite d’un mouvement uniforme absolu vers le point B et revenant ensuite, en ligne droite et d’un mouvement uniforme absolu encore, au point A. […] On hésite parfois à admettre cette réciprocité de l’accélération, pour certaines raisons spéciales dont il sera question à l’appendice suivant, quand nous traiterons des « lignes d’Univers ». […] Sur la ligne d’Univers de M₁, choisissons deux événements déterminés A et B… Entre ces événements nous pouvons imaginer dans l’Espace-Temps une infinité de lignes d’Univers réelles… Prenons l’une quelconque de ces lignes d’Univers ; il suffit pour cela de considérer un second mobile M₂, parti de l’événement A, qui, après avoir parcouru, avec une vitesse plus ou moins grande, un trajet spatial plus ou moins long, trajet que nous allons repérer dans un système en translation uniforme lié à M₁ rejoint ce mobile M₁, à l’événement B. […] En d’autres termes : entre deux événements déterminés, la plus LONGUE ligne d’Univers est celle qui correspond au mouvement de translation uniforme. […] La considération des « lignes d’Univers », introduite par Minkowski, a même pour essence (le masquer, ou plutôt d’effacer, la différence entre le réel et le représenté.

16. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Le maréchal de Villars. »

Le maréchal de Montesquiou proposa, dès le commencement de la campagne, de tirer des lignes depuis la tête de l’Escaut jusqu’à la Somme pour couvrir la Picardie, et de s’y retrancher ; projet que Villars dut soumettre à la Cour, par déférence pour un confrère, bien qu’il le désapprouvât en principe. La défense derrière des lignes n’est aucunement dans l’humeur française. […] Le gros des forces du prince Eugène était alors trop rapproché des lignes de communication, et celles-ci eussent été soutenues aussitôt par toute la droite de son armée. […] A y regarder de plus près, l’honneur de Montesquiou est, certes, d’avoir eu la visée sur Denain (qu’elle soit venue primitivement de Louis XIV ou de lui), de l’avoir proposée à Villars avec insistance sous la forme d’un plan militaire aussi hardi que praticable, et d’avoir été en première ligne dans l’exécution. […] Villars put être critiqué à bon droit par Napoléon pour sa campagne d’Italie en 1733, et pour avoir méconnu alors le vrai point stratégique, la ligne défensive de l’Italie qui est sur l’Adige ; mais (circonstance atténuante) il avait alors quatre-vingts ans.

17. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces diverses — Préface du « Rhin » (1842) »

Il y a quelques années, un écrivain, celui qui trace ces lignes, voyageait sans autre but que de voir des arbres et le ciel, deux choses qu’on ne voit pas à Paris. […] Maintenir le droit de la France sans blesser la nationalité de l’Allemagne, c’était là le beau problème dont celui qui écrit ces lignes avait, dans sa course sur le Rhin, cru entrevoir la solution. […] Or, l’auteur ayant toujours eu plutôt pour but de calmer que d’irriter, il se demanda s’il n’effacerait pas ces deux lignes. […] En admettant que ces deux lignes aient un sens, ce ne sont pas elles qui sont venues se superposer aux événements, ce sont les événements qui sont venus se ranger sous elles. […] Dans la Légende du beau Pécopin (paragraphe XII, dernières lignes) au lieu de : une porte de métal, il faut lire : une porte de métail.

18. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre II. De la multiplicité des états de conscience. L’idée de durée »

On a vu des animaux revenir presque en ligne droite à leur ancienne demeure, parcourant, sur une longueur qui peut atteindre plusieurs centaines de kilomètres, un chemin qu’ils ne connaissaient pas encore. […] Pour mettre cette argumentation sous une forme plus rigoureuse, imaginons une ligne droite, indéfinie, et sur cette ligne un point matériel A qui se déplace. Si ce point prenait conscience de lui-même, il se sentirait changer, puisqu’il se meut : il apercevrait une succession ; mais cette succession revêtirait-elle pour lui la forme d’une ligne ? […] Mais qui ne voit que, pour apercevoir une ligne sous forme de ligne, il faut se placer en dehors d’elle, se rendre compte du vide qui l’entoure, et penser par conséquent un espace à trois dimensions ? […] Au moment où j’écris ces lignes, l’heure sonne à une horloge voisine ; mais mon oreille distraite ne s’en aperçoit que lorsque plusieurs coups se sont déjà fait entendre ; je ne les ai donc pas comptés.

19. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre deuxième. Le développement de la volonté »

Mais la certitude de ces résultats mécaniques n’empêche point les mouvements d’être en eux-mêmes sensitifs et appétitifs : la ligne du mouvement le plus facile y est toujours, psychologiquement, la ligne de la moindre peine. […] L’arrangement inné des cellules, qui présente aux mouvements utiles les lignes de moindre résistance toutes tracées, est évidemment un héritage de l’espèce et un produit de la sélection naturelle. […] La spontanéité primitive est une ; la volonté raisonnable est un fractionnement apparent produit par la réflexion de l’intelligence, qui, elle, a l’idée de plusieurs lignes de conduite. […] William James et Delbœuf, la volonté semble « suivre la ligne de la plus grande résistance », par exemple de la plus grande douleur : la bombe de canon qui s’enfonce dans une muraille, au lieu de se détourner, suit une ligne résistante, mais c’est que la puissance emmagasinée dans la bombe lui impose cette ligne. […] Il en est de même chez le martyr qui va au supplice ; la ligne qui paraît de la plus grande résistance, si on la considère en elle-même, — c’est-à-dire la ligne aboutissant à la mort, — est toujours la ligne de la moindre résistance si on la considère par rapport au cerveau du martyr, à ses idées et à ses mobiles, soit visibles, soit invisibles, à son tempérament et à son caractère.

20. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre II : Termes abstraits »

Quand nous disons étendu, signifiant quelque chose détendu, nous voulons dire l’une ou l’autre de ces trois choses : une ligne, une surface, un volume. […] L’étendue linéaire est l’idée d’une ligne, moins la connotation, c’est-à-dire moins l’idée de résistance. […] Une étroite et irrésistible association d’idées nous fait concevoir l’accroissement continu d’une ligne, d’une surface, d’un volume. […] Dans l’idée d’un corps mouvant, nous trouvons les éléments suivants : idée d’une ligne (car un corps se meut toujours selon une ligne droite ou autre), idée de succession.

21. (1868) Curiosités esthétiques « II. Salon de 1846 » pp. 77-198

Exalter la ligne au détriment de la couleur, ou la couleur aux dépens de la ligne, sans doute c’est un point de vue ; mais ce n’est ni très-large ni très-juste, et cela accuse une grande ignorance des destinées particulières. […] Voici quelques lignes de M.  […] Decamps sait faire comprendre un personnage avec quelques lignes. […] La circonférence, idéal de la ligne courbe, est comparable à une figure analogue composée d’une infinité de lignes droites, qui doit se confondre avec elle, les angles intérieurs s’obtusant de plus en plus. […] Qu’est-ce que chacun ferait désormais de son pauvre moi, — de sa ligne brisée ?

22. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Remarque finale. Le Temps de la Relativité restreinte et l’Espace de la Relativité généralisée »

Plus précisément, celui-là est à la fois un Temps et une « ligne de lumière » ; les autres ne sont que des lignes de lumière. Mais comme ces dernières lignes naissent d’un allongement de la première, et comme la première était collée contre du Temps, on dira d’elles que ce sont des Temps allongés. […] On avait implicitement admis le contraire pour tous — sauf un seul — quand on avait identifié le Temps avec la ligne de lumière.

23. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iii »

N’a cessé de circuler en première ligne les 29 et 30 mars, réconfortant les blessés et mourants, et donnant le plus bel encouragement, ainsi que l’exemple du mépris absolu du danger. » (13 avril 1916 ; J. […] Toujours en première ligne, sans aucun souci du danger, a donné le plus bel exemple de magnifique intrépidité et de charité envers ses semblables. […] A été blessé le 12 octobre 1915, en allant dans les tranchées de première ligne, identifier les morts et procéder à leur inhumation, sa division étant au repos. » Légion d’honneur. […] Constamment en première ligne, se rit du danger et, par sa présence, communique à tous un réconfort des plus précieux. […] Ces jours derniers, devant notre première ligne, s’abat un suint et violent marmitage.

24. (1894) Propos de littérature « Chapitre II » pp. 23-49

L’énonciation précise et immédiate d’un concept métaphysique ne va pas sans une sécheresse qui répugne au rythme, et ses lignes abstraites ne peuvent se montrer sous les formes harmonieuses et les couleurs de l’œuvre d’art. […] Pour arriver à mieux, il renie la maternelle nature : le peintre agence des lignes qui n’obéissent plus à la divine concordance ; le littérateur écrit « la Justice » et paraît oublier que le vers est rythme et image. […] Les formes diverses dont l’œuvre est composée s’orientent alors comme un ensemble de lignes qui, sans atteindre le point précis de leur jonction, le révèlent au moins par leur unanime tendance, projetant ainsi dans l’espace le signe de leur raison d’être et de leur unité. […] L’inclinaison des lignes convergentes peut être à peine indiquée : l’esprit qui les reçoit est illimité par le songe — et ne croira-t-il pas saisir un certain aspect de l’Infini si de toutes ces lignes le point de jonction unique, si de toutes ces formes l’unique et radieux symbole s’illumine en lui-même ? […] Mais il appartient au tact de l’artiste de dessiner sa pensée jusqu’à la rendre aisément perceptible en ses lignes générales sans la restreindre à une idée particulière.

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