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1083. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — II » pp. 112-130

Les imprudents se battent, et les gens sages viennent à profiter de l’objet du combat quand on est bien sûr qu’ils ne s’en sont pas mêlés ; et cette aventure de tertius gaudet arrive dans les cours les plus intrigantes tout comme pendant les gouvernements forts et tranquilles… Dans ces intrigues, ajoute-t-il, le moindre risque, selon moi, surpasse les plus hautes espérances ; je crains extrêmement la disgrâce et la Bastille ; j’aime ma liberté et ma tranquillité, et je ne les veux jamais sacrifier qu’au bonheur de mes citoyens ; mais quelle sottise de les sacrifier à ses vues personnelles ! […] J’ai vu dans ma jeunesse que l’on n’était pas plus philosophe que cela ; mais, grâce à Dieu, la philosophie nous éclaire davantage, et nous le devons à la liberté anglaise.

1084. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — III » pp. 132-153

Il avait raison, et j’irai plus loin : l’on n’est jamais moins occupé de soi que quand on est seul, et on n’en est jamais si occupé, si embarrassé qu’avec le monde. » Ainsi en liberté avec sa pensée et avec celle des autres, il se donnait toute carrière. […] Oui, cette nation va bien loin, à force de liberté en tout.

1085. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — II » pp. 150-171

Je déclare donc ici que tout homme qui voudra m’offenser n’y réussira pas en attaquant ma figure ; il y a longtemps que je l’ai abandonnée à son mauvais sort ; il y a longtemps que ses querelles ne sont plus les miennes : mais comme je ne connais point M. l’abbé Couture, que je n’ai pu par conséquent lui faire cette déclaration, il n’a pas dû croire qu’il fût de mon goût que cette liberté devînt le droit de Gacon même. […] Les mots y sont presque toujours dans une attitude contrainte et forcée ; il faut souvent aider à la lettre pour les entendre, et je suis persuadé que s’ils avaient la liberté de se plaindre, ils avoueraient qu’ils se trouvent bien plus en presse et plus mal à leur aise dans sa prose et dans d’autres ouvrages pareils, qu’ils ne le sont dans les bons vers.

1086. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) «  Essais, lettres et pensées de Mme  de Tracy  » pp. 189-209

Cuvillier-Fleury, qu’il n’est pas interdit aux amis d’en dire quelque chose, je désirerais à mon tour que la même liberté fût laissée, non pas aux indifférents (ceux qui ont lu ce recueil ne sauraient plus l’être pour Mme de Tracy), mais aux étrangers et aux curieux pleins de respect qui n’ont pas eu l’honneur directement de la connaître : comme esprit et comme cœur, elle s’est peinte suffisamment à eux dans ces pages. […] Si l’on perd la danse à trente ans, on acquiert la liberté.

1087. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

. — Ainsi encore, dans le tableau de la Liberté, d’Eugène Delacroix, voyez la blouse du gamin : le peintre n’a pas cherché à reproduire la couleur exacte de la blouse ; il a cherché un ton harmonieux qui fît le meilleur effet dans le tableau tel qu’il le concevait. […] Je soigne mon petit oiseau pour lui donner la liberté quand il sera bien remis de ses privations et de sa fatigue.

1088. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Et pense-t-on qu’ils résistent longtemps au désir de reprendre leur liberté, quand ils n’ont à espérer aucune compensation aux maux dont ils sont accablés ? […] Des bâtiments énormes, une administration nombreuse, une discipline de fer et de bâtons ; des résultats passables, mais qui ne sont d’aucune utilité pour la masse, les privilèges de la Couronne anéantissant sur-le-champ le bénéfice qu’on en pourrait tirer si la liberté d’en tirer parti pour son compte existait.

1089. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Don Carlos et Philippe II par M. Gachard Don Carlos et Philippe II par M. Charles de Mouy »

Lorsque ensuite on s’aperçut que ce projet de voyage royal n’était qu’une feinte, il s’en montra très irrité et pensa à s’y rendre lui-même ; c’était moins sans doute dans la vue de se lier avec un parti politique et avec des hérétiques que pour échapper au joug paternel trop pesant de près, et pour pouvoir se livrer avec plus de liberté à son agitation turbulente. […] A l’intérêt que le roman et le théâtre avaient jeté sur l’infortuné don Carlos, à cet amour partagé qui aurait fait deux victimes, à cet enthousiasme de philosophie et de liberté dont le prince espagnol aurait été le complice et le martyr, est substitué, d’après des pièces authentiques, le récit d’une longue démence et d’une maladie terminée par la mort.

1090. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SCRIBE (Le Verre d’eau.) » pp. 118-145

Il a donc rang parmi nos poëtes65 à aussi bon droit, je pense, que s’il avait composé dans sa vie une couple de pièces en alexandrins ; et nous n’avons pas même à demander pardon de la liberté grande aux innombrables auteurs d’élégies, à l’aristocratie désormais très-mélangée des rêveurs et des rimeurs à rimes plus ou moins riches. […] En 1815, l’agréable et malin vaudeville courait encore à la légère et non dénaturé ; la démarcation même des genres l’avait sauvé dans son humble liberté sans prétention.

1091. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LOYSON. — POLONIUS. — DE LOY. » pp. 276-306

Maine de Biran, sont déjà des méditations ébauchées et mieux qu’ébauchées : O Biran, que ne puis-je en ce doux ermitage, Respirant près de toi la liberté, la paix, Cacher ma vie oisive au fond de tes bosquets ! […] Labinsky, lequel, à distance et dans la liberté, me fait l’effet d’un correspondant correct de Lamartine.

1092. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Pierre Corneille »

Mon travail, sans appui, monte sur le théâtre ; Chacun en liberté l’y blâme ou l’idolâtre. […] La forme dramatique de Corneille n’a point la liberté de fantaisie que se sont donnée Lope de Vega et Shakspeare, ni la sévérité exactement régulière à laquelle Racine s’est assujetti.

1093. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Le comte de Ségur »

Elle manifestait son adoption des idées nouvelles par toutes sortes d’indices plus ou moins frivoles, par l’anglomanie dans les modes, par la simplicité du frac et des costumes : « Consacrant tout notre temps, dit M. de Ségur, à la société, aux fêtes, aux plaisirs, aux devoirs peu assujettissants de la cour et des garnisons, nous jouissions à la fois avec incurie, et des avantages que nous avaient transmis les anciennes institutions, et de la liberté que nous apportaient les nouvelles mœurs : ainsi ces deux régimes flattaient également, l’un notre vanité, l’autre nos penchants pour les plaisirs. […] Liberté, royauté, aristocratie, démocratie, préjugés, raison, nouveauté, philosophie, tout se réunissait pour rendre nos jours heureux, et jamais réveil plus terrible ne fut précédé par un sommeil plus doux et par des songes plus séduisants. » Ainsi on ne se privait de rien en cet âge d’or rapide ; on était aisément prodigue de ce qu’on n’avait pas perdu encore ; on cumulait légèrement toutes les fleurs.

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