Mais il n’était pas même nécessaire de combattre dans ce moment : la révolution combattait pour nous en Hongrie, en Prusse, à Francfort, à Rome, à Naples, en Toscane, à Vienne, et l’Autriche, qui n’existait plus que dans son unique armée d’Italie, ne songeait pas à se jouer elle-même dans une seule bataille ; elle ne songeait qu’à se ménager des conditions honorables de retraite.
Là les âmes, les démons, les anges, les vierges, les saints, les damnés, les trois personnes de la Divinité elles-mêmes, jouaient des rôles d’acteur dans le drame théogonique de ces mondes surnaturels.
Tout à coup le défilé s’ouvre entre deux remparts de rochers dont la surface, frappée par les rayons du soleil couchant, présente tantôt la blancheur du marbre qu’on vient d’extraire, tantôt les teintes roses de la joue d’une jeune fille rougissante.
N’est-ce pas là l’hypothèse des variations accidentelles, qui joue un si grand rôle dans la doctrine darwinienne ?
Il le fit avec talent, avec beaucoup de talent, se joua des phrases jolies qui donnent aux sentiments profonds des allures d’écoliers en maraude, et nous conta une petite histoire qui n’avait l’air de rien, et qui était toute la vie.
La larme qui coule sur sa joue est fausse.
Ainsi, pour reprendre une métaphore qui a déjà paru plusieurs fois dans ce livre, il faut, pour des raisons semblables, que le passé soit joué par la matière, imaginé par l’esprit.
C’est elle qui « fait tout 101 », jouant par rapport à l’intelligence discursive, en mouvement dans le temps, le même rôle que joue le Moteur immobile lui-même par rapport au mouvement du ciel et au cours des choses. […] Certes, les idées de devenir, de progrès, d’évolution, paraissent occuper une large place dans leur philosophie, Mais la durée y joue-t-elle véritablement un rôle ?
Une profonde tristesse y règne, qui n’est point jouée, et à mesure qu’on avance, une sorte d’inquiétude, d’anxiété nerveuse et d’agitation tremblante dans la poursuite du bonheur, qui sont d’une grande vérité et infiniment dramatiques. […] Elle est bien un peu désobligée quelquefois par cette affectation contraire à celle des Français, qui consiste à jouer le sentiment comme nous en jouons l’absence, qui « s’exalte sans cesse » et qui « fait de la coquetterie avec de l’enthousiasme, comme nous en faisons avec de l’esprit et de la plaisanterie. » — Il faut croire que, par tout pays, il est bien malaisé d’être simple. […] Il dira par exemple : « Aujourd’hui déjeuné chez X, dîné chez Y, soupé chez Z, vu jouer Zaïre… journée perdue.
Elle n’y joua jamais qu’un rôle assez secondaire.
Il marque tout dans le vol du faisan, le frou-frou de son essor, « ses teintes lustrées, changeantes, — sa crête de pourpre, ses yeux cerclés d’écarlate, — le vert si vif que déploie son plumage luisant, — ses ailes peintes, sa poitrine où l’or flamboie1121. » Il a la plus riche provision de mots brillants pour peindre les sylphes qui voltigent autour de son héroïne, « lumineux escadrons dont les chuchotements aériens semblent le bruissement des zéphyrs, — et qui, ouvrant au soleil leurs ailes d’insectes, — voguent sur la brise ou s’enfoncent dans des nuages d’or ; — formes transparentes dont la finesse échappe à la vue des mortels, — corps fluides à demi dissous dans la lumière, — vêtements éthérés qui flottent abandonnés au vent, — légers tissus, voiles étincelants, formés des fils de la rosée, — trempés dans les plus riches teintes du ciel, — où la lumière se joue en nuances qui se mêlent, — où chaque rayon jette des couleurs passagères, — couleurs nouvelles qui changent à chaque mouvement de leurs ailes1122. » Sans doute ce ne sont point là les sylphes de Shakspeare ; mais à côté d’une rose naturelle et vivante, on peut encore voir avec plaisir une fleur en diamants, comme il en sort des mains d’un joaillier, chef-d’œuvre d’art et de patience, dont les facettes font chatoyer la lumière et jettent une pluie d’étincelles sur le feuillage de filigrane qui les soutient.