C’est-à-dire un assemblage disparate de pages disparates, d’impressions au jour le jour qui n’ont d’autre unité — que celle de la couverture !
Cette première rencontre se borna à une présentation et à un bref échange de politesses, mais l’impression que j’en gardai ne fut pas extrêmement favorable. […] J’ai toujours eu l’impression qu’il en voulait aux nécessités de la vie de l’obliger à un travail dont il était trop intelligent pour ne pas sentir l’inutilité. […] J’eus cette impression une fois de plus à un dîner auquel m’invita Forain pour y rencontrer Degas qui, d’ailleurs, fut insupportable. […] Ni le poète, ni le romancier ne trouva grâce devant lui, si bien que j’eus un peu l’impression d’avoir usurpé le fauteuil que le vote de l’Académie m’avait admis à occuper. Il va sans dire que le succès du discours du comte Albert de Mun fut considérable et j’eus assez l’impression que j’aurais dû m’excuser auprès de mes « parrains » d’avoir eu à encadrer un récipiendaire aussi peu académiquement désirable.
Après avoir parlé, puisqu’il le faut, de Condillac, de ce fameux Traité des sensations, de cette statue « où tous nos sens naissent l’un après l’autre, et qui semble être la dérision de la nature, laquelle les produit et les forme tous à la fois », il en vient à la lecture qu’il a faite également de Bacon : Quelle impression différente j’en ai reçue ! […] Le rétablissement du culte en particulier, loin de l’irriter, l’attendrit, ce qui est un bon signe moral ; citons deux passages qui sont un correctif nécessaire à ce qu’on a dit, et qui font foi d’une impression salutaire : Vers la fin de 1802, j’assistai au mariage du jeune d’Arquelai. […] Cette cérémonie me causa beaucoup d’attendrissement et me parut propre à opérer, même sur les gens âgés, de très salutaires impressions.
On a imprimé en partie les lettres qu’il écrivait de là sans prétention aucune, et à la diable16 ; j’ai sous les yeux les originaux : l’impression est assez exacte, sauf quelques interversions de dates et des mots trop familiers qu’on n’a osé risquer et qui ont été remplacés un peu arbitrairement. […] … » « D’El-Arich à Gaza, le pays change de figure ; le sable se couvre de petits buissons, puis on commence à rencontrer des pierres, puis des troupeaux ; enfin on entend un peu de bruit ; le silence est encore une chose qui fait une véritable impression ; on cherche pendant longtemps ce qui manque à la vie, et tout à coup… » Horace Vernet a, depuis, imprimé quelques-uns de ces passages dans une brochure sur les Costumes de l’Orient, il a ôté les familiarités et n’a laissé que le noble et le grave, ce qui allait à son but. […] Cette idée le reprit vivement dans son voyage de Syrie, et en repassant sur ses impressions anciennes et récentes, il écrivait d’un accent de conviction qui portait avec lui une certaine éloquence : « Damas (janvier 1840). — J’ai passé une bonne journée, car j’ai vu beaucoup de choses, et beaucoup de choses différentes qui, malgré cela, en se réunissant dans ma tête, deviennent homogènes par le but auquel je me rattache sans cesse, celui de voir partout de la peinture.
Il y faut tant de préparation en effet, que je me dis quelquefois qu’au milieu de cette vie pressée, affairée, bourrée de travaux et d’études, où chacun en a assez de sa veine à suivre et de sa pointe à pousser, ceux même qui sont du même métier et du même bord n’auront pas toujours le temps, l’espace, la liberté et l’élasticité d’impressions nécessaires pour être justes envers leurs devanciers. […] D’où je conclus que, puisqu’il en est ainsi, et que la littérature critique (car il s’agit d’elle surtout) se trouve en présence d’un monde nouveau et d’un public qui n’est plus dans les conditions d’autrefois, qui n’est plus un cercle d’amateurs studieux, vibrant aux impressions les plus fines et les plus fugitives ; puisqu’elle-même serait bien embarrassée à ressaisir cette légèreté et cette grâce fondues dans la magie unique du talent, il y a nécessité pour elle de se renouveler d’ailleurs, de se fortifier par d’autres côtés plus sûrs, de ceindre courageusement ses reins comme pour une suite de marches fermes et laborieuses. […] Et pourtant je sens la force ou plutôt l’agrément des raisons qu’on m’oppose ; je le sens si bien, que je suis tenté parfois de m’y associer et de pousser aussi mon léger soupir ; tout en marchant vers l’avenir, je suis tout prêt cependant, pour peu que j’y songe, à faire, moi aussi, ma dernière complainte au passé en m’écriant : Où est-il le temps où, quand on lisait un livre, eût-on été soi-même un auteur et un homme du métier, on n’y mettait pas tant de raisonnements et de façons ; où l’impression de la lecture venait doucement vous prendre et vous saisir, comme au spectacle la pièce qu’on joue prend et intéresse l’amateur commodément assis dans sa stalle ; où on lisait Anciens et Modernes couché sur son lit de repos comme Horace pendant la canicule, ou étendu sur son sofa comme Gray, en se disant qu’on avait mieux que les joies du Paradis ou de l’Olympe ; le temps où l’on se promenait à l’ombre en lisant, comme ce respectable Hollandais qui ne concevait pas, disait-il, de plus grand bonheur ici-bas à l’âge de cinquante ans que de marcher lentement dans une belle campagne, un livre à la main, et en le fermant quelquefois, sans passion, sans désir, tout à la réflexion de la pensée ; le temps où, comme le Liseur de Meissonier, dans sa chambre solitaire, une après-midi de dimanche, près de la fenêtre ouverte qu’encadre le chèvrefeuille, on lisait un livre unique et chéri ?
Lorsque, en 1827, à l’occasion du sujet proposé par l’Académie française, qui avait demandé le Tableau de notre littérature au xvie siècle, quelques esprits curieux se portèrent plus particulièrement vers la poésie de ce temps-là, leur première impression fut la surprise : on leur avait tant dit que cette poésie, celle qui remplissait l’intervalle de Clément Marot à Malherbe, était barbare et ridicule, qu’ils furent frappés de voir, au contraire, combien elle l’était moins qu’on ne le répétait de confiance ; combien elle offrait, après un premier et rude effort, d’heureux exemples de grâce, d’esprit, et parfois d’élévation. […] On a souvent exprimé le regret que ce manuscrit n’ait pas été livré à l’impression. […] Mais, quelque estime que nous ayons pour les savants étrangers qui s’occupent de nous à ce degré et qui veulent bien entrer dans notre inventaire domestique, quelque reconnaissance que nous leur devions, c’est toujours pour nous une impression singulière de nous voir ainsi établis par eux sur une table de dissection, comme une nature morte, comme une langue morte.
Mais je dois me borner ici à rendre une impression, non un jugement ; à faire comprendre l’ordonnance et le mouvement du livre, peut-être aussi l’esprit qui l’a inspiré. […] Là, les croyances étaient des impressions et non des doctrines ; elles tenaient moins du raisonnement que de l’habitude. […] Là, se rendaient les garçons et les filles ; ils couronnaient de fleurs les images des Nymphes, non plus par religion, mais par une sorte d’instinct machinal ; la douce mythologie, inséparable de toutes les impressions du plaisir, était encore le langage de l’amour ; les cœurs demeurèrent longtemps sous la protection de cet enfant jeune et beau, qui a des ailes, et pour cette cause prend plaisir à hauter les beautés ;… qui domine sur les éléments, les étoiles et sur ceux qui sont dieux comme lui.
Ce plaisir, on le trouve un peu puéril et on a quelque peine à le goûter tout d’abord quand on s’est laissé corrompre par d’autres livres où le besoin de la vérité, même triste, surtout triste, s’étale avec quelque chose de maladif et d’outré ; mais, avec un peu d’effort, on s’affranchit de cette impression première ; on sent se réveiller au fond de son âme, sous les tristesses d’une expérience morose, sous le positivisme et le pessimisme acquis, cet amour des fables et des fictions, ce goût de l’irréel qu’apporte tout homme venant en ce monde. […] Elles diffèrent d’âge, de situation et d’éducation ; il y en a qui meurent, il y en a qui se tuent et d’autres qui tuent ou qui tueraient ; mais, malgré la diversité des dénouements, on a cette impression que la petite comtesse qui meurt après la souillure est la même femme que Julia de Trécœur qui se tue avant ; que Julia est à son tour la même femme que Mme de Campvallon qui demeure triomphante dans son crime, et que Mme de Maurescamp ou Mme d’Hermany, c’est encore Mme de Campvallon. […] Or l’impression que laisse le livre est toute différente.
La Rochefoucauld avait vu les emportements des caractères : ses portraits se sentent des fortes impressions qu’il avait reçues de cette violence. […] Beaucoup de ses traits sont à la fois si frappants et si rapides, que la réflexion qui suit l’impression n’ajouterait pas beaucoup à l’effet produit. […] Quelques-unes nous trouvent si distraits et si occupés des soins de la vie, que leur présence nous donne un plaisir de surprise, ou si incapables d’en retenir l’impression dans nos faibles cerveaux que, comme un air de musique difficile et charmant, nous avons besoin de les rapprendre sans cesse.
Nous ne donnons cette impression que comme un jugement tout personnel ; l’expérience eût peut-être tourné tout autrement avec un éducateur d’un autre sexe. […] L’impression que produit Emmeline Nadaud sur tous ceux qui la voient est des plus vives. […] Elle n’a pas, comme les autres jeunes filles de la campagne, suivi le changement des modes ; elle a gardé son costume et sa coiffure de villageoise ; elle le porte avec une rare distinction ; car voici la silhouette exquise que M. le curé de Château-l’Évêque nous a envoyée d’elle : « Un trait vous fera comprendre l’impression profonde que l’on ressent en voyant Emmeline Nadaud.
Tout autre en eût tiré quelque leçon, ou du moins quelque dégoût et quelque tristesse ; mais la force du naturel et des premières impressions l’emporta. […] L’expression, chez la duchesse du Maine, était égale ni plus ni moins à l’impression ; et l’une et l’autre étaient toujours nettes et vives. […] Sa provision d’idées est faite ; elle rejetterait les vérités les mieux démontrées, et résisterait aux meilleurs raisonnements, s’ils contrariaient les premières impressions qu’elle a reçues.