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1953. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre premier. » pp. 15-203

Nos autres aristarques n’en savent pas plus que celui qui a écrit ce qui suit : « Il est impossible de lire les ouvrages de Sénèque sans se sentir plus indépendant du sort, plus courageux, plus affermi contre la douleur et la mort, plus attaché à ses devoirs, plus éclairé sur ses besoins réels ; enfin, meilleur sous tous les rapports, et surtout plus sensible aux charmes de la vertu. » Un de nos anciens écrivains avait pensé de Sénèque comme le moderne estimable que nous venons de citer. « Pour se résoudre contre les durs et fâcheux événements de la vie, acquiescer doucement à la Providence ; pour mépriser le moment et aspirer à l’immortalité bienheureuse ; pour réprimer l’insolence des passions étranges qui nous emportent souvent haut et bas et pour jouir d’un grand repos parmi tant de tempêtes et naufrages, je ne sache, entre les païens, historien, philosophe, orateur, ni auteur quelconque que je voulusse préférer à Sénèque.

1954. (1883) Le roman naturaliste

Quoi qu’il en soit, ce qui est certain, c’est qu’au cœur même de ce dramatique récit d’Adam Bede, et jeté brusquement, — avec cette parfaite insouciance de l’art de composer qui caractérise trop souvent les Anglais, — on pouvait lire un long manifeste sur la portée duquel il était impossible de se méprendre un seul instant : « Je n’aspire, disait donc l’auteur, qu’à représenter fidèlement les hommes et les choses tels qu’ils se sont reflétés dans mon esprit. […] Un Dodson ne devait point être accusé de négliger quoi que ce soit de bienséant, indiqué par l’exemple des principaux paroissiens et par les traditions de famille, comme l’obéissance aux parents, la fidélité conjugale, le travail, l’honnêteté rigide, l’activité, le nettoyage a fond des ustensiles de bois et de cuivre, la conservation des pièces d’argent menacées de disparaître de la circulation, la production de denrées de premier ordre pour le marché… Les Dodson étaient une race très fière, et leur fierté consistait à rendre impossible toute accusation de manquement aux usages ou aux devoirs traditionnels : orgueil sain, à plusieurs égards, puisqu’il unissait l’honneur à la parfaite intégrité, le vrai travail et la fidélité aux règles admises. » Ce n’est pas George Eliot, c’est moi maintenant qui souligne. […] Et « nos vies sont tellement liées entre elles qu’il est absolument impossible que les fautes des uns ne retombent pas sur les autres ; même la justice fait ses victimes ; et nous ne pouvons concevoir aucun châtiment qui ne s’étende en ondulations de souffrances imméritées bien au-delà du but qu’il a touché ».

1955. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre II. Les Normands. » pp. 72-164

Ce sont bientôt des voyages impossibles, des défis extravagants qu’ils veulent voir, un tapage de combats, un entassement de magnificences, un imbroglio de hasards ; de l’histoire intérieure, nul souci : ils ne s’intéressent pas aux événements du cœur, c’est le dehors qui les attache ; ils demeurent comme des enfants les yeux fixés sur un défilé d’images coloriées et grossies et, faute de pensée, ne sentent pas qu’ils n’ont rien appris.

1956. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

Impossible de voir ensemble plus de coquinerie morale et de correction littéraire.

1957. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1889 » pp. 3-111

Enfin il arrive à un anéantissement complet, confessant que l’opium donne une certaine hilarité au bout d’un petit nombre de pipes, mais que passé cela, la fumerie amène un vide, accompagné d’une tristesse, d’une tristesse impossible à concevoir.

1958. (1896) Les époques du théâtre français (1636-1850) (2e éd.)

Mais, après cela, si dans l’École des femmes la peinture ou la représentation des caractères n’est pas ce qu’elle sera bientôt, on l’y trouve pourtant, il est impossible de l’y méconnaître ; et ceci, je le répète, même par rapport au Menteur, est nouveau. […] tous ces traits sont respectivement disposés de la même manière, — le nez au-dessus de la bouche et le front au-dessus du nez ; — et cependant, de tant de visages, il n’y en a pas un qui n’ait sa physionomie, bien à lui, partout reconnaissable, facile à distinguer, impossible à confondre89.

1959. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre II. Le théâtre. » pp. 2-96

Impossible de rencontrer une femme plus raisonnable et plus raisonneuse.

1960. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre I. Les idées et les œuvres. » pp. 234-333

« Such being our chief scene, the date of our story refers to a period towards the end of the reign of Richard I, when his return from his long captivity had become an event rather wished than hoped for by his despairing subjects, who were in the mean time subjected to every species of subordinate oppression. » — Impossible d’écrire plus lourdement.

1961. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Conduite de l’action dramatique. » pp. 110-232

Le caractère de Messala, développant tout à coup tant de courage, d’audace et d’adresse, achève de justifier, pour ainsi dire, Titus aux yeux des spectateurs : on sent qu’assiégé par un tel homme, il est impossible qu’il ne succombe pas.

1962. (1888) Portraits de maîtres

Ce fut un triomphe que cette publication de Jocelyn, et, si le retentissement s’en est affaibli à distance, la victoire n’en demeure pas moins bien et dûment gagnée ; car, pour qui lit sans parti-pris cette œuvre captivante et frémissante à la fois, cette œuvre sentie, vécue, pensée dans la plénitude de ces termes, il est impossible de ne pas être comme ravi par une continuité d’admiration. […] Il est impossible de parler de sang-froid de ces hommes qui dans leur vie ont atteint aux sublimes pensées.

1963. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

., sans aller si loin, il nous a été impossible de ne pas saisir du moins l’application d’un trait plus innocent : « Personne ne sait mieux que moi, dit en un endroit Mme de Vernon (lettre xxviii, 1re partie), faire usage de l’indolence ; elle me sert à déjouer naturellement l’activité des autres… Je ne me suis pas donné la peine de vouloir quatre fois en ma vie, mais quand j’ai tant fait que de prendre cette fatigue, rien ne me détourne de mon but, et je l’atteins ; comptez-y. » Je voyais naturellement dans cette phrase un trait applicable à l’indolence habile du personnage tant prôné, lorsqu’un soir j’entendis un diplomate spirituel, à qui l’on demandait s’il se rendait bientôt à son poste, répondre qu’il ne se pressait pas, qu’il attendait : « J’étais bien jeune encore, ajouta-t-il, quand M. de Talleyrand m’a dit, comme instruction essentielle de conduite : N’ayez pas de zèle ! 

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