Les idées y sont présentées sous la forme de propositions ; chaque proposition a un nombre proportionné de preuves. […] De ses exercices de professeur, il avait retenu, outre les formules de la démonstration, l’habitude de donner aux idées une valeur absolue. […] Il ne tire du sujet que des idées importantes ; aucune qui soit de trop, ou qui n’ait avec l’objet du sermon le rapport du chemin au lieu où l’on va. […] Cette incertitude du premier dessein se fait sentir dans l’exécution ; souvent les idées s’y pressent plutôt qu’elles ne se suivent. […] La phrase y affecte presque exclusivement la forme d’une période dont les membres se font équilibre, quelquefois par le poids des idées, trop souvent par le nombre et le son des mots.
Ces drames sont des organismes qui se tiennent dans toutes leurs parties, depuis l’idée générale, presque abstraite, jusqu’au plus infime détail d’exécution matérielle. […] Dans beaucoup de phrases la suite des idées devra être identique, aucune inversion n’est admissible ; dans d’autres il faudra, coûte que coûte, que le mot vienne se placer sous le mot. […] Ce motif évoque l’idée de Grâce efficiente du Gral, il se matérialise dans la lance et le calice, et il manifeste aussi parfois la mission de Parsifal. […] Il touche à toutes les idées de souffrance et de salut, de blessure et de guérison, à tout ce qui est douloureux dans le drame. […] Le commencement, ressemblant à 42, évoque l’idée de sa grande et forte jeunesse.
On resterait des heures à l’entendre battre et remuer des idées, souvent paradoxales, mais qui ne sont jamais les idées courantes et prostituées. […] « L’épreuve, finit-il par dire, est votre pensée éclairée… » Et il se demande comment, sans cette inspiration matérielle, manuelle de l’écriture, les anciens pouvaient suivre une idée dans toutes ses rédactions, — lui, qui ne peut raisonner qu’avec la plume. […] Cette tristesse, Michelet l’attribue à la complexité des idées modernes, à l’embarras du choix entre tant de voies nouvelles de l’esprit, au tiraillement des études en sens divers, et, pour ainsi dire, à la multiplication des horizons autour de notre cerveau : « Moi, par exemple, ajoute-t-il, vers les trente ans, j’avais d’horribles migraines. […] Nous ne nous disons rien, mais nous sentons parfaitement les idées qui nous travaillent, et que nous nous cachons. […] » 27 mai C’est après le dîner que l’homme a le plus d’idées.
L’amputé ramasse son nez dans le ruisseau, et a l’idée de monter chez un médecin-dentiste demeurant en face, nommé Carnajou, qui lui recoud à tout hasard, le nez avec du fil. […] Je la vois encore quelques heures avant sa mort, à l’hospice Dubois, sachant qu’elle allait mourir, et préoccupée seulement de l’idée, que la visite que ma mère lui faisait, allait la faire dîner une demi-heure plus tard. […] Longue attente, dans ce roulement de voitures du boulevard Saint-Germain, dans ce bruit et cette trépidation de la vie parisienne, pendant laquelle vous vous demandez, si bientôt quelques mots, quelques paroles de l’homme qui est derrière la porte, ne vont pas, tout à coup, éveiller chez vous l’idée du silence éternel. […] Et il nous conte, que tout jeunet, à l’isthme de Panama, naviguant sur la rivière, dans une étroite barque, et que le moindre mouvement pouvait faire chavirer, naviguant couché au fond de la barque, sa boîte à violon entre ses bras, soudain, en ce grand paysage, il lui avait pris une idée de préluder ; mais au bout de quelques accords, ne voilà-t-il pas que les quatre sauvages qui menaient la barque, pris d’une exaltation furieuse, voulaient jeter à l’eau le sorcier. […] Il aimait beaucoup sa mère, et quand sa mère vint à mourir, il eut l’idée de forger, pour mettre sur sa tombe, un petit saule pleureur.
Ceci prouve combien il est important que les idées physiologiques qu’on a, soient aussi saines que possible. […] Chez les Mammifères, les éléments anatomiques sont confondus et mélangés. — Idée générale de la structure du foie chez les Mammifères. […] On s’est fait pendant longtemps une très fausse idée de ce qu’est un organe sécréteur. […] Ce ne sont pas des hommes qui sont en présence, ce sont des idées d’une part, et des faits de l’autre. […] Dans cette méthode, on part d’une idée préconçue, sur la manière suivant laquelle doit s’opérer un certain ordre de phénomènes, puis on fait des expériences, non pas pour vérifier cette idée, mais pour la confirmer.
Froissart a de bonne heure son idéal : les grands romans de chevalerie, les grands exploits des siècles précédents, qui se renouvellent dans ce siècle, ont mis en circulation une certaine idée d’honneur et de courtoisie ; il en est épris ; elle a relui sur son berceau, et toute sa vie sera consacrée à en retracer et à en perpétuer par écrit l’image. […] Pour prendre idée du zèle et du sentiment que Froissart apportait à la confection de son œuvre, il faut lire les diverses préfaces et les passages où il s’en exprime avec effusion. […] Dans les idées du temps cela ne déshonorait en aucune façon, tant s’en faut ; et l’idéal de Froissart (car il en avait un) était précisément cette sorte de confrérie, de confraternité universelle, commune à tout ce qui était noble et vaillant, qui comptait dans ses rangs toute fleur de chevalerie, et qui savait couronner le vainqueur en respectant, en relevant honorablement le vaincu. […] Claverhouse en convient : il insiste sur son idée en la poussant cruellement à bout ; il l’exprime en des termes énergiques que nul, certes, n’a oubliés, distinguant entre le sang et le sang, entre celui « des braves soldats, des gentilshommes loyaux, des prélats vertueux, et la liqueur rouge, dit-il, qui coule dans les veines de manants grossiers, d’obscurs démagogues, de misérables psalmodieurs… ».
Quant à Montluc, après avoir fait jusqu’au bout son office de chef, il eut l’idée de finir la journée par un de ces coups imprévus et d’aventure qui lui plaisaient : il s’était mis en tête qu’il ferait prisonnier ce jour-là un ennemi de haut rang et d’autorité, le général en chef, par exemple, le marquis du Guast en personne, pourquoi pas ? […] Sur cette idée un peu folle, ainsi qu’il l’appelle, il avait donné ordre à un sien valet de lui tenir son cheval turc prêt à monter derrière le bataillon ; mais une fugue du valet mit du retard à l’entreprise, et Montlue, après un temps de galop, vit qu’il lui fallait renoncer à ce supplément d’honneur et de gain. […] Montluc, au désespoir et dans son irritation, eut d’abord l’idée de désobéir, de se dérober le soir même du lendemain, de crever les chevaux et de se rompre le cou plutôt que de ne pas apporter lui-même le premier la nouvelle. […] L’idée et la doctrine de Montluc, tout gentilhomme qu’il est, c’est que tout ce qui sert à la guerre, tout ce qui est utile et commandé par les besoins de l’armée, travail de main de quelque genre que ce soit, ne peut faire tache au guerrier et ne peut que procurer honneur aux capitaines et aux princes comme aux soldats.
Villehardouin ne nous a transmis qu’une faible idée des discours qu’il prononçait devant les Vénitiens ou dans l’armée des croisés pour servir la cause commune et apaiser les différents. […] Deux lettres écrites vers ce temps à l’un de ses plus fidèles serviteurs et compagnons d’armes, M. de Batz, donnent idée de tout ce qu’il y a d’alerte, de gai, de familier dans sa manière : Monsieur de Batz, ils m’ont entouré comme la bête, et croient qu’on me prend aux filets. […] Il ne rencontra rien de cela dans Marie de Médicis ; il croyait l’avoir trouvé ou à peu près dans Gabrielle, qui n’était digne d’un tel choix et d’une telle idée qu’à demi ; il l’aurait moins bien trouvé chez la noble Corisandre, dont la beauté un peu fière se fanait déjà, et dont l’esprit tournait à l’aigre et au bizarre. […] Et toutefois, malgré l’impression de ce tort final, malgré ce désagréable affront que le temps avait fait à son visage, la belle Corisandre, comme on l’appelle encore ; cette aïeule du chevalier de Grammont, revue à son jour, nous laisse l’idée d’une amie dévouée, vaillante, romanesque ; elle fut bien la maîtresse qu’on se figure au roi de Navarre en Guyenne pendant les luttes de son laborieux apprentissage, l’aidant de son zèle, de ses deniers, de la personne de ses serviteurs ; elle fut à la peine et ne put atteindre jusqu’au jour du triomphe : une autre hérita facilement de son bonheur.
Émile Chasles, qui, fort jeune, soutient par des travaux solides et avec une application suivie un nom brillant dans les lettres, se trouvant il y a peu d’années professeur à Mâcon, eut l’idée de rassembler tout ce qu’il pourrait recueillir sur le poète de cette province le plus célèbre avant M. de Lamartine. […] Poli, doué, à ce qu’il semble, des avantages extérieurs et d’un grand esprit de sociabilité, aimant à se répandre, à voir, à savoir, à observer, et se plaisant à verser chaque matin sur une idée aisément éclose un courant de versification facile, il était heureux et si bien dans son élément, que le dégoût ne lui serait point venu. […] Il s’en plaint sans cesse, il y revient en idée, il renoue et entretient tant qu’il peut des relations de compliments et de louanges avec les grands noms qu’il a connus. […] J’ai emprunté la plupart des détails qu’on vient de lire, et même des idées, à sa notice fort complète.
Il en fait assez pour que l’on consente à entendre à une paix générale : « Je fis savoir à la Cour (c’est-à-dire au quartier du roi) que je mourrais gaiement, avec la plupart de tout le parti, plutôt que de n’obtenir une paix générale ; qu’il était dangereux d’ôter tout espoir de salut à des personnes qui ont les armes à la main ; que je ne la traiterais jamais tout seul… » Le roi écoutait les propositions avec plaisir ; mais le cardinal confesse, dans ses mémoires, avoir fort hésité à cette heure sur ce qu’il conseillerait à son maître : tout lui disait qu’on allait avoir raison des rebelles et de leur chef par la force, ce qui était fort de son goût, et qu’ils seraient réduits, après un prochain échec infaillible, à demander merci : la prudence toutefois l’emportant sur l’humeur, et cette idée que Rohan dans sa proposition de paix cette fois était sincère, lui firent conseiller de traiter. […] Richelieu, tout vif qu’il est sur la religion, montre qu’il n’était pas loin de l’entendre ainsi en idée ; mais, de part et d’autre, qu’on était neuf pour ce nouvel état ! […] Dans la relation envoyée au roi, M. de Rohan fit généreusement honneur à Montausier de l’idée du combat. […] Quoique souvent maltraité par le sort et n’ayant mené finalement à bien aucune de ses entreprises, il a laissé de lui une idée considérable.
Mais que de précautions, que de compliments et de flatteries avant de risquer l’idée nouvelle qui lui est venue un matin, et qu’elle voudrait, de loin, insinuer et suggérer à ceux de qui le succès et, comme nous dirions aujourd’hui, la réalisation dépend. […] La maréchale de Noailles, en effet, n’avait pas moins de onze filles sur vingt et un enfants ; il y avait de quoi l’allécher que de lui montrer de grands partis, et sous air de railler on venait de glisser une sorte de promesse. — C’est dans ces termes habiles et modestes que Mme des Ursins présente d’abord son idée, sa vue. […] Car ses idées à elle ne sont pas, un seul instant, à l’état de rêves et de chimères ; elles prennent forme aussitôt et consistance, et ont, en naissant, de quoi faire leur chemin. […] Je soumets cette idée à votre prudence, et, si elle vous paraît juste, vous la tournerez comme il vous plaira, car vous êtes plus habile que moi.