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1828. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 11-15754

Heureux à la guerre. […] Je me promene tout autour de cette ville de guerre, que je vois enfermée dans ses remparts : j’apperçois cette campagne bornée d’un côté par une riviere & d’un autre par une forêt : je vois ce tableau enfermé dans son cadre, dont je puis même mesurer l’étendue & dont je vois les bornes : je mets sur ma table un livre, un écu ; je vois qu’ils n’occupent qu’une petite étendue de ma table ; que ma table même ne remplit qu’un petit espace de ma chambre, & que ma chambre est renfermée par des murailles : enfin tout corps me paroît borné par d’autres corps, & je vois une étendue au-delà. […] Fait-on la guerre, je ne dis pas comme on la faisoit du tems d’Alexandre, mais comme on la faisoit du tems même d’Henri IV ? […] On donne ordinairement pour exemple d’une amphibologie, la réponse que fit l’oracle à Pyrrhus, lorsque ce Prince l’alla consulter sur l’évenement de la guerre qu’il vouloit faire aux Romains : Aio te, AEacida, Romanos vincere posse. […] Après les fureurs de la guerre, Goûtons les douceurs de la paix.

1829. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

La poésie anglaise, qui, durant la guerre du continent, n’avait pu assister à ce congrès permanent de la pensée dont Coppet fut le séjour, y parut en 1816, représentée par Lewis et par Byron. […] Un poëte anglais moraliste, et qui, tour à tour aimable ou austère, s’est parfois montré sévère pour la France jusqu’à l’injustice, William Cowper n’a pourtant pas tout à fait tort quand il définit quelque part les Français (à l’occasion de la guerre d’Amérique), ce peuple à l’humeur inquiète et ingérante (meddling), qui se mêle de tout, — qui se mêle du moins de bien des choses.

1830. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff » pp. 237-315

Quand ils ont fini ou accompli à demi leurs migrations mystérieuses des confins de l’Orient aux confins de l’Europe ; quand ils ont conquis un vaste territoire inhabité ou presque désert, qu’ils s’y sont établis avec leurs hordes populeuses, leurs mœurs traditionnelles et leurs facultés de croissance gigantesques et presque indéfinies ; quand ils se sont fait place par le premier génie des nations, le génie sauvage de la guerre, accompagné du génie de l’unité ou de l’ordre, sous des chefs absolus ; quand ils commencent à jouir de l’agriculture, de l’aisance, du loisir, ils se civilisent, ils se policent, ils songent par instinct à se procurer les douceurs et les gloires de l’existence. […] La guerre ne secondant pas alors son ambition et son ardeur militaire, il franchit l’Allemagne et vint à Paris pour y soigner l’éducation d’une jeune enfant qu’il appelle sa fille.

1831. (1868) Curiosités esthétiques « II. Salon de 1846 » pp. 77-198

Cette immense popularité, qui ne durera d’ailleurs pas plus longtemps que la guerre, et qui diminuera à mesure que les peuples se feront d’autres joies, — cette popularité, dis-je, cette vox populi, vox Dei, est pour moi une oppression. […] Cependant il n’est pas imprudent d’être brutal et d’aller droit au fait, quand à chaque phrase le je couvre un nous, nous immense, nous silencieux et invisible, — nous, toute une génération nouvelle, ennemie de la guerre et des sottises nationales ; une génération pleine de santé, parce qu’elle est jeune, et qui pousse déjà à la queue, coudoie et fait ses trous, — sérieuse, railleuse et menaçante22 !

1832. (1923) Paul Valéry

Il a donné en 1897 sous ce titre, la Conquête allemande, un article fort curieux, qu’on a pu rééditer pendant la guerre, et où il ajoutait un pendant sociologique à l’épure psychologique de son Vinci. […] Notons qu’il revint à l’art de vers, qu’il se retrouva poète (et poète autrement entier que dans les essais de ses vers anciens) pendant l’année la plus sombre de la guerre, lorsque l’âme pure de l’humanité se trouvait comme forcée à une invention désespérée, à un alibi autonome et créateur.

1833. (1900) Quarante ans de théâtre. [II]. Molière et la comédie classique pp. 3-392

Toutes les locutions et toutes les métaphores tirées du jeu ont été nobles au siècle de Louis XIV, comme celles qui venaient de la chasse, de la guerre et de l’écurie. […] La petite guerre s’engage donc tout de suite entre eux deux, et selon le mode usité en pareille circonstance. […] Voilà la guerre allumée. […] La guerre m’a défait d’un frère, heureusement. […] La guerre me ferait d’ailleurs assez d’envie, Si des gens bien versés en l’art d’astrologie Ne m’avaient assuré que je vivrais cent ans.

1834. (1889) La littérature de Tout à l’heure pp. -383

Le comte Léon Tolstoï, l’admirable écrivain de Guerre et paix, obéissant à l’esprit évangélique qui fait de lui une sorte d’apôtre libre ou de sacerdotal éducateur des moujiks, écrivit pour eux, dans leur langue, ce noir drame. […] Encore sera-ce désormais une vie en guerre, et d’ailleurs les heures ont été brèves de la douce beauté chrétienne. […] C’est ainsi que les grandes convulsions, guerres ou révolutions, stérilisantes dans l’immédiat, fécondent le tout proche avenir, achèvent de pousser dans l’oubli telles règles ou telles modes qui menaçaient de perpétuer leur désuétude : la Grande Révolution porte le coup suprême au Classicisme qui se survivait languissamment dans un épuisement abominable, incapable de produire œuvre de vie et fertile seulement en monstruosités. […] — La menace perpétuelle d’une guerre ; les cruelles taquineries du militarisme universel et l’obligation de s’interrompre entre deux hémistiches pour aller « accomplir une période de vingt-huit jours d’instruction militaire » ; les agitations de la rue : le grincement de la machine gouvernementale — journaux, élections, changements de ministères — n’a jamais fait tant de bruit ; l’autocratie turbulente et bruyante du commerce a supprimé, dans les préoccupations publiques, la préoccupation de la Beauté, et l’industrie99 a tué ce que la politique laisserait subsister de silence. […] Au commencement toutefois, aux temps préhistoriques où paraissait une petite feuille littéraire qui s’appela d’abord La Nouvelle Rive Gauche, puis Lutèce, les Décadents — car ils étaient alors tout près d’accepter pour leur ce nom de guerre — firent un semblant de groupe et un semblant de manifestation publique.

1835. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Ainsi Hébal, décrivant en deux traits la guerre du Péloponèse, montre Sparte essayant de stéréotyper la civilisation héroïque.

1836. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DE LA MÉDÉE D’APOLLONIUS. » pp. 359-406

Pétrone, parlant d’un poëme de la Guerre civile, en esquisse largement la poétique en ces termes : « Il ne s’agit pas, dit-il, de comprendre en vers tout le récit des faits, les historiens y réussiront beaucoup mieux ; mais il faut, par de merveilleux détours, par l’emploi des divinités, et moyennant tout un torrent de fables heureuses, que le libre génie du poëte se fasse jour et se précipite de manière qu’on sente partout le souffle sacré, et nullement le scrupule d’un circonspect récit qui ne marche qu’à couvert des témoignages102. » On se ressouvient involontairement de cette recommandation en lisant les Argonautes ; non certes que les fables et les prodiges y fassent défaut : ils sortent de terre à chaque pas ; mais ici ces fables et ces prodiges sont, en quelque sorte, la suite des faits mêmes, et il ne s’y rencontre aucune machine supérieure, aucune invention dominante et imprévue, pour donner au poëme son tour, son impulsion, sa composition particulière.

1837. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Ampère »

Lacuée de Cessac, président de la section de la guerre, nomma en vendémiaire an XIII (1804) M. 

1838. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre III. Services locaux que doivent les privilégiés. »

. — Lettre du bailli de Mirabeau du 25 août 1770. « Cet ordre féodal n’était que fort, et ils l’ont appelé barbare, parce que la France, qui avait les vices de la force, n’a plus que ceux de la faiblesse et que le troupeau, qui était autrefois dévoré par les loups, l’est aujourd’hui par les poux… Trois ou quatre coups de pied ou de bâton ne nuisent pas tant à la famille d’un pauvre homme, ni à lui-même, que six rôles d’écritures qui le dévorent. » — « La noblesse, disait déjà Saint-Simon, est devenue un autre peuple qui n’a d’autre choix que de croupir dans une mortelle et ruineuse oisiveté qui la rend à charge et méprisée, ou d’aller se faire tuer à la guerre à travers les insultes des commis, des secrétaires d’État et des secrétaires des intendants. » Voilà les réclamations des âmes féodales  Tous les détails qui suivent sont tirés de Saint-Simon, Dangeau, Luynes, Argenson et autres historiens de la cour.

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