Mme Necker, née loin de Paris, arrivant de la Suisse française dont elle était l’honneur, n’eût rien tant désiré que de rencontrer à Paris un salon exactement pareil à celui de Mme de Lambert, c’est-à-dire où l’esprit trouvât son compte et où rien de respectable ne fût blessé. […] D’Argenson ajoute qu’elle l’avait voulu persuader de se mettre sur les rangs pour l’Académie française. […] Il est certain qu’elle a bien fait la moitié de nos académiciens actuels. » Cette influence des salons sur l’Académie française, et l’importance que reprend cette compagnie, sont un des caractères propres qui signalent l’avènement du xviiie siècle. L’Académie française n’eut pas, en effet, une importance égale dans tous les moments de son existence. […] Mais, trente ans environ après sa fondation, lorsqu’une jeune et hardie littérature se fut produite sous Louis XIV, que les Boileau et les Racine, les Molière et les La Fontaine eurent véritablement régénéré les lettres françaises et la poésie, l’Académie se trouva un peu arriérée et surannée, et elle resta telle, plus ou moins, durant les trente-cinq dernières années du siècle.
Au moment où s’ouvrit la campagne contre la France, le maréchal n’admit pas un seul instant qu’un corps français pût faire partie de l’armée anglaise et associer son drapeau à celui de l’étranger : lui-même il quitta Gand et alla à Aix-la-Chapelle, d’où il partit pour rejoindre le roi à Mons, lors de la seconde rentrée. […] La société française, en juillet 1830, était dans une situation d’esprit telle que la traiter comme on l’a fait, avec ce mélange de témérité et de légèreté, avec cette absence de connaissance et de crainte, était de la folie. […] Ce ne saurait être un récit détaillé que je présente ici, et il n’y a que deux points qu’il importerait de constater : 1º Que, comme militaire, le maréchal usa avec force et habileté de tous les moyens incomplets qu’il put réunir ; 2º Que, comme Français et comme homme, il accueillit, il invoqua jusqu’à la dernière heure tous les moyens de conciliation qui étaient en son pouvoir. […] Laffitte, celui même qui avait parlé si vivement pour les Bourbons le soir du 30 mars 1814 dans le salon du maréchal, rue Paradis-Poissonnière, s’adressant à lui encore, lui dit : « Monsieur le maréchal, nous venons nous adresser à un général qui a le cœur français, pour lui demander de faire cesser l’effusion du sang. » Le maréchal répondit qu’il était prêta arrêter le feu des troupes si les hostilités cessaient du côté des habitants. […] Ce prince bienveillant et faible, et qui appréciait avec cœur des services dont il n’avait pas su profiter, lui fit cadeau de l’épée qu’il portait, en lui disant : « Monsieur le maréchal, je vous remets, en témoignage de haute estime, l’épée que je portais quand je voyais les troupes françaises. » Parole qui fait sourire, mais qui est touchante d’intention dans sa modestie même et sa faiblesse.
Pendant l’année 1792, Volney, je l’ai dit, tenta en Corse une entreprise industrielle et coloniale ; il allait y chercher la paix agricole, il y rencontra des discordes, des haines et des guerres domestiques, exaspérées encore par le contrecoup de la Révolution française et fomentées par les intrigues de Paoli. […] Volney, ami de Jefferson et de l’école de Franklin, se trouva avoir contre lui John Adams, élu président en 1797 ; on le rendit suspect comme Français, comme agent supposé du Directoire ; et, dans le même temps, un savant chimiste qui se mêlait ardemment de théologie, le Priestley, le dénonçait, pour le livre des Ruines, comme coupable d’incrédulité. […] Il y donne de curieux renseignements sur la colonie française de Gallipolis et sur une autre dite du Poste-Vincennes : la différence de caractère du colon américain et du colon français y est tracée d’une manière frappante et sévère, et dans deux portraits caractéristiques qui seraient dignes d’Aristote. […] Le trait distinctif du colon français qui, jusque sur les confins du désert, sent le besoin de voisiner et de causer, y est vivement saisi : « En plusieurs endroits, ayant demandé à quelle distance était le colon le plus écarté : Il est dans le désert, me répondait-on, avec les ours, à une lieue de toute habitation, sans avoir personne avec qui causer. » Il y a aussi dans les Éclaircissements un chapitre curieux sur les sauvages ; en nous décrivant leurs mœurs et leurs habitudes, Volney ne perd pas l’occasion de revenir à la charge contre Rousseau et contre son paradoxe de parti pris en faveur de la vie de nature ; il donne la preuve de ce parti pris par des anecdotes qu’il savait d’original, et notamment par celle de la fameuse conversation de Jean-Jacques avec Diderot à Vincennes : « Et cet homme aujourd’hui, ajoute-t-il, trouve des sectateurs tellement voisins du fanatisme, qu’ils enverraient volontiers à Vincennes ceux qui n’admirent pas Les Confessions ! […] L’attention d’écrire les mots anglais avec la prononciation française en est certainement une bien caractérisée.
Il faisait beau ; le ciel était pur sur la douce campagne française, son lent fleuve, sa fière forêt. […] Lamartine tient une place considérable dans la poésie française et dans celle de son époque. […] De là, sans doute, l’attrait qu’a pour le Français le divertissement de la querelle littéraire. […] Sa grâce française se mélange de grâce italienne. […] Ils vous coûtèrent un siège à l’Académie Française.
Elles étaient dans la saine tradition française et je dirai dans la saine tradition de la paroisse française. […] Mais en français, c’est surtout ne pas endurer. […] Rien qui ne soit français et chevaleresque. […] C’est-à-dire le vrai héroïsme militaire français. […] Il faut que ces infidèles aient une certaine image de ce que c’est qu’un baron français et de ce que c’est que la parole d’un baron français.
Ce serait plutôt un mariage de l’âme anglaise et de l’esprit français. […] Charles Maurras a fait un livre intitulé : Quand les Français ne s’aimaient pas. […] Le génie latin, c’est le génie français qui le préserve. […] Or, disait-il aux Français, qu’attendez-vous ? […] Rondeau écrit une histoire de la littérature française.
Elle a donc eu lieu cette séance tant attendue, tant désirée, et qui devait être la plus curieuse de toutes les fêtes que l’Académie française a offertes jusqu’ici à son brillant public : car c’est proprement un bal de beaux esprits qu’une séance de réception. […] L’ancienne Académie française qui compta toujours un si grand nombre d’abbés, d’évêques, de cardinaux, la fleur du clergé séculier, n’aurait jamais songé à choisir un religieux proprement dit, un homme voué à la retraite, enchaîné par des vœux étroits, eut-il été un foudre d’éloquence. […] Ç’a été pour lui une occasion naturelle de rendre hommage à la civilisation moderne et à cette société française qui a du bon et qui n’est pas uniquement, comme on venait de le dire, « une statue de Nabuchodonosor ». — Il a parfaitement défini le genre d’éloquence mi-partie tribunitienne et religieuse du père Lacordaire, cette éloquence de laquelle M. de Lamennais disait, comme de celle de M. de Montalembert : « Ce sont là pourtant des œufs que nous avons couvés !
Louis XIV entoura donc son petit-fils de conseils ; lui-même il traça de sa main les règles qu’il crut les plus sages ; il composa la cour d’Espagne avec choix ; l’ambassadeur à Madrid, le duc d’Harcourt, fut en réalité le gouverneur du jeune roi, et la jeune reine reçut pour gouvernante, à titre de dame d’honneur, une Française célèbre par sa naissance et son mérite, Anne-Marie de la Trémoïlle, veuve du prince de Chalais, et depuis mariée en Italie à Flavio, prince des Ursins. […] Mais les choses ne se passèrent pas si bien ; les Français outrepassèrent leurs pouvoirs, les Espagnols s’irritèrent de leur insolence ; les ambassadeurs, c’est-à-dire les ministres, se succédèrent rapidement : Marsin, le cardinal et l’abbé d’Estrées, le duc de Grammont, furent l’un après l’autre nommés (1701-1705), et aucun ne contenta. […] Accablée de dettes elle-même, « en vérité, disait-elle encore, je croirais voler sur l’autel si je recevais du roi d’Espagne. » Qu’on ne l’accuse pourtant pas d’être meilleure Espagnole que Française ; elle vous répondra « qu’elle n’oublie pas sa nation, mais qu’elle a horreur de la voir avilir ; elle aime la France, mais comme une bonne mère fait de sa fille, qui ne la flatte pas sur ses défauts. » Aussi, tout en s’apitoyant de fort bonne grâce sur ce pauvre M. de Villeroy et sur ce bon M.
On essaie d’abord de comprendre, ce qui, pour nous autres, Français de France, est toujours la première démarche de notre esprit, jusqu’à ce qu’on ait compris qu’il n’y a rien à comprendre et qu’il faut plutôt se laisser bercer par une mélodie qui n’est pas sans charme. […] Vielé-Griffin n’a usé que discrètement de la poésie populaire — cette poésie de si peu d’art qu’elle semble incréée — mais il eût été moins discret qu’il n’en eût pas mésusé, car il en a le sentiment, et le respect… Je ne parle pas de la part très importante qu’il a eue dans la difficile conquête du vers libre ; mon impression est plus générale et plus profonde, et doit s’entendre non seulement de la forme, mais de l’essence de son art : il y a, par Francis Vielé-Griffin, quelque chose de nouveau dans la poésie française. […] Certainement, ce solide esprit eut été un de nos plus grands chantres français s’il fût né, par un long soir d’été, sur une des rives de cette Loire qu’il chérit et où il fait son plus habituel séjour.
Si l’on a bien dans la mémoire l’ensemble des œuvres du comique français, on discerne sans peine l’élément important que lui a transmis la double veine, littéraire et populaire, de l’art italien ; élément important, non par le fonds des idées satiriques et morales, mais par l’abondance des moyens d’expression ; élément en quelque sorte matériel, artificiel, mis à la disposition du grand ouvrier. […] Mais ce n’est pas, à notre avis, dans cette sorte de caput mortuum qu’il faut découvrir et signaler le service le plus important que les Italiens rendirent au chef de l’école française. […] Rathery a comparé le début du fameux monologue d’Argan, le malade imaginaire, à l’entrée en matière de la farce du Français logé à l’hôtellerie du Lombard63 : Chinque per chinque, vinte chinque ; Sey per sey, trenta e sey ; Septe per septe, quaranta e nove ; Octo per octo, sexenta e quatre… Ho guadagnato in octo mesi Solamente à logiar Francesi A centanara de fiorini.
On commence à reconnaître quelques symptômes d’excellent français ; on signale même quelques liaisons dans les phrases. » Qu’on ne prenne pas cet article pour une fantaisie. […] En voyant revenir les épreuves si diaboliquement chargées de corrections, plus d’un compositeur d’imprimerie dut regretter le temps où ses devanciers portaient l’épée : avec plus de raison que Vatel, un typographe eût pu se transpercer de part en part en jetant un coup d’œil inquiet sur des hiéroglyphes qui n’appartenaient pas plus au mantchou qu’au français. […] Gloriole d’enfant, orgueil considérable, inquiétudes plus considérables encore sur la durée de son œuvre et l’enveloppe d’un style qui ne lui semblait pas assez résistante pour traverser victorieusement les modes de la langue française, me paraissent former le véritable fonds de Balzac écrivain.