Vera s’est dévoué et l’a traduit en français avec un grand talent ; eh bien, il a été accusé par un autre traducteur, — un traducteur russe de ce grand homme, à ce qu’il paraît intraduisible, — de l’avoir singulièrement défiguré et très peu compris. […] Les étrangers qui ont traduit Descartes n’ont jamais été accusés par les philosophes français de ne l’avoir pas compris, ni, en Angleterre, ceux qui ont traduit Locke non plus. […] Ribot, le vulgarisateur de Schopenhauer, prétend qu’il y avait, en cet Allemand, du Français, de l’Anglais et de l’Indou, et il est heureux que, dans cette complexité de natures, ce soit le Français qui ait dominé. […] Car il avait lu Chamfort, ce quart de Français. […] Ce que nous aurions voulu, c’est le chamfortiste sur les femmes, sur l’amour, sur la vie réelle, sur le monde, le moraliste plutôt que le métaphysicien, le Français plutôt que l’Allemand, et surtout l’Allemand livré à ses arabesques métaphysiques, aussi vaines que celles du bâton d’un fou dans les airs !
Il n’a jamais pris pour lui le mot insolent et cruel, trop accepté, comme tant de mots : « Les Français n’ont pas la tête épique. » Lui, il a toujours cru qu’il l’avait. […] Quinet n’est pas Français. C’est un Allemand, né en France, dont l’érudition est allemande, la science allemande, et qui a la naïveté allemande de croire nous donner des poèmes épiques en français. […] Il s’est un instant reposé de l’éjaculation des Épopées, dont il est le volcan, en nous racontant l’histoire des Épopées françaises qui n’étaient pas les siennes. […] Edgar Quinet a brouillé, avec son Merlin, jusqu’au sens droit, si net, si français, si moqueur, de M.
Après avoir savouré les détails de son livre, qui sont jolis souvent et parfois touchants, après avoir admiré l’adresse et la délicatesse de touche avec laquelle l’auteur, qui est l’amant de son histoire, sauve sa maîtresse de la vileté ordinaire aux femmes comme elle, — car, il faut bien le dire, Louise est de la race aux camélias, dont on abuse vraiment trop dans les romans et au théâtre, et qui fera, si on continue, appeler la littérature française du xixe siècle la littérature des filles entretenues, — on est tout étonné de cette rupture peu intelligible qui vient brusquement clore le livre, et on voudrait se l’expliquer. […] Jean Gigon, né avec le siècle, trouvé sur le versant français des Pyrénées par deux gendarmes, dont l’un son parrain, et l’autre sa marraine, lui donnent, l’un son prénom et l’autre son nom de famille, et lui constituent ce nom de Jean Gigon, si fameux — mais seulement fameux là ! […] Il est tout entier dans la figure de Jean Gigon, type du soldat français en ces dernières années12, et qui n’est plus du tout, quoiqu’il y ait identité de cette bravoure qui est venue des Gaulois à nous et qui s’appelle la furie française, qui n’est plus du tout la figure connue des soldats français des autres temps. […] Quel est donc le secret de cette physionomie étrange pour un homme d’autant d’acier que son sabre, innocent, héroïque, détaché de la vie comme d’une garnison où il n’y a pas d’adieux à faire, et qui, malgré son historien, moins naïf que lui à coup sûr, n’a cependant pas la gaîté, — la gaîté si connue et si légendaire du soldat français ?
Dans le Palais du Gin, à côté des mésaventures innombrables et des accidents grotesques dont est semée la vie et la route des ivrognes, on trouve des cas terribles qui sont peu comiques à notre point de vue français : presque toujours des cas de mort violente. […] Mais que dire de ces plagiaires français modernes, impertinents jusqu’à prendre non seulement des sujets et des canevas, mais même la manière et le style ? […] Goya n’est précisément rien de spécial, de particulier, ni comique absolu, ni comique purement significatif, à la manière française. […] Au total, c’est un artiste français, c’est Callot qui, par la concentration d’esprit et la fermeté de volonté propres à notre pays, a donné à ce genre de comique sa plus belle expression. C’est un Français qui est resté le meilleur bouffon italien.
Nous pouvons louer la langue de Cervantès, les Français ne proposeront jamais pour modèle celle de Rabelais, malgré sa richesse, sa variété et son caractère pittoresque. […] Les héros de ces romans, tout en portant des noms grecs, turcs et romains, parlaient et sentaient comme des Français contemporains des Précieuses. […] Il court dans ses veines du sang italien, grec et français. […] Les autres œuvres de Fernan Caballero ont également des versions françaises (Castermann, Donniol, Hachette, Pion, Maillet, éditeurs.) […] Un anonyme a traduit en français Doña Luz (Lalouette, édit.) et moi-même le Commandeur Mendoza (Giraud).
Mélange du sang français et du sang allemand, il forme la nuance entre ces deux nations. […] Aussi c’est la seule nation, qui, avec la française, mérite proprement ce nom en Europe. […] Le lord ne le voulut pas : « Je n’aime pas les Français, moi », répétait-il avec humeur. […] Les Français s’habituent facilement à la vie sauvage, et sont fort aimés des Indiens. […] Cette belle chaîne du génie français s’est brisée.
Car il comprenait bien l’esprit moderne, et surtout l’esprit français, ennemi du symbolisme, et qui ne voit de philosophie que dans la logique, et de poésie que dans la forme. […] L’union de la poésie et de la philosophie, qui fait son originalité et sa valeur, a nui à son succès ; car c’était là une innovation que l’esprit français acceptera difficilement. […] Ballanche, désigné depuis longtemps au choix de l’Académie française, fut élu, trop tardivement peut-être, en 1841. […] Deux fois le vaudeville arrêta Ballanche sur le seuil de l’Académie française, et il emporta au détriment du poète philosophe le fauteuil de M. de Bonald. […] Les poètes et les orateurs de Louis XIV ont obéi aux mêmes lois que Sophocle et Démosthène ; c’est pourquoi la littérature française partage l’universalité de la littérature ancienne.
— Depuis quelque temps, et surtout depuis les deux dernières années, il se fait dans la littérature française et dans la critique un mouvement curieux qui semble annoncer qu’on entre dans une phase et dans une vogue nouvelle. […] Les classiques français du xviie siècle sont déjà devenus des Anciens. La critique française entre décidément dans son époque alexandrine.
[Histoire de la poésie française à l’époque impériale, 2 vol. […] [Les Poètes français, recueil publié par Eug. […] Il est tout verve, rondeur, élan, Furia française dans la gaîté.
Dans son Petit traité de la poésie française, qui est comme le code des conquêtes romantiques, M. […] Nos abstracteurs de songes ont découvert qu’en s’appliquant à resuggérer ces sensations confuses, à reproduire artificiellement ces presque insaisissables excitations à la rêverie, ils obtiendraient un art étrangement subtil et raffiné auprès de celui que les poètes français ont pratiqué jusqu’à présent. […] On peut penser tout ce qu’on voudra de cette violence, en rire ou s’en alarmer, mais il nous semble qu’il ne s’en est point vu d’aussi curieuse depuis que Ronsard essaya de parler grec et latin en français, et qu’elle vaut la peine qu’on s’y arrête une fois. […] L’imitation de Victor Hugo, voilà le salut de la poésie française ! […] Vous prenez soin, Monsieur, de désigner dans votre manifeste, en même temps que les bons écrivains français qui ont préparé le symbolisme, les mauvais qui l’ont retardé.
» C’est ainsi qu’un ami commence le récit suivant : À Biarritz, il y a une bibliothèque de 25 volumes, votre Histoire de la société française pendant le Directoire s’y trouvait. […] et il s’écrie : « Un Français qui ne fit rien, qui fut à Londres pour dépenser de l’argent tranquillement, qui a vu cela ? Les Français voyagent pour se distraire d’un chagrin d’amour, d’une perte au jeu, ou pour placer des rouenneries, mais là, un Français dans une calèche, un Français qui ne soit ni un acteur, ni un ambassadeur, un Français ayant à ses côtés une femme comme une mère ou une sœur, et pas une fille, une actrice, une couturière, non on n’en a jamais vu ! […] Lors de l’entrée de l’armée française à Moscou, il prend possession d’un palais. […] Moscou évacué, voici Penguilly, chargé par le maréchal je ne sais plus qui, de ramener dans sa voiture deux actrices de la troupe française.