« Il fallut à la mort de son père quitter le toit paternel, devenu l’héritage de son frère ; il se retira avec Amélie chez de vieux parents. » Dans sa gentilhommière on l’avait nourri de mépris pour toute espèce de travail : nullement pressé d’endosser la soutane, il continua sa vie oisive, « s’égarant sur de grandes bruyères », rêvassant sur « une feuille séchée que le vent chassait… sur un étang désert où le jonc flétri murmurait ». […] La malheureuse Ernesta épouse un Barbe-Bleu, espèce de géant, ne connaissant que la généalogie du duc de Saxe-Gotha, dont il est le grand-veneur ; il ne parle que chiens, loups, sangliers, cartes et dés ; il se ruine au jeu, vole les diamants de sa femme, l’injurie, la maltraite, la traîne par les cheveux : d’un coup de pied il lance sa fillette de deux ans contre la muraille ; il vit publiquement avec une catin, oblige Ernesta à la recevoir, emprisonne son épouse dans un sombre château de la Forêt-Noire et meurt assassiné par sa maîtresse en proclamant l’innocence de sa légitime : une sainte. […] Un Parisien de Notre-Dame-de-Lorette fait la trouvaille de la virginité-capital ; mais c’est en Angleterre que les filles se marient sans dot ; tandis qu’en France elles doivent apporter un capital espèces sonnantes pour faire passer l’autre. […] Mais victorieuse, elle fut si épouvantée de son œuvre, qu’elle voulut qu’on en perdît le souvenir : elle posa l’homme bourgeois avec ses passions, ses vices et ses vertus, comme le type immuable de l’espèce humaine passée, présente et future.
Le boulevard, qui n’est maintenant qu’une voie de communication attendant l’énorme affluent du boulevard Haussmann pour aller se jeter avec lui dans les faubourgs, était alors un lieu assez familier, une espèce de promenade qui ne différait de celle de l’Orme du Mail que par la qualité des habitués et le ton de la conversation ; mais c’étaient tout de même des habitués qui venaient là à des heures régulières et qui s’entretenaient des choses de la ville. […] Notre génération était tout imprégnée des théories et de la méthode de Darwin ; nous avions lu et relu dix fois l’Origine des Espèces, et nous étions convaincus que ce livre illustre contenait le commencement de la fin de la philosophie. […] J’allais ajouter : « Darwin, l’auteur de l’Origine des Espèces », mais je compris tout de suite qu’il ne fallait pas insister et que mon futur confrère n’était pas familiarisé avec ce nom. […] dans huit jours il ne tient qu’à elle d’être la fiancée de ce garçon pour lequel elle n’a aucune espèce de sympathie ; elle n’a qu’un mot à dire pour être sa femme dans deux mois, et, à la suite de cette formalité, une mère de famille dans un ménage sans luxe et sans gaieté.
Comme Duclos, après avoir donné ses Considérations sur les mœurs où il avait oublié de parler des femmes et où il avait à peine prononcé leur nom62, voulut réparer cette omission singulière en publiant l’année suivante (1751), sous le titre de Mémoires pour servir à l’histoire des mœurs du xviiie siècle, une espèce de répétition de ses Confessions du comte de…, Voltaire qui trouvait ce genre de romans détestable, et qui voyait dans ceux de Duclos une preuve de plus de la décadence du goût, écrivait : « Ils sont d’un homme qui est en place (dans la place d’historiographe), et qui par là est supérieur à sa matière. […] Il n’est pas favorable aux religieux des ordres mendiants, mais il n’est pas contre toute espèce de communautés religieuses, et il les croit compatibles avec l’ordre politique moyen qu’il conçoit : Les religieux rentés, en France, sortent communément d’une honnête bourgeoisie, dit-il, paraissent peu dans le monde et sont, malgré beaucoup de plates déclamations, plus utiles à l’État qu’on ne le pense.
Dans toutes les parties d’Adolphe qui ne sont pas essentielles, on trouverait de ces espèces de défauts, et même des défauts de style. — « Mon père, dit Adolphe parlant de certaines liaisons, les regardait comme des amusements, sinon permis, du moins excusables, et considérait le mariage seul sous un rapport sérieux. » — La note perpétuelle d’Adolphe est une note sourde, intérieure : « Je m’agitais intérieurement. — Je me débattais intérieurement. […] Le comte me découvrit dans l’espèce de retraite où je m’étais réfugié ; il vint à moi, me prit par la main, et me conduisit vers Ellénore.
Son fils, le duc de Chevreuse, l’élève de Lancelot et l’ami de Fénelon, est une autre espèce de curieux, toujours dans les projets, dans les mémoires, dans le travail du cabinet, dans les entreprises nouvelles, dont il s’engoue, qu’il étudie à fond, mais qu’il ne mène pas toujours pour cela à bonne fin : on peut voir, sur son compte, ce que Saint-Simon et Fénelon, tous deux d’ailleurs pleins de respect pour lui, s’accordent à dire. […] Le cérémonial monarchique, en moins de cent ans, avait certes fait du chemin depuis les chasses de Henri IV jusqu’à celles de Louis XIV ; c’est à croire qu’on n’avait plus affaire à la même espèce et à la même nature de monarchie.
2º quelles indications générales résultent de l’histoire pour le perfectionnement de la civilisation et l’amélioration du sort de l’espèce ? […] Il faut voir le monde et notre espèce d’un peu moins haut pour s’en éprendre, et cependant les voir en grand et avec largeur.
Je vous envoie en même temps une espèce de nigaud ou soi-disant tel, qui est venu tomber dans un de mes postes. […] Il n’eut pas la force de résister à cette espèce de conjuration domestique.
Mon espèce de journal aurait été libre : je ne me serais pas assujetti à satisfaire le public. […] J’épuiserai enfin le petit trésor manuscrit qui a été mis à ma disposition, en indiquant quelques vers de la jeunesse de Sénancour, une romance sur le rossignol, une espèce d’épître intitulée : J’ai vu, dans la forme, sinon dans le genre de la pièce attribuée à Voltaire, et qui fut composée à vingt-six ans.
Il n’est pas vrai, malheureusement, qu’on ne soit jamais entraîné que par les qualités qui promettent une ressemblance certaine entre les caractères et les sentiments : l’attrait d’une figure séduisante, cette espèce d’avantage qui permet à l’imagination de supposer à tous les traits qui la captivent, l’expression qu’elle souhaite, agit fortement sur un attachement, qui ne peut se passer d’enthousiasme ; la grâce des manières, de l’esprit, de la parole, la grâce, enfin, comme plus indéfinissable que tout autre charme, inspire ce sentiment qui, d’abord, ne se rendant pas compte de lui-même, naît souvent de ce qu’il ne peut s’expliquer. […] La nature et la société ont déshérité la moitié de l’espèce humaine ; force, courage, génie, indépendance, tout appartient aux hommes, et s’ils environnent d’hommages les années de notre jeunesse, c’est pour se donner l’amusement de renverser un trône ; c’est comme on permet aux enfants de commander, certains qu’ils ne peuvent forcer d’obéir.
Je me dis malgré moi : — Un homme qui souffre de la grande misère du peuple et de toutes les horribles iniquités sociales et qui fait profession de ne point s’y résigner, j’ai beau faire, je ne puis me le représenter sous les espèces d’un boulevardier qui fait des mots. […] Et ces plaisirs doivent être d’une espèce assez rare et délicate pour qu’il soit fort éloigné d’y renoncer jamais.
C’est là que M. de Musset déroule sa théorie du Don Juan et oppose les deux espèces de roués qui se partagent, selon lui, la scène du monde : le roué sans cœur, sans idéal, tout égoïsme et vanité, cueillant le plaisir à peine, ne visant qu’à inspirer l’amour sans le ressentir, Lovelace ; et l’autre type de roué, aimable et aimant, presque candide, passant à travers toutes les inconstances pour atteindre un idéal qui le fuit, croyant aimer, dupe de lui-même quand il séduit, et ne changeant que parce qu’il n’aime plus. […] Et puis, pourquoi nous mettre dans cette alternative absolue d’avoir à choisir entre les deux espèces de roués ?