« L’enfant s’arrêta à côté du buisson, sans voir Jean Valjean, et fit sauter sa poignée de sous, que jusque-là il avait reçue avec assez d’adresse tout entière sur le dos de sa main. […] Que d’abord il est très rare qu’on meure littéralement de faim ; ensuite que, malheureusement ou heureusement, l’homme est ainsi fait qu’il peut souffrir longtemps et beaucoup, moralement et physiquement, sans mourir ; qu’il fallait donc de la patience ; que cela eût mieux valu même pour ces pauvres petits enfants ; que c’était un acte de folie, à lui, malheureux homme chétif, de prendre violemment au collet la société tout entière et de se figurer qu’on sort de la misère par le vol ; que c’était, dans tous les cas, une mauvaise porte pour sortir de la misère que celle par où l’on entre dans l’infamie ; enfin qu’il avait eu tort. […] XV Revenons à Valjean, bon citoyen, bon commerçant, bon magistrat, et qui commence à sentir le prix d’une société qui lui garantit les fruits du travail, la liberté et la concurrence, l’inviolabilité des banques, ces réservoirs et ces dépôts du capital ; toutes ces vertus qui la composent tout entière aux yeux de l’industriel enrichi. […] Car, premièrement, comment supposer qu’un brave homme, condamné pour une vétille, devenu un manufacturier opulent, le bienfaiteur d’une province entière, magistrat adoré de sa ville adoptive, soit renvoyé pour sa vie aux galères, sans discernement, sans justice et sans grâce, par la société du dix-neuvième siècle ? […] Ni plan, ni convenances, ni proportions, dans ce hors-d’œuvre qui emporte le roman tout entier, comme un coup de canon emporte la bourre.
Ils ont aimé passionnément les lettres, avec une sincérité entière et un désintéressement rare ; poussant bravement leur manière jusqu’à l’extrême, sans consentir jamais à des atténuations qui eussent peut-être suffi à leur amener le grand public ; poussant dans les derniers temps le courage de leur opinion jusqu’au baragouin le plus distingué. […] Un tel genre de talent ne peut s’appliquer tout entier, on le comprend, qu’à la peinture des choses vues, de la vie moderne, surtout parisienne. […] MM. de Goncourt ont éprouvé par deux fois le besoin d’exprimer leur peur de la femme, leur préjugé contre le mariage, et de montrer que l’artiste doit vivre seul pour être tout entier à son démon intime. […] 24 » (Je néglige ici la synonymie absolue de turgide et de gonflée. ) — Parfois le pléonasme va jusqu’à l’incorrection choquante : « Ce qui lui manquait et lui faisait défaut, c’était une absence d’aliments à des appétits nouveaux25. » Ceci rappelle une phrase célèbre à l’École normale : « Messieurs, il y a dans votre préparation des lacunes dont il faudrait combler l’absence. » Voici des mots inventés, peut-être inutilement : «… un paresseux lazzaronisme d’âme26 » — « notes trémolantes 27 », — « obscurant le public28 », — « nuits insomnieuses 29 », — « arrivée à une entière déréliction30. » A quoi bon ces mots nouveaux ? […] On se demande si l’effet de ces mots nouveaux ou de ces tournures inusitées n’est pas tout entier dans leur nouveauté même, et si, la nouveauté passant, l’effet ne disparaîtrait pas du même coup.
Il nous faudrait parcourir l’histoire entière de la métaphysique pour montrer combien elle ressemble à la poésie. […] Elle consiste tout entière dans la réflexion ou observation intérieure. […] Ainsi, tandis que chez la presque totalité des animaux, la digestion se fait à l’intérieur du corps dans un organe spécial, parfois, comme chez l’hydre, l’être semble transformé tout entier en estomac ; chez d’autres, l’acte se produit au dehors, entre de nombreux appendices qui servent à la fois de bouche et de bras. […] Supposons que par une accumulation d’expériences sûres et variées on en soit venu à constater, par exemple, que telle manière de sentir suppose elle-même telle variété d’imagination, qui suppose elle-même telle façon de juger et de raisonner, qui suppose telle manière de vouloir et d’agir, etc., etc, que cette détermination soit aussi précise que possible, on pourrait à l’aide d’un seul fait reconstituer un caractère, puisque le problème se réduirait à ceci : Etant donné un membre de la série, retrouver la série tout entière. […] Il s’efforce même d’établir que la psychologie est la science de l’homme tout entier, la physiologie ne s’occupant que de l’animal.
En second lieu, les divers états de conscience et les diverses idées ne sont pas, selon nous, doués d’une force « détachée » ; leur action est celle même de la conscience tout entière, dont ils ne sont que les formes et manifestations actuelles, en raison composée de l’activité intérieure et des activités extérieures. […] L’être conçu (par abstraction) comme purement matériel serait inerte : son existence serait tout entière immobile dans le présent, alors même qu’il parcourrait mille lieues par seconde. […] James, Münsterberg et tous les psycho-physiologistes pourraient écrire là-dessus des volumes entiers, une bibliothèque, sans avoir épuisé toutes les sensations périphériques, tous les résidus de sensations, tous les mouvements centripètes qui accompagnent nécessairement, en nombre incalculable, dans toutes les parties du corps, les actes réputés les plus spirituels. […] Comment un être vivant ne vibrerait-il pas tout entier à tout instant dans chacune de ses pensées ? […] Le monde entier est, en un sens, comme disaient Berkeley et Schopenhauer, notre représentation : pour nous, et psychologiquement, son esse est son percipi.
Nous n’hésitons pas à dire que, si l’espèce humaine devait disparaître tout entière de la terre (ce qui est possible) pour faire place sur ce petit globe à une race plus parfaite et plus intelligente, et qu’il ne dût y avoir qu’une seule œuvre de l’homme sauvée de ce cataclysme, c’est le poème de Job qu’il faudrait sauver de préférence du naufrage ou de l’incendie. […] …………………………………………………… …………………………………………………… …………………………………………………… …………………………………………………… Le mal dès lors régna dans son immense empire ; Dès lors tout ce qui pense et tout ce qui respire Commença de souffrir ; Et la terre, et le ciel, et l’âme, et la matière, Tout gémit ; et la voix de la nature entière Ne fut qu’un long soupir. […] Vous déposez votre cœur tout entier, comme un fardeau qui pèse à porter, dans le sein d’une épouse jeune et adorée qui ne doit vous le rendre qu’à la tombe, la mort la cueille dans vos bras, sous vos baisers, et le fossoyeur ensevelit sans le voir deux cœurs dans un seul cercueil ! […] … S’il parcourt l’espace, s’il remonte les temps, il voit presque autant de religions que de grandes divisions de temps ou que de grandes divisions du globe : la foi de Wichnou et de Brama dans l’Orient, celle de Fô et de Confutzé dans la Chine, celle de Zoroastre dans la Perse, celle de Pythagore dans l’Asie, celle d’Osiris dans l’Égypte, celle de Jupiter et de son Olympe, foi d’enfants en nourrice, dans la Grèce, celle de Teutatès dans la Gaule, celle des dieux scandinaves dans les Germanies, celle de Jéhovah dans la Judée, celle du Christ dans l’Asie et dans l’Europe romaine, celle d’Allah dans l’Arabie, dans l’Inde moderne, dans l’Asie Mineure, dans l’Afrique entière ; et, parmi ces religions, presque autant de subdivisions, de schismes, d’antipathies, de rameaux divergents que de souches, se disputant les symboles et les interprétations, et s’arrachant les unes aux autres les sectateurs, la polémique acharnée sur les lèvres ou le glaive impitoyable dans la main. […] XX Supposons en effet qu’un philosophe d’Europe pût confier son âme pensante tout entière, pour un instant, au fil du télégraphe électrique, qui fait le tour du globe en sept secondes.
Krantz croule tout entière et je trouve partout des noms et des œuvres pour y contredire. […] La satire en même temps est devenue moins âpre, au moins dans la forme ; la narration tout entière moins longue et cependant plus ample. […] La convenance n’est pas encore entière entre la forme et le fond, l’adaptation n’est pas parfaite entre les moyens et la fin. […] Dans la ressemblance, il excelle à discerner la différence, et dans ce qui est de l’humanité tout entière, à nous montrer ce qui est de l’individu. […] Prévost au contraire, dans ses fictions les plus invraisemblables, il se met et donne tout entier.
« Né, dit-il, avec un esprit vif, élevé, entreprenant, une conception facile, une mémoire sûre, un génie subtil & délié, beaucoup de facilité à s’exprimer, un cœur faux & dissimulé, une ambition sans bornes, il se donna tout entier à l’étude, en sorte qu’il devint bon Grammairien, meilleur Rhétoricien, excellent Humaniste.
Ils peuvent se garantir d'un entier naufrage ; mais les débris qu'ils conservent, sont des preuves de leur chute, & non des preuves de leur mérite.
Je serai satisfait de mon travail, si elle y reconnaît le témoignage de mon entier dévouement à ses ordres et de la durée de ma reconnaissance pour ses bienfaits.
Oui, Portia ou Rosine, elle se jettera avec le plus entier abandon dans les bras du premier venu, oubliant, tant elle est naïve, et le mari qui l’aime et l’honneur qu’elle quitte. […] Fortunio achète un hôtel quand il lui plaît et résolu de vivre à Paris pendant quelques mois, il a acquis un quartier tout entier pour y établir son harem indien. […] Cet inconvénient est grand pour le poète, mais il est suivi d’un autre qui n’est pas moindre pour le public : c’est que l’auteur, assis à sa table de travail, avec la dépouille des dictionnaires et des relations de voyages, jette son butin tout entier sur le papier, s’arrangeant de façon à ne rien laisser perdre. […] Malheureusement on peut s’assurer à la lecture de ces romans par trop colorés, rehaussés de descriptions, bariolés d’épithètes, que la pensée de leur auteur a continué à se concentrer tout entière sur le côté plastique de la nature. […] Voici le morceau tout entier : « Bats le tambour et n’aie pas peur.
L’Homere vengé donna lieu à cette Epigramme : En vain des siecles triomphant, De l’Univers entier Homere eut le suffrage ; Le plus honteux revers l’attendoit dans notre âge : Houdart l’attaque, & Gacon le défend.