Le spectacle, que nous ne laisserons qu’entrevoir d’après lui sans l’étaler tout entier, est affligeant ; mais il renferme quelques leçons sévères que l’histoire a déjà tirées ; il fait pénétrer dans les causes profondes de ruine de l’ancienne monarchie ; il fait sentir à quel point les plus nobles nations, et la nôtre en particulier, dépendent, dans l’esprit qui les anime et jusque dans leur ressort intérieur, des gouvernements qui les régissent et des hommes qui sont à leur tête. […] Elle peut tout se permettre avec lui ; il lui doit tout, il ne se brouillera jamais avec elle ; mais il ne lui dissimule plus ce qu’il croit l’entière vérité sur la situation, et elle ne lui en sait aucun gré.
Pendant les six années qui suivirent, on resta dans les essais et les tâtonnements ; ils furent des plus brillants et même des plus glorieux, et jamais Saint-Cyr ne fit plus de bruit que dans ce temps où il n’était pas encore assis sur ses entiers et ses plus sûrs fondements. […] Pendant ces années de labeur et d’essai, Mme de Maintenon ne cessait de visiter, d’animer et de corriger Saint-Cyr : elle y venait de deux jours l’un au moins ; elle y passait des journées entières dès qu’elle le pouvait.
L’entière bonne foi qu’il montre en tout ce qui le concerne, nous garantit sa véracité sur tout le reste. […] Prud’homme était alors pour Joinville et pour saint Louis ce qu’étaient le beau et le bon des Grecs, ce que sera le mot honnête homme au xviie siècle, un mot large et flottant qui revient sans cesse et dans lequel on faisait entier les plus beaux sens.
Le second chant du poème est tout entier consacré aux malheurs publics ou plutôt encore aux calamités physiques et naturelles qui éclatèrent alors (1781-1783) par d’affreux ouragans, par des tremblements de terre soit à la Jamaïque et dans les îles adjacentes, soit plus tard en Sicile et autres lieux. […] Newton, et aux exemples qu’on lui alléguait de cas plus ou moins semblables au sien, et qui avaient été restaurés et guéris, il répliquait : « Ce n’est point là exactement mon mal, et je suis une exception. » Dans cette désespérance entière de lui-même, voyant son nom définitivement rayé du livre de vie, religieux et chrétien comme il était, on peut juger de son angoisse et de sa dépression mortelle.
Et, en etfet, par une rencontre imprévue et qui permet la confrontation, le fabricateur fait dire à sa fausse marquise, sur les personnes de son monde et de sa connaissance, des méchancetés plus ou moins atroces, qui sont justement le contraire de ce qu’on trouve dans les lettres authentiques et qui en reçoivent un entier démenti. […] c’est Pascal qui nous a fait ce larcin-là. » Je ne sais s’il a dit réellement ce mot, et je ne voudrais pas refuser à Pascal l’honneur d’avoir contribué à l’entière réformation de Mme de Créqui.
Qui voudrait recueillir dans les correspondances du temps les mots et les jugements de Mme Du Deffand, du président Hénault et autres de ce monde-là sur Voltaire, les jugements du président de Brosses, de Frédéric, de Mme de Créqui (j’en ai donné des échantillons), quiconque ferait cela aurait l’idée d’un Voltaire vrai, non convenu, non idéalisé et ennobli par l’esprit de parti, et auquel on laisserait toutefois la gloire entière de ses talents. […] Souvenez-vous de l’amitié tendre que vous avez eue pour moi ; au nom de cette amitié, informez-moi par un mot de votre main de ce qui se passe, ou parlez à l’homme que je vous envoie, en qui vous pouvez prendre une entière confiance.
J’ai dit qu’on pouvait étudier à nu le type du métaphysicien en sa personne ; il est juste d’ajouter que ce type, entier et accompli de tout point dans une nature telle que celle de Kant, est fragile et fuit par bien des côtés chez Maine de Biran. […] J’ai été heureux et actif dans tout cet intervalle ; j’avais un point d’appui fixe, un seul objet qui servait de centre à mes idées ; j’y étais tout entier ; le monde des affaires et des intrigues avait disparu pour moi, ou ne me servait que de distraction. » Il ne tire pas, ce me semble, de ces faits tout le parti qu’il devrait.
Sachons-lui gré pourtant ; en le harcelant à tort et à travers, il va forcer Vauvenargues à se révéler par la portion la plus fière et la plus élevée de son être, et à développer son âme tout entière. […] lui qui croit sentir mieux que Mirabeau ce que c’est que l’ambition et la grande, ce que c’est qu’être acteur tout de bon dans ce monde ; qui ne ferait pas fi de cette scène de la Cour s’il y était ; qui ne verrait dans ce Versailles même qu’un vaste champ ouvert à ses talents de toute sorte, y compris l’insinuation et le manège (l’honnête manège, comme il l’entend et dont il se pique avec un reste d’ingénuité), il éclate et tire le rideau de devant son cœur, par une admirable lettre, qui sera suivie de plusieurs autres pareilles ; de sorte que Mirabeau, arrivé en cela à ses fins, a raison de s’écrier : « Ne vous lassez pas de m’en écrire… Je vous aurai par morceaux, mon cher Vauvenargues, et quelque jour je vous montrerai tout entier à vous-même. » Ces lettres, en effet, qui sont mieux que des pages d’écrivain, manifestent l’âme même de l’homme, l’âme virile dans sa richesse première et à l’heure de son entrée en maturité.
Qu’on lui ait demandé des suppressions, des modifications même en quelques endroits du texte, cela est possible et très probable ; mais il en fit qui sont sans excuse, et qui n’ont d’explication que dans son faux goût littéraire et son peu de scrupule pour l’entière vérité. […] Feuillet de Conches, après collation exacte : La correspondance réelle de Frédéric et de Maupertuis reste tout entière à publier.
Ce fut une grâce… » Elle disait encore, en parlant de cet entier abandon de son être au sein de Dieu : « Ces sentiments, chère amie, sont de très ancienne date : le premier germe en a été conçu dans un temps où l’air était encore embaumé, les objets à l’entour resplendissants de beauté et de fraîcheur, et où mon cœur, quoique troublé par des peines, sentait encore parfois son existence avec enivrement. » Pour le philosophe et l’observateur, qui ne donne dans le surnaturel qu’à son corps défendant, il n’y a pas tant à s’étonner de cette subtilisation, de cette sublimation (pour parler comme en chimie) de tous les sentiments. […] Aucuns des grands sujets n’y sont interdits, mais la liberté sur tous est entière, car si une fois la conclusion était commandée, s’il y avait d’avance une orthodoxie politique ou religieuse, un Credo ou un veto, un nec plus ultra, c’en serait fait de la libre et charmante variété de la parole, qui va comme elle peut et qui trouve dans le feu de la contradiction ses plus vives saillies, son ivresse involontaire.
Dans un grand nombre d’affaires qu’on traita dans cette Assemblée, quoiqu’il parlât et dît son sentiment après tous les autres, il trouvait toujours de si fortes et nouvelles raisons, qu’il était bien difficile de ne pas se rendre à ses décisions. » Tel était, dans l’entière vérité du portrait, l’homme dont on n’a pas à dissimuler les faibles, mais dont il faut reconnaître, avec tous les contemporains éclairés, la supériorité et l’espèce de génie53. […] Un homme qui connaissait bien les hommes, le cardinal de Forbin-Janson, avait tiré son horoscope : « M. de Noailles, avait-il dit, sera un jour chef de parti, mais ce sera sans le vouloir ni le savoir. » Encore une fois, au point de vue politique et ecclésiastique extérieur, et comme archevêque dirigeant tout un Ordre auguste et vénérable, M. de Harlay n’avait qu’un défaut, celui qui fit tort au sage roi Salomon ; et La Bruyère, ce grand et excellent juge, l’a dit avec bien de la modération et de la finesse ; car c’est très probablement à l’archevêque de Paris qu’il pensait lorsqu’il a tracé ce Caractère : « Il coûte moins à certains hommes de s’enrichir de mille vertus que de se corriger d’un seul défaut ; ils sont même si malheureux que ce vice est souvent celui qui convenait le moins à leur état et qui pouvait leur donner dans le monde plus de ridicule : il affaiblit l’éclat de leurs grandes qualités, empêche qu’ils ne soient des hommes parfaits et que leur réputation ne soit entière.