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770. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Léon Bloy »

C’est même cet incompressible fanatisme, dont il se vante comme de sa meilleure faculté, qui l’a empêché de prouver aux regards du monde ses autres facultés et sa supériorité d’écrivain.

771. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — III »

Cette correspondance pose avec une ingénuité émouvante le problème d’un jeune garçon du peuple, empêché par sa condition précaire et par des complications familiales, qui veut assurer son développement intellectuel.

772. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre II. Le public en France. »

Peut-on s’empêcher au dessert de mettre en bons mots les choses les plus graves ? […] Quel cœur peut s’empêcher de les aimer, et quelle intelligence peut en prévoir toutes les applications ? […] Sans doute il y a beaucoup de déistes, surtout depuis Rousseau ; mais je ne crois pas que, sur cent personnes du monde, on trouve encore à Paris dix chrétiens ou chrétiennes. « Depuis dix ans514, dit Mercier en 1783, le beau monde ne va plus à la messe ; on n’y va que le dimanche pour ne pas scandaliser les laquais, et les laquais savent qu’on n’y va que pour eux. » Le duc de Coigny515 dans ses terres auprès d’Amiens, refuse de laisser prier pour lui, et menace son curé, s’il prend cette licence, de le faire jeter en bas de sa chaire ; son fils tombe malade, il empêche qu’on apporte les sacrements ; ce fils meurt, il interdit les obsèques et fait enterrer le corps dans son jardin ; malade lui-même, il ferme sa porte à l’évêque d’Amiens qui se présente douze fois pour le voir, et meurt comme il a vécu. — Sans doute un tel scandale est noté, c’est-à-dire rare ; presque tous et presque toutes « allient à l’indépendance des idées la convenance des formes516 ».

773. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXVIe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (2e partie) » pp. 417-487

Du patriarche d’Arabie au mage de Perse, du grand roi de Persépolis au démagogue d’Athènes, du consul de Rome aristocratique au César de Rome asservie dans le bas empire, du César païen au pontife chrétien souverain dans le Capitole ; de Louis XIV, souverain divinisé par son fanatisme dans sa presque divinité royale, aux chefs du peuple élevés tour à tour sur le pavois de la popularité ou sur l’échafaud où ils remplaçaient leurs victimes ; des démagogues de 1793, du despote des soldats, Napoléon, affamé de trônes, aux Bourbons rappelés pour empêcher le démembrement de la patrie ; des Bourbons providentiels de 1814 aux Bourbons électifs de 1830, des Bourbons électifs, précipités du trône, à la république, surgie pour remplir le vide du trône écroulé par la dictature de la nation debout ; de la république au second empire, second empire né des souvenirs de trop de gloire, mais second empire infiniment plus politique que le premier, calmant dix ans l’Europe avant d’agiter de nouveau la terre, agitant et agité aujourd’hui lui-même par les contrecoups de son alliance sarde, insatiable en Italie, contrecoups qui, si la France ne prononce pas le quos ego à cette tempête des Alpes, vont s’étendre du Piémont en Germanie, de Germanie en Scythie, de Scythie en Orient, et créer sur l’univers en feu la souveraineté du hasard ; de tous ces gouvernements et de tous ces gouvernants, la souveraineté, souvent dans de mauvaises mains, mais toujours présente, n’a jamais failli ; c’est-à-dire que la souveraineté, instinct conservateur et résurrecteur de la société naturelle et nécessaire à l’homme, n’a pas été éclipsée un instant dans l’esprit humain. […] Les opinions flottent comme les mœurs ; la rotation sans limite de la fortune et des familles empêche toute autorité morale de s’établir ; la roue de la fortune, en tournant si vite, précipite tout dans un égoïsme funeste à l’ensemble ; le peuple même n’a plus ni protection, ni centre, ni représentants puissants dans le pays, pour défendre ses droits, ses instincts, ses libertés. […] Où serait le mobile de l’activité, si la loi sociale était assez insensée pour dire à l’homme laborieux et économe, et à l’homme oisif et parasite de la terre : Travaillez ou reposez-vous, produisez ou consommez, votre sort sera le même, et vous serez égaux devant la misère, et je vous condamne à être également misérables pour vous empêcher d’être réciproquement envieux !

774. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (2e partie) » pp. 365-432

Rousseau, presque de nos jours, écrivit de verve trois livres d’un style entraînant qui vous empêche de réfléchir : un livre chimérique sur l’éducation, appelé Émile ; un livre immoral et raisonneur sur l’amour, appelé Héloïse ; enfin un livre de fanatique, sur la législation des empires, appelé le Contrat social, livre où toutes les lois sont faites à l’inverse de l’homme, un livre qui exalte la liberté et finit par la plus atroce des tyrannies. […] Aussi, tout en gémissant sur le frère innocent et supplicié du fameux filou, quand on lit sous la même larme les deux noms accolés, on ne peut s’empêcher de faire un geste de tête en arrière, et de crier : « Oh !  […] Cependant elle n’était pas complète si le temps froid ou pluvieux l’empêchait d’aller passer, le soir, quand les deux femmes s’étaient retirées, une heure ou deux dans son jardin avant de s’endormir.

775. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

Telle qu’elle était, et en enlevant par la pensée trente ans de vie agitée à cette personne, on ne pouvait s’empêcher de lui restituer une vivacité sereine et une grâce agile, en contraste avec la majesté de son rang et avec les malheurs de son union, très propres à inspirer un immense amour. […] On ne pouvait s’empêcher de compatir à ses revers, d’excuser ses fautes, de respecter ses adversités. […] Rien n’empêche aujourd’hui l’Italie, qui a Dante, Arioste, le Tasse et Pétrarque pour ses poètes immortels, d’élever à sa gloire nationale un théâtre qu’elle n’a jamais eu !

776. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Il en arrache, une à une, toutes les notions qui s’y étaient attachées, et, pour les empêcher d’y rentrer par surprise, il se violente en quelque manière à parler contre elles et à les dédaigner. […] Sa diversité excite la pensée, et l’empêche de se fixer. […] Dans son orgueil naïf de novateur et d’émancipé, il raille l’étude de l’antiquité, et va jusqu’à regretter d’avoir appris le latin, qui empêche, dit-il quelque part, d’écrire en français24.

777. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre IV. Le Séminaire d’Issy (1881) »

— C’est la miséricorde de Dieu qui nous en empêche… -je suis donc obligé à Dieu de ce que je ne commets pas tous les péchés du monde ? — Oui… C’est le sentiment ordinaire des saints, parce que la chair est entraînée par un tel poids vers le péché que Dieu seul peut l’empêcher d’y tomber. […] Il faut faire comme ce saint qui autrefois fut conduit au supplice pour un crime qu’il n’avait point commis et dont il ne voulut pas se justifier, disant en lui-même qu’il l’aurait commis, et de bien plus grands encore, si Dieu ne l’en eût empêché.

778. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VII. La littérature et les conditions économiques » pp. 157-190

Lesage les représentait dans son Turcaret sous des traits si peu flatteurs que les financiers du temps firent tous leurs efforts pour empêcher la représentation de la pièce. […] Il en est où la vie littéraire a été plus difficile : qu’on se rappelle-le pauvre Hardy, fournisseur attitré du théâtre du Marais, grand fabricant de tragédies, comédies, pastorales et autres pièces innombrables, s’écriant lamentablement : « Les fers de la pauvreté empêchent l’esprit de volet dans les cieux !  […] Ils ont soumis à des règles sévères la représentation des pièces, la reproduction des romans ; une législation internationale commence à se créer pour empêcher d’un pays à l’autre les fraudes de la contrefaçon.

779. (1908) Dix années de roman français. Revue des deux mondes pp. 159-190

Bourget ait songé à ramener de force et en bloc l’ancien régime avec ses divisions inexorables, et à empêcher, par principe, les migrations de classe exceptionnelles et justifiées ; il a simplement voulu montrer combien étaient salutaires les coutumes qui, dans la vieille société française, préservaient les familles des désordres que nous y voyons généralisés aujourd’hui. […] Loin de briser ces liens, il importe de les consolider, car ils sont la chaîne qui nous empêchera de nous égarer. […] L’indulgence d’ailleurs n’empêche point chez lui la pénétration, et, s’il est toujours prêt à défendre et à excuser les coupables dans la passion, sa lucidité laisse intactes toutes ses facultés de jugement.

780. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre II. La poésie lyrique » pp. 81-134

Montfort le déclare : « … Son amour du rythme devait l’empêcher de s’accommoder du vers libre, dont la cadence plus composée, est imprécise encore. […] Peuvent-ils empêcher d’ailleurs qu’un cher poème                    T’enlève ton souci, Et que, si plein d’erreurs sans doute et de torts même,                    Tu sois heureux ainsi ? […] L’éternel bon sens de sa race l’empêche de se croire la dupe de ses songes.

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