/ 1643
1065. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 11-15754

Ces Philosophesont cru que comme la lumiere vient du soleil, que comme l’eau ne devient chaude que par le feu, de même l’homme n’étoit tel que par l’humanité ; que le beau n’étoit beau que par la beauté ; le bon par la bonté, & qu’il n’y avoit de vrai que par la vérité. […] Ensuite sous animaux je fais autant de classes particulieres, que j’ai observé de différences entre les animaux ; les uns marchent, les autres volent, d’autres rampent ; les uns vivent sur la terre & mourroient dans l’eau ; les autres au contraire vivent dans l’eau & mourroient sur la terre. […] ) La mer, c’est-à-dire l’eau amere, proprie autem mare appellatur, eo quod aquoe ejus amaroe sint. […] Elément est donc le nom générique de quatre especes, qui sont le feu, l’air, l’eau, la terre : la terre se prend aussi pour le globe terrestre.

1066. (1883) Le roman naturaliste

Le vent souffle et les flots font rage : c’est un lépreux qui veut passer l’eau. […] Elle souriait là-dessous à la chaleur tiède, — et on entendait les gouttes d’eau, une à une, tomber sur la moire tendue. […] Tandis que jamais peut-être on n’a senti circuler dans toute une œuvre un plus large courant de sympathie, d’autant plus entraînant qu’il se contient lui-même entre de plus fortes digues, à la manière d’un grand fleuve dont les eaux ne roulent que plus puissantes, resserrées entre leurs quais de granit. […]  » Et encore : « Ce fut l’occasion d’une cérémonie où l’eau et le savon jouèrent le principal rôle, et de laquelle la petite fille sortit avec une nouvelle beauté. […] Comme la pierre qui tombe dans une eau paisible, ainsi, chacune de nos actions devient un centre d’ondulations dont le remous risque d’aller, là-bas, bien loin, interrompre ou troubler le cours de quelque existence ignorée.

1067. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

Elle est rude à subir la vérité morose Qui lui dit : — Tout renaît, l’arbre, l’eau qui l’arrose, La fleur, après l’hiver, sur les plus froids sommets : Et le génie éteint seul ne renaît jamais ! […] Vous qui songez aux morts sur la terre étendus, Donnez un souvenir à ceux qui sont perdus          Sous les eaux de la mer profonde. […] loin de vous engloutis          Sous l’épais linceul des eaux noires ; Et que les souvenirs que nous avions laissés, Plus vite que des mots sur le sable tracés          Seraient rayés de vos mémoires ! […] Son sourire est Mâyâ, l’illusion divine ; Sur son ventre d’azur roulent les grandes eaux ; La charpente des monts est faite de ses os. […] On croit entendre, au bord de l’eau,      Pan, le dieu de l’automne, Tirer de sa flûte en roseau      Ce refrain monotone.

1068. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

Quand le Rhin tranquille et fier du progrès de ses eaux secoue sa barbe limoneuse, c’est un symbole assez corsé. […] Edwige : Vous pourriez dire au fond de la mer, ou au fond de l’eau. […] Ce pistolet, l’assesseur Brack, un pêcheur en eau trouble que je n’ai pas eu le loisir de vous présenter, en connaît la provenance. […] Il savait également l’intérêt que peuvent présenter les humbles existences, la douceur sérieuse de la vie rustique et la beauté des arbres, des champs, des eaux et du ciel. […] Après trois ou quatre répliques, Elise dit à Valère : « Je me représente à toute heure ce péril étonnant qui commença de nous offrir aux regards l’un de l’autre ; cette générosité surprenante qui vous fit risquer votre vie pour dérober la mienne à la fureur des ondes ; ces soins pleins de tendresse que vous me fîtes éclater après m’avoir tirée de l’eau, et les hommages assidus de cette amour… qui, vous faisant négliger et parents et patrie, arrête vos pas en ces lieux, y tient en ma faveur votre fortune déguisée, et vous a réduit, pour me voir, à vous revêtir de l’emploi de domestique de mon père. » Et Valère continue ce petit « historique ».

1069. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

En ce temps-là, il vivait dans l’eau. […] Il se plonge dans l’eau des fleuves, des lacs et des océans avec délices. […] À cela près, et pourvu qu’ils ne boivent ni lait ni eau, les invisibles peuvent fort bien exister. […] Rien n’empêche qu’il n’existe des enfants de l’air, comme il existe des enfants des eaux et des fils de la terre. […] Là, dans de longues prairies où serpentent les eaux du fleuve, on se promène sous des berceaux de figuiers et d’acacias.

1070. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre I. Les idées et les œuvres. » pp. 234-333

Ces doux instants ne durèrent pas. « Au mieux, disait-il, mon esprit a toujours un fonds mélancolique ; il ressemble à certains étangs que j’ai vus, qui sont remplis d’une eau noire et pourrie, et qui pourtant dans les jours sereins réfléchissent par leur surface les rayons du soleil1189. » Il souriait comme il pouvait, mais avec effort ; c’était le sourire d’un malade qui se sait incurable et tâche de l’oublier un instant, du moins de le faire oublier aux autres. « Vraiment, je m’étonne qu’une pensée enjouée vienne frapper à la porte de mon intelligence, encore plus qu’elle y trouve accès. […] Les décors sont splendides, on les voit descendre du ciel, c’est-à-dire du plafond, trois fois par acte : hautes cathédrales gothiques, dont les rosaces flamboient au soleil couchant, pendant que les processions se déploient autour des piliers, et que des clartés ondoient sur les chapes ouvragées, sur les dorures des habits sacerdotaux ; mosquées et minarets, caravanes mouvantes qui serpentent au loin sur le sable jaunâtre, et dont les lances, les parasols alignés posent leur frange sur la blancheur immaculée de l’horizon ; paradis indiens, où les roses amoncelées pullulent par myriades, où les jets d’eau entre-croisent leurs panaches de perles, où les lotus étalent leurs larges feuilles, où les plantes épineuses hérissent leurs cent mille calices de pourpre autour des singes et des crocodiles divins qui grouillent dans leurs massifs. […] J’entre ici comme dans la vallée de Port-Royal : un recoin solitaire, des eaux stagnantes, des bois mornes, des ruines, des pierres tumulaires, et par-dessus tout l’idée de l’homme responsable et de l’obscur au-delà, vers lequel involontairement nous nous acheminons. […] Ce qu’il expose, ce sont les grands intérêts de l’âme, « c’est la vérité, la grandeur, la beauté, l’espérance, l’amour, —  la crainte mélancolique subjuguée par la foi, —  ce sont les consolations bénies aux jours d’angoisse, —  c’est la force de la volonté et la puissance de l’intelligence, —  ce sont les joies répandues sur la large communauté des êtres, —  c’est l’esprit individuel qui maintient sa retraite inviolée, —  sans y recevoir d’autres maîtres que la conscience, —  et la loi suprême de cette intelligence qui gouverne tout1222. » Cette personne inviolée, seule portion de l’homme qui soit sainte, est sainte à tous les étages ; c’est pour cela que Wordsworth choisit pour personnages un colporteur, un curé, des villageois ; à ses yeux, la condition, l’éducation, les habits, toute l’enveloppe mondaine de l’homme est sans intérêt ; ce qui fait notre prix, c’est l’intégrité de notre conscience ; la science même n’est profonde que lorsqu’elle pénètre jusqu’à la vie morale ; car nulle part cette vie ne manque. « À toutes les formes d’être est assigné un principe actif ; —  quoique reculé hors de la portée des sens et de l’observation, —  il subsiste en toutes choses, dans les étoiles du ciel azuré, dans les petits cailloux qui pavent les ruisseaux, —  dans les eaux mouvantes, dans l’air invisible. —  Toute chose a des propriétés qui se répandent au-delà d’elle-même — et communiquent le bien, bien pur ou mêlé de mal. —  L’esprit ne connaît point de lieu isolé, —  de gouffre béant, de solitude. —  De chaînon en chaînon il circule, et il est l’âme de tous les mondes1223. » Rejetez donc avec dédain cette science sèche « qui divise et divise toujours les objets par des séparations incessantes, ne les saisit que morts et sans âme et détruit toute grandeur1224. » « Mieux vaut un paysan superstitieux qu’un savant froid. » Au-delà des vanités de la science et de l’orgueil du monde, il y a l’âme par qui tous sont égaux, et la large vie chrétienne et intime ouvre d’abord ses portes à tous ceux qui veulent l’aborder. « Le soleil est fixé, et magnificence infinie du ciel — est fixée à la portée de tout œil humain. —  L’Océan sans sommeil murmure pour toute oreille. —  La campagne, au printemps, verse une fraîche volupté dans tous les cœurs. —  Les devoirs premiers brillent là-haut comme les astres. —  Les tendresses qui calment, caressent et bénissent — sont éparses sous les pieds des hommes comme des fleurs1225. » Pareillement à la fin de toute agitation et de toute recherche apparaît la grande vérité qui est l’abrégé des autres. « La vie, la véritable vie, est l’énergie de l’amour — divin ou humain — exercée dans la peine, —  dans la tribulation, —  et destinée, si elle a subi son épreuve et reçu sa consécration, —  à passer, à travers les ombres et le silence du repos, à la joie éternelle1226. » Les vers soutiennent ces graves pensées de leur harmonie grave ; on dirait d’un motet qui accompagne une méditation ou une prière.

1071. (1925) Dissociations

Il est même parfait qu’il n’ait jamais bu que de l’eau, ce qui prouve la vertu conservatrice de cet élément. […] Il y a une église et un casino ; on y chante des cantiques, cependant que le phonographe y étale ses flons-flons ; on y consomme force eau bénite et force limonade gazeuse, les deux commerces se prêtent un mutuel appui ; mais le grand attrait de Bonsecours, c’est son cimetière, endroit privilégié au sens pieux comme au sens esthétique. […] Il n’a pas confiance en cet enseignement théorique ; il estime qu’un marin se prépare sur l’eau et que c’est en naviguant qu’on devient navigateur. […] Les boys, sérieux, la considéraient avec un peu d’inquiétude, mais respectueuse, et le plus jeune, qui avait une dizaine d’années, versait goutte à goutte l’eau frappée sur les morceaux de sucre.

1072. (1901) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Deuxième série

., ont été crues unanimement du peuple le plus spirituel de la terre. « Toute idée qui nous frappe vivement et reste devant nos yeux nous paraît bientôt vraie… La seule présence d’une idée fait que nous y croyons… Et voilà pourquoi la croyance des autres accroît la nôtre si promptement… Voilà pourquoi il y a si peu d’hommes qui puissent s’empêcher de céder aux préjugés dont on est imbu dans leur secte ou dans leur parti. » L’homme est en proie à l’universelle suggestion, et l’état où il passe sa vie, plongé dans toutes les causes d’erreur qui exercent sur lui leur influence, comme dans l’eau sale un canard, c’est un vrai sommeil magnétique. […] C’est la goutte d’eau qui creuse les roches les plus dures. […] Bris-son demanda avec instance d’être mis au pain et à l’eau entre quatre murailles pour y achever un livre qu’il avait commencé. […] Tant qu’elle ne l’a pas trouvée, elle est « l’esprit se mouvant sur les eaux » dans le chaos fécond de la création en germe ; elle n’est pas l’être vivant auquel Dieu dit : « Croissez, multipliez, remplissez toute la terre et l’assujettissez. » La plus grande puissance de vie qui soit au monde, j’ai peur que ce ne soit la plume. […] Idée analogue à celle de Winckelmann : « La beauté parfaite est comme l’eau pure qui n’a point de saveur particulière. » Mais prenons bien garde, nous touchons ici aux confins de la platitude ; il faut donc distinguer avec beaucoup de soin entre ce qui est peut-être le plus haut effort de l’art et ce qui en est l’ignorance ou la négation.

1073. (1920) Impressions de théâtre. Onzième série

Autrement dit, les différences s’expliquent par l’eau qui a passé sous les ponts. […] — le sang qui tachera ce seuil. « Oui, oui, dit le portier ; versez l’eau ; versez toute l’eau du déluge ; vous n’en viendrez jamais à bout. » Premier symbole. […] (Quatrième symbole, j’imagine. ) Elle voudrait les tremper dans l’eau. « C’est au bord d’une fontaine qu’il vous a trouvée ? […] » Elle ne répond point, mais se met à jouer avec son anneau de mariage et elle le laisse tomber dans l’eau. […] l’eau !

1074. (1923) Nouvelles études et autres figures

S’il puise l’eau dans une marmite à pied pour la cuisine ou pour le bain, sans avoir accompli les rites, il peut être sûr qu’il lui en cuira. […] Tantôt c’est une vallée riche en arbres fruitiers et baignée d’eaux vives, tantôt un val profond entre deux montagnes, tantôt une enceinte de hautes murailles. […] Comme il ne leur était permis de quitter la cour que si l’eau bénite gelait à la chapelle, un gamin du nom d’Arouet glissait de petits glaçons dans le bénitier. […] » Ces plaisanteries d’étudiant ne tirent pas plus à conséquence que les flottilles de papier qu’il aimait et qu’il aimera toujours à lancer sur l’eau. […] Williams et Shelley passaient leurs journées sur l’eau ; et ils s’étaient fait construire un bateau, l’Ariel.

1075. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

Quand une sauce a déjà servi, le lendemain on y met de l’eau. […] * *   * L’École qui peint avec des blancs d’œuf et de l’eau pure, l’école Gérôme et Hamon, fait des farcescontre MM.  […] Le porteur d’eau Rombouillat, dit Trombouillot . […] mais malheureusement les éclectiques cherchent à jouer le rôle de pompiers, — c’est de la littérature qui se fait avec des seaux d’eau. […] * *   * Triboulet, Voix des Écoles, Méphistophélès, etc., journaux de basse-cour, nourris avec l’eau de vaisselle du Figaro !

/ 1643