» Mais il faut quelque chose de plus grave aux oreilles romaines que cette mythologie pittoresque, et le poëte reprend alors : « Que dirai-je avant la louange tant répétée du Père souverain, qui régit les choses humaines et divines, l’Océan, la terre et le monde, dans l’ordre varié des saisons, immortel principe, d’où ne sort rien de plus grand que lui, et près de qui ne s’élève rien de semblable ou d’approchant.
Son incapacité s’accommode des brusqueries ; &, sa paresse le mettant hors d’état de porter un Arrêt exact & motivé, il veut quelqu’un (dût-il en être trompé) qui le décide & qui lui fournisse périodiquement une petite sentence meurtrière, qui lui épargne l’ennui d’applaudir à tout ce qui se fait de bon : emploi vraiment triste & décourageant ; car s’il faut louer quelque chose à Paris, ce ne doit être que par communication, par signal, par esprit de parti, & tout ce qui n’est pas divin, comme l’a dit Helvétius, est nécessairement détestable. […] Pouvoir de l’Ecriture, pouvoir divin & surnaturel ! […] J’aime mieux lire Gilblas de Santillance, de notre ami le Sage, que tout Boileau ; Richardson me touche bien autrement que toutes les Tragédies du Divin Racine ; l’Abbé Prévôt m’intéresse par ses tableaux vastes, profonds, variés, mélancoliques ; & c’est pour moi un homme de génie, par son invention & par sa fécondité ; & ce Crébillon si fameux, me paroît à moi un Poète barbare, outrageant à la fois le bon-sens, la Nature, la langue & le sentiment. […] Les divines tirades du divin Racine, sont merveilleuses, d’accord ; mais voudra-t-on nous persuader que Pyrrhus, Xipharès & Hippolyte, ont eu la physionomie que leur donne le Poète.
Du moment que la religion passe pour une invention humaine, elle est nulle ; la religion qu’on croit divine et révélée est la seule qui puisse avoir de l’influence sur les mœurs et contribuer au bonheur de la société. […] Il faut ou renoncer à tous les avantages de la religion, ou persuader au peuple qu’elle est divine : il n’y a pas de milieu. […] Racine lui-même, le dieu de l’élégance poétique, n’a-t-il pas semé au milieu de ses divines tragédies une foule de vers simples, négligés et naïfs, qui rapprochent le dialogue de la conversation ordinaire, et semblent avertir les spectateurs que ce ne sont pas des poètes, mais des hommes et des femmes qui parlent ? […] On ne s’intéresse plus du tout à la jalousie d’Orosmane, à la philosophie d’Alzire, aux forfanteries et aux horreurs de Mahomet ; mais les grands tableaux, les situations fortes, la divine éloquence d’Horace, de Cinna, d’Héraclius, entraînent et subjuguent des spectateurs que les événements dont ils sont environnés ont accoutumés à réfléchir. […] Les grosses bouffonneries du vieillard en goguettes étaient adorées comme les oracles sacrés d’une philosophie divine.
C’en est une pourtant, et à laquelle on a envie de rendre hommage en disant qu’elle n’est pas volontaire, comme si alors elle avait le caractère d’une aubaine surnaturelle et d’un cadeau à peu près divin. […] Encore leur divin témoignage ne nous est-il intelligible qu’à l’aide de notre petite inspiration ; mais, attentive, elle suffit à nous faire reconnaître le divin dans le mélange où on le lui révèle. […] C’est déjà très bien, d’être vertueuse comme on est blonde, ou brune, par un divin hasard. […] Il manque des morceaux à la divine statue et l’on risquera des réparations. […] Et c’est, à l’égard du divin Virgile, un sacrilège.
La foi n’est point l’assentiment donné à une opinion, ni à un nombre quelconque d’opinions » ; c’est la sensation de la présence divine, c’est la communication de l’âme avec le monde invisible, c’est le renouvellement complet et imprévu du cœur […] Quittons ce mathématicien, homme de cabinet, homme antique, qui prouve trop et s’acharne, et voyons parmi les gens du monde celui qu’on appelait « le plus spirituel » des ecclésiastiques, Robert South, homme aussi différent de Barrow par son caractère et sa vie que par ses œuvres et son esprit ; tout armé en guerre, royaliste passionné, partisan du droit divin et de l’obéissance passive, controversiste acrimonieux, diffamateur des dissidents, adversaire de l’Acte de tolérance, et qui ne refusa jamais à ses inimitiés la licence d’une injure ou d’un mot cru. […] Sherlock, appliquant la psychologie nouvelle, invente une explication de la Trinité, et suppose trois âmes divines, chacune d’elles ayant conscience de ce qui se passe dans les deux autres. […] In like manner should we in the heart and centre of our soul, in the best and highest appartments thereof, in the places most exposed to ordinary observation, and most secure from the invasions of worldly care, erect lively representations and lasting memorials unto the Divine bounty.
Qui nous rendra la divine vertu de la joie dans l’effort et de l’espérance dans la lutte ? […] La force positive qui se manifeste par les symboles religieux les plus imparfaits est un sens du divin qu’il faut discerner et qui n’est jamais négligeable, car il constitue ce qu’il y a de plus haut dans le cœur de l’homme. […] Renan, ce qui vaut mieux que toutes les habiletés techniques, ce trésor rare et divin : une pâture pour l’âme. […] Dieu sera un jour une injure au divin », nous nous rappelons avoir lu d’éloquentes pages sur ce texte, d’ailleurs si paradoxal, dans les livres de M. […] Mais beaucoup ont senti de même, depuis le divin Virgile, ce contemplateur, jusqu’à Théophile Gautier, cet olympien.
J’invoquai plusieurs fois, dans cette anxiété, la mémoire de mon père, de cet homme, le Fénelon de la politique, dont le génie était en tout l’opposé de celui de Bonaparte ; et il en avait du génie, car il en faut au moins autant pour se mettre en harmonie avec le ciel que pour évoquer à soi tous les moyens déchaînés par l’absence des lois divines et humaines. […] « Ce qui est vraiment divin dans le cœur de l’homme ne peut être défini ; s’il y a des mots pour quelques traits, il n’y en a point pour exprimer l’ensemble, et surtout le mystère de la véritable beauté dans tous les genres.
Glasenapp, solennelles de respectueuse admiration, de culte presque religieux pour le Père de la musique, — les pages, dont les principales seront traduites en cette revue, sur Beethoven, enthousiastes jusque le lyrisme, où l’essence de la musique est, à jamais, définie, et le caractère divinement génial de Beethoven, « le Révélateur », avec des adorations agenouillées, — les pages sur Gluck, sur Weber, sur Spontini, — et celles où il proclame le culte des vieux Maîtres, inviolable, sacré, nécessaire, d’ordre divin. […] Aucun Art, jamais, n’a produit une impression plus sereine que les deux symphonies en la et en fa majeur, ainsi que les autres compositions du Maître — si intimement liées à celles là — écrites durant cette période divine de sa complète surdité.
On peut imaginer qu’en quelqu’un de ces jours anciens, parmi les fêtes qui remplissaient la cité de splendeurs, quelque divin philosophe isolé dans la multitude sur les gradins de marbre d’un Panathénée, ayant été subitement étonné par la magnificence de quelque maxime qu’énonçait le protagoniste, une fois ferma les yeux aux merveilles des décorations et des chorégraphies ; et, comme l’on dit, il ferma les yeux pour mieux entendre ; en effet, aveugle aux tableaux du théâtre, il s’aperçut qu’il entendait mieux, qu’il comprenait mieux, qu’il se faisait plus fortes, plus profondes, plus belles, les sentences qui arrivaient à son oreille ; et supposons qu’à ce moment, par quelque bizarre incident, les musiques accompagnatrices des paroles et des mimiques se soient tues, alors le philosophe, n’ayant plus en son esprit que la sensation des paroles récitées et donnant à ces paroles toute l’attention de son esprit auparavant divisée aux visions et aux harmonies, médita qu’il jouissait, plus intensément de ces littératures que seules il percevait ; ainsi pouvait-il conclure que l’œuvre d’art serait plus puissante à l’émouvoir qui, au lieu d’occuper tous les moyens de perception, en occuperait un seul et, de ce fait, avec une triple intensité. […] XIII La Révélation est ; et, par ce même qu’elle est la révélation du divin à l’humain, elle est Mystère.
Vous ne reconnaîtriez pas que l’étendue convient à tel objet, l’intensité à tel autre, le temps à tel autre, ou que l’étendue convient sous tel rapport, dans telle relation, dans telle mesure, s’il n’y avait pas déjà dans les sensations mêmes ce que vous voulez faire descendre en elles, comme une grâce divine, du haut d’une intuition pure de l’espace infini, homogène et indifférent. […] Nous sommes ainsi sous la fascination de l’espace, dont nous faisons ensuite une idée a priori, presque surnaturelle et divine, quand elle est peut-être une forme de notre imagination et de notre conscience relative à notre constitution cérébrale.
Sous les platanes, dans un jardin diapré de lis et de roses, les mercenaires célébrant leur festin ; la lente apparition de Salammbô descendue les apaiser, à la fois peureuse et divine, l’expédition nocturne de Mathô et Spendius dans le temple de Tanit, l’horreur de ces voûtes et le charme du passage du chef par la chambre alanguie où Salammbô dort entre la délicatesse des choses ; le retour d’Hamilcar, son recueillement dans la maison du Suffète-de-la-Mer ; Salammbô partant racheter de son corps le voile de la déesse, son accoutrement d’idole et ses râles mesurés, quand le chef des barbares rompt la chaînette de ses pieds ; puis le siège énorme de Carthage, la foule des peuplades accourues, l’écrasement des cadavres, l’horreur des blessures, et sur ce carnage rouge, l’implacable resplendissement de Moloch ; l’agonie de toute une ville, puis par un revers l’agonie de toute une armée, les dernières batailles, et, entre celles-ci, l’entrevue si curieusement mièvre et grave, où Salammbô voilée et parlant à peine reçoit le prince son fiancé en un jardin peu fleuri que passent des biches traînant à leurs sabots pointus, des plumes de paons éparses ; enfin le supplice de Mathô et les joies nuptiales, mêlant des chocs de verres et des odeurs de mets au déchirement d’un homme par un peuple, jusqu’à ce qu’aux yeux de Salammbô défaillante en l’agitation secrète de ses sens, Schahabarim arraché au supplicié son cœur et le tende tout rouge au rouge soleil, final tonnant dans lequel se mêlent le beau, l’horrible, le mystérieux et l’effréné en un suprême éclat. […] Et que l’on joigne à ces grandes œuvres certaines pages de l’Hérodias, les imprécations de Jeochanann, la scène gracieuse où Salomé, nue et cachée par un rideau, étend dans la chambre du tétrarque son bras ramant l’air pour saisir une tunique ; enfin cette Légende de saint Julien qui contient les plus divines pages en prose de ce siècle, la vie pure et fière du château, les combats et les hasards de Julien fuyant son destin de parricide, les lieux luxurieux où il se marie, son crime, sa rigueur, sa transfiguration finale certes pas même chez les grands poètes de ce temps et d’autres on ne trouve un pareil ensemble de scènes aussi purement belles et hautes flattant l’oreille, les sens, l’esprit et toute l’âme, au point que certaines pages entrent par les yeux comme une caresse, se délayant dans tout le corps, et le font frissonner d’aise comme une brise et comme une onde.