On est là à s’étonner, à déclarer étourdissant que Pascal ait trouvé, deux siècles avant la science de l’hérédité, le fameux mot : « L’habitude est une seconde nature et la nature est une première habitude » ; et que deux siècles avant les théories sur l’inconscient, Leibniz en ait tranquillement donné l’essence, en termes unis, en écrivant, entre autres choses : « Les perceptions remarquables viennent par degré de celles qui sont trop petites pour être remarquées ; et nous savons bien des choses auxquelles nous ne pensons guère. […] Il ne sera pas optimiste, puisqu’il est doué à un très haut degré de l’instinct de sympathie et puisque, comme l’on sait et comme M. […] Il est vain de s’épuiser à chercher des différences de degré, sur ce point, entre de pareils démiurges d’humanité. C’est ailleurs qu’il faudrait chercher des différences, de degré ou autres.
Le genre de mérite d’un Maspero, d’un Henri Weil, d’un Gaston Paris échappera toujours à l’appréciation de la plupart de nos contemporains ; et si ces hommes éminents n’étaient pas dignitaires de l’Université, membres de l’Institut de France et décorés de plusieurs ordres, ils occuperaient sans doute assez peu l’attention du public, inapte, en général, à percevoir, entre les hommes, des degrés et des différences. […] On voudrait ne plus entendre les clients de l’agence Cook ni les membres de la Biblical Society, et ressusciter la citadelle religieuse d’Israël, ses robustes assises, ses terrasses étagées comme d’énormes degrés, ses hauts remparts, semblables à ceux qui étreignent encore certaines acropoles de Carie, le dur profil, si beau avoir, dans l’or du couchant, sur le fond lointain des montagnes couleur de mauve On songe aux tumultes des grandes fêtes, à l’appel des trompettes, à l’odeur des victimes brûlées ou bien à l’aspect plus simple de la vie quotidienne, au murmure des prières chuchotées dans un vague parfum d’encens, au va-et-vient des prêtres, au glissement des babouches traînées sur les dalles avec une discrétion ecclésiastique… On évoque des détails vulgaires, les inévitables banalités du culte, les boutiques établies sous les colonnades, les comptoirs des changeurs dans les cours près des fontaines, le bétail que l’on vendait pour les sacrifices, les objets de piété, marchandés par les fidèles, les opérations mercantiles, traitées par les bas officiers du Temple avec la vulgarité irréligieuse des sacristains de tous les temps, bref les mille négoces qui mettaient dans la grande mosquée un bazar d’Orient. […] Ce commerçant stupide qui digère sa soupe, en achevant de lire une chronique de quelque imbécile, le fin lettré qui savoure, à petites gorgées, des vers bien tournés, le joli garçon qui flirte avec une jolie femme, le grammairien qui se complaît trop dans une correction de texte, n’ont cherché, en somme, que leur plaisir ; à ce titre, et malgré les degrés divers où ils placent leur idéal, ils sont à peu près égaux au regard de la justice infinie.
Si nous étudions avec curiosité, parfois même avec une sympathie qui relève de l’esthétique tels individus audacieux, pénétrés de la valeur de leur Moi au point de lui subordonner tout autrui, de ne vouloir connaître et de ne connaître réellement que leur gloire et leur intérêt, comment ne goûterions-nous pas ceux qui, doués au même degré d’énergie et de volonté, agissent en oubliant leur Moi on plutôt en ne le percevant plus qu’à travers le malaise d’autrui ? […] Rappelle-toi, maintenant, Gausson, de quel acharnement tu travaillais à ce tableau malgré les cinq degrés sous zéro et la bise. […] Une ombre par degrés baigne ces formes vagues ; Et sur les bracelets, les colliers et les bagues Qui chargent les poignets, les poitrines, les doigts, Avec le luxe lourd des femmes d’autrefois, Du haut d’un ciel profond d’azur pâle et sans voiles L’étoile qui s’allume allume mille étoiles, Le jet d’eau dans la vasque au murmure discret Retombe en brouillard fin sur les bords ; on dirait Qu’arrêtant les rumeurs de la ville au passage, Ces arbres agrandis rapprochent leur feuillage Pour recueillir l’écho d’une mer qui s’endort Très loin au fond d’un golfe où fut jadis un port.
L’érudition, poussée à ce degré d’exubérance, est une manière de virtuosité. […] Car elle possède, au plus haut degré, la vertu coutumière de ses pareilles : la bonté. […] Bard continue sa description par des traits qui montrent le degré d’abandon où peut descendre l’incurie orientale.
VI, le paysan Mais insensiblement nous sommes descendus d’un degré.
Le roi Edwy28, ayant épousé Elgita, sa parente à un degré prohibé, quitta, le jour même du couronnement, la salle où l’on buvait, pour aller près d’elle.
J’aime naturellement le fond de la vallée, je m’y repose des maux de la vie ; mais, lorsqu’on vient m’y troubler, mon âme s’élève par degrés au-dessus de tout ce qui voudrait l’atteindre.
Je ne connais que lui qui possède à ce degré la passion de la symétrie.
Par deux précieuses qualités, que peu d’auteurs ont possédées au même degré que lui : une force comique d’une rare puissance, un art exceptionnel de créer et de marquer des types. […] Elle permet, en détraquant davantage par degrés les ressorts de la marionnette, de s’évader soudain dans la fantaisie ; et, par une insensible transition, de passer d’une peinture très approchée, à une irréalité folle, au caprice d’imagination éperdu.
Il me fait voir encore un morceau de vase en grès liquéfié, en me disant qu’il faut 1 500 degrés de chaleur, dans un four à potier, pour obtenir ce résultat. […] Puis c’est une improvisation charmante de Banville, sur l’imagination de la rime, qu’a au plus haut degré Hugo ; puis c’est la nouvelle donnée par Houssaye, que la Païva s’est mariée avec le comte Henkel, le diadème de l’Impératrice sur la tête.
Patriote terrien et territorial de 1871, il n’a pas perdu un degré du feu avec lequel, dans l’Assemblée de Bordeaux, il a dit Non aux préliminaires de paix. […] Il craindra qu’un libéralisme militant, un libéralisme d’exportation, ne comporte un certain degré de pharisaïsme.