Il ne demande pas mieux que de rester chrétien et tranquille, — l’unique chrétien, je crois, de la Revue des Deux-Mondes, mais pourtant c’est à la condition que le christianisme se conduira bien, c’est-à-dire ira se relâchant chaque jour un peu plus dans une liberté indéfinie. […] Telles sont la philosophie et l’histoire de cet optimiste faux chrétien qui croit, dit-il, à la Providence divine, comme il croit à la destinée, comme il croit à ce dix-neuvième siècle, qui a réveillé l’infini, comme à la science, comme à tout, et qui a le mysticisme de toutes ces sornettes contemporaines, lesquelles formeront un jour une logomachie à faire pouffer de rire nos descendants !
L’Orient chrétien (1897). — Le Bois sacré (1898) […] Pierre Quillard On crut d’abord que le vicomte de Guerne serait l’homme d’une œuvre unique et considérable, Les Siècles morts, où il a tenté d’inscrire la légende de quelques siècles, les plus lointains, de l’Orient, père des dieux féroces et des conquérants aussi féroces que les dieux ; il avait successivement assoupli sa langue et ses rythmes à redire la Chaldée et l’Iran hiératique en des poèmes massifs et sonores et à exprimer ensuite les subtilités de la Gnose et de l’Hellénisme finissant et de la première théologie chrétienne, si proche des métaphysiques ingénieuses et extravagantes qui lui furent contemporaines.
L’architecte chrétien, non content de bâtir des forêts, a voulu, pour ainsi dire, en imiter les murmures ; et, au moyen de l’orgue et du bronze suspendu, il a attaché au temple gothique jusqu’au bruit des vents et des tonnerres, qui roule dans la profondeur des bois. […] Son affinité avec les monuments de l’Égypte nous porterait plutôt à croire qu’il nous a été transmis par les premiers chrétiens d’Orient ; mais nous aimons mieux encore rapporter son origine à la nature.
. — Seconde cause : les anciens ont épuisé tous les genres d’histoire, hors le genre chrétien. […] Suétone conta l’anecdote sans réflexion et sans voile ; Plutarque y joignit la moralité ; Velleius Paterculus apprit à généraliser l’histoire sans la défigurer ; Florus en fit l’abrégé philosophique ; enfin, Diodore de Sicile, Trogue-Pompée, Denys d’Halicarnasse, Cornelius-Nepos, Quinte-Curce, Aurelius-Victor, Ammien-Marcellin, Justin, Eutrope, et d’autres que nous taisons, ou qui nous échappent, conduisirent l’histoire jusqu’aux temps où elle tomba entre les mains des auteurs chrétiens : époque où tout changea dans les mœurs des hommes.
Le premier est la condamnation éternelle : c’est l’Enfer chrétien. Le second est le salut éternel : c’est le Ciel chrétien. […] Les chrétiennes avaient adopté la langue et le voile des musulmanes. […] Cette place est parfaitement injustifiable selon la dogmatique chrétienne. […] L’imagination et la sensibilité étaient redevenues chrétiennes.
Il a parlé des morts anciennes opposées aux morts chrétiennes, Darius, Caton, Socrate, Alexandre, que sais-je ? […] Lacordaire a d’ordinaire de l’éclat, de l’imagination, du talent, mais un esprit peu judicieux, des rapprochements historiques forcés qui seraient plutôt saint-simoniens que chrétiens, toute l’emphase du jour : sa parole lui échappe souvent, et il ne la gouverne pas.
Littéraire ou révolutionnaire, elle est restée chrétienne dans ses troubles, et, devenue Asiatique, elle est chrétienne encore. […] Excepté à Nazareth, la ville crypte et le berceau du Sauveur, et à Jérusalem, notre patrie à tous, nous autres chrétiens avec ou sans patrie, où la voyageuse retrouve une palpitation, mouvement d’aile d’un oiseau blessé, il n’y a pas le moindre enthousiasme dans tout le courant de ce livre.
Un peu gravé de cette horrible petite vérole philosophique, du moins il n’en mourut pas ; car il faut bien qu’on le sache, cet Arlequin d’abbé philosophe est mort en chrétien… Il a trompé son monde, comme Littré. […] L’une de ces lettres, très grave, très noble et très éloquente, est de la Reine Caroline, qui exhorte avec ferveur l’homme qu’elle admire à mourir en chrétien, et l’autre est la réponse du mourant, qui déclare que, malgré ses erreurs et ses péchés, il n’a pas cessé d’être chrétien et de demander à Dieu sa miséricorde.
Dans l’antiquité, M. de Beauverger nous cite Platon, Xénophon, Polybe, Cicéron, saint Augustin ; — mais Platon n’est qu’un poëte, et saint Augustin est un prêtre chrétien, ce qui est tout le contraire d’un philosophe. […] Certes, quand on descend d’une pareille chaîne d’esprits et qu’on va d’Aristote à… Sieyès, à travers le christianisme qui de toutes les manières fut une révélation, on se demande ce qui aurait manqué à l’humanité, devenue chrétienne, quand elle n’aurait pas eu, pour tracasser ses annales, tous ces gaillards-là ! […] Il n’y a qu’un bon gouvernement qui soit possible dans la nature même des choses, qu’un seul, quels que soient les climats, les caractères, les idées, il ne nous doit pas le bonheur cependant, c’est ce que les philosophies politiques en dehors des idées chrétiennes n’ont pas compris, et ce que celle de M. de Beauverger, s’il en avait une à lui, — car il n’en a point, — ne comprendrait pas davantage.
À celles-là, par charité chrétienne, il ne refusait pas ses avis. […] Comment instruire la jeunesse chrétienne ? […] » Alors Julien était chrétien comme son père. […] Chrétien en apparence, il était helléniste dans son cœur. […] Il n’est pas vrai que Julien ait laissé aux chrétiens, comme dit M.
Cowper est profondément chrétien ; l’austérité domine même trop chez lui, au point de vue de la mesure et du goût. […] qu’il est doux, disait-il quelque part, dans la retraite (d’un soir d’hiver), à travers le trou de sa serrure, de guetter le monde tel qu’il est fait, de voir tout le remuement de cette Babel et de ne point sentir la foule. » Mais il avait trop de sensibilité, de patriotisme, de mouvements humains et chrétiens pour en restera cet état de spectateur amusé, et il s’échappait à tout instant en élancements et en effusions douloureuses qui peuvent sembler aujourd’hui toucher à la déclamation, mais qui, à les bien prendre et à les saisir dans leur jet, étaient surtout des à-propos éloquents. […] L’homme trouve son compagnon coupable, — coupable d’une peau autrement colorée que la sienne, etc… Il continue d’énumérer toutes ses douleurs et ses blessures comme Anglais, comme chrétien, et comme homme. […] Newton, et aux exemples qu’on lui alléguait de cas plus ou moins semblables au sien, et qui avaient été restaurés et guéris, il répliquait : « Ce n’est point là exactement mon mal, et je suis une exception. » Dans cette désespérance entière de lui-même, voyant son nom définitivement rayé du livre de vie, religieux et chrétien comme il était, on peut juger de son angoisse et de sa dépression mortelle. […] On n’a jamais lutté avec plus de constance et de suite qu’il ne l’a fait contre une folie aussi présente et persistante, « une des plus furieuses tempêtes, disait-il, qui ait été déchaînée sur une âme humaine, et qui ait jamais bouleversé la navigation d’un matelot chrétien. » Une de ses dernières pièces de vers, intitulée Le Rejeté, est la peinture d’un matelot tombé en pleine mer pendant le voyage de l’amiral Anson, et s’efforçant de suivre à la nage le vaisseau d’où ses compagnons lui tendent en vain des câbles, et qu’emporte la tempête : il y voyait une image lugubre de sa destinée.