Considérant d’abord la première de ces idées, nous avons trouvé que les faits psychiques étaient en eux-mêmes qualité pure ou multiplicité qualitative, et que, d’autre part, leur cause située dans l’espace était quantité. […] La vérité est que si nous vivons et agissons le plus souvent extérieurement à notre propre personne, dans l’espace plutôt que dans la durée, et si, par là, nous donnons prise à la loi de causalité qui enchaîne les mêmes effets aux mêmes causes, nous pouvons cependant toujours nous replacer dans la pure durée, dont les moments sont intérieurs et hétérogènes les uns aux autres, et où une cause ne saurait reproduire son effet, puisqu’elle ne se reproduira jamais elle-même. […] Car si, par hasard, les moments de la durée réelle, aperçus par une conscience attentive, se pénétraient au lieu de se juxtaposer, et si ces moments formaient par rapport les uns aux autres une hétérogénéité au sein de laquelle l’idée de détermination nécessaire perdît toute espèce de signification, alors le moi saisi par la conscience serait une cause libre, nous nous connaîtrions absolument nous-mêmes, et d’autre part, précisément parce que cet absolu se mêle sans cesse aux phénomènes et, en s’imprégnant d’eux, les pénètre, ces phénomènes ne seraient pas aussi accessibles qu’on le prétend au raisonnement mathématique.
Ici c’est le rapport de la cause à l’effet, creator mundi ; là de l’effet à la cause, Ciceronis opera. […] Le créateur de l’univers, rapport de la cause à l’effet : les écrits de Cicéron, rapport de l’effet à la cause : un vase d’or, rapport de la forme à la matiere : l’or de ce vase, rapport de la matiere à la forme, &c. […] Ces accroissemens d’action instantanés comme la cause qui les produit, c’est ce qu’on appelle explosion. […] Ce n’est point par les causes physiques qu’il faut juger de la nature de l’articulation ; c’est par elle-même : l’oreille en discerne toutes les variations, sans autre secours que sa propre sensibilité ; au lieu qu’il faut les lumieres de la Physique & de l’Anatomie pour en connoître les causes. […] C’est donc sous ce mot qu’il convient d’examiner les causes des irrégularités qui se sont introduites dans les langues.
Sans doute tout est fait par la cause première ; mais la cause première n’agit pas par des motifs partiels, par des volontés particulières, comme dirait Malebranche. […] C’est que les circonstances ne sont plus les mêmes : les causes occasionnelles qui déterminaient les lois à ces grands phénomènes n’existent plus. […] Le besoin, en effet, est la vraie cause occasionnelle de l’exercice de toute puissance. […] Sans doute il y a mouvement, comme le voulait Vico ; sans doute, il y a des causes, comme le voulait Montesquieu ; sans doute, il y a un plan imposé, comme le voulait Bossuet. […] Aucun problème n’est posé ; la grande cause n’est jamais aperçue.
Le Cheval, depuis que les Espagnols l’ont importé dans l’Amérique du Sud, s’y est naturalisé à l’état sauvage ; il s’est multiplié dans toute la contrée avec une vitesse de propagation sans pareille ; je devais donc me demander quel pouvait avoir été la cause de son extinction première sous des conditions de vie en apparence si favorables. […] Cette espèce eût été vivante, mais assez rare, aucun naturaliste n’aurait été surpris de sa rareté ; car nombre d’espèces sont rares dans toutes les classes et dans tous les pays ; et, si l’on demande quelles sont les causes de leur rareté, nous répondons que sans doute les conditions de vie locales leur sont défavorables en quelque chose. […] Avant que l’homme habitât l’Inde ou l’Afrique, la multiplication progressive des Éléphants doit y avoir été limitée par quelque cause. […] En effet, on ne saurait sérieusement considérer les changements des courants, des climats ou des autres conditions physiques comme la cause de ces grandes mutations dans les formes de la vie, sur toute la surface du monde et dans les plus différentes régions. […] De même, les formes vaincues, qui ont déjà cédé la place à de nouvelles formes victorieuses, étant généralement alliées en groupes par l’héritage commun de quelques causes d’infériorité, au fur et à mesure que des groupes nouveaux et en voie de progrès se répandront dans le monde, d’anciens groupes disparaîtront de proche en proche ; de sorte que, d’une manière comme de l’autre, la succession des formes organiques doit tendre au parallélisme et à la simultanéité.
Causes de la croyance générale à l’immutabilité des espèces. — IV. […] Ces faits seraient, au contraire, des plus étranges, si les espèces avaient été indépendamment créées et les variétés simplement produites par des causes secondes. […] Causes de la croyance à l’immutabilité des espèces. […] Mais la principale cause de notre mauvais vouloir à reconnaître qu’une espèce a donné naissance à d’autres espèces distinctes, c’est que nous répugnons toujours à admettre tout grand changement dont nous ne voyons pas les degrés intermédiaires. […] À mon avis, ce que nous connaissons des lois imposées à la matière par le Créateur s’accorde mieux avec la formation et l’extinction des êtres présents et passés par des causes secondes, semblables à celles qui déterminent la naissance et la mort des individus.
Toutefois, un certain besoin de perfection et de beauté concentrée, une vérité et une justesse de plus en plus soigneusement recherchée, la difficulté croissante du goût à l’égard de soi-même, l’absence du théâtre aussi et d’un cadre qui incessamment sollicite, bien des causes peuvent faire, en avançant, que les produits de ce genre d’imagination ne remplissent pas toute une vie et y laissent vacantes bien des heures. […] Les causes complexes, qui, après les grandes guerres d’Annibal, rendaient la situation de l’Italiote de plus en plus précaire et pénible, à mesure qu’au contraire celle du citoyen romain s’élevait et visait au roi, sont très-bien démêlées et viennent se traduire en un tableau général d’oppression et de dépopulation tout à fait effrayant. C’est alors, vers l’an de Rome 617, qu’un jeune homme d’une famille plébéienne, mais illustre, un élève formé de la main des philosophes grecs, Tibérius Sempronius Gracchus, « dont le caractère bon et humain n’avait pu être corrompu par l’orgueil exclusif de sa nation, » comme il traversait l’Étrurie pour aller servir en qualité de questeur dans l’armée qui s’assemblait contre Numance, fut frappé de l’aspect désolé de ce pays, célèbre autrefois par sa richesse ; il s’en demanda les causes, il songea aux grands remèdes : de là plus tard ses tentatives de tribun et sa catastrophe. […] Mérimée s’étonne à la fois et de la patience prolongée de l’Italie et de l’aveuglement de Rome ; il en retrouve plusieurs causes dans l’organisation politique, bien différente des deux côtés. […] A Rome, enfin, le parti démocratique n’était pas un allié très-fidèle et très-chaud de la cause italienne, bien que des tribuns essayassent parfois de donner le change et de confondre.
On lui rend aujourd’hui plus de justice qu’il n’en rendait : il eut des talents divers dont la réunion n’est jamais commune ; jeune, il contribua pour sa bonne part aux gracieux plaisirs de son temps ; plus tard, s’armant d’une plume habile en prose, il fut utile à une cause sensée, et il reste après tout l’homme le plus distingué de son groupe littéraire et politique. […] Ainsi l’homme d’imagination plaidera sa cause sans déployer ses cahiers, et il évitera le reproche le plus sensible à tout ami de l’idéal, celui d’être taxé de rêve et de chimère. […] Elle est tout à fait hors de cause, et on n’en saurait faire qu’une question de préséance entre eux. […] Ce sentiment délicat et amer, rendu avec une subtilité vive, et multiplié dans des tableaux attachants, lui a valu des admirateurs individuels très-empressés, très-sincères, parmi cette foule de jeunes talents plus ou moins blessés dont il épousait la cause et dont il caressait la souffrance. […] Le jour où le directeur de l’Académie, homme classique lui-même, proclame une telle solution, n’en faut-il pas conclure que le procès est vidé et que la cause est entendue ?
Mais ce que j’ai fait, et ce que j’aurais fait en tout état de cause, j’ai beaucoup lu et feuilleté Beaumarchais, qui est l’homme le moins discret quand il parle de lui-même, et il me semble qu’à le bien écouter dans ses aveux et ses confidences familières, on en sait déjà presque assez. […] L’art de Beaumarchais fut de confondre insensiblement sa cause dans l’injure de tous, et de se faire, par ses plaisanteries acérées, le vengeur universel. Toutes les scènes où il met en cause Mme Goëzman, tête légère, assez jolie femme, qu’on retournait par un compliment, qu’on jetait hors d’elle par une vérité, et qui présentait dans toute sa conduite un mélange de coquinerie, d’impudence et d’innocence, sont des scènes parfaites de comédie. […] Ainsi de tous ceux qu’il met en cause et en scène : ou les connaît ; on ne les oublie plus. […] Pendant ce temps-là le Parlement Maupeou croulait ; on jouait Le Barbier de Séville à Paris ; Beaumarchais, relevé de son jugement avec pompe, saisissait tous les à-propos, toutes les occasions de faire bruit et fortune, épousait les causes à la mode, devenait l’approvisionneur et le munitionnaire général des États-Unis insurgés, et entrait, le vent en poupe et toutes voiles dehors, dans cette vogue croissante qui ne s’arrêta plus qu’après Le Mariage de Figaro.
J’ai été frappé de ce fait que, si quelque animal ou quelque plante à l’état de nature est d’une grande utilité à l’homme ou, par toute autre cause, attire son attention, il se trouve presque toujours qu’on en mentionne plusieurs variétés. […] Mais tant de causes tendent à contrebalancer ce résultat que je m’étonne de ce que mes tables montrent même une faible majorité du côté des plus grands genres. Je ne veux mentionner ici, en passant, que deux de ces causes contraires. […] Nous reviendrons sur la cause de la grande expansion des plantes d’organisation inférieure dans le chapitre où nous traiterons de la distribution géographique. […] Ces faits ont une haute signification, s’il est vrai que les espèces ne soient que des variétés permanentes et bien tranchées : car, partout où de nombreuses espèces du même genre ont été formées, c’est-à-dire partout où les causes de leur formation ont eu une grande activité, nous devons généralement nous attendre à les trouver encore en action, d’autant plus que nous avons toute raison pour croire que le procédé de formation des espèces nouvelles est extrêmement lent.
On ne disserte pas quand on cause ; on professe encore moins ; car ce serait insupportable ; et Socrate a trop de goût pour être jamais pédant. […] À ses yeux, elle remplit la condition essentielle de toute bonne définition : elle contient la cause. L’âme ainsi comprise est la cause du corps vivant ; c’est elle qui, en lui donnant la vie, le fait ce qu’il est. […] Mais c’est l’âme qui est la cause absolue de la nutrition. […] à quelle cause convient-il de les rapporter ?
Après dîner, sur ce divan, à gauche de la cheminée du cabinet de travail, qui peut être appelé le coin Zola, de Daudet, de Goncourt, on cause de l’éloquence d’hier, des discours de Poincaré, de Clemenceau. […] Il dit qu’il a été obligé de donner un coup de poing à un de ces chaleureux, qui s’était assis trop près de sa femme, pendant qu’il était entré chez un marchand de tabac, et il raconte qu’il a rencontré à Gibraltar des Anglaises qui se sont plaintes de n’avoir pu rester à Séville, à cause des attouchements cochonnes des hommes. […] Et il cause longuement de cette société, toute appuyée sur le passé, me citant, à propos du Tonkin, la demande par la France, de la cession d’un territoire, où toutes les paroles dites aux Chinois, pour prouver la convenance de cette cession, avaient été vaines, quand on rappela, que ce territoire avait été cédé autrefois par un ancien empereur. […] Lorsqu’il nous remet en voiture, un moment, arrêté à la portière, il s’ouvre sur le chagrin que lui cause la brouille avec son fils : « Quant à moi, fait-il, il ne me parle plus, ne me salue plus… Dans ma jeunesse, j’étais violent, prêt à frapper, et cependant lui — il lève le doigt en l’air, et le laisse retomber — je ne lui ai jamais même fait cela… je ne l’ai jamais puni ! […] Ce soir Gyp, qui vient de passer deux mois au lit, Gyp, à l’élégance ondulante du corps, dans un fourreau de satin blanc, cause avec moi de sa maladie, sur une note comique, disant qu’elle entendait le médecin dire, derrière un paravent, à sa garde : « Voilà une petite dame qui est en train de se laisser couler !