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162. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. — POST-SCRIPTUM. » pp. 269-272

Il nous a semblé de plus que si cette circonstance nouvelle, si précieuse à nos yeux, en venant certainement compliquer pour nous les difficultés et multiplier les convenances, devait avoir un effet rétroactif et allait jusqu’à nous obliger à rétracter, à modifier les jugements du passé, il n’y aurait ni fond ni base solide à notre travail critique : nous n’avons donc pas hésité à maintenir dans presque tous les cas ce qui est écrit. […] En commençant cette réimpression, nous pouvions craindre d’avoir trop penché pour l’enthousiasme ; en la terminant, un scrupule contraire nous vient, et nous aurions voulu, dans plus d’un cas, avoir mieux su tempérer l’éloge, de manière à ne jamais paraître le retirer et à n’avoir point à enregistrer les retours de nos jugements après les écarts.

163. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre II. Le comique de situation et le comique de mots »

Mais la vérité est que si on laisse de côté quelques cas très spéciaux sur lesquels nous reviendrons plus loin, la répétition d’un mot n’est pas risible par elle-même. […] Il y a des cas où tout l’intérêt d’une scène est dans un personnage unique qui se dédouble, son interlocuteur jouant le rôle d’un simple prisme, pour ainsi dire, au travers duquel s’effectue le dédoublement. […] Mais leur définition est loin de convenir à tous les cas ; et, là même où elle convient, elle ne définit pas le principe du comique, mais seulement une de ses conséquences plus ou moins lointaines. […] Et elle est en tout cas incorrigible, de sorte qu’il ne sert à rien d’en rire. […] Et l’effet de parodie, ainsi défini, se prolongera jusqu’à des cas où l’idée exprimée en termes familiers est de celles qui devraient, ne fût-ce que par habitude, adopter un autre ton.

164. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre deuxième. Le développement de la volonté »

Pourquoi un animal agit-il semblablement dans des cas semblables ? […] Nous, au contraire, nous agissons semblablement parce que les deux cas sont jugés semblables : ainsi, nous prenons de la quinine dans des accès de fièvre jugés similaires ; c’est donc l’idée de la similitude et non le fait même de la similitude qui provoque l’acte. […] En tout cas, la conscience qui voit l’idée de l’objet désiré amener, par la tendance qu’elle enveloppe, l’existence de l’objet même, ne se demande point si cette idée se résout ou ne se résout pas en mouvements : il y a là une question métaphysique en dehors de la psychologie, et que la conscience pratique ne se pose pas. […] Dans l’un des cas, la force qui entraîne est en grande partie étrangère au moi intelligent ; dans l’autre, elle est le moi lui-même avec sa puissance acquise sur soi. […] Il y aurait équation parfaite entre la théorie et la pratique si on calculait toutes les forces, même dans les cas où, selon MM. 

165. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre IV. Construction de la société future »

Il est triste, quand on s’endort dans une bergerie, de trouver à son réveil les moutons changés en loups ; et cependant, en cas de révolution, on peut s’y attendre. […] Contre leurs débordements et leurs dévastations, il a fallu installer une force égale à leur force, graduée selon leur degré, d’autant plus rigide qu’elles sont plus menaçantes, despotique au besoin contre leur despotisme, en tout cas contraignante et répressive, à l’origine un chef de bande, plus tard un chef d’armée, de toutes façons un gendarme élu ou héréditaire, aux yeux vigilants, aux mains rudes, qui, par des voies de fait, inspire la crainte et, par la crainte, maintienne la paix. […] Sitôt que le gouvernement sort de cette humble attitude, il usurpe, et les constitutions vont proclamer qu’en ce cas l’insurrection est non seulement le plus saint des droits, mais encore le premier des devoirs  Là-dessus la pratique accompagne la théorie, et le dogme de la souveraineté du peuple, interprété par la foule, va produire la parfaite anarchie, jusqu’au moment où, interprété par les chefs, il produira le despotisme parfait. […] C’était le cas dans l’armée permanente qu’on appelle Sparte ; là les enfants, vrais enfants de troupe, obéissaient tous également à tous les hommes faits […] Sa loi « ne prêche que servitude et dépendance… il est fait pour être esclave », et d’un esclave on ne fera jamais un citoyen. « République chrétienne, chacun de ces deux mots exclut l’autre. » Partant, si la future république me permet d’être chrétien, c’est à la condition sous-entendue que ma doctrine restera confinée dans mon esprit, sans descendre jusque dans mon cœur  Si je suis catholique, (et sur vingt-six millions de Français, vingt-cinq millions sont dans mon cas), ma condition est pire.

166. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre IV. L’espace et ses trois dimensions. »

Ces définitions posées, si le continu C peut être divisé par des coupures qui ne forment pas elles-mêmes un continu, ce continu C n’a qu’une dimension ; dans le cas contraire il en a plusieurs. […] Dans ce cas nous dirons que α et β correspondent au même déplacement et de même que α′ et β′ correspondent au même déplacement. […] Dans ce second cas, ils seront pour ainsi dire indiscernables par convention, je veux dire en convenant de faire abstraction des circonstances qui pourraient les faire distinguer. […] Les moyens dont nous disposons jusqu’ici nous permettent de reconnaître que M et M′ ne sont pas distincts dans deux cas : 1° si Σ est identique à Σ′  ; 2° si Σ′ = Σ + S + S′, S et S′ étant inverses l’une de l’autre. Si, dans tous les autres cas, nous regardions M et M′ comme distincts, l’ensemble des points aurait autant de dimensions que l’ensemble des séries Σ distinctes, c’est-à-dire beaucoup plus de 3.

167. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre V. La parole intérieure et la pensée. — Premier problème : leurs positions respectives dans la durée. »

Sans doute, la parole intérieure paraît rigoureusement contemporaine de la pensée qu’elle exprime lorsque nous inventons sans effort, soit que nous rêvions de sujets futiles sur lesquels l’invention est toujours aisée, — ce qui est le cas le plus fréquent, — soit que, nous attachant à des problèmes difficiles, nous nous trouvions en verve et heureusement inspirés. […] Dans le premier cas, l’idée succédait au signe ; dans le second, le signe succédait à l’idée. […] Si, par bonheur, les différences sont nulles, si les deux pensées coïncident exactement, l’expression provisoire est acceptée à titre définitif, la pensée nouvelle a rencontré du premier coup sa vraie formule ; c’est là le cas de l’inspiration ; mais l’inspiration, nous l’avons montré, n’est d’ordinaire que le terme d’une réflexion oubliée249. […] Ici, trois cas sont à distinguer : nous ne savons pas du tout la langue du texte que nous étudions, nous la savons mal, ou nous la savons bien. […] VI, § 8], comme il fait l’unité intellectuelle et morale d’une nation ; mais sa puissance est bonne ou mauvaise selon les cas ; elle n’est bonne que s’il est un langage bien fait252, et un langage bien fait n’est tel que par une attention constante donnée aux idées qu’il exprime.

168. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vi »

Ils avaient souhaité, prêché le désarmement simultané des nations, et maintenant le tonnerre grondait, et ils s’apercevaient que leur internationalisme n’était pas pour tous les cas une solution à l’antinomie historique qui existe entre les peuples. […] En juillet 1914, quand la question serbe s’est posée, on est parti du vote de la fédération parisienne, où l’on a voté à la quasi-unanimité la grève générale en cas de guerre, et quelques jours après, fin juillet, à Lyon, Jaurès lançait la fameuse phrase que si la guerre arrivait tout de même, la France se souviendrait non point de son alliance avec l’empire russe, mais de son contrat avec l’humanité.‌ […] Toutefois, il y avait un correctif : nous ferons ainsi, mais seulement dans le cas où les deux gouvernements russe et français ne demanderaient pas l’arbitrage. […] Souvent, depuis quatre mois m’était revenue à l’esprit la discussion qu’avait provoquée le « cas » d’Andler. […] Et surtout je sens ce qu’il y a de grandeur morale dans le cas de ces antimilitaristes et pacifistes qui adaptent leur idéal aux nécessités de l’heure présente pour lui assurer l’avenir.

169. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre III. De la nature du temps »

Cette idée, hypothétique dans tous les cas, nous paraît même prendre une rigueur et une consistance particulières dans la théorie de la Relativité, entendue comme il faut l’entendre. […] Si fort qu’on en diminue l’intensité, on risquera d’y laisser à quelque degré la variété et la richesse de la vie intérieure ; on lui conservera donc son caractère personnel, en tout cas humain. […] Mais puisque cette conception doit surgir de ce que nous n’avons aucun moyen de limiter au passé notre représentation spatiale du temps écoulé, il est possible que la conception soit erronée, et il est en tout cas certain que c’est une pure construction de l’esprit. […] Le cas est privilégié ; il est même unique. […] Or tel est le cas des temps auxquels nous aurons souvent affaire dans la théorie de la Relativité.

170. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par le chevalier d’Arneth »

Demandez à M. et à Mme de Noailles, en l’exigeant même, sur tous les cas, ce que, comme étrangère et voulant absolument plaire à la nation, vous devrez faire, et qu’ils vous disent sincèrement s’il y a quelque chose à corriger dans votre maintien, dans vos discours, ou autres points. […] Si c’était le cas de plaisanter, on dirait vraiment, à lire ces quelques extraits, que l’abbé affecte de quitter la reine par degrés, par accès et intermittence, et comme s’en va peu à peu une petite fièvre dont on ne désire pas le retour. […] M. y ait mis la condition de me mander dans certains cas, j’ai néanmoins lieu de compter que ma retraite sera entière et irrévocable. […] Elle néglige pourtant souvent les distinctions à l’égard de ceux qui sont le plus dans le cas d’en attendre, tels que les grands, les ministres, les ambassadeurs et ministres des Cours étrangères, et les étrangers particuliers, auxquels elle ne dit presque jamais rien. […] Jusqu’à présent, on n’y voit encore aucune apparence, et cela est d’autant moins probable que le jeune monarque, étant très-borné, est aussi très-méfiant et ne mettra pas facilement quelqu’un dans le cas de lui donner de pareils conseils.

171. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Ce fut le cas de Talleyrand. […] Napoléon avait été informé d’un rapprochement de Talleyrand avec Fouché pendant son absence, et il le soupçonnait de s’être également entendu avec Murat en cas d’accident et en prévision de ce qui pouvait soudainement résulter, dans cette aventure espagnole, d’une balle de guérillas ou d’un poignard de moine visant droit à sa personne. […] Si Talleyrand est pour quelque chose dans cette opinion de laisser l’impératrice à Paris, dans le cas où l’ennemi s’en approcherait, c’est trahir. […] Dans le Conseil qui fut assemblé au dernier moment, quand on apprit que les alliés marchaient sur Paris, il maintint son opinion jusqu’à ce que le roi Joseph produisît une lettre de Napoléon qui ne permettait plus d’hésiter : Marie-Louise devait, le cas échéant (et il était échu), se retirer sur la Loire. […] Il croyait ainsi se prémunir contre l’apoplexie, et les nombreux bonnets de nuit pouvaient aussi lui servir de bourrelets en cas de chute nocturne.

172. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Frédéric le Grand littérateur. » pp. 185-205

Je ne sais si Frédéric ne se fût pas dédit, au cas qu’un malin génie l’eût pris au mot et qu’il lui eût fallu opter tout de bon entre la guerre de Sept Ans et Athalie, ou plutôt je suis bien sûr que le roi, en définitive, l’eût emporté : mais le cœur du poète aurait saigné au-dedans de lui, et il nous suffit, pour le qualifier comme nous faisons, qu’il eût pu hésiter un seul instant. […] Un jour, Voltaire a le front de lui dire que lui, Frédéric, écrit mieux le français que Louis XIV, que Louis XIV ne savait pas l’orthographe, et autres misères de ce genre ; comme si Louis XIV n’avait pas été un des hommes de son royaume qui parlât le mieux, et comme si l’une des plus grandes louanges à donner à l’excellent écrivain Pellisson, ce n’était pas d’avoir été en plus d’un cas le digne secrétaire de Louis XIV. […] Parmi les modernes, il faisait surtout cas de Locke, de Bayle, de ces philosophes à hauteur d’appui, qu’il était tenté de placer un peu trop près ou même au-dessus des grands inventeurs un peu imaginatifs, comme Leibniz ou Descartes, dont les erreurs l’offusquaient. […] Dans le cas présent il se repentit vite d’avoir montré son épigramme à Thiébault, et il lui imposa la discrétion ; le bon d’Alembert n’en sut jamais rien. […] Pour moi, de quelque côté que je le prenne, et jusque dans les années où ses défauts se marquèrent le plus, je ne puis que conclure en somme à son avantage, et dire comme Bolingbroke disait de Marlborough : « C’était un si grand homme, que j’ai oublié ses vices. » Dans le cas présent, le grand homme avait, malgré tout, du bon et de l’humain, et un fonds de cœur en lui.

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