Alors vraiment arriva la fin du monde, et nul depuis ce temps, n’a osé reprendre cette facile, et dangereuse conversation du siècle révolté de Voltaire et de Diderot.
. — Voltaire.
Si l’on passe à la tragédie, nous voyons que Voltaire, dans ses préfaces et dans sa correspondance, affecte défaire fi de l’amour et de lui préférer la tendresse maternelle ou filiale, l’amitié, la haine, l’ambition politique. […] Corneille, Molière, Racine, Marivaux, Voltaire, Diderot, Beaumarchais ont eu successivement la prétention de « faire plus vrai » qu’on n’avait fait avant eux. […] Je m’arrête à la Petite Marquise par nonchalance, car, si on faisait l’effort de remonter un peu plus haut, c’est dans les romans de Voltaire, et particulièrement dans Candide, qu’on verrait les plus parfaits exemplaires de cette reproduction ironique des pires inconsciences morales. […] Il me ferait absoudre le mot de Voltaire : « C’est un sauvage ivre. » Il est vrai que les vingt autres pages sont d’un grand poète.
Redoutable Dieu, qui ne ressemble guère à la calme intelligence qui sert aux philosophes pour expliquer l’ordre des choses, ni à ce Dieu tolérant, sorte de roi constitutionnel que Voltaire atteint au bout d’un raisonnement, que Béranger chante en camarade et qu’il salue « sans lui demander rien. » C’est le juste Juge impeccable et rigide, qui exige de l’homme un compte exact de sa conduite visible et de tous ses sentiments invisibles, qui ne tolère pas un oubli, un abandon, une défaillance, devant qui tout commencement de faiblesse ou de faute est un attentat et une trahison. […] En vain nous essayons, nous autres descendants des races ariennes, de nous figurer ce Dieu dévorateur ; nous laissons toujours quelque beauté, quelque intérêt, quelque portion de vie libre à la nature ; nous n’atteignons le Créateur qu’à demi, avec peine, au bout d’un raisonnement, comme Voltaire et Kant ; nous faisons de lui plus volontiers un architecte ; nous croyons naturellement aux lois naturelles ; nous savons que l’ordre du monde est fixe ; nous n’écrasons pas les choses et leurs attaches sous le poids d’une souveraineté arbitraire ; nous ne nous figurons pas le sentiment sublime de Job qui voit le monde frissonner et s’abîmer sous l’attouchement de la main foudroyante ; nous ne nous sentons plus capables de soutenir l’émotion intense et de répéter l’accent extraordinaire des Psaumes, où, dans le silence des êtres pulvérisés, rien ne subsiste que le dialogue du cœur de l’homme et du Dominateur éternel.
Molière passe couramment pour être le direct prédécesseur de Voltaire, et, par suite, du grand mouvement d’idées dont l’explosion de 1789 marque l’aboutissement. […] Ils entendaient par-là, comme Rousseau, comme Voltaire, comme tous les encyclopédistes, un appel au sens propre, à une espèce de révélation naturelle, identique chez tous les hommes, une capacité capable de percevoir directement l’absolu. […] Voltaire disait, plaidant pour lui-même : « Oublions les rêves des grands hommes, et souvenons-nous des vérités qu’ils nous ont enseignées. » Mais comment délimiter ces vérités sans indiquer aussi le point où ces intelligences supérieures ont erré ?
Cependant Voltaire, qui n’est pas à cet égard une grande autorité, affirme que le vers hébreu est rimé. […] La même recherche pourrait s’appliquer à d’autres récits des trouvères ; mais nous ne nous perdrons pas dans cette étude généalogique de quelques vieilles plaisanteries, venues de nos vieux poëtes jusqu’à Rabelais, et de Rabelais jusqu’à Voltaire.
— Mais on y tient enfermés aussi les contes de La Fontaine, les confessions de Jean-Jacques, Rabelais, Montaigne, Voltaire ; qu’importent les tableaux si la question d’art y domine ? […] À côté de la belle pièce inspirée par la mort de Théophile Gautier, et dont nous citerons plus loin une partie, je trouve ces vers pleins de délicatesse, et qui rappellent à la fois la grâce de Voltaire et le charme d’Anacréon : Horace, et toi, vieux La Fontaine, Vous avez dit : Il est un jour Où le cœur qui palpite à peint ; Sent comme une chanson lointaine Mourir la joie et fuir l’amour.
D’Alembert, contre Voltaire, et ses procédés avec milord Maréchal, M.
Depuis Voltaire, Tartufe est impossible.
N’ayant aucune opinion bien arrêtée, seulement une modération naturelle qui répugnait à toutes les exagérations ; s’appropriant à l’instant même les idées de ceux auxquels il voulait plaire par goût ou par intérêt ; s’exprimant dans un langage unique, particulier à cette société dont Voltaire avait été l’instituteur ; plein de réparties vives, poignantes, qui le rendaient redoutable autant qu’il était attrayant ; tour à tour caressant ou dédaigneux, démonstratif ou impénétrable, nonchalant, digne, boiteux sans y perdre de sa grâce, personnage enfin des plus singuliers et tel qu’une révolution seule en peut produire, il était le plus séduisant des négociateurs, mais en même temps incapable de diriger comme chef les affaires d’un grand État ; car, pour diriger, il faut de la volonté, des vues et du travail, et il n’avait aucune de ces choses.
Sous le socle, cette inscription à demi effacée rappelle le temps auquel remonte cet ornement par l’enthousiasme dont il témoigne pour Voltaire, rentré dans Paris en 1777 : Qui que tu sois, voici ton maître, Il l’est, le fut, ou le doit être.