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566. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « III. Quelques mots sur l’explication de textes »

Par l’explication, on s’habitue à se mettre dans une certaine attitude d’esprit, dans un certain état d’activité en face des textes ; on acquiert l’art de les interroger rapidement, de les presser, d’en voir et résoudre les difficultés, d’en saisir et d’en suivre les suggestions, de leur faire rendre tout ce qu’il nous est possible de leur arracher de leur contenu. […] D’ailleurs, faut-il savoir l’espagnol pour être en état d’étudier le Cid ? ou l’italien, ou l’anglais, ou l’allemand, pour être en état d’étudier tel ou tel autre ouvrage français ?

567. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVII. Forme définitive des idées de Jésus sur le Royaume de Dieu. »

Le Fils de l’homme, assis à la droite de Dieu, présidera à cet état définitif du monde et de l’humanité 782. […] La grande largeur des conceptions évangéliques, laquelle a permis de trouver sous le même symbole des doctrines appropriées à des états intellectuels très divers. […] Il se proposa de créer un état nouveau de l’humanité, et non pas seulement de préparer la fin de celui qui existe.

568. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVI » pp. 279-297

Enfin, et c’était là le point le plus sensible, cet état de domesticité qu’elle accepterait dans la maison de madame de Montespan, la placerait au-dessous des regards du roi, de ces regards qu’elle avait trouvés si doux, et qu’elle se sentait autorisée à rappeler sur elle, par l’aveu secret de ce prince pour l’éducation de ses enfants naturels. […] Tous les biographes81 s’accordent, avec raison, à dire, d’après la correspondance de madame de Maintenon, que, « parvenue aux grandeurs, elle se trouva si importunée des respects que son nouvel état inspirait au directeur, qu’elle crut devoir donner sa confiance à un autre ». […] Madame de Maintenon, dans son 3e entretien, répondant à une amie qui la plaignait de ne pouvoir consulter personne à la cour dans les occasions délicates, répondit : « J’ai un fort honnête homme, de très bon esprit, qui me décide de gros en gros ce que je puis faire en sûreté de conscience et ce que je dois éviter pour ne point passer les bornes de mon état.

569. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Journal de la campagne de Russie en 1812, par M. de Fezensac, lieutenant général. (1849.) » pp. 260-274

Toutes les parties de l’habillement, et surtout la chaussure, étaient en mauvais état. […] Les colonels rivalisèrent de zèle pour présenter leurs régiments en bon état. […] Après le passage de la Bérézina, on ne parvient avec ces débris à réunir au plus que 100 hommes en état de combattre, et qui font escorte au maréchal.

570. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Bossuet, et Fénélon. » pp. 265-289

D’ailleurs, dans son état de grandeur & de considération, elle n’eut pas été flattée en se mettant à la tête d’une espèce de parti. […] Ils ne vouloient point admettre la réalité d’un état dans lequel on aime dieu sur la terre, absolument & sans intérêt, pour lui-même. […] Mademoiselle Desvieux lui fit le sacrifice de sa passion & de son état, pour ne pas mettre obstacle à la fortune que l’éloquence de son amant lui procureroit dans l’église.

571. (1854) Préface à Antoine Furetière, Le Roman bourgeois pp. 5-22

On y voit Furetière accusé d’avoir prostitué sa sœur pour se mettre en état d’acheter la charge de procureur fiscal de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés ; il y est dit qu’il se déshonora dans ce poste par des prévarications et qu’il s’y fit le protecteur déclaré des filous et des filles publiques ; on y raconte comment il abusa de sa charge pour escroquer, par une manœuvre qui, selon le vocabulaire moderne, serait qualifiée de chantage, le bénéfice d’un jeune abbé ; enfin, retournant une plaisanterie de Furetière contre lui-même, l’auteur prétend que le Roman Bourgeois, — ce détestable ouvrage — a été dédié par lui au bourreau, comme au seul patron digne d’une telle œuvre. […] On sait quelle indignation éprouvant Saint-Simon à voir tomber aux mains des Pontchartrain, des Le Tellier, des La Vrillière, les ministères et les charges d’état, jusque là dévolus aux ducs. Dans ce conflit de deux classes, l’une envahissante, l’autre mise en état de défense par la menace d’une décadence prochaine ; de la bourgeoisie, ou, si l’on veut, de la ville et de la cour, les préférences des gens de lettres étaient pour la noblesse, à laquelle les rattachaient d’abord leur intérêt, leurs pensions, les fonctions de secrétaires, de précepteurs et de bibliothécaires, enfin l’attrait, si puissant pour des esprits délicats, de la bonne compagnie, seule capable de les comprendre et de flatter leur vanité.

572. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Eugène Fromentin ; Maxime du Camp »

Sa visée et ses procédés doivent donc avoir toute l’insolente simplicité de son état. […] Mais ce que nous ne pouvons admettre au même titre, c’est le voyage servi à l’état de livre facile dans sa négligence déshabillée ou prétentieuse, ses indiscrétions d’album ou son intimité de correspondance. […] La description, déjà abusive chez Fromentin, qui est un peintre, est chez du Camp, qui se croit un poète, à l’état violent, furieux, insupportable : c’est un casse-tête de descriptions.

573. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — Se connaître »

Une aussi énergique assurance ne peut provenir que de deux causes ; soit de la connaissance approfondie de sa valeur et de sa force, soit de l’ignorance complète de son état réel. […] Quand nous saurons exactement ce que nous sommes, quel est notre état positif, ce que nous possédons et ce qui nous manque, il est impossible que nous ne consacrions pas toutes nos forces à nous guérir et à reconquérir le terrain perdu. […] Le tressaut d’énergie nécessaire pour déterminer une nouvelle orientation ne surgira, en tous cas, que de la reconnaissance brutale de son état, comparé à celui des autres puissances.

574. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVII. Des éloges en Italie, en Espagne, en Angleterre, en Allemagne, en Russie. »

Parcourez tous les états d’Italie ; est-ce à Venise, dont l’aristocratie sévère est fondée sur la crainte ; où la politique inquiète et soupçonneuse marche quelquefois dans la nuit entre des inquisiteurs d’état et des bourreaux ; où tout est couvert d’un voile ; où le gouvernement est muet comme l’obéissance ; où la barrière qui sépare la noblesse et le peuple défend aux talents de s’élever ; où le plaisir même est un instrument de politique ; où, par système, on a substitué à la liberté qui élève les âmes, la licence qui les amollit ; Venise, où tout ce qui serait grand serait suspect ; où enfin le caractère de tous les principes de gouvernement est d’être immobile et calme, et où, depuis des siècles, tout tend à la conservation et à la paix, rien à l’agrandissement et à la gloire ? […] Chez un peuple qui n’est pas libre, ou ne l’est qu’à moitié, jamais le génie de l’éloquence n’a paru qu’avec l’éclat du gouvernement ; et les grands orateurs y marchent à la suite des généraux, des ministres et des grands hommes d’état.

575. (1927) Quelques progrès dans l’étude du cœur humain (Freud et Proust)

C’est lui qui nous maintient avec nous-mêmes dans cet état d’amitié et d’alliance sans lequel nous ne pouvons pas vivre et qui est pourtant si complètement dépourvu de justification qu’on ne comprend pas comment il peut naître. […] Plusieurs de ces procédés sont utilisés certainement par nous à l’état de veille, pour nous aider à nous représenter nos sentiments sous une forme acceptable. […] Je retrouve le même état, sans une clarté nouvelle. […] Autrement dit, je ne sais si vous avez en mémoire en ce moment la théorie d’Auguste Comte sur les trois états successifs de l’esprit humain, — autrement dit l’homme sincère est animé, dans l’étude de lui-même, par l’esprit métaphysique. […] Les alternatives de souvenir et de conscience actuelle, les comparaisons détaillées que fait l’esprit de Swann entre le passé et le présent, la rencontre et l’enchevêtrement de ses états d’âme nous sont montrés avec une distinction extraordinaire, sont cristallisés pour nous sur la page.

576. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIe entretien. Balzac et ses œuvres (1re partie) » pp. 273-352

Cet espoir passa tellement chez lui à l’état de conviction, qu’il recommandait sans cesse aux siens de conserver leur santé pour jouir des millions qu’il leur laisserait. […] Mon frère n’avait encore donné aucune preuve de talent littéraire, et il avait sa fortune à faire ; il était donc rationnel de désirer pour lui un état moins problématique que celui de littérateur ! […] « On allait faire perdre à mon frère un temps précieux ; l’état de littérateur pouvait-il, en aucun cas, mener à la fortune ? […] on tient à ses dents, et il faut mordre, d’ailleurs, quelquefois dans mon état, quand ce ne serait qu’au travail ! […] un tel état serait le dernier mot de la sagesse humaine ?

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